lichéniennes mais aussi en peau normale, sur la partie distale
des membres ; l’état général peut être altéré.
[28]
L’aspect
histologique est celui d’un lichen plan avec décollement
dermoépidermique et bulle sous-épidermique comme dans une
pemphigoïde bulleuse. L’immunofluorescence directe (IFD) met
en évidence des dépôts linéaires de C3 et/ou d’immunoglobu-
line G (IgG) à la jonction dermoépidermique en peau saine et
en peau lichénienne.
[28]
Dans plus de 50 % des cas, on trouve
des anticorps circulants antimembrane basale qui se fixent sur
le versant épidermique sur peau clivée.
Le diagnostic différentiel de cette affection est le lichen plan
bulleux, au cours duquel les bulles se forment du fait de
l’intensité de l’inflammation lichénoïde et de la dégénérescence
de la basale.
D’un point de vue physiopathologique, on suppose que les
lésions des cellules basales générées par l’infiltrat lichénien
démasquent des déterminants antigéniques ou créent de
nouveaux antigènes, induisant la formation d’autoanticorps et
l’apparition d’une dermatose pemphigoïde-like.
[29]
En immu-
nomicroscopie électronique, les produits de la réaction immune
siègent le plus souvent au niveau de la lamina lucida, comme
l’antigène majeur de la pemphigoïde bulleuse. L’immunoblot
retrouve le plus souvent des antigènes de la pemphigoïde
bulleuse (230 kDa et 180 kDa), cependant, un antigène de
200 kDa a également été détecté dans deux cas.
[28]
Des études
récentes rapportent que les anticorps du sérum de lichen plan
pemphigoïde réagissent avec un épitope de l’antigène BP
180 différent de celui de la pemphigoïde bulleuse.
[30]
Quelques
observations de lichen plan pemphigoïde médicamenteux ont
été rapportées, avec la cinnarizine, le furosémide et la simvas-
tatine ; la PUVAthérapie et certains inhibiteurs de l’enzyme de
conversion de l’angiotensine ont été rapportés.
[31-34]
Particularités du lichen plan
chez l’enfant
[8, 19]
Le lichen plan de l’enfant est rare. Moins de 2 % des cas de
lichen sont diagnostiqués avant 20 ans. Quelques particularités
sémiologiques sont à noter : une prédominance chez les enfants
à peau pigmentée, une disposition linéaire suivant les lignes de
Blaschko et des formes vésiculobulleuses plus fréquentes, une
atteinte muqueuse plus rare estimée entre 6 et 25 % des cas
contre 75 % chez l’adulte. L’évolution est identique à celle de
l’adulte. Des cas rapportés après vaccination contre l’hépatite B
font discuter le rôle de la stimulation antigénique dans l’induc-
tion de la réaction lymphocytaire cytotoxique.
Lichen médicamenteux (Fig. 11)
Les principaux médicaments responsables figurent dans le
Tableau 1.
[35, 36]
D’authentiques dermites de contact lichénoï-
des ont aussi été rapportées après utilisation de topiques
(encadré). Les tests épicutanés reproduisent une réaction
lichénoïde ou eczématiforme.
[35]
Le délai entre l’introduction du médicament et l’éruption
varie de 1 semaine à quelques mois (2 mois à 3 ans pour la
D-pénicillamine, 1 an pour les b-bloquants,3à6mois pour les
inhibiteurs de l’enzyme de conversion).
[35]
Cliniquement, on peut individualiser quelques particularités
du lichen médicamenteux : coexistence de lésions psoriasifor-
mes ou eczématiformes, absence des stries de Wickham, lésions
photodistribuées symétriquement sur les avant-bras et les
extrémités avec une évolution plus fréquente vers l’hyperpig-
mentation, atteinte muqueuse moins fréquente. Au plan
histologique, la présence d’éosinophiles dans le derme oriente
vers ce diagnostic.
[37]
La régression des lésions survient dans un délai variable après
l’arrêt du médicament (1 mois pour certains b-bloquants, plus
de 1 an pour les sels d’or). Des régressions et une évolution par
poussées successives ont également été décrites en cas de
poursuite du médicament responsable.
[35]
. Il semble exister un
lien entre lichen buccal isolé et amalgames dentaires contenant
du mercure.
[38]
Deux hypothèses pourraient expliquer cette
association : un rôle traumatique de l’amalgame avec effet
Koebner ou bien une réaction d’hypersensibilité retardée,
comme en témoignerait la positivité de patchs tests. Après
ablation de l’amalgame, une amélioration significative des
lésions est observée.
■Diagnostic différentiel
[1, 3, 4]
En cas de lésions typiques, le diagnostic ne se discute qu’avec
les éruptions lichénoïdes médicamenteuses. Les lésions moins
typiques peuvent être confondues avec des verrues planes, une
Figure 11. Toxidermie lichénoïde aux sels d’or (collection du profes-
seur Patrice Morel).
Tableau 1.
Médicaments responsables de lichen médicamenteux.
[35, 55]
Antihypertenseurs
–b-bloquants : labétalol, practolol, propranolol
– Inhibiteurs de l’enzyme de conversion : captopril, énalapril
– Inhibiteurs calciques : cinnarizine, flunarizine, nifédipine
– Diurétiques : chlorothiazide, hydrochlorothiazide, furosémide, spiro-
nolactone
– Autres : méthyldopa
Anti-infectieux
– Antituberculeux : éthambutol, isoniazide, acide para-amino-
salicylique, streptomycine
– Autres : dapsone, déméclocycline, griséofulvine, kétoconazole, lévami-
sole, tétracycline
Anti-inflammatoires non stéroïdiens
Acide acétylsalicylique, flurbiprofène, ibuprofène, indométacine, na-
proxène
Antimalariques
Chloroquine, pyriméthamine, quinacrine, quinidine, quinine
Psychotropes/neuroleptiques
Carbamazépine, lévomépromazine, lorazépam, méthopromazine
Hypoglycémiants
Chlorpropamide, metformine, tolazamide, tolbutamide
Antimitotiques
Hydroxyurée, 5 fluoro-uracile
Métaux lourds
– Arsenic, bismuth, mercure
– Sels d’or
Autres
Allopurinol, leflunomide, D-pénicillamine, mercaptopropionylglycine,
probénécide, produit de contraste iodé, trihexyphénidyle
Lichen plan et dermatoses lichénoïdes
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98-525-A-10
5Dermatologie