Introduction : Mesures et espaces de probabilit´es
R´ef´erences :
Poly c´edric Bernardin et Jean Michel Morel.
J.-F. Le Gall, Int´egration, Probabilit´es et Processus Al´eatoire
J.-Y. Ouvrard, Probabilit´es 2, maˆıtrise-agr´egation, Cassini, (2000)
D. Williams, Probability with martingales, Cambridge University Press, (1991) Durrett R., Probability :
Theory and examples, Duxburry, (1995).
Grimmett G., Stirzaker D., Probability and Random Processes, Oxford University Press, Third Edition, (2001)
Lecons :
Loi des grands nombres. Th´eor`eme de la limite centrale. Applications.
Ind´ependance d’´ev´enements et de variables al´eatoires. Exemples.
Suite de va de beroulli independantes
Utilisation en probas de la transformation de Fourier ou de Laplace et du produit de convolution.
Nous sommes habitu´es `a munir un espace Ω d’une topologie pour regarder des convergences. Nous allons
ici le munir d’une tribu pour mesurer des ensembles et int´egrer. Nous avons surtout en tˆete de regarder
des tribus engendr´ees par une topologie pour faire les deux et consid`erer des mesures de masse 1, c.a.d. des
probabilit´es.
1 Alg`ebres, tribus, π-syst`emes, λ-syst`emes et espaces mesurables
Soit Ω un ensemble quelconque. On commence par d´efinir toute une typologie de collections d’ensembles
que l’on utilisera tout au long du cours.
efinition 1.1. (π,λ-syst`emes, alg`ebres et tribus)
1. Une classe Pde sous-ensembles de est appel´ee un π-syst`eme ssi :
A, B ∈ P AB∈ P
2. Une classe Fde sous-ensembles de est appel´ee une alg`ebre ssi :
i) ∈ F.
ii) F∈ F Fc∈ F.
iii) F, G ∈ F =FG∈ F.
3. Une classe Fde sous-ensembles de est une tribu (ou σ-alg`ebre) ssi :
i) Fest une alg`ebre.
1
ii) Si Fn∈ F pour tout nNalors nNFn∈ F.
efinition 1.2. (λ-syst`emes)
Une classe Lde sous-ensembles de est appel´ee un λ-syst`eme ssi :
i) ∈ L.
ii) Si A, B ∈ L et ABalors B\A∈ L.
iii) Si (An)nNest une suite croissante d’´el´ements de Lalors nNAn∈ L.
Remarque 1.1. (i) Un tribu est une alg`ebre (qui est un πsyst`eme) et un λsyst`eme.
Un λsyst`eme n’est pas forcement un πsyst`eme (et donc une tribu), `a cause de l’intersection. Prendre par
exemple {, A, B, A, B, }qui est un λsyst`eme mais ne contient pas AB.
Une alg`ebre est un πsyst`eme, mais pas forement vrai un λsyst`eme. Les parties de Nfinies ou de compl´ementaires
finies forment une alg`ebre mais pas un λsyst`eme `a cause des entiers pairs, tout commes les unions fines
d’intervalles semi-ouverts.
(ii) La diff´erence entre topologie et tribu ? Le passage par complementaire marche pour les tribus (pas pour les
topologies) mais pour les tribus l’union doit etre d´enombrable. La topologie est donn´ee par l’union quelconque
d’intersection finie d’´el´ements des ensembles qui l’engendrent (ces intersections sont des bases de voisinage),
la tribu c’est plus compliqu´e...
(iii) On peut remplacer les stabilit´es par intersection par des stabilit´es par union pour l’alg`ebre (et donc la
tribu, mais pas le λsyst`eme) qui poss`edent le passage au compl´ementaire et `a l’union, et l’union par une
union disjointe ou croissante pour la tribu.
(iv) Une intersection quelconque (d´enombrable ou pas) de π-syst`emes, λ-syst`emes, d’alg`ebres ou de tribus
est (respectivement) un π-syst`eme, un λ-syst`eme, une alg`ebre ou une tribu.
(v) Le π-syst`eme, le λ-syst`eme, l’alg`ebre ou la tribu engendr´ee par une partie χest l’intersection de tous
ceux contenant χ.
(vi) Vous savez engendrer une topologie par une base de voisage en prenant l’union quelconque d’intersection
finie d’´el´ement de cette base.
Le coin du curieux (cf le cours d’Amaury Lambert `a Jussieu en L3, TD 4). On pourrait penser (au vue
aussi de certains cas particuliers) que trouver la tribu engendr´ee par une classe Cse fait en ajoutant `a C
les unions d´enombrables et les compl´ementaires des parties de C. Manque de chance, cela ne marche pas
toujours, notamment pour le cas de la tribu bor´elienne sur R. Et ce mˆeme si c’est un πsyst`eme (ou que l’on
ajoute les intersections d´enombrables). Si l on obtient ainsi une tribu, on a bien trouv´e la tribu engendr´ee
par (C).
Si l on proc`ede de la sorte en partant des intervalles r´eels, on ne tombe en effet pas sur une tribu. Il faut en
fait it´erer ce processus par r´ecurrence transfinie pour obtenir la tribu des bor´eliens. Cela explique pourquoi
il est impossible de fournir une description explicite compl`ete des bor´eliens de R. On peut montrer que la
tribu bor´elienne sur Ra la puissance du continu, ce qui montre l’existence de non-bor´eliens (car P(R)a une
puissance strictement sup´erieure `a celle du continu).
Proposition 1.1. Une collection de sous-ensembles de est une tribu ssi c’est `a la fois un λ-syst`eme et un
π-syst`eme.
Le th´eor`eme suivant est fondamental dans tout ce qui suit et notamment dans la d´emonstration du
th´eor`eme de Carath´eodory dont nous parlerons plus loin.
Th´eor`eme 1.1. (Dynkin)
Si Pest un π-syst`eme contenu dans un λ-syst`eme alors ce λ-syst`eme contient la tribu engendr´ee par ce
π-syst`eme.
2
emonstration. Voir TD.
Inerˆet : Montrer que les ensembles v´erifiant une propri´et´e Pforment un λsyst`eme qui contient un π
syst`eme pour obtenir que la tribu engendr´ee par le πsyst`eme v´erifie P.
efinition 1.3. Espace mesurable Une paire (Ω,F), o`u est un ensemble et Fest une tribu sur , est
appel´ee un espace mesurable. Un ´el´ement de Fest appel´e un ensemble F-mesurable.
Passons maintenant `a un exemple fondamental d’espace mesurable. Soit Sun espace topologique muni
de sa famille Sd’ouverts.
On appelle tribu bor´elienne sur Sla tribu engendr´ee par S.
On la note B(S) et ses ´el´ements sont appel´es les bor´eliens de S. Cette tribu est engendr´ee (par exemple)
par l’une des classes suivantes (qui sont des πsyst`eme), voir TD :
(d
Y
i=1
[ai;bi]; ai, biR),(d
Y
i=1
(−∞;bi]; biR),(d
Y
i=1
[ai; +); aiR)
Les ´el´ements de B(Rd) peuvent ˆetre tr`es compliqu´es mais il est possible de construire des ensembles non
bor´eliens (voir TD)
2 Mesure
efinition 2.1. Soit µune application de Fdans [0,+].
1. µest dite additivement d´enombrable si pour toute suite d’´el´ements disjoints Fn∈ F tels que nFn
F,µ(nFn) = Pnµ(Fn).
2. µest appel´ee mesure sur un espace (Ω,F)mesurable ssi µ() = 0 et µest additivement d´enombrable.
Remarque 2.1. ?L’addititive d´enombrabilit´e de la mesure entraˆıne sa monotonie : si AnAavec An∈ F,
alors µ(An)A.?Bien sur pr´eciser µ()=0est inutile par 2) si µn’est pas identique `a l’infini car
µ() = Pµ(). Tout comme pr´eciser nFn∈ F est inutile dans 2) ici mais utile dans Carath´eodory.
?On dira que la mesure µest finie (ou de masse finie) ssi µ(Ω) <+.
?On dira qu’elle est σ-finie ssi il existe une suite (Ωn)nd’ensembles mesurables tels que µ(Ωn)<+et
Ω = nn.
?On appelera probabilit´e toute mesure µde masse µ(Ω) ´egale `a 1.(Ω,F, µ)est alors appel´e un espace
probabilis´e ou espace de probabilit´e.
?On peut compl´eter un espace mesur´e (Ω,F, µ)en ajoutant les ensembles n´egligeables, i.e. les ensembles X
tels qu’il existe Z∈ F contenant Xde mesure nulle. Pour les Boreliens, on obtient la tribu des Lebesguiens.
?On ne peut esp´erer avoir µ(xIFx) = PxIµ(Fx)en g´en´eral comme on peut le voir avec l’ensemble non
enombrable I= [0,1],Fx={x}et la mesure de Lebesgue (on obtient 1 = 0).
2.1 Prolongement de mesures
Le probl`eme pos´e est le suivant et est bien illustr´e par le cas de la mesure de Lebesgue λ. On cherche
`a d´efinir une mesure λsur (R,B(R)) telle que pour tous r´eels a < b,λ(]a, b[) = ba. Premi`ere question :
existe-t-il une telle mesure ? Si oui, est-elle unique ?
Th´eor`eme 2.1. (Carath´eodory)
Soit un ensemble muni d’une alg`ebre F0et soit Fla tribu engendr´ee par cette alg`ebre. Si µ0est une
application d´enombrablement additive µ0:F0[0; +]alors il existe une mesure µsur (Ω,F)telle que
µ=µ0sur F0
Si µ0(Ω) <+alors cette extension est unique.
3
Pour obtenir la mesure de Lebesgue sur ((0,1],B((0,1])), on peut prendre comme alg`ebre
F= (a1, b1]. . . (ar, br]
avec rNet 0 a1. . . arbr1.
Pour la preuve, on commence par ´etablir que deux mesures qui co¨ıncident sur un π-syst`eme (ou donc
une alg`ebre) co¨ıncident aussi sur la tribu qu’engendre ce π-syst`eme (ou cette alg`ebre).
Proposition 2.1. (d’unicit´e des prolongements de mesures)
Soit un ensemble muni d’un π-syst`eme Pet soit F=σ(P). Supposons que l’on ait deux mesures µ1et µ2
sur Fde mˆeme masse finie, µ1(Ω) = µ2(Ω), qui co¨ıncident sur P. Alors
µ1=µ2
Ce r´esultat (comme d’autres plus loin) se g´en´eralise aux mesure σfinie par limite croissante.
Pour le prouver, on d´efinit la classe D={F∈ F;µ1(F) = µ2(F)}. Il est facile de voir que c’est un
λ-syst`eme puisque puisque le fait que les deux mesures aient mˆeme masse montre que Ω ∈ D et les masses
finies assurent que Dest stable par diff´erence propre. Donc par le th´eor`eme de Dynkin, Dcontient F.
Passons maintenant `a la preuve du th´eor`eme de Carath´eodory.
emonstration. (Th´eor`eme de Carath´eodory). Nous n’indiquerons que les principales ´etapes, les d´etails
´etant parfaitement expliqu´es dans [Williams, Probability with martingales].
Etape 1 : Soit P(Ω) la tribu compos´ee de toutes les parties de Ω. Pour un G∈ P(Ω), on d´efinit
λ(G) = inf (X
n
µ0(Fn))
o`u l’infimum est pris sur toutes les suites (Fn)nd’´el´ements de F0qui recouvrent G, i.e. G⊂ ∪nFn.λn’est
pas une mesure mais est ce que l’on appelle (improprement) une “mesure exterieure”, c’est-`a-dire qu’elle
jouit des propri´et´es suivantes :
a) λ() = 0.
b) λest croissante : G1G2λ(G1)λ(G2).
c) λest d´enombrablement sous-additive : si (Gk)kest une suite d’´el´ements de P(Ω) alors
λ(kGk)X
k
λ(Gk)
Seule c) m´erite d’ˆetre expliqu´ee. Soit (Gn)nune suite suppos´ee telle que pour chaque n,λ(Gn)<+
(sinon c’est trivial). On se donne ε > 0 et pour chaque n, on se donne une suite d’´el´ements (Fn,k)kde F0
pour lesquels
Gn⊂ ∪kFn,k ,X
k
µ0(Fn,k)λ(Gn) + ε2n.
Alors G⊂ ∪n,kFn,k et on a :
λ(G)X
n,k
µ0(Fn,k)X
n
λ(Gn) + ε.
Puisque εest arbitraire, en le faisant tendre vers 0, on obtient c).
Etape 2 : On introduit alors la notion de λ-ensembles. Un ´el´ement Lde P(Ω) est appel´e un λ-ensemble
ssi “il d´ecompose tout ´el´ement de P(Ω) proprement”, c’est-`a-dire :
λ(LG) + λ(LcG) = λ(G),G∈ P(Ω)
4
Lemme 2.1. Les λ-ensembles forment une tribu Lsur laquelle λest d´enombrablement additive si bien que
(Ω,L, λ)est un espace mesur´e.
emonstration. Montrons ce lemme.Lest une alg`ebre qui jouit de la propri´et´e suivante :
Si L1, L2, . . . , Lnsont des ´el´ements de Ldisjoints et G∈ P(Ω) une partie quelconque de Ω alors
λ(n
k=1(LkG)) =
n
X
k=1
λ(LkG) (?)
Nous avons donc `a d´emontrer que si (Lk)kest une suite d’´el´ements disjoints de Lalors L=kLk∈ L
(cf. la remarque apr`es la d´efinition de la notion de tribu) et
λ(L) = X
k
λ(Lk)
Par sous-additivit´e de λ, on a pour tout G∈ P(Ω) :
λ(G)λ(LG) + λ(LcG)
Passons maintenant `a l’in´egalit´e inverse. Soit Mn=knLk. Puisque Lest une alg`ebre (cf ce qui
pr´ec`ede), Mn∈ L donc
λ(G) = λ(MnG) + λ(Mc
nG)
Or LcMc
nsi bien que
λ(G)λ(MnG) + λ(LcG)
et par (?),
λ(G)
n
X
k=1
λ(LkG) + λ(LcG)
Par passage `a la limite quand n+, on obtient
λ(G)
X
k=1
λ(LkG) + λ(LcG)λ(LG) + λ(LcG)
la deuxi`eme in´egalit´e ´etant une cons´equence de la sous-additivit´e de λ. On en d´eduit que L∈ L. D’autre
part, puisque la derni`ere in´egalit´e est en fait une ´egalit´e, on voit qu’il en est de mˆeme des autres et que
finalement
λ(LG) = X
k
λ(LkG)
Il suffit maintenant de prendre G= Ω pour conclure.
Il nous reste `a voir que F0⊂ L et λ=µ0sur F0pour achever la preuve du th´eor`eme.
Etape 3 : Preuve que λ=µ0sur F0.
Soit F∈ F0. On a bien entendu λ(F)µ0(F). Supposons maintenant que F⊂ ∪nFno`u Fn∈ F0. On
d´efinit une suite (En)nd’´el´ements disjoints de F0par :
E1=F1, En=Fn(k<nFk)c
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