réfère à « notre tragédie » sachant qu’une tragédie finit forcément mal (par la
mort des acteurs). Ainsi, l’emploi répété de « tragédie » renseigne la perception
de l’auteur par rapport au capital humain perdu au cours des combats. L’utilisation
du pronom « notre » dans « notre tragédie » indique que pour Aragon, la tragédie
en question est commune à tous les français. En outre, le terme « acteurs (ver 25)»
du champ lexical du théâtre est employé ici par le poète en référence aux résistants
français lors de la seconde guerre mondiale. De même, le « miroir » décrit par le
poète tout le long de son texte peut être assimilé à une ouverture scénique avec
Aragon et Elsa comme spectateurs de la représentation.
2. La guerre, cause de souffrance
Si la guerre est un thème implicite dans le poème, la souffrance et l’indignation
qu’elle cause y sont clairement perceptibles. La structure et le rythme employé
par le poète sont indicatifs de son ressenti et de sa souffrance face aux événements
de la seconde guerre mondiale. En effet, le poème est composé de deux parts
séparés par une volta au 4ème quintile. Le premier part composé de 4 quintiles est
très musical avec des strophes longues et berceuses, parcourues par des répétitions
systématiques de vers (1, 2 et 3) et de rimes, traduisant la vision du poète d’un
monde dans lequel la guerre, la déshumanisation, et l’inhumanité sont répétitives
et déprimantes. Après le volta, le poème se poursuit par une série de cinq distiques
caractéristique d’un changement de ton dont la brusquerie renseigne l’émergence
de la souffrance du poète. En outre, de nombreux effets poétiques sont utilisés
pour traduire la souffrance de l’auteur face à la guerre, aux morts, et à l’injustice.
« Elle martyrisait à plaisir sa mémoire » : il s'agit d'une antithèse, presque un
oxymore. Par un geste doux, elle ravive la douleur. Une deuxième antithèse est
créée avec l’amour et la beauté d’Elsa, et la tragédie de l’Occupation. « Les
cheveux d’or (3) » d’Elsa sont une métaphore pour les incendies. L’expression
« Sans y croire ... » montre le désespoir et le défaitisme qui régnait à cette sombre
et terne période. En plus, Aragon référence à l’Occupation quand il répète, « notre
tragédie (1, 5, 8, 17, 21, 25) » et il compare « ce miroir maudit (18) » et « ce
monde maudit (26)». Il emploie plus loin une assonance en « d » avec « je les ai
dits (27) » et « reflet d’incendie (30) », ce qui renforce ces métaphores.
3. La guerre, un souvenir indélébile
Le souvenir est un thème récurrent très présent dans « Elsa au miroir ». Le premier
indice en est la date d’écriture du poème : il a été écrit en 1945 à la fin de la
seconde guerre mondiale, ce qui en fait un souvenir de la situation. En outre, « Je
croyais voir (ver 3) » et « Les coins de ma mémoire (ver 20) » indiquent que le