
reconnue à l’interdiction de la torture par la communauté internationale fait que
tout Etat est en droit d’enquêter, de poursuivre et de punir ou d’extrader les
individus accusés de torture, présents sur son territoire6.
1.2. La jurisprudence de la CEDH
Ainsi, et au-delà même des textes, l’interdiction de la torture occupe une place
primordiale dans tous les instruments internationaux relatifs à la protection des droits
de l’homme, notamment, dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, ou
encore dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
L’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme – « Nul
ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou
dégradants » – prohibe également en termes absolus la torture et les peines ou
traitements inhumains ou dégradants et jurisprudence s’est vite établie en ce sens7. Il
consacre l’une des valeurs fondamentales des sociétés démocratiques, et il ne souffre
nulle dérogation, même en cas de danger public menaçant la vie de la nation8.
La Cour européenne des droits de l’homme, en accord avec la jurisprudence du
Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), a jugé que l’interdiction de
la torture a valeur de norme impérative, c’est-à-dire de jus cogens9. Ainsi, et même
dans les circonstances les plus difficiles, le droit prohibe en termes absolus les
traitements inhumains ou dégradants. L'article 3 ne prévoit d’ailleurs aucune
restriction10. La prohibition des traitements inhumains ou dégradants est absolue,
quels que soient les agissements de la victime11.
Un mauvais traitement doit atteindre un minimum de gravité pour tomber sous le coup
de l'article 3. L'appréciation de ce minimum est relative par essence ; elle dépend de
l'ensemble des données de la cause, et notamment de la durée du traitement, de ses
effets physiques et mentaux ainsi que, parfois, du sexe, de l'âge et de l'état de santé de
la victime. Lorsqu'un individu se trouve privé de sa liberté, l'utilisation à son égard de
la force physique alors qu'elle n'est pas rendue strictement nécessaire par son
comportement porte atteinte à la dignité humaine et constitue, en principe, une
violation du droit garanti par l'article 312.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
6 TPIY, Mucić, 16 novembre 1998, affaire no IT-96-21-T, § 454 ; Kunarac, 22 février 2001, affaire nos IT
96-23-T et IT-96-23/1-T, § 466!
7 Catherine-Amélie Chassin, La portée de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme,
Collection : Rencontres européennes, Bruylant, 2007 ; Dilbadi Gasimov, « Jurisprudence de la Cour
européenne des droits de l’homme (l’interdiction de la torture et des traitements inhumains et
dégradants) », L’Europe des libertés (Strasbourg), n° 34, 2011, pp. 29-32 ; Marie-Aude Beernaert, « La
Cour européenne des droits de l’Homme en demi-teinte sur les limites de l’interdiction des traitements
inhumains et dégradants. Cour européenne des droits de l’Homme (Gde Ch.), Gäfgen c. Allemagne,
1er juillet 2010) », Revue trimestrielle des droits de l’Homme (Bruxelles), n° 86, 1er avril 2011, pp. 359-
8 CEDH, Aksoy c. Turquie, 18 décembre 1996, § 62 ; CEDH, Assenov et autres c. Bulgarie, 28 octobre
1998, § 93 ; CEDH, Selmouni c. France [GC], no 25803/94, § 95, CEDH 1999-V.!
9 CEDH, Al-Adsani c. Royaume-Uni [GC], no 35763/97, § 60, CEDH 2001-XI!
10 CEDH, Labita c. Italie [GC], no 26772/95, § 119 ; CEDH, Selmouni c. France [GC], no 25803/94, § 95 ;
CEDH, Assenov et autres c. Bulgarie, 28 octobre 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-VIII, p. 3288,
11 CEDH, Chahal c. Royaume-Uni, arrêt du 15 novembre 1996, Recueil 1996-V, p. 1855, § 79!
12 CEDH, Labita précité, § 120 ; CEDH, Assenov et autres précité, p. 3288, § 94 ; CEDH, Tekin c. Turquie
du 9 juin 1998, Recueil 1998-IV, pp. 1517-1518, §§ 52 et 53!