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Sels végétaux traditionnels au Rwanda et en Afrique de l’Est

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Sels végétaux traditionnels au Rwanda et en Afrique de l’Est
Un produit et un savoir-faire à redécouvrir
La consommation de sels végétaux étaient autrefois commune en Afrique. Ces sels
ont disparu de l'alimentation au profit des sels marins raffinés. Eu égard à
l’augmentation des troubles de santé induit par la surconsommation de chlorure
de sodium, la valeur des sels traditionnels mérite d’être redécouverte
De part sa situation géographique, les besoins en sel des anciens Rwandais ne pouvaient être
satisfaits par du sel provenant des côtes océaniques. Vers l’orient, il faut parcourir 1100 km, à vol
d’oiseau, pour atteindre l’Océan Indien. Vers l’occident, 2000 km séparent le pays des milles
collines de la côte atlantique.
Les quelques salines locales ne pouvaient pas non plus suffire aux besoins de la population. Il
existait certes un commerce régional du sel provenant des salines de Kibero près du lac Rwicanzige
(renommé Albert par l’explorateur Henri-Morton Stanley), et des salines de Katwe au bord du lac
Mwitanzige (Alias Edouard), mais cette précieuse matières ne pouvaient être acquise que par des
notables.
Salines de Katwe et porteurs de sel 1907-1908, Mission Mecklenbourg
Dans le récit de son exploration de l’Afrique des Grands Lacs intitulé Dans les ténèbres de
l’Afrique, et publié en 1890, Henri Morton Stanley décrit le rôle du lac salé de Katwe en ces
termes :
« Le sel est ici une marchandise de valeur. La réputation de ce dépôt s’est étendue jusqu’à
Kavalli, où j’entendis parler pour la première fois du grand lac salé de « Katto ». Des flottilles
de canots chargés de grains comme moyen d’échange viennent du Makara, de l’Oukondjou, de
l’Ounyampaka, de l’Ankori et du Rouanda. Des caravanes arrivent de l’Oukondjou oriental, du
nord de l’Oussongora, de Toro, de l’Ouhaiyana, pour négocier sel contre millet, vêtement
d’écorce, pois, fèves, éleusine, sésame, outils de fer, armes, etc. Les insulaires de l’AlbertEdouard, montés sur leurs pirogues, vont porter leur poisson séché et la précieuse denrée aux
riverains de l’ouest et du sud. La possession de Katoué, qui commande les lacs, est un grand
sujet de jalousie. D’abord sujette des Ouassongora, elle passa au roi de l’Ankori ; le chef
insulaire Kakouri en hérita ; mais Kabba Réga, entendant parler de cette riche proie, dépêcha
Roukara pour s’en emparer ».
Circuits du sel (Bernard Lugan et Raphaël Mutombo, « Le sel dans le Rwanda ancien »
Sels végétaux
Pour relever la saveur des préparations culinaires, la plupart des anciens Rwandais utilisaient un sel
végétal obtenu par brûlis de différentes plantes sauvages. On appelait « igitazi » les cendres à haute
teneur saline de ces plantes. (La cendre commune est, elle, appelée « ivu »). Le sel utilisé en cuisine
extrait par distillation du filtrat des cendres de ces herbes était lui appelé « umushangashanga ».
La plupart des plantes salifères poussaient dans les marais et les marécages. Ainsi récoltait-on,
lorsqu’il était possible d’y pénétrer en saison sèche les plantes connues au Rwanda sous les noms
« umuberanya », « umurago », « igikangaga » et « umufunzo ». Au Burundi voi, les herbes salifères
étaient « umubere », « umurago », « umugonzo » et « urukangaza ».
Sel d’Igikangaga
Parmi ces plantes, la plus commune au Rwanda, « l’igikangaga », était la plus employée.
Igikangaga (Cyperus latifolia)
Français : « Massette à feuille étroite » ou « roseau à massette » ; English : « Reedmace »
Un des procédés pour en extraire le sel était le suivant :
Une fois coupées et réunies en bottes, les plantes d’igikangaga étaient exposées au soleil pour
pouvoir les brûler une fois sèches. La cendre était recueillie dans un grand tesson sur lequel on
versait de l’eau qui débordant et coulant dans une cruche entraînait quelques particules plus ou
moins solubles de cette poussière charbonneuse. Le liquide était alors mis en réserve.
Il était ultérieurement utilisé pour cuisiner. On en en versait une petite quantité à cuire dans les
aliments mis dans la marmite.
Quelques familles faisait négoce de cette eau à forte teneur saline. Le degré de salinité du filtrat
dépendait non seulement des plantes utilisées pour le réaliser mais aussi de la qualité des sols et
peut-être aussi de l’eau utilisée. Chaque plante conférait au sel de ces cendres, une saveur
spécifiques, et les gens étaient capables de reconnaître en le goûtant quelle plante était à l’origine du
filtrat salin.
D’une région à une autre les plantes et les techniques de fabrication privilégiées pouvaient varier.
Sel d’Umurago
Dans la région septentrionale du Busanza frontalière du Burundi, l’umurago était parmi les
végétaux utilisés, celui qui possédait la plus forte teneur en sel [6]. De cette herbacée de la famille
des cypéracées qui pousse dans les marais, était extrait un sel « umushangashanga » utilisé en
cuisine. Un quart de litre du filtrat obtenu à partir des cendres d’umurago permettait d’assaisonner
une marmite de haricots pour 5 à 7 personnes, soit 2 à 3 kg de haricots crus.
Umurago (Cyperus dendatus) En anglais : Dentate umbrella sedge, Toothed flatsedge
À partir de cette plante était également préparé un sel appelé « umubaya » pour le bétail. Dans les
régions où les puits salins (amabuga) étaient inconnus mais où l’existence de marécages permettait
la pousse de l’« umurago », les gardiens de troupeaux creusaient des abreuvoirs dans des termitières
ou en construisaient avec de l’argile et ils les remplissaient d’eau mélangée à ce sel « umubaya » au
grand plaisir des bovins
Gutegura amazi y’imbuga Préparation du breuvage d’eau salée pour le bétail premier quart du XXe s.,
source Rwanda Heritage
Certains lieux, comme le pied de la colline Kigoma, dans la vallée de la Runukangoma étaient
réputés produire des herbes à forte teneur saline. Une zone de cette vallée avait pour nom « Mu
Ruguhu rwa Ruhungirabenga » : « dans un buisson appartenant à Ruhungirabenga » où poussait
une umurago fameuse.
Sa récolte avait lieu en saison sèche, période de l’année où il était possible de pénétrer dans les
marais pour les cueillir. L’« umurago » cueillie était étalée au soleil. Une fois totalement sèche, la
plante était brûlée sur un sol qui avait été préalablement battu. La cendre obtenue était
soigneusement recueillie puis déposée sur un filtre constitué d’un bouchon d’herbes inséré dans le
col d’une grande jarre. Sur ces cendres était versé peu à peu un filet d’eau jusqu’à remplir le
récipient. La quantité requise pour assaisonner les aliments liquide pouvait dès lors être prélever
directement dans la jarre.
Sel d’umuberanya
Une autre plante utilisée était « l’umuberanya », une herbacée de la famille des typhacées poussant
également dans les marais qui peut atteindre trois mètre de hauteur. En Français, cette plante
cosmopolite est appelée Massette à larges feuilles, quenouille à larges feuilles, ou roseau des étangs
En Anglais, l’appelle Bulrush, cattail, broad-leaved cattail, common cattail, great reedmace.
Umuberanya (Typha angustifolia)
Français : Massette à larges feuilles, quenouille à larges feuilles, roseau des étangs
Anglais : Bulrush, cattail, broad-leaved cattail, common cattail, reedmace, great reedmace
Avec l’umuberanya, le procédé de d’extraction du sel était spécifique. sa phase terminale plus
élaborée permettait de produire deux variétés de sel : l’« Ingasire » et le « Nyirakibuye ».
Sel « Nyirakibuye »
Le mot « Nyirakibuye » signifie littéralement : « sous forme de pierre »
Comme dans le procédé décrit avec l’umurago, le filtrat de la cendre de plante séchée permettait
d’obtenir un liquide à forte teneur saline. Mais cette saumure n’était pas utilisée telle quelle.
La cruche contenant le liquide était posée sur un feu, et la saumure mise à ébullition durant une
journée entière jusqu’à évaporation de l’eau. En cristallisant, le sel et adhérait aux parois de la jarre.
Une fois l’eau évaporée, soit la cruche se brisait sous l’effet de la chaleur, soit on la brisait
intentionnellement. Dans les deux cas, les tessons recouverts de cristaux de sel étaient recueillis et
proposés tels quels au consommateur ou à l’acheteur.
« Au Burundi1, la production du sel à partir des roseaux imiberebere (Typha angustifolia) était une
spécialité du Kumoso et des régions voisines du Buha. Elle donnait un produit cristallisé de
meilleure qualité que les saumures ordinaires fabriquées au niveau domestique dans les différents
marais du pays. La technique de fabrication, une lixiviation des cendres suivie d'une ébullition.
Les sauniers étaient à la fois producteurs et colporteurs. Ils partaient en équipe à chaque saison
sèche, munis de provisions, vers un emplacement de production dit igungu, un tertre où ils
pouvaient s'installer durant quelques mois, procéder à la coupe des roseaux et à la fabrication du sel.
La concession de cet igungu était obtenue des autorités locales en échange de quelques têtes de
bétail et du respect d'un rituel rendu aux esprits de ces marais, les bisigo.
Cette transhumance artisanale se prolongeait par des déplacements sur les collines de la région pour
vendre le sel, transporté en paquets de forme cylindrique de tailles variées : les « ibibere » étaient à
peu près deux fois plus grands que les impinda. On portait non sans peine deux bibere sur la tête,
chacun pesant sans doute une douzaine de kilos (ou trois impinda de chacun environ huit).
Les prix de vente au Burundi au début du siècle étaient de 6 à 10 impinda ou 2 à 5 bibere pour une
vache (ou une quinzaine de chèvres). Ces paquets pouvaient être débités au détail. »
Sel « Ingasire »
« Ingasire », signifie littéralement : « en forme de pierre à moudre » (La pierre servant à écraser le
grain dans la meule de pierre a également pour nom ingasire.)
Le sel « Ingasire » obtenu à partir de l’umuberanya subissait la même phase préparatoire que le sel
« Nyirakibuye ».
La différence dans sa préparation intervenait au moment de la cuisson. On ne laissait pas le liquide
s’évaporer jusqu’au bout. On versait le contenu de la cruche, lorsqu’il atteignait la consistance
d’une pâte que l’on divisait en boules de la taille d’une pierre à moudre et qu’on laissait sécher au
soleil.
1 .BDABAYHAGAMYE, «Technologie et économie du sel végétal dans l’Ancien Burundi », in CCB La civilisation
ancienne des peuples des Grands lacs. Paris. 1981. pp. 408-416.
Le sel « Ingasire » pouvait également être extrait des cendres de papyrus « urufunzo ».
Cyperus papyrus « urufunzo ».
Français : Papyrus, souchet à papier, papier du Nil Anglais : Papyrus, Egyptian paper plant, paper reed
Sel d’amarebe
Ces herbes de marais utilisées n’étaient pas les seuls végétaux employés pour la fabrication de sel,
c’est ainsi que dans certaines régions l’on mélangeait des feuilles séchées de bananier à de
l’« amarebe », herbacée aquatique de la famille des Nymphéacées, dont les longues feuilles flotte à
la surface de l’eau dans les zones humides. Ces deux matières végétales étaient brûlées ensembles.
La cendre obtenue était brassée avec de l’eau contenue dans une auge « Umuvure » en bois, qu’on
laissait s’évaporer comme dans le procédé décrit précédemment.
Au Burundi un sel végétal était fabriqué avec seulement de l’amarebe.
« Amarebe » (Nymphea sp.)
Français Nénuphars, Lotus ; Anglais : Water lilies
Sel végétaux du Kenya
Au Kenya ou le sel traditionnel est appelé, lye, uvusaaru, mfume en swahilin Musherekha dans la
communauté luhya..., les sels à base végétale s’obtenaient à partir de toutes sortes de plantes
locales, surtout les cosses de haricots, les restes de maïs, les feuilles de papayes, les feuilles et les
tiges de papyrus…
Aujourd’hui ces sels traditionnels commencent à être de nouveaux fabriqués. Les procédés de
fabrications sont à peu près similaires à ceux décrit jusqu’ici : les plantes sont récoltées alors
qu’elles sont encore vertes. Une fois cueillies, elles sont brûlées et les cendres sont recueillies et
conservées dans un grand récipient. Elles sont ensuite mélangées à de l’eau de pluie dans des
récipients plus petits et filtrés plusieurs fois grâce à de fins tissus propres pour éliminer les
impuretés.
Le liquide filtré est ensuite stocké dans de grands pots ou dans des bouteilles ou chauffé à haute
température dans des casseroles jusqu’à évaporation de l’eau pour recueillir au fond les cristaux de
sel.
Le produit final commercialisé est soit un sel liquide soit des cristaux de sel.
Pot rempli de sel de cendres végétales « Musherekha »
et pot d’argile traditionnel « Lusherekho » servant filtre.
Dans la communauté luhya, le sel végétal traditionnel « Musherekha est fabriqué à partir de cendres
d’épis de maïs secs, de cosses de haricots ou de pelures de banane.
Pour le réaliser on prend une feuille de bananier ou une feuilles de citrouille, qu’on perfore à l'aide
d'un cure-dent et qu’on place sur le pot d’argile traditionnel « Lusherekho » servant de receptacle.
après avoir déposé la cendre végétale on verse très lentement un filet d’eau sur la cendre. Le filtrat
récupéré est utilisé pour cuire et attendrir les aliments, améliorer le goût et préserver la couleur
verte des légumes. Les légumes cuits dans le musherekha sont réputés se conserver plus longtemps
sans se gâter. Musherekha est également utilisé pour soulager les brûlures d'estomac.
Pour promouvoir ces sels, les gardiens de l’art de préparer les sels végétaux informent que leurs sels
peuvent être utilisés :
✔ comme un sel de cuisine relevant la saveur des aliments ;
✔ pour attendrir les légumes ;
✔ comme complément alimentaire car ces sels ont une forte teneur en calcium, minéral réputé
renforcer les os.
✔ comme succédané du bicarbonate de sodium dans la préparation de pain ou de gâteaux.
✔ comme lessive antiseptique pour laver les vêtements
✔ pour adoucir l’eau calcaire.
✔ comme agent de conservation, sous sa forme liquide
✔ comme substance insectifuge (les cristaux peuvent être mélangés avec des céréales pour les
protéger des insectes) ;
✔ pour l’hygiène buccale sous sa forme liquide
✔ comme savon une fois mélangé à des graisses animales.
✔ pour conserver les peaux animales.
✔ comme substance médicinale. Ingéré en petites quantités, le liquides, il soignerait la
constipation et neutraliserait les acidité de l’estomac.
✔ Des Kényans âgés affirment qu’en utilisant le dans la cuisine journalière, les gens vivent
plus longtemps grâce à ses propriétés thérapeutiques. le dicton qui énonce « kula chumvi
nyingi » : « manger beaucoup de sel », signifie métaphoriquement « vivre plus longtemps ».
Un article paru dans le quotidien kényan en 2013 The Standart déplorait la disparition de l’art de
préparer les sels traditionnels et vante les vertus de leur consommation
Les sels traditionnels disparaissent des cuisines africaines
Par Juma Kwayera Nairobi, Kenya:
La prochaine fois que l’on vous dira que quelqu'un a « mangé beaucoup de sel », gardez à l’esprit
que c’est une métaphore des pouvoir des sels locaux de procurer une vie saine.
Le professeur Ward Mavura de l'Université d'agriculture et de technologie Jomo Kenyatta, qui a
mené de nombreuses recherches sur la valeur culturelle, nutritionnelle et commerciale des sels
indigènes à base de plantes, affirme que les connaissances indigènes utilisées dans la fabrication
des sels risquent de disparaître.
« Le sel (mfume) a une faible teneur en sodium, mais plus de potassium. Le sel de roseaux est
recommandé pour les personnes hypertendues. Le sel indigène fabriqué au Kenya et en Ouganda en général par les habitants du bassin du lac Victoria - est meilleur que les sels raffinés hyposodés
(lona) », explique le professeur Mavura, qui dirige le campus de JKUAT à Arusha en Tanzanie.
Les écosystèmes dans lesquels les espèces de graminées dont les sels sont extraits dans la plupart
des régions de l’ouest du Kenya sont en voie de disparition à mesure que la demande de terres pour
l’agriculture commerciale et la colonisation augmentent.
La disparition des zones humides n’affecte pas seulement les régimes fluviaux; elle génère un recul
de la transmission des connaissances locales uniquement maintenues par l’expérience pratique.
Connus sous le nom de munyu-mfume ou esalu chez les Luhyia, kat kamsingli parmi les Luo ou
omusaala en luganda, les sels végétaux fabriqués avec des variétés spécifique de roseaux poussant
dans les zones humides ou les lagons, ont pratiquement perdu leur valeur culturelle au sein des
communautés qui croyaient que le sel de roseau permettait à chacun de vivre plus longtemps, d’où
le dicton kula chumvi nyingi (manger beaucoup de sel), signifiant métaphoriquement « vivre plus
longtemps».
Mama Kamilita Achieng, qui fabrique et vend du munyu mfume (le sel traditionnel), affirme que les
connaissances utilisées pour fabriquer le sel ne sont plus transmises à la jeune génération. Selon
Mme Achieng, les écosystèmes dans lesquels les roseaux servant à faire pousser les sels poussent
cèdent la place à la canne à sucre, qui domine l’agriculture commerciale dans l’ouest du Kenya.
Ses préoccupations soulignent l’impact de la destruction de l’environnement sur la culture locale.
Elle dit que les meilleurs sels indigènes sont fabriqués à partir d'omuverenyi (Typha latifolia), de
mukongolo (Brachystegia bussei) et de nénuphar. Ce sont des plantes indigènes rares qui
disparaissent rapidement.
Parmi les trois espèces, typha latifolia (quenouilles ou Massette à larges feuilles) prospérant dans
les marais de la rivière Sio, de la rivière Nzoia, de la rivière Lusumu et de la rivière Yala, est
l'ingrédient le plus répandu.
Les nutritionnistes considèrent le potassium, le troisième minéral le plus abondant dans le corps
humain, comme un « gardien de la santé » du corps humain. Des publications médicales indiquent
que ce minéral, qui est un électrolyte, joue en outre une rôle important dan le maintien en parfait
état de fonctionnement. du cœur, du cerveau, des reins, des tissus musculaires et d’autres organes
importants du corps humain
Carence
La carence en sel provoque de la fatigue, des faiblesses musculaires, des réflexes inactifs, des
battements de cœur anormaux, des palpitations cardiaques, de l'anémie et de graves maux de tête.
Ce sont ces qualités qui ont permis aux consommateurs de sel de vivre plus longtemps et en bonne
santé.
Le biochimiste John Ouma, conférencier à l'Université Egerton, attribue la plus grande fréquence
de l’hypertension artérielle dans l'ouest du Kenya à la diminution de la consommation de sel
indigène.
« La composition des sels indigènes présente un équilibre naturel en nutriments bénéfiques pour le
corps. Le sucre industriel raffiné a tendance à optimiser un composant particulier, dans ce cas le
chlorure de sodium, en éliminant les autres sels.
Dans le cas des sels indigènes, le taux d'absorption est progressif par rapport aux sels raffinés dans
lesquels l'absorption est rapide, ce qui déclenche des palpitations cardiaques plus rapides »,
explique le professeur Ouma.
L’explication de l’expert met en lumière les perceptions culturelles locales selon lesquelles le sel est
utilisé pour soulager les convulsions chez une personne ensorcelée. Culturellement, ces condiments
étaient consommés lors de réunions après une journée de travail, car ils étaient perçus comme un
symbole d’unité ou pour éloigner le mauvaise sort. Les consommateurs ignoraient tout de la valeur
nutritionnelle et sanitaire de ces sels.
Achieng indique que mfume est utilisé pour traiter les furoncles, qui seraient transmises par des
esprits maléfiques. « le sel est bien plus qu’un condiment des aliments ou un attendrisseur des
viandes et des poissons fumés. Certaines personnes l'utilisent pour des raisons religieuses ou
superstitieuses. Ils croient que cela les protège contre la sorcellerie. Cependant, les croyances
tombent en désuétude au fur et à mesure que les gens commencent à comprendre la valeur
nutritionnelle de ces sels », explique Achieng’, qui fournit le sel dans les villes de Busia et
Kakamega.
Sources :
BDABAYHAGAMYE, «Technologie et économie du sel végétal dans l’Ancien Burundi », in CCB
La civilisation ancienne des peuples des Grands lacs. Paris. 1981. pp. 408-416.
CHRÉTIEN Jean-Pierre, 1988, « Ethnologie et économie : les productions de l’Afrique des Grands
Lacs dans le miroir de la colonisation allemande », Journal des Africanistes, Volume 58, N° 1, p.
51-73.
GAHAMA Joseph et THIBON (Christian), dir., Les Régions orientales du Burundi. Une périphérie
à l'épreuve du développement. Paris : Karthala, coll. Hommes et sociétés, 1994, 638 p.
LUGAN Bernard et MUTOMBO Raphaël, Le sel dans le Rwanda ancien, Les cahiers d’outre-mer
PAGES Albert (Père), 1928, « La flore domestique du Ruanda. Les plantes alimentaires, la
botanique considérées par rapport aux arts et usages domestiques, Bulletin agricole du Congo belge,
RWICANINYONI (E.) (1979). — La région de Busanza. Essai d'étude socio-historique. Butaré :
Université Nationale du Rwanda, 150 p. dactylographiées (Mémoire de Licence en Histoire).
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