Indications inhabituelles du PET scan. M. Lonneux La TEP (tomographie par émission de positons) est une technique d’imagerie isotopique dont l’apparition en routine clinique oncologique est récente. Les émetteurs de positons sont fabriqués en bombardant une cible par un flux de protons produisant au niveau nucléaire l’expulsion d’un (ou plusieurs) neutrons au profit d’un proton. Ainsi, en bombardant une cible d’eau (enrichie en 18O*), on réalise une réaction (p,n) et on obtient du 18F qui va servir à marquer une molécule d’intérêt biologique, comme le déoxyglucose (on obtient alors le 18Ffluoro-déoxyglucose ou FDG) pour l’imagerie du cancer. Ces isotopes ont une demi-vie physique courte (de l’ordre de 110 minutes pour le 18F, 2 minutes pour l’15O), ce qui pose des problèmes de disponibilité. Une fois dans l’organisme, l’isotope va se désexciter en émettant un positon (β+) qui après un trajet de quelques millimètres va s’annihiler avec un électron du milieu, générant 2 photons de haute énergie (511 keV) émis en même temps dans deux directions opposées de 180°. Ce sont ces photons que la caméra TEP va détecter, grâce à des détecteurs disposés en anneaux autour du patient. Nous avons là les deux caractéristiques principales de l’imagerie par TEP : premièrement il s’agit d’une technique « naturellement » tomographique puisque les événements sont enregistrés par paires opposées de 180°, il suffit de recouper les lignes de réponse pour obtenir une image en volume « 3D ». En voyageant dans le volume ainsi obtenu, on peut détecter les foyers captant avidement le traceur, et ce dans tout le corps. En effet, la TEP fournit des images du corps entier en une seule séance d’imagerie qui dure environ 40 minutes (et même moins pour les caméras de la nouvelle génération). Les caméras récentes comprennent une partie TEP et une partie CT dans un même appareil, ce qui permet la production d’images à la fois fonctionnelles (la partie TEP) et anatomiques (la partie CT), la fusion des données augmentant la précision diagnostique du test, notamment par une meilleure localisation des foyers captant le traceur. En Belgique un arrêté royal datant de 2000 fixe le nombre de machines TEP agréés (13 scanners, dont 7 dans les hôpitaux universitaires). La nomenclature de remboursement est unique dans le domaine de l’imagerie médicale puisque l’examen n’est remboursé que pour une liste d’indications bien définies, essentiellement en oncologie. L’exposé de ce jour couvrira certaines des indications « inhabituelles » de la TEP. Par inhabituel, on entendra soit des indications rares, soit des indications en devenir, ce qui nous permettra de faire découvrir le large champ d’utilisation de cette technique d’imagerie. 1 Bien qu’il existe de multiples traceurs émetteurs de positons, le FDG (18Ffluorodéoxyglucose) est à l’heure actuelle le seul disponible pour une utilisation clinique de routine. Le FDG est avidement capté par les tissus en prolifération rapide, dont la grande majorité des cancers mais également les éléments cellulaires impliqués dans la réponse inflammatoire : macrophages, granulocytes, fibroblastes. Dès lors, il est tout à fait possible de détecter l’inflammation et l’infection par TEP-FDG. Une des applications cliniques possibles est la mise au point des fièvres d’origine indéterminée (fever of unknown origin, ou FUO). La cause de ce syndrome clinique est soit une maladie tumorale, un foyer d’infection profond, ou encore une maladie inflammatoire ou « de système », de type sarcoïdose. La TEP-FDG étant une technique corps entier, elle présente la caractéristique unique et très intéressante de « dépister » une maladie profonde de type infectieux ou inflammatoire. Plusieurs études ont démontré l’intérêt de la TEP-FDG dans cette situation clinique. Parmi les causes de FUO figurent les artérites giganto-cellulaires (maladie de Horton, maladie de Takayashu,...), dont le diagnostic est parois difficile ou repose sur des méthodes invasives (biopsie de l’artère temporale). La TEP-FDG a une bonne sensibilité pour détecter l’inflammation des gros troncs artériels (crosse aortique, artères sous-clavières), et, grâce à l’imagerie corps entier, permet de dresser une cartographie de l’atteinte inflammatoire (extension vers l’aorte abdominale, les tronc iliaques, ...). La TEP permet aussi de mesurer la réponse au traitement, en montrant rapidement la réduction de la captation de FDG au niveau des artères atteintes. D’autres maladies inflammatoires sont également très avides en FDG : fibrose rétropéritonéale, sarcoïdose, polyarthrite rhumatoïde par exemple sont des diagnostics parfois obtenus par TEP prescrite pour un syndrome clinique vague (altération de l’état général, perte de poids, fièvre,...). Il arrive dans ces contextes qu’une biopsie diagnostique soit guidée vers le site métaboliquement actif. La TEP-FDG peut également être réalisée à la recherche d’une infection profonde ou une infection de prothèse. Il faut cependant rappeler que dans ces indications, la littérature ne montre pas de gain diagnostique par rapport à la scintigraphie aux globules blancs marqués (et au couple scintigraphie osseuse + scintigraphie aux globules blancs marqués), qui reste le gold standard car plus spécifique de l’infection (on visualise la concentration des granulocytes marqués au site de l’infection). 2 Parallèlement à son intérêt dans des syndromes cliniques « internistiques » particuliers, la TEP-FDG s’affirme de plus en plus comme une technique de référence dans la prise en charge des cancers. Très récemment deux applications nouvelles sont apparues dans ce domaine. Tout d’abord de nombreux travaux ont porté sur l’utilisation de la TEP dans la définition des volumes tumoraux à irradier. La question centrale de la radiothérapie moderne, avec l’avènement d’appareils de radiothérapie de plus en plus précis, est clairement de délivrer le maximum de dose à la tumeur tout en épargnant le tissu sain environnant. Grâce à la TEP, le faisceau de rayons peut être concentré sur la partie métaboliquement active de la tumeur, la plus agressive. Enfin, nous montrerons comment la TEP-FDG permet de mesurer la réponse des cancers au traitement, et ce beaucoup plus tôt que l’imagerie morphologique de type CT ou IRM. A l’heure des thérapies de type « biologique », la TEP se positionne comme un outil de référence dans ce domaine car elle est capable de détecter très tôt les patients non répondeurs, et donc d’interrompre rapidement un traitement inefficace et coûteux. Elle permet également de sélectionner correctement les patients nécessitant une alternative thérapeutique. 3