COMPLIANCE ET ÉTHIQUE DES AFFAIRES

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MANAGEMENT & SYSTÈMES DINFORMATION
ISb
REVUE BANQUE
STRATÉGIE
Compliance et éthique
DES AFFAIRES : LES LEVIERS
DUNE NOUVELLE GOUVER
NANCE DENTREPRISE (l/2)
Directeur Groupe
Conformi et
Éthique des affaires
Dans ce premier article, l'auteur montre que la compliance
est encore trop souvent réduite à une conformité
limitée à la vérification de processus, alors que
la compliance mais aussi léthique des affaires sont
en réalité intimement liées à la gouvernance de lentreprise.
Cela implique que les entreprises et les dirigeants intègrent
dans leurs prises de décisions le paramètre du risque
de non-conformité et son corollaire, le risque de réputation.
Dans un deuxième article, à paraître dans le prochain
numéro, l'auteur détaillera les leviers à mettre en place
financier et bancairefi]. Les deux
démarches se sont développées il y a
dix ans, en parallèle, et aujourd’hui,
au moment de souffler les bougies,
il apparaît nécessaire de prendre
conscience quen réalité elles sont
toutes les deux étroitement liées.
Ce mariage est encore renforcé par
la prise de conscience de la néces
sité de mettre en œuvre de bonnes
pratiques déthique des affaires, au
AG2R La Mondiale
Matmut
Psident du Club
Recherche/Entreprise
Cercle dÉthique
des Affaires
Professeur en droit/
compliance
à
l’École
Supérieure de
la Banque Paris
et en master 2
droit des affaires,
Université Libre
de Lille
Revue Banque
poury parvenir.
1 y a dix ans en 2008, le monde entrait
dans ce qu’il était convenu dappeler
la crise bancaire et financre. Cette
crise mondiale a conduit plusieurs
établissements financiers américains
à être plas en liquidation de paie
ment, comme le plus célèbre d’entre
eux, Lehman Brothers.
Ce triste anniversaire a permis tou
tefois de faire émerger deux dyna
miques, celle de la gouvernance et
celle de la compliance, dans le secteur
[1] Laccord de Bâle III vient compléter l’accord
dele II ; il a été publié en décembre 2010.
Il constitue la réponse du Comité de Bâle à la crise
financière de 2007-2008, avec pour objet cfë
renforcer la réglementation, le contrôle et la gestion
des risques dans le secteur bancaire. La directive
Solvabilité 2, adoptée en 2009, modifie en
profondeur le régime existant en assurance. Dans le
prolongement de la réforme Bâle II pour le secteur
bancaire entrée en vigueur en 2008, un nouveau
cadre réglementaire prudentiel au niveau européen
est défini pour les assureurs.
regard des nouvelles attentes de la
socté civile et des parties prenantes.
En parallèle, dautres entreprises, quel
que soit leur secteur dactivité, sont
confrones dès leur cation, à l’obli
gation desoudre des problèmes de
compliance dans le cadre de leur acti
vité en France ou à linternational. Il
sagira par exemple du respect des
embargos ou dans le domaine de
léthique des affaires du contrôle de
la chaîne de sous-traitance pour éviter
par exemple le travail forcé ou celui des
enfants. Cela pourra encore prendre
la forme dune prise en compte de
limpact de lactivi de lentreprise
sur lenvironnement.
I. La com pliance :
u n e v a leu r a jo u tée
p o u r l ’e n tr ep r ise
9 N°832
par des typologies dexigence très
différentes, dune part la définition
du risque de non-conformi, dautre
part par linjonction de maîtriser ces
risques pour lentreprise par des dis
positifs de contrôle, enfin par les
missions quil convient de confier
au directeur de la conformité. Mais
à aucun m om ent le législateur ne
prend le risque de dire ce que l’en
treprise doit entendre et comprendre
par compliance ou conformité, il faut
en revanche juste quelle le soit.
L'APPROCHE RÉGLEMENTAIRE
DE
LA
CONFORMITÉ
À titre d’exemple, dans le secteur de
la banque et des services dinvestis
sement, cest larrêté du 3 novembre
2014(2] qui encadre le contrôle
interne des entreprises qui définit
le risque de non-conformité (article 10
(p)), puis fixe lobligation de vérifier
la conformité des activis à travers
un dispositif de contrôle interne
(article n ), enfin confie au respon
sable du contrôle de la conformité le
soin de veiller au caractère adap des
dispositifs et procédures (article 72).
[2] JORF n° 0256 du 5 novembre 2014, p. 18598,
texte n° 10, Arrêté du 3 novembre 2014 relatif au
contrôle interne des entreprises du secteur de la
banque, des services de paiement et des services
d'investissement soumises au contrôle de l'Autori
de contrôle prudentiel et de résolution.
En assurance, c’est le décret 2015/513
du 7 m ai 2015 [3] qui définit la fonc
tion de vérification de la confo rm ité
p a r so n ob jet qui e st de « conseiller le
directeurgénéral ou le directoire ainsi que
le conseil d'administration ou le conseil
de surveillance, sur toutes les questions
relatives au respect des dispositions légis
latives, réglementaires et adm inistra
tives afférentes à l'accès aux activités de
l'assurance et de la réassurance et à leur
exercice. Cette jonction vise également à
évaluer l'im pact possible de tout chan
gement de l'environnementjuridique sur
les opérations de l'entreprise concernée,
ainsi quà identifier et évaluer le risque
de conformité » (article R. 354-4-1 du
C ode des assu ran ces et R. 356-48-1
du C ode de la m utu alité).
La loi Sapin 2 sur la corruption [4]
prolonge lextension de la démarche
de compliance dans lentreprise dans
la mesure où cette nouvelle régle
mentation rappelle très clairement
dans son article 17 que lobligation
de respecter la réglementation et
donc dêtre conforme repose sur les
dirigeants de lentreprise, lesquels
[3] JORF 0108 du 10 mai 2015, p. 7986, texte,
n° 5 Décret n° 2015-513 du 7 mai 2015 pris pour
l'application de l'ordonnance 2015-378 du
2 avril 2015 transposant la directive 2009/138/CE
du Parlement européen et du Conseil sur l'accès
aux activités de l'assurance et de la réassurance
et leur exercice (solvabili 2).
[4] JORF0287 du 10 décembre 2016, texte 2,
loi 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la
transparence, à la lutte contre la corruption et à
la modernisation de la vie économique (1).
La compliance, concept anglo-saxon,
est très souvent traduite en France
par le terme de « conformité ». La
terminologie anglaise recouvre en
réali une dynamique que sa tra
duction française n’exprime pas. La
compliance n’est pas réglementaire
ment définie en tant que telle ; elle
est souvent appréhendée à travers
les finalités quelle poursuit.
Cette approche de la compliance se tra
duit dans les textes réglementaires
Revue Banque
SYSTEMES D INFORMATION
((L a compliance n’est pas
glementairement définie
en tant que telle; elle est
souvent appréhendée
à travers
les
finalis
quelle
poursuit. 99
« sont tenus de prendre les mesures destinées
à prévenir et à détecter la commission, en
France ou
à l'étranger, d é fa its de
corrup
tion
ou de
trafic d'influence ».
Sont ainsi listés un certain nom bre
de m esures, telles que m ettre en
place : un code de conduite ; un dis
positif d'alerte (tuhistleblouring) ; une
cartographie des risques ; des procé
dures d'évaluation de la situation des
clients, fournisseurs de prem ier rang
et interm édiaires ; des procédures
de contrôles com ptables, internes
ou externes ; un disp ositif de for
m ation ; un régim e disciplinaire ;
enfin, un d isp ositif de contrôle et
d'évaluation interne des m esures
m ises en œuvre.
[ 5 ] P r é s id e n t d e F o rs id e s , P a t r ic k T h o u r o t a
c o n s a c r é t r e n t e a n s d e s a c a r r iè r e à l ’ a s s u r a n c e ,
c o m m e d ir e c t e u r à la C O F A C E , d ir e c te u r g é n é r a l d e
P F A ( G r o u p e A t h é n a ) , d i r e c t e u r g é n é r a l t e c h n iq u e
c e n tr a l d u g r o u p e A X A , d i re c t e u r g é n é r a l d e
Z U R IC H F r a n c e e t d i r e c t e u r g é n é r a l d é lé g u é p u i s
c o n s e il le r d u p r é s i d e n t d u g r o u p e S C O R . P a tr ic k
T h o u r o t e s t é g a le m e n t p r o f e s s e u r a s s o c ié a u C N A M
e t c o n s u lta n t e n r é a s s u r a n c e , d e p u is 2 0 1 0 .
accordé en novembre 2018, « la régula
tion s'immisce dans toutes les composantes
de la chaîne de valeur, et par conséquent,
implique le contrôle de la com pliance
dans un nombre croissant de domaines :
le consumérisme et la DDA, la protection
des données personnelles, viennent com
pléter et renforcer les sujets plus tradition
nels de LCB/FT et de la loi Eckert. C'est le
territoire nouveau de lafonction. Mais ce
n'est pas tout: lagouvernanceetlagestion
des Conseils, demain, le respect de gles
dinvestissements EGS (environnement,
gouvernance, society), voire les règles en
matre de ressources humaines (non-dis
crimination, harcèlement, égalité hommes/
femmes, mixité et diversité), et enf n, les
gles fiscales, avec
une
logique complexe
de gestion du risque et de com pliance
(faut-il avoir une attitude de non-risque
ou une démarche d'optimisation?). Cela
permet de relier la conformité aux ques
tions éthiques. »
UN PERIMETRE
D'INTERVENTION TOUJOURS
PLUS VASTE
Il appartient donc aux entreprises
de se doter d ’une direction confor
mité pour faire face à ces nouveaux
enjeux. L’utilité est quasi identique
que les entreprises soient soum ises
à une obligation de créer la fonction
com m e dans le dom aine financier
de la banque et de lassurance ou
q u elles d écident p ar elle-m êm e
de la créer afin de contribuer à une
meilleure m aîtrise de ces risques au
regard de son activité notam m ent à
linternational.
Comm e Patrick Thourotlf] le sou
lignait dans le cadre d’un entretien
DEFINIR LA COMPLIANCE
La définition de la compliance que je
propose pourrait donc être la sui
vante : c’est une culture qui consiste
à intég rer d an s le pro ce ssu s de
gouvernance d’une entreprise une
connaissance adaptée des risques de
non-conform ité afin de prévenir la
survenance dun risque de réputation
ou de sanctions, induisant des pertes
significatives po ur l’entreprise. À
cette fin, la direction générale confie
à une direction de la conform ité la
m ission de la conseiller quant aux
m esures à pren dre pou r adapter
lentreprise aux évolutions réglemen
taires ou remédier aux non-conformi
tés avérées. Le directeur conformité
doit disposer de moyens suffisants,
de l’autorité, de la com pétence, de
lindépendance et de lhonorabilité
pour la conduite de sa m ission. Il
propose, une ou plusieurs fois par
an, un programme de conformité qui
intègre égalem ent les sujets pros
pectifs à traiter. Il est linterlocuteur
privilég des autorités de contrôle,
des opérationnels et de la direction
générale pour toutes m esures rele
vant d’un risque de non-conformité
à des dispositions législatives, régle
m entaires, de norm es profession
nelles com m e déontologiques ou
de norm es internes obligatoires. Il
peut déléguer dans lentreprise une
partie de ses m issions à condition
d’en conserver le contrôle.
Cette définition est issue du croi
sem ent d une pratique profession
nelle, d ’une activi d’enseignem ent
de la compliance et de la confro n
tation d ’idées au sein d ’asso cia
tions professionnelles. Elle perm et
de com prendre que la compliance,
contrairem ent à ce que pourrait lais
ser entendre le m ot de conform ité,
n ’est pas réductible à une technique
ou une nouvelle matière juridique que
serait un droit de la compliance. En
effet, la compliance dans l’entreprise
n ’a strictem ent aucun rapport avec
la mise en œuvre dun « droit de la
compliance » que propose Marie-Anne
Frison Roche [6]. Nous som m es très
loin de la simple exécution de process
qui transform eraient les collabora
teurs de l’entreprise en m achines.
UN MODE DE PREVENTION DU
RISQUE DE NON-CONFORMITÉ
Ensuite, sans nier que la conform ité
comm e objet de recherches peut être
considérée com m e « une technique de
gestion (au double sens
de façon
de traiter un
problème et de mode dorganisation dune
entreprise) » comme le souligne Hugues
Bouthinon-Dum as [7], m ais elle est
aussi et surtout un mode de préven
tion du risque de non-conform ité
intim em ent associé aux décisions
à prendre et donc à la gouvernance
de l’entreprise.
[ 6 ] M . - A . F r is o n - R o c h e , «
Je p ense q ue l'E u ro pe
p e u t e t d o it se co n struire
s u r u ne u is io n
hum a n is te
de la co m p lia n ce
» , e n t r e t ie n a v e c O liv ia D u f o u r ,
in L es P e tite s A f fi c h e s n ° 2 2 2 , n o v e m b r e 2 0 1 8 ,
p p . 4 - 7 . F r is o n - R o c h e , « Le d r o it d e la c o m p lia n c e » ,
W o r k in g
Paper,
2 0 1 6 : h t t p : / / m a f r . f r / f r /a r t i c l e /
le - d r o i t- d e - la - c o m p l ia n c e / .
[ 7 ] B o u th i n o n - D u m a s H u g u e s , « L a c o m p lia n c e
u n e i n f la t io n n o r m a t iv e a u c a r r é » , C a h ie r s p é c ia l
« In f la t io n n o r m a t iv e : q u e l m a n a g e m e n t d a n s le s
e n t re p r is e s e t le s o r g a n is a t io n s p o u r y f a i r e f a c e » ,
M a n a g e m e n t
& A u e n ir , à p a r a î tr e .
Revue Banque n° 832 mai 2019
Ainsi, comme le souligne Patricia
Foucaud[8] pour lentreprise Biogen :
« Au-delà de son acception juridique de
conformité'aux
exigences
voulues par les lois,
les règlements, les codes, et les directives, la
compliance ambitionne
de
protéger len
treprise contre tout non-respect des normes
internes et externes et de ses ualeurs. Elle a
pour objectif deuiter les consequences défa-
uorables pour lentreprise et ses dirigeants,
tantfnancières que de responsabilité' civile
ou penale, ou encore datteinte à limage et
à la réputation... La compliance est un
état desprit qui promeut le sens de la res
ponsabilité' indiuiduelle et collective au sein
des entreprises et des organisations. Cest
une culture du respect des règles pour assurer
une performance plus solide et pérenne. »
IL Léthique des affaires
est intimement liée
à
la compliance
Le Cercle déthique des affaires,
dans son Manifeste pour une éthique
des affaires [9], propose la définition
suivante de léthique des affaires :
« Léthique des affaires est contingente et
subjective. Elle définit ici et maintenant
le comportement quadopte ensemble un
groupe dindividus dans un temps
et
un
espace
donnés. Elle porte sur
les
arbitrages
faits par les acteurs économiques pour choi
sir ce qui est bon ou mauvais au dévelop
pement durable de l'entreprise, prenant en
considération les demandes de l'ensemble
des parties prenantes de l'entreprise (action
naires, clients, salariés, fournisseurs, société
civile, etc.). En
effet,
aujourdhui chaque
décision prise derrière les portes doses des
Conseil dAdministration est inévitablement
soumise aux regards et aux commentaires
des parties prenantes. Léthique dit ce qui
est bon ou mauvais pour une organisation,
mais na pas vocation à définir le Bien et
le Mal. » Cette définition montre que
[8] Foucaud Patricia, « Comment fédérer les
collaborateurs à la compliance ? », Linkedin
Published 2017.
[g] https://www.ie-ihedn.org/wp-content/
uploads/20i5/o5/Manifeste-%C3%Agthique_CEA_
Dec14_VF2.pdf.
la manière dappréhender l’éthique
des affaires peut varier dune entre
prise à lautre.
Léthique des affaires est le partenaire
indispensable à la mise en œuvre
dune gouvernance efficace dans fen
il
La compliance est
un état d’esprit qui promeut
le sens de la responsabilité
individuelle
et collectine
au sein des entreprises
et
des
organisations.
C’est une culture du respect
des gles pour assurer
une performance plus
solide et pérenne.
JJ
treprise. En effet léthique des affaires
dune entreprise repose dabord sur
les dirigeants et les valeurs de l’entre
prise quils incarnent. À ce titre, ils
doivent décider des pratiques quils
souhaitent voir mises en œuvre et
du niveau dexigence éthique atten
due dans le cadre de la réalisation
des activis de l’entreprise. Cest
en effet le dirigeant qui dune part
à travers lexemplari de son com
portement, dautre part des choix
politiques qui seront pris vis-à-vis
de ces deux enjeux que sont la com
pliance etléthique des affaires, ainsi
que du choix du rattachement de la
direction conformité et éthique des
affaires dans l’organigramme. Enfin
plus concrètement ce sera les choix
daffectation de budgets ou pas sur
des projets réglementaires et sur
la taille de léquipe en charge de la
conformi et l’éthique des affaires,
qui crédibilisera ou pas la compliance
dans son entreprise.
Une entreprise sans politique
déthique des affaires sera peu encline
à favoriser la mise en œuvre dune
fonction compliance efficace dans son
entreprise. En revanche, une équipe
dirigeante tournée vers le respect de
règles éthiques fortes afin de favo
riser un développement durable de
lentreprise pour ses collaborateurs,
ses clients ou ses parties prenantes,
verra un intérêt évident à disposer
dune direction compliance forte pour
la conseiller sur le niveau de risque de
conformité possible de telle ou telle
décision et l’impact envisageable en
termes de réputation.
Le couple compliance et éthique des
affaires ne doit donc pas être réduit
à un corpus de règles à mettre en
œuvre, qui serait le meilleur moyen
de faire de ces deux leviers un outil
pour générer des contraintes régle
mentaires supplémentaires dans
lentreprise.
III. Gouvernance,
compliance et éthique
des affaires la nouvelle
alchimie
La notion de gouvernance, comme
celle de compliance sont des concepts
anglo-saxons qui renvoient aux condi
tions dune bonne organisation et
de bonnes pratiques des instances
dirigeantes de lentreprise. La gou
vernance permet de réfléchir aux diffé
rences de forme que peuvent prendre
les organes de direction de l’entreprise
quant à la répartition des pouvoirs
par exemple entre le président de
Conseil d'administration et le direc
teur général ou quant au choix de la
nature des organes de contrôle de la
société (Conseil d'administration vs
Conseil de surveillance).
Dans le domaine de lassurance[io],
cest la réglementation avec la direc
tive européenne Solvabilité 2 [n] qui
[10] Silva Do Carmo, « Le cadre juridique
européen de la conformité dans les organismes
dassurance : de lobligation de conformi à la
gestion prudentielle du risque de conformi » RTDF
n°20i7.
[n ] Directive 2009/138/CE du Parlement euroen
et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l'accès
aux activités de l'assurance et de la réassurance
et leur exercice (solvabilité 2).
MAI 2019 N° 832 Revue Banque 81
MANAGEMENT & SYSTÈMES D INFORMATION
lïli
REVUE BANQUE
fixe le cadre de la gouvernance d’en
treprise. Et lAutorité de Contrôle
Prudentiel et de Résolution (ACPR)
précise notammentles contours des
relations entre la fonction confor
mi et la gouvernance dentreprise
dans une notice du 2 novembre
20l6[l2].
Comme le souligne Daniel Tri-
cot[i3] : « L'émergence de la notion
de gouvernance est allée de pair
avec la
recherche de bonnes pratiques d'entreprise,
essentielles pour accroître 1'effcacité de
celle-ci. Il s'agit alors de rechercher la créa
tion de valeur pour les parties prenantes
de l'entreprise via le développement d'un
capitaljrnancier, mais aussi humain. »
À titre d’exemple, cela conduit sor
mais les directions des entreprises à
s’interroger sur les bonnes pratiques
à mettre en œuvre dans le cadre de
la transparence de la munération
des dirigeants, ou encore à mettre
en œuvre des gles pour éviter la
survenance des conflits d’intérêts et
des bonnes pratiques à adopter pour
les rer ou encore des principes
dintégrité auxquels l’entreprise est
attachée qui pourront être affichés
dans un code déthique des affaires.
LA G O UV E R N A N C E FACE
AU RISQ UE DE RÉP U TA TIO N
Cela implique donc une nécessaire
prise de conscience de la gouver
nance quune décision ne peut plus
reposer sur le seul arbitrage de la
rentabilité et de la recherche d’un
équilibre entre satisfaction du client
et maîtrise des risques financiers
pour l’entreprise. Il convient désor
mais dajouter une autre dimen
sion, avec le même poids que les
deux premières, celle du risque de
non-conformité et son corollaire
immédiat le risque de réputation.
Cette prise en compte du couple com
[12] https://acpr.banque-france.fr/sites/default/
files/2ûi6iio2-notice_gouvernance-post-ccap_o.
pdf.
[13] Daniel Tricot, « Gouvernance et compliance,
les nouveaux défis de l'entreprise », 20 janvier 2017,
Affiches parisiennes.
pliance-éthique des affaires apparaît
nécessaire :
- dune part, parce que les clients
et la société civile attendent de leurs
entreprises qu’elles soient éthiques
ce qui implique au minimum de res
pecter la réglementation ;
- d’autre part, parce que le risque de
putation est extrêmement sensible
pour une entreprise avec la mondia
lisation et l’échange d’informations
en temps réel avec les nouvelles
technologies et les réseaux sociaux ;
-enfin, parce que les sanctions
financières pronones par les auto
rités de contrôle sont de plus en
plus lourdes pour les entreprises ;
a
Une entreprise sans politique
d’éthique des affaires sera peu
encline à favoriser la mise en
œuvre dune fonction compliance
efficace dans son entreprise.
9
9
- et que la responsabilité person
nelle des dirigeants sera dans les
années à venir très certainement
recherchée de plus en plus faci
lement.
DES S A N C TIO N S DE PLUS
EN PLUS LO URDES
Ainsi, lAutorité de contrôle et de
résolution (ACPR) a prononcé en
2018, dix décisions de sanctions
dont neuf portent sur la défaillance
des dispositifs de lutte contre le
blanchiment de capitaux dassu
reurs avec des sanctions pronones
jusqu’à50 millions d’eurosfiq]. Et
dès qu’une entreprise effectue des
transactions en dollars, elle sex
[14] Décision de la Commission des sanctions
du 21 cembre 2018 à légard de La Banque
Postale, procédure n° 2018-01 (gel des avoirs)
- tablissement de crédit, lutte contre le
blanchiment des capitaux et le financement
du terrorisme).
pose aux foudres de l’administration
américaine, par exemple en cas de
non-respect des embargos. Ladmi
nistration américaine sappuie en
effet sur le principe dextraterrito
riali des lois américaines qui lui
permet de sanctionner des entre
prises étrangères commerçant avec
des pays sous embargo, dès lors
quelles échangent également avec
les États-Unis ou utilisent le dollar
dans leurs transactions. Cest au
nom de ce principe que la banque
française BNP-Paribas s’est vu infli
ger une amende de 8,9 milliards de
dollars [15].
Quant à la responsabilité person
nelle des dirigeants, elle est par
fois expressément pvue comme
dans le cadre de la loi Sapin 2 sur
la corruption dé citée, où le diri
geant doit sous peine de sanctions
administratives et pénales, prendre
des mesures desties à prévenir et
à détecter les faits de corruption ou
de trafic d'influence. La loi Sapin
2 vise les dirigeants suivants : les
présidents, directeurs généraux
et gérants (art. 17, I-al. 1) ; selon
les attributions qu'ils exercent, les
membres du directoire des sociétés
anonymes (SA) (art. 17, I-2°)[i6].
À titre dexemple, Vincent Bollo a
été placé en garde à vue pour « cor
ruption d'agents publics e'trangers » le
24 avril 2018. Il a é convoq pour
des soupçons de corruption pesant
sur les conditions d'obtention de
concessions portuaires au Togo et
en Guie. Plus récemment, c’est
Carlos Ghosn, président de Nissan,
qui estsoupçonné par la justice japo
naise d'avoir mino ses revenus sur
5 ans dans des documents remis aux
autorités boursières japonaises, et
d'abus de confiance.
[15] http://www.rfi.fr/economie/2018050g-
sanctions-iran-entreprises-concernees-risques-
encourus.
[16] « À quels dirigeants la lutte contre la corruption
incombe-t-elle dans les SA et SAS ? », Communication
Ansa, comité juridique n° 17-057 du 6 décembre 2017:
https://www.efl.fr/actualites/affaires/societes/details.
html?ref=ui-i272ffi4e-5a22-4f5d-8dgf-fofd7342i2ca.
Revue Banque n° 832 mai 2019
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