La profession sage-femme éthique et déontologie professionnelle Mme EL GOURJT Année universitaire 2021/2022 L’éthique et la déontologie professionnelle Quelques définitions La morale Le terme morale signifie l'ensemble des règles d'action et des valeurs qui fonctionnent comme normes dans une société. Certains auteurs le distinguent du terme éthique et d'autres le considèrent comme synonyme SIGNIFICATION DU MOT « ÉTHIQUE » Le terme éthique tire son origine dans la signification de deux mots grecs : L’un veut dire à la fois « étable » et « habitat » L’ autre mot qui a le sens de manière de vivre, de manière d'habiter en soi-même et de diriger son agir pour mieux y vivre. Étable ou habitat Manière de vivre Manière d’habiter en soi-même pour mieux y vivre. L’éthique C'est un questionnement critique sur la morale dont elle interroge les règles et recherche à leur égard des orientations réfléchies et correctes. L'éthique n'impose pas ses préceptes de manière autoritaire, Elle n'est pas normative comme la morale Différences entre éthique et morale La morale A une connotation religieuse. Elle comporte une notion de contrôle imposée de l’extérieur. Elle porte sur le bien et sur le mal. Elle nous interpelle, crée des obligations. L’éthique Est plutôt de nature laïque. Elle comporte une notion d’autocontrôle. Elle part de l’intérieur de la personne. Elle porte sur le positif et le négatif. Elle nous fait réfléchir et nous responsabilise. Déontologie Le terme déontologie signifie simplement : éthique appliquée à un champ professionnel. Il regroupe l’ensemble des règles qui régissent l’exercice d’une fonction professionnelle. Exemple : Code Déontologie de la sagefemme La bioéthique Le terme « bioéthique » quant à lui, comme sa racine l'indique, réfère aux réflexions sur la vie et la mort et tend à éclairer les grandes décisions qui s'y rapportent. Les liens entre la morale, l’éthique et le droit Il y a des liens importants entre ces concepts. La morale et l’éthique soulèvent les questions, mettent les besoins en lumière et le droit, par le biais des lois, vient les sanctionner. Par exemple, La personne coupable d'atteinte à la vie de quelqu'un, pour un motif humanitaire non reconnu par l’éthique, pourra, au nom de la loi, se voir poursuivre devant les tribunaux Pourquoi avons-nous besoin de l’éthique? En raison : Des changements constants de la société et de la nécessité d’y adapter nos règles de conduite. Des pressions sociales pour les droits individuels afin de trouver un équilibre optimal entre ceux-ci et les droits collectifs. De la progression de la science et de la médecine et de leurs moyens nouveaux. Du pouvoir des soignants face la vie et à la mort. Principes éthiques Le domaine de l’éthique se caractérise par - son hétérogénéité - Pluralisme moral - Aspect multidisciplinaire de l’éthique D’où la nécessité d’instaurer des principes // moyen d’avoir en commun une base solide de laquelle partir pour réfléchir, pour décider et agir// Principes éthiques (suite) La recherche scientifique a apporté des avantages sociaux substantiels. Elle a également posé quelques questions d’éthique troublantes. L’attention du public a été attirée sur ces questions à la suite de rapports d’abus perpétrés sur des sujets humains au cours d’expériences biomédicales, notamment lors de la Seconde Guerre mondiale. Principes éthiques (suite) Pendant les procès des criminels de guerre à Nuremberg, le code Nuremberg a été rédigé en un ensemble de normes permettant de juger les médecins et les scientifiques qui s’étaient livrés à des expériences biomédicales sur des prisonniers des camps de concentration. Principes éthiques (suite) Ce code est devenu le prototype pour de nombreux codes ultérieurs visant à garantir que la recherche faisant appel à la participation de sujets humains se déroule de façon éthique. Principes éthiques (suite) - Le Rapport Belmont – 1978: - La médecine devient ultra performante: quelles conséquences? - Connaissance des expérimentations effectuées durant la guerre mondiale - - Scandales médicaux (Brooklyn, Willowbrook,etc.) Principes éthiques (suite) Issu de la Commission Nationale Américaine pour la Protection des Sujets humains dans la Recherche Biomédicale et Comportementale Fruit d’une réflexion commune -Concerne uniquement la recherche Principes éthiques (suite) Les principes de l’éthique biomédicale de Tom Beauchamp et James Childress – 1979: deuxième texte dans lequel apparaissent les principes Trois principes [Belmont]: -Le respect des personnes (comprend la notion d’ autonomie ) -La bienfaisance -La justice - la non-malfaisance (rajouté par Beauchamp et Childress) BREF la médecine et le monde a besoin de repères éthiques pour « réguler » la pratique mais SURTOUT ne jamais retomber dans les atrocités commises dans le passé La pensée bioéthique naît à partir du moment où le sentiment est celui qu’une norme a été violée Paul Ricoeur: le sentiment de la transgression d’une norme appelle l’éveil de la conscience morale et le besoin de normativité Le principe du respect de l’autonomie Rapport Belmont Une personne autonome est une personne capable de réfléchir sur ses objectifs personnels et de décider pour elle-même d’agir conformément à cette réflexion 1 . Respecter l’autonomie c’est donner leur poids aux opinions et aux choix réfléchis des personnes autonomes tout en s’abstenant de faire obstacle à leur actions à moins que de façon évidente ces actions ne causent un préjudice aux autres. Manquer de respect envers une personne autonome c’est nier le fruit de ses réflexions ou refuser de lui fournir les renseignements pour porter un jugement réfléchi alors qu’aucune raison ne nous oblige à le faire. » Le principe du respect de l’autonomie d’action: mouvement dans l’espace de pensée: mener une argumentation réfléchie de volonté: - Autolimitation: maîtrise rationnelle de la sensibilité; résolution consciente et personnalisée - Souveraineté individuelle: avoir des préférences et se déterminer en fonction de ces dernières [Donc en fonction d’une conception du BIEN qui nous est propre] Principe de bienfaisance Rapport Belmont Assurer le bien-être Bonté-Charité = OBLIGATION Deux règles de base: Augmenter et les avantages réduire le plus possible les torts Principe de bienfaisance Pour traiter les personnes d’une façon morale, il faut s’efforcer d’assurer leur bien- être Vouloir le bien peut se heurter à des difficultés: Matérielles Conflits entre les principes Le principe de nonmalfaisance Adage Hippocratique: Primum non nocere Balance : avantages – inconvénients Exemple: -Faire une autre chimiothérapie ( +: petit espoir d’amélioration) -Effets du traitement ( -:souffrance, qualité de vie impactée, etc.) Où se situe la frontière entre bienfaisance et malfaisance? Le principe de justice Rapport Belmont Justice définie par l’injustice - « Il y a une injustice lorsqu’un bienfait auquel une personne a droit lui est refusé sans raison, ou lorsqu’un fardeau lui est indûment imposé. » - Communauté de droits et de devoirs: référence à un système supérieur (la LOI) Par exemple: comment être juste dans la répartition du soin? Le principe de justice Oui, mais comment concevoir la justice? - 5 formules: -A chaque personne -A chaque personne -A chaque personne -A chaque personne -A chaque personne une part égale selon ses besoins particuliers selon ses efforts personnels selon ce qu’elle contribue à la société selon son mérite Importance du concept d’égalité- -Principe qui demande de s’interroger sur la façon qu’ont les hommes d’être égaux- Droit à l’intimité et à la protection de la vie privée Toute intervension auprès des êtres humains constitue une forme d’intrusion dans leur vie personnelle dans le domaine de la santé, le sujet consent à dévoiler des informations intimes à certaines conditions connues La violation à l’intimité survient si l’information privée est donnée à des tiers sans ou à l’encontre du consentement de la personne Melle Elgourjt Mariama Difficultés relatives au principisme (dilemme éthique) suite Le soin se définit par le souci d’autrui : il vise à répondre à ses besoins et à soulager ses souffrances, physiques et morales. Le soin a une visée éthique, mais il a souvent échoué dans l’histoire et il risque toujours, dans la pratique quotidienne, d’échouer à être véritablement éthique, à être respectueux de l’être humain. Difficultés relatives au principisme (dilemme éthique) suite On risque de ne pas prendre en considération l’expérience propre du patient, son point de vue, ses valeurs, sa volonté. On peut être tenté de décider à sa place. Difficultés relatives au principisme (dilemme éthique) suite Ø La dissymétrie des positions entre soignant et soigné, entre point de vue objectif et point de vue subjectif sur la maladie est sans doute irréductible. Elle peut générer de l’incompréhension, voire de la maltraitance et de la violence morale dans le soin. Ø Il est difficile de bien faire même avec de bonnes intentions face à la maladie, la souffrance, la solitude, l’inquiétude, la détresse. . Difficultés relatives au principisme (dilemme éthique) suite Ø On peut aussi être tenté de juger le malade, de le rendre responsable de sa maladie, de le stigmatiser (populations précaires, toxicomanes, prostituées) Ø En avoir conscience, c’est se donner la possibilité de l’analyser et de Difficultés relatives au principisme Exemple: Greffe d’organes (dilemme éthique) Pp de bienfaisance: tout le monde doit être greffé Pp de justice: critère de répartition équitable (le critère de l’urgence peut-il être considéré comme un critère juste?) Exemple: Maladie d’Alzheimer Pp de bienfaisance: « tout » gérer pour le patient pour assurer son bien-être Pp du respect de l’Autonomie : lui laisser un champ d’expression autonome Comment faire quand une situation appelle deux principes entrant en contradiction? Conclusion Le soin est une relation d’aide. Le soin est une réponse technique aux besoins, physiques et psychiques, d’une personne qui requiert un savoir et savoir-faire, MAIS c’est AUSSI une relation morale qui requiert le souci, l’attention à la personne soignée, la sollicitude envers elle. Code de déontologie international pour les sages-femmes Le code I. Relations établies dans le cadre de la pratique de sage-femme II. La pratique de sage-femme III. Les responsabilités professionnelles des sages-femmes IV. Développement des connaissances et de la pratique de sage-femme I. Relations établies dans le cadre de la pratique de sage-femme a. Les sages-femmes nouent des relations avec chaque femme dans le cadre desquelles elles partagent des informations pertinentes qui conduisent à une prise de décision informée, conviennent d’un programme de soins évolutif et acceptent la responsabilité des conséquences de leurs choix b. Les sages-femmes soutiennent le droit des femmes/des familles à participer activement aux décisions relatives à leurs soins. I. Relations établies dans le cadre de la pratique de sage(suite) habilitent les femmes/leurs c.femme Les sages-femmes familles à faire entendre leur point de vue sur des questions qui affectent les femmes et les familles au sein de leur culture/société. d. Les sages-femmes, en collaboration avec les femmes, travaillent avec des agences de politique et de financement pour définir les besoins des femmes en matière de services de santé et pour garantir que les ressources sont allouées de façon juste en fonction des priorités et disponibilités I. Relations établies dans le cadre de la pratique de sagefemme (suite) e. Les sages-femmes s'aident et se soutiennent mutuellement dans leurs rôles professionnels et encouragent activement le sentiment personnel de leurs propres valeurs et de celui des autres. f. Les sages-femmes travaillent avec d'autres professionnels de la santé en faisant preuve de respect à leur égard et les consultent ou transfèrent si nécessaire les femmes dont elles ont la charge si les soins requis par celles-ci excèdent les compétences de la sage-femme I. Relations établies dans le cadre de la pratique de sagefemme (suite) g. Les sages-femmes ont conscience de l'interdépendance humaine au sein de leur profession et cherchent activement à résoudre les conflits inhérents. h. Les sages-femmes ont des responsabilités vis-à-vis d'elles-mêmes en tant que personnes de grande moralité, y compris des devoirs de respect de soi et de préservation de leur intégrité. II . La pratique de sagefemme a. Les sages-femmes fournissent des soins aux femmes enceintes et à leur famille en respectant la diversité culturelle tout en tentant d'éliminer les pratiques dangereuses qui existent dans ces mêmes cultures. b. Les sages-femmes encouragent des attentes minimales de la part des femmes et des filles que la conception et l'accouchement ne nuiront pas à la santé. II . La pratique de sagefemme (suite) c. Les sages-femmes intègrent des connaissances professionnelles fondées sur des preuves les plus récentes, afin de maintenir sa compétence en matière de la pratique de sage-femme dans tous les milieux et des cultures. d. Les sages-femmes avec l'objection de conscience à un certain type de soins réclamé par la femme, orienteront cette dernière vers un autre prestataire de soins qui sera en mesure de le leur fournir. II. La pratique de sage-femme (suite) e. Les sages-femmes comprennent les conséquences négatives que la violation de droits moraux et des droits de l'homme ont sur la santé des femmes et des nouveau-nés et s'efforceront d'éliminer ces violations f. Les sages-femmes participent au développement et à la mise en place de politiques de santé qui favorisent la santé de toutes les femmes enceintes et de leurs famille IV. Développement des connaissances et de la pratique a.deLessage-femme sages-femmes garantissent que le développement des connaissances en matière de pratique de sage-femme est basé sur des activités qui protègent les droits des femmes en tant que personnes. b. Les sages-femmes développent et partagent des connaissances sur leur métier grâce à diverses méthodes dont le contrôle par les pairs et la recherche. c. Les sages-femmes contribuent à la formation officielle des étudiants en pratique de sage-femme et à la formation continue des sages-femmes. Les principales qualités morales et aptitudes de la SF Les compétences psychosociales « Les compétences psychosociales sont la capacité d'une personne à répondre avec efficacité aux exigences et aux épreuves de la vie quotidienne. C'est l'aptitude d'une personne à maintenir un état de bienêtre mental, en adaptant un comportement approprié et positif, à l'occasion des relations entretenues avec les autres, sa propre culture et son environnement…» O.M.S., 1993 Les aptitudes à la vie quotidienne Définition Life Skills La première définition des Life Skills a été énoncée par un groupe d’experts en 1993 : « les compétences psychosociales sont la capacité d’une personne à répondre avec efficacité aux exigences et aux épreuves de la vie quotidienne » (Arwidson, 2012). LIFE SKILLS « aptitudes en faveur d’un comportement adapté et positif qui rend une personne capable de composer de manière effective avec les exigences et les défis de la vie quotidienne » (WHO, 2012). Les LIFE SKILLS Une « approche de changement de comportement ou de développement d’un comportement en faveur d’un équilibre à trois dimensions : la connaissance, l’attitude et les aptitudes » (UNICEF, 2012). Les Life skills Sans prétendre à l’exhaustivité, l’OMS, l’UNICEF et l’UNESCO ont identifié 10 life skills qu’ils ont regroupées en trois catégories : Aptitudes à la communication et aux relations interpersonnelles Aptitudes à la prise de décision et à la pensée critique Aptitudes à la gestion autonome et à la maîtrise de soi Aptitudes à la communication et aux Aptitudes à la communication interpersonnelle : verbale/non verbale, relations interpersonnelles 1 écoute active, expression des sentiments, réactions (donner/recevoir) ; Capacités de négociation/refus : négociation et gestion de conflit, affirmation de soi, aptitudes au refus ; Empathie : aptitudes à écouter/comprendre les besoins/circonstances de l’autre et à exprimer cette compréhension ; Aptitudes à la communication et aux relations interpersonnelles 2 Collaboration et travail en équipe : manifestation de respect pour les contributions des autres et les différents styles, évaluation de ses propres capacités et contribution dans un groupe ; Capacités de plaidoyer : capacités d’influence et de persuasion, motivation, réseautage. Aptitudes à la prise de décision e tà pensée critique la Aptitudes à la prise de décision et à la résolution de problèmes : collecte de données, anticipation des conséquences de ses propres agissements et de ceux des autres, identification de solutions alternatives aux problèmes Aptitudes à la pensée critique : analyse de l’influence des médias et des pairs, analyse des attitudes, des valeurs, des normes et croyances sociales ainsi que des facteurs qui les influencent, identification d’informations pertinentes et de sources d’informations. Aptitudes à la gestion autono me et à la maîtrise de soi Augmentation du contrôle de soi : développement de l’estime de soi et de la confiance en soi, conscience de soi y compris des droits, des influences, des valeurs, des attitudes, des forces et des faiblesses, capacités à se définir un but et à l’auto‐évaluation ; Capacités de gestion de ses émotions : gestion de la colère, gestion de l’anxiété, capacités d’adaptation à/gestion des situations difficiles (perte, abus, traumatisme) ; Le professionnalisme/expertise professionnelle Le professionnalisme Définition : capacité à assurer l’engagement envers la société et à répondre à ses attentes, de développer une activité professionnelle en privilégiant le bien-être des personnes par une pratique éthique et déontologique, d’améliorer ses compétences par une pratique réflexive dans le cadre de la pratique fondée sur des données probants, d’assumer la responsabilité des décisions prises avec le patient. Qu’est-ce que la pratique réflexive ? Développer une pratique réflexive, c’est adopter une posture réflexive, de manière régulière et intentionnelle, dans le but de prendre conscience de sa manière d’agir, ou de réagir, dans les situations professionnelles ou formatives. Qu’est-ce que la pratique réflexive ? La pratique réflexive consiste à caractériser la manière dont l’action est organisée, à penser ce qui pousse à l’action, à formaliser ses savoirs pour les rendre lisibles et visibles par tous Utilité La pratique réflexive permet de faire évoluer les pratiques professionnelles individuelles et collectives en accompagnant chacun vers un travail sur l’identité professionnelle, le rapport à l’institution, au savoir et au changement. Cela engage un réel processus de professionnalisation. La pratique réflexive permet de résoudre un problème, comprendre une situation complexe, s’interroger sur sa pratique et imaginer de nouvelles façons d’améliorer sa performance P. Perrenoud Référence ICM Document Essentiel Révisé et approuvé à la réunion du Conseil de Prague de 2014