LE GENRE ARGUMENTATIF (Littérature d’idées)
Tout texte littéraire peut permettre à un auteur d'exposer ses opinions et de les défendre. Ainsi tous les genres littéraires sont susceptibles de contenir une part
argumentative. Par exemple, le roman L'étranger de Camus (XXe) critique le système judiciaire et dénonce la peine de mort ; la pièce de théâtre L'île des esclaves de Marivaux
(XVIIIe) interroge les inégalités sociales de son époque et le poème Liberté de Paul Eluard (XXe) est un poème engagé qui invite à la résistance pendant l'occupation allemande
de la seconde guerre mondiale. Pour autant, le roman, le théâtre et la poésie ne sont pas considérées comme de purs « genres argumentatifs » car l'argumentation n'est
pas leur objectif principal ; celle-ci passe en second plan derrière la narration, l'aspect comique, l'aspect esthétique, etc. En revanche, il existe des genres littéraires
dont la qualité première est l’argumentation. Ces genres sont appelés « genres argumentatifs ». Ils correspondent à des textes destinés à véhiculer des idées.
Vous devrez garder cela à l’esprit lors du baccalauréat, afin de ne pas passer à côté de la dimension argumentative d’un poème, d’un récit, ou d’une pièce de théâtre,
ce que l’expression « littérature », au sens large vous invite à vous rappeler, cf le parcours « Imagination et pensée ».
Comment reconnaître un texte de genre argumentatif ?
o Les genres argumentatifs peuvent prendre des formes variées: article philosophique, fable, discours, conte, essai, portrait satirique, maxime, oraison funèbre...
o Toute argumentation développe une thèse, qui s’appuie sur des arguments eux-mêmes étayés d’exemples.
o Tout auteur argumentatif développe une stratégie argumentative
o Une argumentation peut-être délibérative.
o Un texte argumentatif relève alors de l'argumentation directe (essais, discours -l’art de la rhétorique, héritée de l’Antiquité) repose sur l’ «inventio», la «dispositio»
(exorde, narration, confirmation, péroraison), l’ «elocutio», l’«actio», et la «memoria»), ou de l'argumentation indirecte (apologue -identifiable aux procédés
comiques, au registre satirique: ironie, hyperboles & tous les procédés narratifs pour dynamiser le propos, créer un effet de surprise et de chute, etc.-).
o Les auteurs de textes argumentatifs cherchent à convaincre et/ou persuader leur destinataire.
o Les auteurs utilisent une palette de tonalités : la tonalité pathétique pour émouvoir et attendrir l'interlocuteur, la visée moralisante et éducative appelée visée
didactique, l'éloge et le blâme ou registre épidictique, le registre polémique qui cherche à interpeller violemment l'auditoire, etc.
LES FORMES (sous-genres) ARGUMENTATIVES
L’ARGUMENTATION DIRECTE
L’ESSAI
Le mot vient du latin « exagium » qui signifie pesée. L'essai est une œuvre en prose qui restitue la pensée en mouvement d'un individu. Elle présente donc des
hésitations, des anecdotes et donne souvent l'apparence d'une certaine spontanéité. C'est un ouvrage de réflexion qui ne prétend pas à l'exhaustivité et qui semble se
contenter d'un destinataire unique.
L'essai est la forme littéraire choisie par Montaigne pour laisser vagabonder son esprit et réfléchir à des thèmes très divers. C'est une forme libre, difficilement
définissable. Ex : Essais de Montaigne (XVIe)
Le traité est un essai dont le champ de réflexion se concentre sur un sujet précis. Ex : Traité sur la tolérance de Voltaire (XVIIIe)
Le pamphlet est une œuvre courte qui traite d'un sujet d'actualité, généralement politique, et l'aborde de façon extrême, avec haine et violence, pour faire
scandale et libérer la pensée révoltée de l'auteur. Ex : Napoléon le Petit de Victor Hugo (XIXe)
L'article philosophique est un essai court qui vise à définir une notion mais la présente de manière très subjective, dans une démarche argumentative. Ex :
article « Paix » de Damilaville dans L'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert et article « Torture » dans le Dictionnaire philosophique de Voltaire (XVIIIe)
La maxime et la sentence sont des textes très courts qui visent à saisir de façon condensée une pensée. Par leur brièveté, ils ne peuvent être exhaustifs ni
construire un développement rhétorique. Ex : Maximes de La Rochefoucauld (XVIIe)
LE DISCOURS
Le discours est un texte écrit, destiné à être lu à voix haute ou publié et qui s'adresse à un large public afin d'emporter son adhésion. Le discours ne semble donc pas
vouloir se contenter d'un destinataire unique mais au contraire cherche à convaincre et persuader le plus grand nombre. Contrairement à l'essai, il utilise forcément les
techniques de la rhétorique, c'est-à-dire de l'art oratoire, en déroulant avec rigueur une pensée très structurée.
Le discours est un texte rédigé avec soin et destiné à être lu devant une assemblée ou un large public. Ex : « Discours de réception du prix Nobel » de Camus
(XXe) ; « Appel de l'abbé Pierre » en hiver 1954 (XXe) ; « Adresse aux français du 16 mars 2020 » de Macron
Le sermon est un discours religieux qui sert de discours de pdication, pour répandre la parole divine. Ex : « Oraison funèbre d'Henriette d'Angleterre de
Bossuet (XVIIe) est un éloge + un sermon.
Le dialogue philosophique est un discours à deux voix permettant au lecteur d'assister à la confrontation de deux points de vue différents afin de se forger sa
propre opinion. Ex : Gorgias de Platon (Antiquité : IVe siècle avant JC)
La lettre ouverte est une lettre destinée à une personne précise mais rendue volontairement publique par son auteur pour toucher le plus grand nombre. Ex :
Lettre ouverte « J'accuse » d'Emile Zola à l'occasion de l'affaire Dreyfus en 1898 : cette lettre est destinée à Monsieur Félix Faure, président de la République,
mais publiée volontairement dans le journal L'Aurore.
Le manifeste est une œuvre théorique qui cherche à servir de référence à un groupe pour définir une nouvelle pensée. Ex : Manifeste du surréalisme d'André
Breton (XXe) ;
L’ARGUMENTATION INDIRECTE
L'APOLOGUE
L’apologue est un court cit fictif, plaisant et porteur d'une valeur morale. Le mot vient du grec et désigne un récit court et allégorique, c'est-à-dire qui a un sens
caché. Dans les apologues, les personnages sont stéréotypés, le cadre spatio-temporel est approximatif : l'histoire et donc la morale sont ainsi plus facilement
réinvesties par le lecteur et peuvent traverser les siècles. Souvent les apologues présentent un aspect comique, notamment à l'exagération des caractères des
personnages ou des situations.
La fable est un apologue en vers. Elle existe dès l'antiquité et est très appréciée au XVIIe siècle. Ex : Fables d'Esope (Antiquité) ; Fables de La Fontaine
(XVIIe) ; Fables de Jean Anouilh (XXe).
Le conte de fées est un apologue qui relève du merveilleux. Sérieux et éducatif, il est très en vogue au XVIIe siècle. Ex : « Le petit chaperon rouge » dans Les
Contes de ma mère l'Oye de Charles Perrault (XVIIe).
Le conte philosophique est un apologue qui invite à la réflexion philosophique tout en présentant souvent un caractère comique, notamment à travers l'ironie.
Ce genre est très prisé au XVIIIe siècle. Ex : Candide de Voltaire (XVIIIe) ; Micromégas de Voltaire (XVIIIe).
La parabole est un apologue porteur d'une morale religieuse. C'est un récit allégorique et imagé. Ex : « Parabole de la brebis égarée » (Bible) ; « Parabole de
l'enfant prodigue » (Bible).
Le portrait satirique se rapproche de l'apologue en ce qu'il brosse un portrait universel de caractère, destiné à être réinvesti par le lecteur. Ex : Les Caractères
de Théophraste (Antiquité) ; Les Caractères de La Bruyère (XVIIe).
LE ROMAN À THÈSE
Le roman fable est un conte philosophique assez long et appelé « roman » par son auteur. Il présente des personnages caricaturés, souvent des animaux, insistant
ainsi sur le côté plaisant et léger de son propos. Ex : La ferme des animaux de G. Orwell (XXe) ; Lorsque j'étais un œuvre d'art de Schmitt (XXe)
Le roman philosophique est proche du roman fable mais se donne davantage des apparences de réel et de sérieux. La réflexion y est souvent également plus
approfondie. Ex : Lettres persanes de Montesquieu (XVIIIe)
L'utopie est un apologue présentant une société fictive idéale. Ex d'utopies : L'Utopie de Thomas More (XVIe) ; l'Eldorado dans Candide de Voltaire (XVIIIe) ;
l'abbaye de Thélème dans Gargantua de Rabelais (XVIe)
La dystopie ou contre-utopie est le contraire d'une utopie. C'est un apologue présentant une société fictive cauchemar, celle que redoute l'auteur dans un futur
plus ou moins proche. Ex : 1984 de George Orwell (XXe) ; Le meilleur des mondes d'Huxley (XXe)
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