IMF Monde Pluriel : ethnocentrisme et relativisme culturel S Volle
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Plan
Introduction
- Travail collectif sur ce qu’évoque pour les étudiants le mot « culture »
- Emergence des questions et amorce des débats
- « culture » et travail social
1ere partie
I/ Le concept de culture
1/ Culture, définitions
2/ Fonctions de la culture
II/ La diversité des cultures au sein des sociétés occidentales
1/ La pluralité des phénomènes culturels
2/ Uniformisation et différenciation socioculturelle
2eme partie Ethnocentrisme et relativisme culturel
III/ La rencontres des cultures
1/ le phénomène d’acculturation
2/ Ma Culture, les cultures : la reconnaissance des cultures
3/ Le relativisme culturel : de Montaigne à Lévi-Strauss
4/ Ethnocentrisme : définition, mécanismes et effets.
Conclusion : Au-delà de la culture, l’identité
Article du N°110 de Sciences Humaines, Novembre 2000 : Cultures, la construction des identités.
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1ere partie
CULTURES ET SOCIETES
Toute société est un ensemble humain caractérisé par un ensemble de traits particuliers. La
culture, à ce titre, est importante, car elle manifeste et constitue l’identité des groupes humains.
I. LE CONCEPT DE CULTURE :
1. Des significations distinctes :
La définition courante de la culture fait référence à la somme des connaissances « nobles »
(dans le domaine des arts, des connaissances scientifiques, des arts, des lettres…) que détient un
individu ou le patrimoine des œuvres intellectuelles et artistiques que possède une société.
L’expression de culture savante est généralement employée en sciences sociales pour désigner cet
ensemble de savoirs.
Pour rendre compte de l’extraordinaire diversité des sociétés humaines, anthopologues ont
pour leur part proposé une définition très large de culture. Elle comprend l’ensemble des productions
concrètes et abstraites de l’homme en société et elle peut s’incorporer dans les objets les plus
humbles.
Le rapprochement entre anthropologues et sociologues dans l’observation des sociétés va ouvrir une
nouvelle réflexion sur la culture. Ils désignent dès lors par l'ensemble des manières d'agir, de
sentir, des valeurs et des normes qui sont communes aux membres d'un groupe et qui les
différencient des autres hommes.
2. Les fonctions de la culture :
La culture est une composante primordiale des sociétés humaines ; elle a ainsi plusieurs fonctions.
Tout d’abord, elle permet d'adapter les hommes à leur milieu ( les manières de faire
manifestent une adaptation à l’environnement ).
Ensuite, elle permet d'intégrer des individus à une collectivité ( on peut vivre ensemble
parce qu’on conçoit les choses d’une façon commune).
Enfin, elle permet la communication ( on ne peut vivre ensemble que parce que l’on parle la
même langue, que parce que la signification des faits et gestes peut-être comprise par les uns
et les autres…)
Cette adaptation et cette intégration reposent sur la transmission des traits culturels des générations
précédentes aux générations suivantes. La culture manifeste l’acquis (social) par rapport à l’inné.
(biologique). Un moment primordial de la constitution des groupes passe ainsi par la socialisation,
qui permet la transmission et l’intériorisation des normes, des valeurs d’une société.
II. La culture : un processus de construction :
S’il est évident qu’il existe des identités culturelles distinctes d’une société à l’autre, la culture
ne doit pas être perçue comme l’ensemble des traits qui caractériserait une fois pour toute les
membres d’un groupe et qui les différencierait de manière tranchée des non-membres. Il ne faut pas
essentialiser la culture, c’est-à-dire faire d’elle une « seconde nature » qui enfermerait les individus
dans une identité collective immuable.
Loin d’être une « chose » qui s’imposerait aux individus, la culture est le processus par lequel ceux-ci
construisent de façon continue leur identité collective. S’ils s’inscrivent à la naissance dans un
univers culturel donné, les individus ont cependant la capacité de la redéfinir, au moins partiellement.
La culture est en recomposition permanente. Elle est le produit de l’ensemble des intéractions
individuelles et collectives.
III. LA DIVERSITE DES CULTURES AU SEIN DES SOCIETES OCCIDENTALES :
1. LA PLURALITE DES PHENOMENES CULTURELS :
La diversité culturelle existe aussi au sein d’une même culture ; l’approche sociologique de la
culture étudie les phénomènes culturels à l’intérieur des sociétés et particulièrement des sociétés
occidentales. Chaque groupe social se caractérise par des valeurs, des normes et des pratiques
sociales spécifiques.
La notion de culture peut concerner une société globale (par exemple, la culture française),
mais aussi des collectivités plus vastes (par exemple, la culture occidentale) ou au contraire plus
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restreintes (par exemple la culture ouvrière ou bretonne). Dans ce dernier cas, on parle de sous-
culture pour indiquer qu’il s’agit de sous-ensembles au sein d’un ensemble plus large.
La sous-culture peut aussi signer un ensemble culturel propre à un groupe particulier (culture
bourgeoise, culture des jeunes, culture provençale, culture d’entreprise…) ou à un mouvement
d’idées (culture catholique, culture communiste…) mais qui partage cependant des traits culturels
dominants de la société dans laquelle il s’inscrit.
Certains groupes restreints ou plus élargis peuvent toutefois exprimer leur différence en
adoptant un système de valeur, une manière de vivre en opposition avec la culture dominante.
C’est le cas de bandes qui rejettent la culture dominante et constituent une contre-culture. Notons
toutefois que les contre-cultures peuvent jouer un rôle dans le changement social et dans l’évolution
de la culture dominante : un élément contre-culturel aujourd’hui peut devenir demain un élément de
la culture globale d’un groupe social ou d’une société.
2. UNIFORMISATION ET DIFFERENCIATION SOCIOCULTURELLE :
La diversité culturelle se manifeste aussi dans les pratiques. La diffusion massive des produits
culturels est facteur d’uniformisation : une culture de masse se développe.
Cependant les pratiques culturelles demeurent fortement influencées par les déterminants sociaux
tels que l’appartenance socioprofessionnelle, le sexe, l’âge, le lieu de résidence…
Certaines pratiques culturelles sont considérées comme supérieures et relèvent de la culture
dominante. Ainsi, existe-t-il une hiérarchie culturelle. La culture dominante est celle du groupe social
dominant qui impose la légitimité de sa propre culture.
Cependant, les rapports de domination culturelle ne sont jamais tels que les groupes dominés
soient privés de toute capacité d’élaboration culturelle. S’ils sont largement contraints de se définir
par rapport à la culture de référence, celle des élites, ils développent aussi des pratiques de
réappropriation et de détournement des productions culturelles dominantes.
En somme le débat entre sociologues oppose ceux qui soulignent des phénomènes
d’uniformisation culturelle du fait de la diffusion massive de produits culturels et donc d’une culture de
masse, et les sociologues qui mettent en évidence la permanence des effets de distinction et de
domination culturelle.
III) LA RENCONTRE DES CULTURES :
A) LE PROCESSUS D’acculturation :
Les anthropologues ont montré la complexité des processus d’acculturation, c’est-à-dire des
phénomènes qui résultent des contacts généralement prolongé entre des groupes d’individus de
cultures différentes. Les modifications qui se produisent alors dans l’une et / ou l’autre des cultures
concernées s’effectuent selon des modalités et sous des formes extrêmement variables. Il peut
toutefois arriver qu’une culture disparaisse ; on parle alors d’ethnocide.
Même si des rapports généralement asymétriques prévalent lors de cette mise en contact
(colonisation, immigration, minorités ethniques…) et si les phénomènes de domination culturelle sont
fréquents, les échanges culturels ne sont jamais à sens unique. En outre, les membres de la culture
dite « receveuse » ne subissent pas passivement les transformations culturelles et celles-ci ne sont
pas seulement destructrices. On observe des mécanismes de syncrétisme. En général, des
configurations culturelles nouvelles naissent de cette confrontation complexe, qui constitue l’une des
sources majeure du changement culturel. Les processus acculturatifs sont facteurs de déculturation,
mais ils engendrent aussi des phénomènes de résistance culturelle, de contre-acculturation (rejet
de la culture « donneuse » avec tentatives de restauration de la culture originelle).
Souvent, les phénomènes d’acculturation sont analysés chez les populations immigrées. Cette
forme particulière de socialisation secondaire peut conduire à l’assimilation (quand les traits de la
culture d’origine disparaissent et sont remplacés pas l’adoption des traits de la culture du pays
d’accueil), ou à l’intégration ( processus long au cours duquel certains traits culturels de la culture
du pays d’accueil sont acceptés tandis que d’autres traits résistent à l’acculturation ).
B) INTEGRATION ET MULTICULTURALISME :
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La diversité culturelle s’appréhende aussi à travers la cohabitation de différentes
communautés sur le sol national.
La France s’est structurée sur un modèle d’intégration républicaine qui affirme l’égale
dignité de chaque individu comme citoyen et renvoie l’affirmation des singularités culturelles au
registre de la vie privée. On lui oppose le modèle multiculturaliste qui repose sur l’affirmation et le
respect des différences et promeut la reconnaissance des cultures particulières des différentes
communautés.
C) la difficile reconnaissance de certaines cultureS :
1. Darwinisme social et ethnocentrisme :
La culture est un phénomène universel. Tous les peuples ont une culture. Considérer que
certains sont « incultes » ou déconsidérer certains traits culturels relève d’une attitude
ethnocentrique. L’ethnocentrisme consiste en effet à juger une autre culture en fonction de ses
propres normes et valeurs. Selon la thèse évolutionniste qui lui est souvent sous-jacente, l’histoire
culturelle de l’humanité aurait évolué des sociétés primitives à la société occidentale. Cette thèse est
contestée car rien ne permet d’établir une hiérarchie ou une filiation entre les cultures.
2. Le paradoxe du relativisme culturel :
La remise en cause de l’ethnocentrisme a permis de développer l’idée du relativisme culturel.
Il convient selon ce principe de ne pas classer les cultures : aucune culture n’est supérieure à une
autre. Etre différent n’est pas être inférieur.
L’école anthropologique américaine des années 20 (M.Mead, R.Benedict, B.Malinovski…) a donné
un élan aux études de terrain, s’orientant vers la recherche de cultures ignorées des occidentaux.
Elle a donné naissance au culturalisme, théorie selon laquelle la culture constitue un système
cohérent et structuré qui façonne profondément les individus et détermine leur personnalité sociale.
Cette analyse a été ensuite jugée trop déterministe et statique. La culture est aussi une production
sociale : elle est produite par les acteurs sociaux qui interprètent les traits culturels et contribuent
ainsi à l’évolution et au dynamisme culturel.
Par ailleurs, le paradoxe du relativisme culturel mis en évidence par Levy-Strauss, dans Race et
histoire, permet de s’interroger : toutes les valeurs sont-elles équivalentes ? Y a-t-il des valeurs
supérieures ? Des pratiques jugées inacceptables ? (excision ?)
3. Mondialisation ou guerre des cultures ?
La mondialisation est ressentie par certains peuples comme la volonté des sociétés
dominantes d’imposer leurs règles économiques, sociales et politiques. Ils peuvent utiliser et
renforcer certains traits culturels pour signifier leur résistance mais aussi se réfugier dans un
repli culturel (exemple des talibans) en refusant tout contact.
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blog.crdp-versailles.fr/.../public/RelativismeCulturel.doc
2eme partie : ethnocentrisme et relativisme culturel
L'ethnologie est une discipline relativement récente des sciences humaines qui a
fortement contribué à la connaissance des cultures non occidentales. Ce savoir a d'autre
part substitué à l'ancienne anthropologie évolutionniste une nouvelle manière d'apphender la
diversité des cultures : le relativisme culturel.
Il découle de l'observation et de la connaissance des cultures étrangères. Il affirme
comme un principe l'idée qu'il est impossible d'attribuer des valeurs comparatives aux
cultures, de les distribuer selon l'ordre hiérarchique qui va de l'inférieur au supérieur.
Comme d'une part chaque culture est un syst è m e de comportements et de
valeurs, et comme d'autre part, on l'a vu, chacune se valorise aux dépens des autres,
toute évaluation d'une culture est nécessairement jugement d'une culture par une
autre et ne saurait correspondre à rien d'objectif ni à rien de vrai.
Le relativisme culturel récuse aussi par conséquent la classification historique des
civilisations selon leur place dans la prétendue évolution ou développement de
l'humanité. C'est la grande leçon de Lévi-Strauss qui a beaucoup fait pour diffuser l'idée
que même les peuples qui n'ont pas progressé au sens où on l'entend communément,
c'est-à-dire surtout techniquement, ont quand même une histoire. Dès lors, il peut dire
que l'« histoire cumulative» (le progrès) n'est pas le privilège d'une civilisation ou d'une
période de l'histoire.
Mais surtout, ce sont les cadres de notre perception qu'il faut changer. Quand bien même
les sociétés occidentales cumuleraient davantage de progrès et d'innovations que d'autres, ce
que l'on peut difficilement nier à propos de l'histoire récente, encore faut-il résister à la
tentation de penser l'histoire des civilisations en termes de progrès, comme s'il s'agissait
de mesurer la distance qui sépare chacune d'une nature originaire. Au contraire,
« Le développement des connaissances préhistoriques et archéologiques tend à étaler
dans l'espace des .formes de civilisation que nous étions portés à imaginer comme
échelonnées dans le temps. » (Race et histoire).
Lévi-Strauss entend penser la diversité des civilisations en.
tant que telle. Il en finit avec l'idée de hiérarchie, qui correspond finalement à une
philosophie historique selon laquelle il y aurait des peuples adultes et d'autres qui
seraient restés dans l'enfance de l'humanité :
« En vérité, il n'existe pas de peuples enfants ; tous sont adultes, même ceux qui
n'ont pas tenu le journal de leur enfance et de leur adolescence. »
Comme le disait déjà l'ethnologue américain Melville Herskovits, « il n'y a aucune raison de
regarder aucun des groupes encore vivants comme nos ancêtres contemporains ». Aucune raison,
par conséquent, d'appeler « primitif» aucun peuple actuel. Sachons nous en souvenir
lorsque la télévision diffuse un reportage sur les Aborigènes d'Australie ou une tribu
d'Amazonie ! Avant l'apparition de l'ethnologie moderne, il existait une
manière de relativiser le jugement porté sur les autres civilisations, et d'atténuer sa
déformation ethnocentrique. Cela consistait à faire un usage critique de la diversité
culturelle. Il s'agissait, par le jeu de la comparaison, de jeter un regard critique
sur notre culture d'appartenance. C'est ainsi par exemple que Pierre de Montaigne
(1533-1592). Dans le chapitre des Essais intitulé Les cannibales, et par un astucieux
retournement, il tire profit de la pratique « barbare » de l'anthropophagie pour
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