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réalisé en France une étude exploratoire avec des joueurs dépendants et non dépendants aux
MMORPG (World of Warcraft). Sur un échantillon de 448 joueurs adultes (M = 26,6 ans, 82.7 %
masculin, 34.5 % étudiants, 59.3 % travailleurs), et en implémentant une enquête à trois instruments
de mesure, 44.2 % se sont avérés dépendants à Internet selon l’échelle de Goldberg, 36.2 % selon le
test d’Orman et 27.5 % selon une échelle construite par les auteurs sur la base des critères
diagnostiques de l’abus de substances du DSM-IV. Comparés aux individus non dépendants, les
dépendants ont montré des taux de tolérance élevés (davantage d’heures passées à jouer à cause de la
pression des membres de la guilde) et davantage de problèmes sociaux, familiaux, conjugaux,
financiers et professionnels. En outre, ces individus dépendants ont rapporté des problèmes
d’irritabilité, des troubles du sommeil, des troubles de l’humeur et des difficultés à réguler leurs
émotions.
1.2.2. Groupes vulnérables
Bon nombre d’études empiriques se penchent sur les risques de l’usage excessif d’Internet et des jeux
vidéo chez les enfants et les adolescents, notamment les étudiants, mais aussi les chômeurs (par
exemple : Ferron & Dugay, 2004 ; Fu et coll., 2010 ; Hawi, 2012 ; Israelashvili & Bokobza, 2012).
Étant donné que cette partie de la population a des horaires flexibles et davantage d’accès aux outils
informatiques, leur vulnérabilité et les risques qu’ils encourent tendent à être significativement élevés.
Parmi les applications les plus citées dans ces études, nous trouvons les chats, les forums, les services
de messagerie instantanée, les jeux interactifs sur Internet, les jeux vidéo et les réseaux sociaux.
Malgré le fait que ces réseaux virtuels ont été souvent célébrés en raison de leur rôle dans le
renforcement de la communication et du partage social de contenus multimédias, certaines études
(Andreassen et coll., 2012 ; Kuss & Griffiths, 2011ab) ont récemment soulevé des questions
concernant le caractère problématique de ces applications chez certains individus, notamment chez les
adolescents et les jeunes adultes dans les premières années d’université. Outre le fait que la
communication virtuelle peut facilement gagner de l’importance au détriment des interactions face à
face, les chercheurs soulignent chez un certain nombre d’individus « dépendants » le besoin impérieux
de rester connecté en permanence sur ces réseaux afin de ne pas rater les derniers faits et gestes de
leurs « amis ». Ce besoin se trouve souvent corrélé à des dysfonctionnements au niveau de la vie
familiale, scolaire, et dans certains cas, professionnelle, ainsi qu’aux symptômes d’un mal-être
(solitude, dépression, insatisfaction dans la vie, manque d’estime de soi). De plus, les corrélations
estimées dans la majorité de ces études constatent une utilisation problématique des réseaux sociaux
davantage marquée chez les filles que chez les garçons.
1.2.3. Propriétés psychométriques des instruments utilisés
Plusieurs études psychométriques consacrées à l’examen et/ou la validation d’échelles de mesure de
dépendance à Internet, aux jeux vidéo, aux jeux en ligne et aux réseaux sociaux ont été repérées dans
cette recherche (par exemple : Andreassen et coll., 2012 ; Beard & Wolf, 2001 ; Caplan, 2002, 2007 ;
Davis, 2001 ; Lemmens et coll., 2009 ; Meerkerk et coll., 2009). La grande variété de critères
diagnostiques et d’instruments implémentés témoigne de l’impossibilité à l’heure actuelle d’unifier
toutes ces perspectives sous une seule et même catégorisation. Ce que nous pouvons constater sur base
de ces études, c’est qu’il existe une tendance répandue à construire un modèle nosologique de
dépendance et à le tester empiriquement sur la base diagnostique du DSM-IV. Qu’il s’agisse de
l’usage « pathologique », « problématique », « compulsif », « addictif », « excessif », ou « abusif »
d’Internet et des jeux vidéo, il existe dans ces études des références récurrentes à l’abus de substances,
au jeu pathologique et aux troubles du contrôle des impulsions non classées ailleurs. En outre, le fait
que chaque instrument de mesure est construit sur un ensemble de critères diagnostiques particuliers
explique en grande partie la difficulté à interpréter les résultats de manière homogène : les cut-offs ne