Dossier scientifique
10 // Revue FRancophone des LaboRatoiRes - FévRieR 2012 - 439 bis
Tableau I – Indications des différents tests de diagnostic biologique de la dengue en fonction de la
situation épidémiologique.
Zone géographique Situation épidémiologique Tests à réaliser
Métropole
Zone Aedes +
Rare
En fonction de la date de début, PCR ou sérologie
Tests NS1 si situation épidémique (débordement des CNR)
Océan indien Sporadique En fonction de la date de début, PCR ou sérologie
Tests NS1 si situation épidémique
Antilles Hyper-endémique En fonction de la date de début, PCR ou sérologie
Guyane Hyper-endémique NS1 (insufsance infrastructure)
Source : Haut Conseil de la Santé publique [1].
Le diagnostic sérologique de la dengue peut se faire en
employant des trousses immunoenzymatiques, utilisant
pour la détection des IgM un ELISA de type capture, et
pour la détection des IgG un ELISA indirect. Le problème
majeur de ces techniques, que ce soit celles des tests com-
merciaux ou celles des laboratoires spécialisés type CNR,
est le manque de spécicité vis-à-vis des autres Flavivirus.
Il existe également sur le marché des tests immunochro-
matographiques (ICT, tests rapides). L’OMS a évalué en
2009 les principaux tests disponibles sur le marché pour
la détection des IgM dengue [4]. Les résultats montrent de
bonnes performances sur certaines trousses ELISA, mais
qu’aucun test ITC n’a de performance acceptable [2, 4]. Il
est important de souligner qu’un diagnostic sérologique
de dengue n’est jamais un diagnostic de certitude ; en
effet, il existe des réactions croisées systématiques pour
les IgG avec les complexes antigéniques de l’encéphalite
japonaise (auquel appartiennent le virus de l’encéphalite
japonaise, et le virus West Nile) et de l’encéphalite à tiques,
et pour les IgM des réactions croisées plus aléatoires et
plus faibles entre les antigènes dengue et West Nile. Il est
donc parfois nécessaire, pour conrmer la spécicité d’une
sérologie IgG positive, de mettre en œuvre les techniques
de séroneutralisation ou d’inhibition de l’hémaglutination.
Enfin, il est toujours difficile d’interpréter un résultat
sérologique en cas de dengue secondaire car les IgM sont
fugaces et les IgG rapidement augmentées.
Le choix de la technique diagnostique à mettre en œuvre
se fait en premier lieu selon la date de début des signes
cliniques : si le prélèvement est précoce (inférieur au 5e jour
suivant l’apparition des symptômes (J5)), ce sont les
méthodes directes, Rt-PCR et détection de l’antigène NS1,
qui sont indiquées. Entre J5 et J7, on utilisera les méthodes
directes et la sérologie. Après J7, seule la sérologie reste
indiquée. Interviennent ensuite dans le choix du test dia-
gnostique, la zone géographique dans laquelle la conta-
mination a eu lieu et dans laquelle se trouve le patient
(qui peuvent être différentes, par exemple les infections
symptomatiques après un retour de voyage) (tableau I). Et
enn, dans une zone géographique donnée, seront prises
en compte la situation épidémiologique, la disponibilité des
tests et la situation clinique du patient. Le Haut Conseil de
la Santé publique a déterminé en 2011 les algorithmes de
choix de la méthode diagnostique de dengue spéciques à
chacune des zones suivantes : métropole, Antilles-Guyane
et Océan indien [1].
5. Conclusion
Le diagnostic biologique de la dengue est complexe. Au
niveau des techniques de laboratoires, même si l’offre de
trousses de tests sérologiques est importante, leurs per-
formances disparates et les difcultés d’interprétations
des résultats nécessitent une attention particulière du
biologiste dans le choix de la trousse et dans l’interpréta-
tion des résultats. Les possibilités de diagnostic précoce
ont évolué ces dernières années avec l’apparition des
méthodes de détection de l’antigène NS1, permettant ce
diagnostic lorsque la RT-PCR ne peut être mise en œuvre
pour des raisons techniques ou de coût. En revanche, le
diagnostic par détection antigénique de la protéine NS1
présente aussi des limites avec un manque de sensibilité
dans certaines situations épidémiologiques. Le diagnos-
tic biologique de dengue ne devrait pas être entrepris en
l’absence d’un minimum d’informations cliniques et épi-
démiologiques, notamment la date de début des signes, la
notion de voyage ou le lieu de séjour pendant la période de
contamination, les antécédents de vaccinations à d’autres
Flavivirus. Sans ces informations, il sera souvent difcile
de conclure.
Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de
conflits d’intérêts en relation avec cet article.
Références
[1] Haut Conseil de la Santé publique. Stratégies de diagnostic biolo-
gique de la dengue. Collection documents. Janvier 2011.
[2] Hunsperger EA, Yaksan S, Buchy P, Nguyen VC, Sakaran SD, Enria
DA, et al. Evaluation of commercially available anti-dengue virus immu-
noglobulin M test. Emerg Infect Dis 2009;15:436-40.
[3] WHO. Dengue: guidelines for diagnosis, treatment, prevention and
control. New edition 2009.
[4] WHO. Diagnostic Evaluation Series n° 3, 2009.