I N F O R M A T I O N S Convergences et controverses médico-chirurgicales J. Silvain* Amicale des cardiologues a tenu, dans les salons de l’hôtel Intercontinental, une réunion médicochirurgicale sur le thème de la prise en charge des coronariens. Les intervenants ont présenté tour à tour les sujets suivants : “Le risque coronarien de la chirurgie : y a-t-il des médicaments à arrêter avant l’anesthésie ?”, par le Pr P. Coriat (hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris), “La morbimortalité de la revascularisation des sténoses du tronc commun”, par le Pr J. Marco (clinique Pasteur, Toulouse) pour le versant angioplastie et par le Dr N. Bonnet (Institut de cardiologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris) pour l’approche chirurgicale. Le tout placé sous la présidence du Dr D. Guedj-Meynier et modéré par le Dr J.P. Belliard et le Pr I. Gandjbakhch. L’ LE RISQUE CORONARIEN DE LA CHIRURGIE : Y A-T-IL DES MÉDICAMENTS À ARRÊTER AVANT L’ANESTHÉSIE ? Pr P. Coriat (hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris) Selon l’enquête de mortalité “SFAR-INSERM” (Paris, septembre 2003), il apparaît que l’insuffisance coronaire est la pathologie associée le plus fréquemment en cause (deux tiers des cas) dans la mortalité postopératoire, surtout en cas d’anémie. L’insuffisance cardiaque est très bien tolérée en milieu chirurgical du fait de l’absence d’effet dépresseur myocardique des agents anesthésiques actuellement utilisés. morbimortalité postopératoire ainsi qu’à une diminution significative de l’espérance de vie de l’opéré. Dans un travail réalisé à la Pitié-Salpêtrière sur près de 1 100 malades (en cours de publication) et étudiant la cinétique de l’ascension de la troponinémie en postopératoire, il a pu être mis en exergue l’existence de deux profils différents d’accidents coronariens. Dans 40 % des cas, l’infarctus est d’apparition brutale, avec une élévation de la troponinémie entre 24 et 48 heures, sans prodromes, correspondant à un accident thrombotique aigu par probable rupture de plaque (figure 1). Dans 60 % des cas, il existe un syndrome de menace négligé, avec troponinémie postopératoire positive et infarctus autour de la 72e heure. Les contraintes postopératoires interviennent sur les différents types de vulnérabilité : la vulnérabilité myocardique avec les ischémies prolongées qui se transforment en nécrose myocardique, la vulnérabilité de la plaque d’athérome coronaire avec la présence d’un syndrome inflammatoire majeur en postopératoire (CRP+++), et la vulnérabilité sanguine (hypercoagulabilité postopératoire). Troponine I (ng/ml) Infarctus inaugural 4,5 3,5 Objectif : troponine zéro Les objectifs de la prise en charge de l’opéré coronarien en 2003 suivent une “démarche qualité” avec un principe qui est d’éviter tout dommage cellulaire myocardique équivalant à une troponine postopératoire égale à zéro. Toute valeur anormale de troponine pré- ou postopératoire doit être considérée comme le témoin d’un syndrome de menace d’infarctus et est statistiquement liée à une augmentation de la 2,5 Syndrome de menace conduisant à l'infarctus postopératoire 1,5 0,8 0,6 0,4 0,2 6 * Institut de cardiologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris. La Lettre du Cardiologue - n° 386 - juin 2005 24 48 Heures postopératoires 90 Figure 1. Cinétique de la troponinémie postopératoire. 11 I N F O R M A T I O N S Stratégies de prévention de l’insuffisance coronaire aiguë postopératoire Prévention préopératoire Revascularisation myocardique La littérature récente montre que, chez les opérés coronariens asymptomatiques, le risque à court terme (décès, infarctus et durée de séjour hospitalier) et à moyen terme (espérance de vie de 2,7 ans) n’est pas amélioré par la revascularisation myocardique préopératoire (McFall EO. N Engl J Med 2004, et Godet G. Anesthesiology 2005). En revanche, le risque est très significativement amélioré par un traitement prophylactique par bêtabloquant (Mangano DT et al. N Engl J Med 1996 et Poldermans D et al. N Engl J Med 1999). Bien sûr, tout coronarien symptomatique doit être confié aux cardiologues avant une éventuelle chirurgie. Gestion de l’angioplastie préopératoire et des stents En cas d’angioplastie coronaire préopératoire, l’arrêt des antiagrégants est à risque (surtout si on utilise des stents pharmacoactifs). Se pose alors le problème du risque hémorragique, en balance avec le risque de thrombose de stent. En cas de stents non pharmaco-actifs, il est prudent de ne pas envisager de chirurgie avant 6 semaines et de poursuivre l’aspirine et le clopidogrel (Plavix®). Vis-à-vis du risque de resténose, on préconise une chirurgie avant le quatrième mois. Les stents au sirolimus ou au paclitaxel posent le problème de cas de thromboses tardives après arrêt de l’antiagrégation plaquettaire, et cela à distance de l’implantation (McFadden EP, Lancet 2004). Il faut savoir discuter avec les chirurgiens de la faisabilité de l’opération sous aspirine et diminuer le risque inflammatoire prothrombotique postopératoire par des anti-inflammatoires. Il existe un risque médico-légal en cas de non-information du patient stenté (par un stent pharmaco-actif ou non) vis-à-vis du risque thrombotique à l’arrêt du traitement antiagrégant avant une chirurgie programmée. Traitements prophylactiques : les quatre médicaments de l’insuffisance coronaire IEC/ARA II : à arrêter la veille de l’opération et à reprendre ensuite (aucun risque à l’arrêt, aucun bénéfice si poursuite ; en revanche, risque d’insuffisance rénale). Bêtabloquants : majoration du risque en cas d’arrêt du traitement et bénéfice important à la poursuite du traitement. Nécessité d’une titration i.v. des bêtabloquants en cas de chirurgie digestive. Aspirine/clopidogrel : risque thrombotique à l’arrêt démontré et statistiquement important au dixième jour d’arrêt (Collet JP, Circulation 2004), risque hémorragique de la poursuite variable selon les chirurgiens et le type de chirurgie. Statines : risque à l’arrêt (rebond inflammatoire et procoagulant) ; risque nul et bénéfice à la poursuite (stabilisation de la plaque, diminution des cytokines en postopératoire) si posologie inférieure ou égale à 40 mg ; mais si posologie supérieure (60 à 80 mg), risque d’hypocoagulabilité (entravement de la fonction plaquettaire) et de rhabdomyolyse. 12 Prévention postopératoire par le monitorage biologique du dommage myocardique Elle est fondée sur le dosage répété de la troponine. Le risque est nul si le taux est compris entre 0 et 0,20 ng/ml, et l’espérance de vie est intacte. Il y a un risque de nécrose étendue dès l’élévation du taux audessus de 0,20 ng/ml, avec un diagnostic de nécrose limitée. Cette situation nécessite l’optimisation de l’oxygénation myocardique, avec notamment un recours large aux transfusions. Au-dessus de 3 ng/ml, la surveillance et l’optimisation des traitements coronariens sont à réaliser en soins intensifs, avec une exploration coronarographique au décours ou en urgence si le traitement antiagrégant peut être instauré sans risque hémorragique majeur. MORBIMORTALITÉ DE LA REVASCULARISATION DES STÉNOSES DU TRONC COMMUN Revascularisation par angioplastie Pr J. Marco (clinique Pasteur, Toulouse) Les sténoses du tronc commun gauche représentent 5 ± 2 % des patients explorés par coronarographie et 15 ± 5 % des pontages coronaires. La mortalité intrahospitalière par revascularisation chirurgicale est de 2,3 ± 4,7 %. Les facteurs prédictifs de mortalité retrouvés en analyse univariée sont : l’infarctus récent, l’insuffisance rénale, l’arythmie, l’âge > 70 ans, la revascularisation incomplète et l’utilisation d’inotropes en postopératoire. En analyse multivariée, seuls ressortent l’âge > 70 ans et une FEVG < 40 %, et le rythme sinusal est de bon pronostic (Alattar N et al. ESC 2001). La mortalité intrahospitalière pour les sténoses du tronc commun isolées est faible et le pronostic à long terme est excellent, tout comme la survie sans événements coronariens. F. Revault d’Allonnes rapporte, dans le journal Heart (2002; 87:544-8), une série de 1 727 sténoses du tronc commun (TC) opérées (22,9 % des patients opérés pour pontages), dont 106 patients présentant des sténoses du TC isolées (35 femmes, 71 hommes, 61 ± 10 ans, FE : 62 ± 13 %) (figures 2 et 3). Concernant l’angioplastie plus stents conventionnels, les études rapportent des groupes hétérogènes de patients (définitions variables et subjectives), rendant l’analyse des résultats difficilement interprétable pour des recommandations. Le résumé des résultats retrouve une mortalité intrahospitalière allant de 0 à 4,3 % et une mortalité cardiaque à 7,3 ± 25,5 mois entre 2 et 12 %. La resténose varie de 8 à 40 %, sachant que les chiffres les plus bas sont assez optimistes. Y a-t-il des conséquences de la resténose postangioplastie avec pose de stent sur la clinique et la fonction ventriculaire gauche ? Cas clinique (figures 4 et 5) Dans le registre français (Lefèvre et al., ACC 2004), la mortalité intrahospitalière est de 0 %, mais sur des hospitalisations de moins de 48 heures. En revanche, à un mois, elle est de 1,1 % et, à 12 mois, de 9,6 %. Dans l’article de Takagi et al. (Circulation 2002;106:698-702), la mortalité augmente particulièrement dans La Lettre du Cardiologue - n° 386 - juin 2005 I N F O R M A T I O N S Sténose du tronc commun isolée : suivi à long terme de 106 patients après chirurgie Taux de survie cumulée Suivi moyen : 57,8 ± 42,4 mois Courbe d'espérance de survie Mortalité : 1,0 • intrahospitalière : 4,7 % 0,9 • tardive : 8,5 % – cardiaque : 3 patients 0,8 – non cardiaque : 6 patients 0,7 0,6 0,5 0,4 0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 Temps (mois) Revault d'Allonnes F. Heart 2002;87:544-8. Figure 2. Courbe d’espérance de survie des patients avec sténose du TC isolée, revascularisés par chirurgie. Figure 5. Patient de la figure 4 contrôlé 3,5 mois plus tard. 1,0 Sténose du tronc commun isolée : suivi à long terme de 106 patients après chirurgie 0,8 Courbe d'espérance de survie sans événement coronarien Coronarographie : 16 patients (17 %) Re-CABG : 2 patients PCI : 5 patients 0,8 0,6 Survie Taux de survie cumulée 1 Taux de survie sans événement cardiovasculaire majeur 0,4 0,6 0,2 0,4 0,2 0 0 0 0 25 50 75 100 125 150 175 200 Temps (mois) Revault d'Allonnes F. Heart 2002;87:544-8. Figure 3. Courbe d’espérance de survie sans événement coronarien des patients avec sténose du TC isolée. Figure 4. Homme de 71 ans avec diabète, insuffisance rénale, angor classe III. FEVG 70 %, coronaire droite normale. La Lettre du Cardiologue - n° 386 - juin 2005 12 24 36 Mois Figure 6. Survie des patients avec sténoses du tronc gauche : angioplastie + stent “conventionnels” (Takagi T et al. Circulation 2002;106:698-702). les 6 premiers mois suivant le geste de revascularisation, avant de se stabiliser (figure 6). Quand on regarde la FEVG des patients avant dilatation et que l’on étudie leur courbe de mortalité, les patients à FEVG basse (< 40 %) ont une mortalité importante dans les premiers mois, avec un probable retentissement de la resténose du TC sur la fraction d’éjection. Tout comme la chirurgie, l’évaluation par le score de Parsonnet ou l’Euroscore permet de prédire le risque de mortalité à court terme (figure 7). Une suppression du risque de resténose est donc nécessaire avant de pouvoir recommander l’angioplastie avec stent comme alternative à la chirurgie. Stents actifs Pour les stents actifs, il existe plusieurs registres, assez hétérogènes, avec des suivis de 6 mois en moyenne, insuffisants pour évaluer la mortalité. .../... 13 I N F O R M A T I O N S .../... Facteurs prédictifs d'événements cliniques et résultats à long terme après angioplastie élective non protégée du tronc commun coronaire gauche 0,2 0 0 12 24 Mort cardiaque et Euroscore 10 9 8 7 6 5 4 3 IC95 Euroscore Survie Mort cardiaque et score de Parsonnet 1,0 Risque faible 0,8 Risque élevé 0,6 p = 0,021 0,4 36 Mois Takagi T et al. Circulation 2002;106:698-702. 6 66 Nombre de patients Boccalate et al. ESC 2002. Figure 7. Évaluation de la mortalité par le score de Parsonnet et l’Euroscore. Si l’on regarde le registre RESEARCH, présenté par C.A. Arampatzis (Am J Cardiol 2003) et concernant 27 patients hautement sélectionnés (TC large, FEVG normale, sténose simple nécessitant un seul stent), la mortalité est de 0 % à 6 mois. Dans les registres (Chieffo A et al. ACC 2004) comprenant des patients plus complexes (n = 57 ; Cypher®), la mortalité à 6 mois est de 5 % et la resténose nécessitant une revascularisation de 23 %. Le registre de la clinique Pasteur (Zanuttini D et al. TCT 2004) montre une mortalité à 6 mois de 0 %, et le taux de resténose nécessitant une revascularisation est de 6 % (n = 34, Cypher® ou Taxus®) (figure 8). Les facteurs prédictifs de resténose sont les lésions complexes (bifurcations), les techniques complexes et le diabète (71,4 % de resténose chez les diabétiques). Le stent actif n’a pas réglé le problème de la resténose dans les lésions complexes du TC de la coronaire gauche. Il faut absolument identifier les patients aptes à poursuivre une antiagrégation plaquettaire double prolongée, en faisant particulièrement attention aux interventions chirurgicales pouvant survenir lors de la première année. Conclusion Chez des patients sélectionnés, l’angioplastie avec implantation d’un stent actif comme traitement des sténoses du tronc non protégées est réalisable, avec un risque immédiat faible et des résultats à moyen terme prometteurs. Cependant, les stents actifs ne résolvent pas les difficultés techniques associées aux lésions de bifurcations IVA/Cx du tronc commun distal et le problème de la resténose intrastent, en particulier chez les patients diabétiques. Il faut être attentif aux conséquences cliniques potentielles de la resténose intrastent et de la thrombose tardive du stent. Une analyse du risque (immédiat, à moyen et à long terme) doit être réalisée par les différents membres d’une équipe médico-chirurgicale. La Lettre du Cardiologue - n° 386 - juin 2005 Figure 8. Homme de 63 ans avec angine classe III, FE = 62 %, sténose ostiale critique du TC. 15 I N F O R M A T I O N S Recommandations ESC PCI 2005 L’angioplastie peut être recommandée pour les lésions du TCG lorsque le pontage chirurgical présente un risque péri-opératoire élevé (Euroscore) : classe IIb-C (correspond à une classe III ACC/AHA). Revascularisation par chirurgie Dr N. Bonnet (Institut de cardiologie, hôpital de la PitiéSalpêtrière, Paris) Histoire naturelle des coronaropathies La survie globale des coronariens est de 61 % à 5 ans et de 48 % à 10 ans (Gazes PC et al. Circulation 1973;48:331) et elle varie suivant le nombre de vaisseaux atteints (Proudfit WJ et al. Circulation 1983;68:986) ; les lésions du tronc commun de la coronaire gauche sont grevées d’une courbe de mortalité superposable à celle des patients tritronculaires. Il est démontré que la chirurgie augmente la survie en cas de lésions du tronc commun, de lésions tritronculaires à FE basse, de lésions bitronculaires incluant l’IVA et des lésions de l’IVA proximale. La chirurgie diminue également l’angor chez le coronarien stable. Dans les études comparant l’angioplastie à la chirurgie dans la revascularisation (BARI Investigators. J Am Coll Cardiol 2000 ; East. J Am Coll Cardiol 2000 et Mass. Circulation 1995) nous avons schématiquement un match nul concernant la mortalité, la survenue d’infarctus du myocarde (IDM) et le coût. La chirurgie semble supérieure pour l’angor et la nécessité de revascularisation. Mais les troncs communs sont exclus de ces études ! avec une FEVG entre 40 et 55 %. La sévérité de la sténose du TC est représentée sur la figure 9. Technique chirurgicale Les interventions se font sous antiagrégants plaquettaires (aspirine et clopidogrel). Elles sont réalisées dans 95,2 % des cas sous circulation extracorporelle (CEC), et à cœur battant dans 4,8 % des cas. En moyenne, 2,7 pontages sont effectués par patient, avec 4 ponts dans 11 %, 3 ponts dans 47,4 %, 2 ponts dans 39,3 % et un pont IVA dans 3,75 % des cas. Les artères revascularisées sont l’IVA dans 100 % des cas, l’artère diagonale dans 26 % des cas, la circonflexe dans 91 % des cas et le réseau droit dans 54 % des cas : 100 % d’artères mammaires internes gauches (MIG) ont été utilisés avec 57 % d’artères mammaires internes droites (MID) (avec une utilisation croissante de la MID : 73 % de 2000 à 2004). L’artère radiale et l’artère gastroépiploïque sont utilisées dans respectivement 5,2 % et 3,2 % des cas. Morbimorbidité, les chiffres Les suites sont compliquées dans 23,7 % des cas (toutes complications confondues, y compris les arythmies par fibrillation auriculaire transitoire, expliquant ce chiffre élevé) avec 8 % de complications sévères, et 3,03 % de décès hospitaliers (> 30 jours). Les deux facteurs de risque de mortalité les plus puissants sont la fraction d’éjection et l’âge (figures 10 et 11). Mortalité intrahospitalière 6 Expérience de la Pitié-Salpêtrière Elle rapporte, de 1994 à 2004, 2 552 patients avec lésion du TC, dont 1 678 patients opérés pour une lésion significative isolée du tronc commun de l’artère coronaire gauche, soit environ 10 % des patients et 18 % des pontages du groupe hospitalier (170 TC/an). Le groupe des patients avec une lésion du TC non isolée se compose de 144 patients avec TC significatif ayant bénéficié d’une chirurgie combinée (5 anévrismes du ventricule gauche, 114 aorte, 23 mitrales, 2 myxomes) ; 123 patients redux de pontages coronaires et 606 patients avec des lésions non significatives. Les patients, dont 84 % d’hommes, sont âgés de 28 à 94 ans, avec en moyenne 67 ± 10,3 ans. La fraction d’éjection préopératoire moyenne est de 54 ± 11,6 %, avec 10 % de patients ayant une FEVG inférieure à 40 %, et 30 % 5 4 3 2 1 0 40-55 < 40 > 55 FEVG (%) Figure 10. Mortalité suivant la FEVG. Expérience de la Pitié-Salpêtrière (2 552 TC de 1994 à 2004). Mortalité intrahospitalière 6 1% 5 2% 4 25 % 100 % 95-100 70-95 50-70 72 % Figure 9. Sévérité des sténoses du tronc commun. Expérience de la PitiéSalpêtrière (2 552 TC de 1994 à 2004). 16 3 2 1 0 < 40 40-50 50-60 60-70 70-80 80-90 > 90 Âge Figure 11. Mortalité suivant l’âge. Expérience de la Pitié-Salpêtrière (2 552 TC de 1994 à 2004). La Lettre du Cardiologue - n° 386 - juin 2005 I Dans la littérature, la mortalité est de 4,7 % et la survie à 5 ans de 86,8 %. La mortalité des TC est la même que pour les pontages classiques (J Cardiovasc Surg 2000). Conclusion La chirurgie de revascularisation coronaire du tronc commun gauche doit être pratiquée rapidement. Elle assure une revascularisation complète et durable préservant la fonction ventriculaire gauche. La mortalité péri-opératoire est de 3 à 4 % ; elle est surtout liée à l’âge et à la fraction d’éjection ventriculaire gauche. REVASCULARISATION CHIRURGICALE DES CORONARIENS DIABÉTIQUES Dr P. Leprince (Institut de cardiologie, hôpital de la PitiéSalpêtrière, Paris) La tendance des 15 dernières années est celle d’un nombre croissant de patients diabétiques chez les coronariens opérés avec 26,7 % des cas entre 1996 et 1998 contre 18,6 % entre 1990 et 1992 (Abramov D et al. ATS 2000), et approchant 33 % en 2004 à la Pitié-Salpêtrière. Les coronariens diabétiques ont un risque accru, compte tenu : – de lésions diffuses, concentriques, proximales et/ou distales, calcifiées et souvent silencieuses ; – d’une fonction VG altérée : chez 400 patients diabétiques, la FE moyenne retrouvée est de 54 ± 13 %, et 11 % d’entre eux avaient une FE < 35 % ; – d’une revascularisation moins efficace avec une mortalité passant de 2,7 à 3,74 % ; – d’un risque infectieux majoré de 1,5 à 4,3 % (Szabo, ATS 2002). Améliorations de la prise en charge Elles passent avant tout par le dépistage, le traitement précoce du diabète et de la maladie coronaire des patients diabétiques, et notamment par le progrès de la technique chirurgicale et l’amélioration de la prise en charge péri-opératoire. Progrès de la technique chirurgicale Il existe un avantage indéniable de l’artère mammaire interne gauche et de l’utilisation des doubles mammaires. Cet avantage est d’autant plus marqué qu’il y a une mauvaise qualité de greffons veineux, avec une dysfonction plus sévère si le diabète est mal équilibré (Lorusso R et al. Diabetes 2003). Quant au risque infectieux de médiastinite lors de l’utilisation des artères mammaires, il est nettement diminué par la squelettisation bilatérale de ces artères (Peterson et al. J Thorac Cardiovasc Surg 2003). La Lettre du Cardiologue - n° 386 - juin 2005 N F O R M A T I O N S L’utilisation de la technique de reconstruction coronaire est un atout supplémentaire. Amélioration de la prise en charge péri-opératoire Dans le service de chirurgie cardiaque de la Pitié-Salpêtrière, une étude mené par A. Ouattara et C. d’Allessandro a permis d’évaluer l’importance du contrôle strict de la glycémie. Elle a comparé 200 patients diabétiques avec un contrôle strict de la glycémie (groupe A) versus 200 autres patients diabétiques avec un contrôle standard de la glycémie (groupe B). Les données pré-opératoires (âge moyen : 65 ans ; FE : 54 % ; diabète insulinodépendant [DID] : 25 %) et le nombre de pontages (2,6 pontages/patient, MIG : 98 %) sont comparables. Il y a eu une utilisation des deux artères mammaires internes dans 38 % des interventions du groupe A et dans 16 % de celles du groupe B (p < 0,05). Le pourcentage d’infection de paroi et de médiastinite a été de 4 % dans les deux groupes, et la mortalité hospitalière passe dans le groupe A à 1,5 % contre 3,5 % dans le groupe B (p = 0,06). Un mauvais contrôle glycémique peropératoire est retrouvé comme un puissant facteur de risque d’événements indésirables majeurs, avec un odds- ratio à 7 (p < 0,001) (étude en cours de publication). Les objectifs du contrôle glycémique reposent sur : en préopératoire, l’utilisation d’injections d’insuline souscutanées ; en peropératoire, le maniement d’une perfusion continue d’insuline dont le débit est adapté en fonction de la surveillance de la glycémie toutes les 30 minutes afin d’obtenir une glycémie inférieure à 10 mmol/l ; en postopératoire immédiat, un traitement adapté afin d’obtenir une glycémie inférieure à 7 mmol/l, selon le type de diabète : – diabète non insulinodépendant (DNID) de type II et ne présentant pas de complication : insuline sous-cutanée adaptée à la surveillance de la glycémie toutes les 4 heures, – diabète insulinodépendant (DID), instabilité hémodynamique ou nécessité d’un débit d’insuline peropératoire supérieur à 2 U/h : insuline i.v. avec une surveillance horaire de la glycémie. Conclusion Le diabète est un facteur de risque indépendant de morbimortalité après revascularisation chirurgicale. L’amélioration des techniques chirurgicales et le contrôle strict et adapté des glycémies périopératoires permettent d’obtenir des résultats à court, moyen et long terme proches de ceux obtenus O chez les patients non diabétiques. Remerciements. Nous tenons à remercier les Prs P. Coriat et J. Marco ainsi que les Drs N. Bonnet et P. Leprince, qui nous ont fourni les diapositives relatives à leurs communications. 17