L’escroquerie : Définition : L’escroquerie est le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. De son côté le législateur marocain définit l’escroquerie comme suite : « Le fait par toute personne d’induire astucieusement en erreur une personne par des affirmations fallacieuses, ou par la dissimulation des faits vraies ou d’exploiter astucieusement l’erreur ou se trouvait une personne et la déterminer ainsi à des actes préjudiciables à ses intérêts ou a ceux d’un en vue de se procurer ou de procurer un profit pécuniaire illégitime » l’article 540 du code pénal I. Les éléments constitutifs : A. L’élément matériel : L’élément matériel consiste à employer des moyens frauduleux, pour obtenir un résultat qui est celle de provoquer la remise au préjudice de la victime ou du tiers pour en tirer profit. Mais cela saurait suffire car il faut un lien de causalité entre les manœuvres et le résultat. a) L’emploi de moyens frauduleux L’art 540 C.P ne définit pas l’escroquerie mais se contente seulement d’énumérer les manœuvres frauduleuses qui sont au nombre de trois : Les affirmations fallacieuses Dissimulation de fait vrais Exploitation astucieuse de l’erreur d’une personne. Affirmations fallacieuses : Le mensonge, écrit ou verbal, émanant de l’escroc lui-même, ne suffit pas à constituer la manœuvre frauduleuse, même s’il est déterminant de la remise. Il n’y a manœuvre que si ce mensonge est conforté et étayé par des éléments matériels extérieurs destinés à lui donner force et crédit. Ainsi l’escroc étaye son mensonge par : La production d’écrits, de pièces ou de documents contrefaits ou falsifiés par l’escroc lui-même, ou l’intervention de tiers. A l’appui de ses allégations mensongères, le coupable utilise des lettres émanant prétendument de tiers ou adressées à des tiers, des certificats fournis par des tiers, des factures fictives à l’appui d’une demande de règlement d’indemnité présentée à une compagnie d’assurance, des documents ou des bilans établissant des bénéfices exagérés en vue de céder un fond de commerce au-delà de sa valeur. Organisation d’un cadre simulé d’activité. L’escroc aménage le milieu dans lequel se déroulera son activité. Citons l’organisation, vraie ou totalement fictive, d’une société en vue de provoquer des versements de fonds, l’établissement d’un bureau en vue d’obtenir aisément la livraison de marchandises. L’usage de faux nom ou d’une fausse qualité. On décide qu’il y a usage d’un faux nom lorsque le délinquant a changé, altéré ou modifié le nom qu’il possède en réalité, ou même le prénom qu’il possède à l’état civil. Par exemple le coupable a usurpé le nom d’une tierce personne, parfois même avec son consentement, ou use d’un nom imaginaire. Dissimulation de faits vrais : L’escroquerie par manœuvre suppose que l’escroc accomplisse des actes positifs mais aussi négatifs pour tromper la victime. Ainsi la dissimulation du prévenu de faits vrais constitue une manœuvre. En outre, la dissimulation doit être déterminante de la remise. A titre d’exemple : une personne vend un bien en gage sans avertir l’acheteur, une personne dissimule ses revenus pour bénéficier de l’aide judiciaire. Exploitation astucieuse de l’erreur d’autrui : L’erreur de la victime et la personne qui exploite cette erreur pour en abuser et profiter de ses actes préjudiciels à ses intérêts pécuniaires et non pécuniaires constitue également une escroquerie. De là, il faut la réunion de deux conditions : L’erreur de la victime qui consiste à des faits irréels, qui était un facteur déterminant de la remise, peu importe que l’erreur émane de la victime elle-même ou d’un tiers. L’exploitation frauduleuse du prévenu de cette erreur. Cela suppose que l’escroc adopte une attitude active et accomplisse des actes positifs pour tromper sa victime. b) L e résultat : Le délit est constitué aussi par le fait que le prévenu a provoqué la remise au préjudice de la victime ou du tiers. Cela ressort clairement de l’art 540 C.P .ainsi rédigé : « la détermine ainsi à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers. ». L’escroquerie étant un délit contre la propriété, on ne saurait escroquer une personne ou une idée. Mais tout objet corporel ou incorporel peut donner lieu à l’escroquerie. Pour que l’infraction soit consommée selon l’art 540 C.P , il suffit que la victime prend des actes préjudiciables à ses intérêts ou aux intérêts des tiers même si le prévenu n’ait pu parvenir aux buts visés par ces manœuvres frauduleuses. c) Lien de causalité : l’élément matériel du délits n’est réalisé que s’il y a un rapport de cause à effet entre les manœuvres frauduleuses et le résultat, c’est_à_dire que ces manœuvres étaient la cause déterminante des actes préjudicielles pour la victime ou un tiers . ainsi le délit n’est constitué que si : Les actes préjudiciels ont été provoqués par les moyens frauduleux du prévenu. De là, ne constitue pas une escroquerie le fait que la remise n’est pas provoquée par les manœuvres du prévenu mais émane de la volonté, saine et consciente, de la victime, et que seulement l’individu en profite pour prendre la fuite Les manœuvres frauduleuses ont été la cause déterminante des actes préjudiciables de la victime à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d’un tiers. B. L’élément intentionnel : L’escroquerie est un délit intentionnel qui suppose donc, chez son auteur, la volonté d’obtenir la remise des objets par des moyens qu’on sait frauduleux. L’intention coupable est déduite des manœuvres frauduleuses employées. Elle inclut toute manœuvre appuyée par des faits extérieurs pour surprendre la bonne foi d’autrui pour la faire tomber dans l’erreur, la conduire à remettre une valeur, une chose…. Sans contrepartie. Les mobiles sont indifférents. Escroquer pour aider une œuvre charitable, pour se faire rembourser de l’argent prétendument volés, demeure une escroquerie. II. La répression : L’escroquerie est puni d’un à cinq ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 à 5000 dhs. Or l’avant-projet du code pénal prévoit une amende de 5000 à50000 dhs. L’immunité familiale prévue pour le vol par les art 534 à 536 C.P.est étendue à l’escroquerie par l’art 541C.P. La circonstance d’appel au public porte la peine au double et la maximum de l’amende à 100000dhs contre celui « ayant fait appel au public en vue de l’emission d’action, obligation, bons , parts ou titre quelconques, soit d’une société, soit d’une entreprise commerciale ou industrielle ». Trois composantes s’articulent dans cette circonstance aggravante : il faut un appel au public, résultant de sollicitations adressées aux épargnants par tous procédés de publicité (annonces, prospectus, visites de démarcheurs). Cet appel doit tendre au placement de toute valeur mobilière quelconque. Enfin, l’escroquerie doit se produire au cours de l’appel délictueux ou à son occasion, par exemple par la constitution de sociétés fictives, la publication de faut bilan, la distribution des dividendes fictifs, la circonstance est de nature réelle, et non personnelle.