
pas qu’un seul facteur mais plusieurs qui coexistent et aggra-
vent simultanément les troubles du sommeil.
Malgré les plaintes de sommeil fréquentes chez le SA,
les troubles du sommeil sont souvent sous-diagnostiqués
[42] et pourtant leurs conséquences sont nombreuses et
particulièrement néfastes. À partir des données de la litté-
rature, nous abordons dans cet article les troubles du som-
meil chez les SA en discutant les particularités propres à
cette population.
Le syndrome d’apnée du sommeil (SAS)
Il est caractérisé par des épisodes répétés d’obstruction des
voies aériennes supérieures entraînant des apnées (pauses res-
piratoires complètes pendant plus de 10 secondes) et/ou
hypopnées (diminution de la respiration d’au moins 50 %
pendant plus de 10 secondes, associée à une désaturation en
oxygène et/ou à des réactions d’éveil). Ces événements
respiratoires au cours du sommeil entraînent une hypoxie
intermittente, une fragmentation du sommeil et une somno-
lence diurne. On parle de SAS minime lorsque le nombre de
ces événements par heure de sommeil (ou l’index par heure)
est compris entre 5 et 15. Un index ≥30/heure signifie un
SAS sévère. La prévalence de SAS dans la population adulte
de 30 à 60 ans est de 2 % à 4 % [63]. Elle augmente avec l’âge
[14]. Chez les SA ≥65 ans, 24 % ont un index d’apnées
(IA) ≥5/heure et 62 % ont un index d’apnées et d’hypo-
pnées (IAH) ≥10/heure [5]. La prévalence de SAS est
dramatique en institution, touchant jusqu’à70%desSA
[2]. Les patients schizophrènes âgés ont plus de SAS
sévère que ceux non schizophrènes (31 % IAH> 20 contre
19 %) [6]. La perturbation de l’architecture du sommeil
chez le SA > 65 ans atteint de SAS est plus importante
que celle des sujets < 65 ans ainsi que la désaturation en
oxygène [33].
Le tableau clinique de SAS peut être difficile à recon-
naître chez le SA. La somnolence diurne est rarement res-
sentie : seulement 25 % des hommes ≥60 ans ayant un
SAS sévère ont un score d’Epworth (évaluation subjec-
tive de la somnolence diurne) pathologique. En revanche,
l’altération de la vigilance est souvent bien objectivée
chez ces patients ; elle peut l’être aussi dans la population
générale des SA mais de façon moins fréquente : 64 %
des hommes avec SAS sévère versus 33 % sans SAS
(Deblois P, et al., Communication personnelle). L’éva-
luation objective de la somnolence semble être donc
plus fiable que celle subjective chez le SA. Kezirian
et al. (2009) ont démontré que chez les hommes âgés
présentant un SAS, l’IAH est très modérément corrélé
au score d’Epworth ; sa sévérité n’est pas corrélée aux
scores de qualité du sommeil [32].
Les deux autres symptômes cardinaux de SAS qui sont
les ronflements et les arrêts respiratoires au cours du
sommeil, sont souvent rapportés par le conjoint du malade.
Malheureusement, beaucoup de personnes âgées vivent
seules à domicile et n’ont pas de témoin de ces symptômes.
Si l’obésité est fréquemment associée au SAS chez les
sujets jeunes, cette association est moins importante
chez les SA [64, 65]. La nycturie est beaucoup plus fré-
quente chez les hommes âgés avec SAS par rapport à
ceux avec insomnie sans SAS (31/60 patients contre
1/28) [29]. Cependant comme les autres symptômes de
SAS –la fatigue, les maux de tête, l’impuissance, etc. –,
ils ont peu de spécificité chez le SA et peuvent être
rencontrés dans de nombreuses autres pathologies. La com-
orbidité peut aussi masquer les symptômes liés au SAS.
Enfin le SAS peut également s’exprimer sous forme
atypique comme des troubles cognitifs, une dépression,
une perte d’autonomie, des chutes, etc. Bailes et al. (2005)
ont montré chez les femmes âgées une absence de
différenciation possible entre le SAS et l’insomnie. Il existe
un chevauchement symptomatique entre les deux entités :
les insomniaques rapportent des ronflements, des problè-
mes respiratoires pendant le sommeil et une somnolence
diurne alors que les patients avec SAS se plaignent surtout
d’insomnie et de fatigue [10]. De plus les SAS légers
peu symptomatiques sont extrêmement fréquents chez
les SA et sont difficiles à dépister par la clinique seule [5].
Chez le SA, le SAS est associé à une mauvaise qualité
de vie, aux troubles neurocognitifs, à la nycturie, aux mala-
dies cardiovasculaires, à la dépression, au risque
d’insulino-résistance [15], à un taux de cholestérol HDL
diminué [53] et à une exacerbation des crises épileptiques
chez les patients épileptiques [19].
Les résultats concernant la mortalité liée au SAS chez le
SA sont discordants selon les études : l’association entre la
mortalité et un IAH > 20 a été significative seulement chez
les hommes < 50 ans [30]. Au contraire, dans une autre
étude l’association entre la mortalité et un IAH> 30 est
trouvée chez les hommes dans la tranche d’âge 40-70 ans
[50]. Dans une population mixte de SA vivant en institu-
tion, il existe une forte relation entre la mortalité et le SAS
chez les femmes surtout avec IAH > 50. La mortalité pré-
coce est plus élevée chez les hommes mais ne semble pas
être liée au SAS [3].
Au total, le SAS est très fréquent chez le SA mais
avec des symptômes souvent trompeurs. Attendre un
tableau clinique typique peut retarder le diagnostic de
SAS. L’exploration du sommeil doit être proposée dès la
suspicion de SAS que le tableau clinique soit typique ou
non [41]. L’âge ne doit pas être un motif de renoncement
au bilan de SAS et au traitement par pression positive
continue (PPC). Celui-ci s’avère bénéfique et bien toléré
même chez les patients atteints de démence légère ou
modérée [61]. La figure 1 montre un enregistrement poly-
somnographique (PSG) sans et avec PPC dans une même
nuit chez un patient âgé de 75 ans présentant un SAS
sévère.
Le sommeil et ses troubles chez le sujet âgé
L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 86, N° 1 - JANVIER 2010 59