Diabète Écouter le patient pour mieux l’informer Les personnes atteintes de diabète de type 2 ont peu de connaissances sur leur maladie. Une enquête infirmière* montre qu’il ne suffit pas d’informer de façon magistrale sur les risques de complications. On entend si l’on est soi-même écouté ! L es soignants seront de plus en plus confrontés à des patients diabétiques de type 2 dont on sait que l’éducation est du ressort de l’infirmière. Mais cette éducation consiste-t-elle à apporter uniquement des “cours médicaux” ? Informer de cette façon ne suffit pas. Certes, le soignant n’a pas le pouvoir de changer le comportement des gens, mais il en a notamment un : celui de pouvoir écouter ce qu’ils ont à dire ! L’écoute, « c’est peut-être le plus beau cadeau que nous puissions faire à quelqu’un... C’est lui dire non pas “tu es important pour moi”, mais “tu es intéressant, je suis heureux que tu sois là”... Il n’est pas étonnant de constater que la meilleure façon pour une personne de se révéler à elle-même, c’est d’être écoutée par une autre... », disait Walter Hesbeen. Comment apporter ses connaissances Une enquête, sous forme de questionnaire, a ciblé 50 personnes souffrant de diabète gras et traitées par comprimés et/ou insuline. L’enquête est née et a été réalisée au Centre de prévention et d’éducation du CH de Laon, mais elle s’est déroulée également en ville, avec l’appui des infirmières libérales et aussi sur Internet. L’intérêt d’Internet est de toucher une population multiculturelle et habitant diverses zones géographiques. D’après l’enquête, 90 % des personnes interrogées pensent qu’il est important d’avoir des explications médicales sur la maladie elle-même et sur le traitement, pour apprendre à vivre avec sa maladie et connaître l’hygiène de vie à adopter. Toutefois, quand la question est formulée ainsi : « Pour vous, que vous faut-il pour vivre au mieux votre diabète ? », les patients soulignent le rôle déterminant des soignants dans plusieurs domaines, notamment celui de l’encadrement, de l’accompagnement, du conseil... Et ce qui ressort dans la façon de citer les soignants en premier lieu, c’est une forte demande d’écoute. Les personnes diabétiques ont besoin qu’on leur parle, qu’on les rassure et les soutienne, qu’on leur permette de “se sentir normales”, autonomes tout simplement ! A travers l’enquête, 24 % des patients vivent mal leur maladie à cause de plusieurs facteurs concernant l’entourage. En effet, il faut savoir que le diabète n’est pas une maladie connue de tout le monde : le manque de soutien et de compréhension de la part de la famille ou la ségrégation au sein du milieu professionnel sont encore d’actualité ! Alors, les personnes diabétiques comptent sur le personnel soignant pour informer le public et impliquer davantage les familles lors d’une éducation. Cependant, les soignants ont à se poser eux-mêmes certaines questions : « Qui est la personne diabétique de type 2 que l’on prend en charge ? Comment vit-elle son diabète ? Où en est-elle dans les étapes d’acceptation de la maladie ? Quelles sont ses représentations de la maladie, du traitement ? ». En effet, avant de faire un cours magistral au patient, il est important de savoir comment ce dernier ressent sa maladie. En d’autres termes, le soignant doit prendre en compte la perception qu’une personne peut avoir de la santé et des maladies, du fonctionnement du corps et des organes. Par exemple, la maladie peut être perçue comme une faute ou la conséquence d’un comportement répréhensible... Un sentiment de culpabilité peut alors gêner l’adoption de nouveaux comportements ou favoriser, en toute bonne foi, la persistance de comportements inadaptés. Le sens des mots Concernant le domaine important de la podologie, une étude réalisée à l’hôpital cantonal de Genève par le Pr Assal a dévoilé que 50 % seulement des patients comprennent le sens de douze termes médicaux relatifs au pied diabétique tels qu’ulcère, cor, nécrose, varice, gangrène, etc. Si 22 % reconnaissent ne pas savoir le sens des mots employés par les professionnels de santé, 28 % croient savoir mais comprennent en fait autre chose. Il ressort que le langage médical n’est pas compris. La métaphore, figure de style offerte par la langue française, constitue peut-être une solution. Ainsi, nous pouvons comparer le pancréas diabétique à une voiture en panne d’essence et l’insuline à l’essence de la voiture, ce qui est plus parlant. En outre, il est important d’utiliser la reformulation qui permet à la personne diabétique d’avoir le sentiment d’être écoutée et comprise. L’éducation n’est autre qu’une succession d’étapes, d’objectifs, établis en accord avec le patient. Le rôle du soignant est d’évaluer et de réévaluer les compétences du patient, jusqu’à ce que ce dernier devienne parfaitement autonome. Cela est le résultat d’une écoute attentive. Virginie Duhamel Infirmière DE * Menée au Centre de prévention et d’éducation du CH de Laon, service du Dr J.-M. Marcelli. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 35 - mars 2002 19