Interview Non-Dualité : Renate McNay & Katie Davis

Telechargé par pierrealberthayen
ENTRETIEN SUR LA NON-DUALITÉ RENATE MCNAY &
KATIE DAVIS
Interview extraite de ‘’Conversations on non-duality Twenty-six
awakenings’’ – Eleonora Gilbert (ed.)
Cette interview fait partie d’une série d’interviews qui ont été réalisées par
Iain et Renate McNay pour Conscious TV entre 2007 et 2009.
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En 1986, Katie Davis, qui était alors professeur
d’aérobic, a connu un Eveil spontané qui a
radicalement transformé sa vie. À l'époque,
elle n'avait jamais médité, ni entendu parler
d'Eveil ou d'Illumination. Elle n’avait aucune
référence intellectuelle, ni aucun cadre pour
ce qui s’est passé. L'intégration a duré douze
ans. En 1998, elle et son mari, Sundance
Burke, qui avait lui aussi connu l’Eveil en 1982,
se lient d'amitié avec Eckhart Tolle, qui les
pousse à partager leurs enseignements et à
écrire leurs livres, et depuis lors, ils voyagent
dans le monde entier pour diffuser ce message
de la Liberté consciente et de la Joie acausale,
via des satsangs, des cours intensifs, des
retraites silencieuses ou des rendez-vous
privés. Katie partage également son message
dans les entreprises, les hôpitaux, les écoles, les églises, auprès de diverses
associations, à la télévision et à la radio, un peu partout dans le monde. Elle
est aussi mère de deux enfants.
Renate (R) : Katie a écrit un livre,
Awake Joy
, et nous allons parler avec elle
de sa vie, de son parcours et de son travail. Alors, Katie, la première question
concerne le sous-titre du livre. Quelle est l’essence de l’Illumination ?
Katie (K) : L'Essence est toujours et pour toujours ici. Elle est qui vous êtes.
En fait, c'est la seule question essentielle, "Qui êtes-vous vraiment, en cet
instant ?" Alors que nous sommes assises ici, en train de nous réjouir, qu'est-
ce qui est plus profond ici ? L'Essence, plutôt que la forme identitaire.
R : C'est juste. En lisant votre livre, ces derniers jours, j'ai lu votre histoire et
avant votre Eveil, vous ne vous êtes jamais posé la question "qui suis-je ?’’
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Votre Eveil s'est juste produit spontanément ?
K : Oui, je n’avais jamais entendu parler d’Eveil ou d’Illumination, et je n’avais
jamais médité. Toutefois, rétrospectivement, je puis voir que par rapport aux
circonstances de ma vie, il y avait une ouverture naturelle depuis le plus jeune
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https://www.youtube.com/watch?v=AR9TlRJ0_yE et suivantes.
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La question ‘’Qui suis-je’’ fait notamment référence à la méthode d’auto-investigation et d’Eveil directe du
sage indien, Ramana Maharshi, NDT.
âge, par une présence dans le corps via des expériences vitales et le type
d'activités dans lesquelles j'étais engagée.
R : Et de quelles activités s’agissait-il ?
K : J'ai été gymnaste et j'ai fait de la danse pendant quatorze ans. En habitant
consciemment le corps, ces deux activités exigeaient un haut degré de
concentration et de conscience du moment présent. Surtout en gymnastique,
il n'y a pas beaucoup de temps pour penser !
Après l'université, j'ai été professeur de français et entraîneur de
gymnastique. Ensuite, j'ai quitté l'enseignement pour ouvrir un studio
d'aérobic. Durant les cours, je me concentrais non seulement extérieurement
sur la manière dont les élèves se sentaient physiquement et
émotionnellement, mais aussi intérieurement et plus particulièrement sur la
respiration. Être consciente de la façon dont mon corps se sentait me
semblait important, afin que l'exercice ne soit pas trop intense pour tout le
monde. Bien que ce fût rare, pendant une apothéose athlétique,
l'environnement devenait totalement silencieux et l'expérience vitale se
déroulait au ralenti.
En 1986, durant l’un de ces états seconds, un formidable sentiment de
sacralité a soudainement émergé. Inconcevable pour le mental, c'était
comme si je percevais une nouvelle dimension. Comme vous pouvez
l'imaginer, je suis devenue intensément consciente. Spontanément et
radicalement, j’ai disparu profondément dans le corps pour tomber dans un
espace numineux et vaste. Puis, toute expérience a disparu. Quand la
conscience est réapparue, je n'étais plus ancrée dans le corps. En fait, le
corps était loin, en quelque sorte, apparemment non affecté, et il continuait
d’enseigner l'aérobic. Il est devenu étrangement clair que je suis infiniment
plus que le corps et que le sentiment du moi avait disparu. L'intégration et la
compréhension intellectuelle ont pris douze ans.
En 1998, j'ai commencé à partager, lorsque quelqu'un m’a demandé de l'aide
par rapport à sa souffrance. Il ne faut pas se leurrer : la réalisation de soi (la
réalisation du Soi) est la fin de toute séparation et par conséquent la fin de la
souffrance psychologique. Je transmets aujourd’hui aux gens que,
pratiquement à chaque instant, la vie ordinaire nous indique le chemin du
Cœur que nous sommes réellement en ce moment. Le maître est à l'intérieur,
bien sûr, mais également partout, comme la vie elle-même. Il suffit d’être
attentif à ce qui est et d’être présent au sens organique de l'être, d’être
curieux par rapport à ce qui est en soi et de s’ouvrir de s’ouvrir réellement à
l'inconnu.
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R : Il est simplement si facile d’oublier d’être présent.
K : Oui, c’est ce que veut l’ego.
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C’est un enseignement qu’on peut aussi retrouver dans ‘’Mettre en pratique le pouvoir du moment présent’’
d’Eckhart Tolle, NDT.
R : Le mental s’interpose et nous emporte.
K : Oui, c'est une habitude tellement ancrée et nous avons vécu ainsi pendant
toute notre vie. Nous avons aussi vécu avec cette hypothèse primaire, suivant
laquelle nous sommes ce sentiment du moi distinctif, depuis que nos parents
nous ont appris à indiquer notre corps et à dire "je".
R : Nous avons été programmés.
K : Nous n’avons jamais cherché la vérité. Nous sommes bien plus qu'une
image mentale qui apparaît dans le temps sous la forme d'un corps. Lorsque
nous nous identifions à ce concept du "moi", il est impossible d'être présent
dans le temps. L'ego n'est pratiquement jamais présent, sauf en cas de
circonstances magnifiques, comme l'émerveillement que nous pouvons
ressentir en regardant un coucher de soleil.
R : Oui.
K : En cet instant d'émerveillement, le voile tombe, même brièvement, et nous
glissons en dehors du temps dans la présence. L'attachement au moi, à l’ego
n'est qu'une habitude inconsciente.
R : Oui, une longue habitude ! Ainsi, tout a commencé pendant un cours
d’aérobic que vous donniez ? Vous avez eu une expérience paroxystique.
Peut-on expliquer ce qui s’est passé ?
K : Ce n'était pas en fait une expérience inhabituelle, et je suis sûre que
beaucoup de nos auditeurs ont vécu la même chose. Je dois cependant
souligner qu’il n’y a rien de causal dans ce que je dis. L'expérience
paroxystique n'est pas la cause de ceci ou cela. Cependant, chaque fois que
nous sommes présents de cette manière et que le mental s'efface, nous avons
l'occasion de réaliser ce qui est plus profond que cette réalité extérieure
superficielle. Ce qui est rare, c'est quand l'expérience se déroule au ralenti.
On devient intensément conscient. Vous avez peut-être déjà ressenti cet
effet, quand le temps se déforme, juste avant un grave accident de voiture, ou
peut-être même en dansant en état de transe. Tout ce que je peux dire, c'est
que juste derrière ce voile fin et intemporel qui ressemble à une transe, le Soi
pur du divin vous fait la cour, et si vous êtes prise, c'est un miracle !
Cette divinité n’est pas quelque chose que l’ego acquiert, devient ou qu’il
atteint. Elle est essentiellement ce que vous êtes. Elle est en vous maintenant,
et elle est aisément accessible pour chaque être humain. La réalisation de soi
/ du Soi n'est qu'un changement radical d'identité, et il peut être utile de
bondir en dehors du temps, ou plutôt de réaliser ce qui est intemporel.
R : Oui, mais vous avez également mentionné dans le livre que vous avez
travaillé de très nombreuses années avec votre corps, et que c’était
important par rapport à votre ouvertureou vous aviez senti alors que c’était
important.
K : Effectivement, rétrospectivement, je pense que le corps était d'une
importance capitale. Le corps est un outil merveilleux pour quitter le temps,
puisqu'il apparaît toujours ici et maintenant, jamais dans le passé ni le futur.
Lorsque nous ressentons consciemment le corps, ses sensations ou sa
respiration, cela détourne notre attention des pensées compulsives.
L'attention se déplace sans effort de la tête dans le corps et la présence
intemporelle.
R : En d'autres termes, vous habitez pleinement votre corps - ce que
beaucoup d'entre nous ne font pas, puisque nous sommes en quelque sorte
pris dans le mental. Pendant la séance d’aérobic, vous avez donc été
réabsorbée par l'absolu, je crois ? Et votre corps, vous avez dit... ?
K : Oui, toute expérience consciente a disparu. J'ai réalisé qui je suis au-delà
de la conscience. Et quand la conscience est réapparue, je n'étais plus vissée
dans le corps, et le concept de ‘’Katie’’ était démoli. Imaginez ! Je me trouvais
là avec une entreprise d'aérobic qui s’appelait "Body by Katie", et en un
instant, je n'avais plus ni corps, ni Katie ! C'était plutôt déroutant. Je n'avais
aucune idée de ce qui s'était passé.
R : Et il n’y avait plus de références. Tout à coup, vous n’aviez plus de points
de référence ?
K : C’est cela.
R : Alors, comment était-ce ?
K : Eh bien, il y avait cette sacralité indescriptible et profonde que je suis. Je
suis cet Être radieux, qui est un Silence profond et une Félicité extatique.
L'intensité a fini par diminuer et on pourrait dire que je suis cette joie calme
qui est toujours présente, une joie éveillée. C'est ce que je suis et c’est ce que
vous êtes. C'est l'essence de qui nous sommes, indépendamment de ce qui se
passe dans les circonstances de la vie. La joie consciente est présente, en
dépit de ce qui arrive au corps nommé Katie et dans les circonstances de la
vie. Elle est toujours ici, on ne doit donc pas l’acquérir. Elle est présente
maintenant et elle n'est causée par rien. Comment cela se pourrait-il ? Elle est
déjà là. Si la joie éternelle existe vraiment, elle doit certainement être
maintenant.
R : Mais nous croyons que nous ne pouvons réaliser cela que par la Grâce.
K : C'est une question intéressante que vous soulevez là. Dès qu'il y a un
pratiquant qui essaie de devenir quelque chose de plus dans le futur, nous
avons affaire au temps et à l'expérience de l'ego. Il ne peut pas falloir plus de
temps pour se libérer du temps. Il ne faut pas plus d'expérience pour réaliser
ce qui est indépendant de toute expérience. Vous ne pouvez pas devenir ce
que vous êtes déjà.
On n’aborde pas la réalisation du Soi de la même manière que l’on apprend de
nouvelles compétences de vie. Par exemple, si nous voulons apprendre
l'allemand, nous pouvons assister à des cours pour apprendre à conjuguer
les verbes et acquérir un nouveau vocabulaire, afin de pouvoir parler la
langue ultérieurement. Pour la réalisation du Soi, nous portons notre attention
sur ce qui est déjà vraiment en nous. Des pratiques peuvent être utiles pour la
concentration de l'esprit, et c’est important - mais un esprit concentré reste
un esprit. À un moment donné, l'attention se porte naturellement sur ce point
de référence personnel qui est le "je". Mais qui est-ce ? Qui est ce "je" ? Est-il
vrai que la pensée "je" ne désigne que le corps ? Qui êtes-vous vraiment au
cœur de votre être ?
R : Alors, la question est ‘’qui suis-je’’ ?’’, comme disait Ramana Maharshi.
K : Oui. L’investigation du Soi est fréquemment utilisée dans ces
enseignements, comme elle fonctionne si bien. Il ne s'agit pas d'une méthode,
ni d’une question que l'on se pose intellectuellement ou philosophiquement -
"Qui suis-je ?", puis on y réfléchit. L’investigation du Soi n'est pas une
pratique. Cette seule question supprime le point de référence du pratiquant
qu'est le corps, et soulève spontanément le voile illusoire de l'ego-je. La
question brise l'attachement et elle tourne l'attention vers l’intérieur.
L'identification à cette pensée crée un nœud entre la conscience du corps et
la pure Conscience. Le secret, c’est que, même si ce n'est qu'un mot comme
un autre, cet ego-je est un état altéré de conscience, et il recèle donc en lui la
pure Conscience. Le "je" est à la fois le nœud et la clé. Bien sûr,
l'identification à cette pensée nécessite du temps. Pas de temps, pas d'ego.
R : Oui.
K : Et donc, pour la réalisation du Soi, on laisse tranquille le moi et son
histoire. Dans le passé, nous essayions d'améliorer un faux moi, de rendre un
"moi" fictif plus heureux. A présent, nous réalisons ce qui précède le moi et
son histoire. Qui êtes-vous avant l'idée d’être le corps ? A qui apparaît cette
pensée, "je" ? D'où émane-t-elle ? Initialement, avec l’investigation du Soi, il
peut n’y avoir qu’un simple aperçu - et c'est en fait tout à fait normal. Certains
en ont un aperçu ou ils ont peut-être un
satori
. Mais s'ils continuent de se
poser cette simple question, que tout le monde peut se poser, cet état de
conscience altéré se dissout. Seul demeure le pur "Je" ; cependant, la
réalisation du Soi, c’est réaliser qui vous êtes en tant que totalité. Il n'y a pas
une seule chose que la réalité ultime n'est pas.
Demeurer en tant qu'Être conscient est tout à fait suffisant. Mais si vous êtes
tourmenté par l'attachement à la pensée conditionnée et à sa temporalité,
l'investigation du Soi est un bon outil pour réaliser que vous êtes toujours
chez vous dans le Cœur
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. L'ancienne vie ne s'intéressait qu'à la nature et à
tout ce qui peut être contacté par les sens physiques. Même si le corps est
beau et essentiel à l'éveil initial, ce que vous êtes vraiment est antérieur à
l'expérience corporelle. Agrippez-vous à la pensée "je" et, au lieu de
rechercher l'Illumination, réalisez qui le "Je" est vraiment.
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Chez Ramana Maharshi, le Soi et le Cœur sont synonymes, NDT.
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