VII/ Discussion ll n’existe pas de technique universelle pour la reconstruction mammaire. Chaque technique a des indications très précises en fonction de la morphologie et du désir de la patiente. Le choix du type de reconstruction doit être le résultat d’une discussion approfondie avec la patiente en lui expliquant les risques de chaque intervention, et les bénéfices attendus et réalisables. Au point de vue économique, les techniques de reconstruction par lambeau pédiculé sont préférés aux lambeaux libres. 1) Comparaison aux autres techniques classiques de lambeaux pédiculés. a) Le grand dorsal Cette technique requiert toujours la pose d’une prothèse (sauf dans le cas de reconstruction par lambeau de grand dorsal autologue) avec les complications qu’il s’en suit . Seul, il est souvent insuffisant pour reproduire un volume correct. D’où la nécessité dans la majorité des cas d’utiliser un prothèse. Il est difficile de recréer un sillon sous mammaire correct. L’aspect naturel de la ptose mammaire est impossible à réaliser. De plus il est très difficile de reproduire le volume du sein restant quand celui-ce est large. C’est pourquoi il est nécessaire de réaliser un second temps opératoire pour réduire le sein controlatéral. Il existe aussi des complications dues à l’implant lui-même, comme l’infection, la formation d’une coque rétractile. Il est aussi souvent nécessaire de changer la prothèse au bout d’un certains temps, la durée de vie médico-légale d’une prothèse est de 10 ans. (Bricout) Pour les reconstructions mammaire avec lambeau de grand dorsal et prothèse, le taux de complication dans certaine série s’élève à 28%(1), comprenant : - Perte de l’implant : 7,7% - Exposition de l’implant : 1,4% - Infection : 4,9% - Rupture : 1,4% - Contraction capsulaire : 5,6% La plupart de ces complications (à part l’infection) ne peuvent survenir lors de la réalisation d’un lambeau mammaire interne. Il n’y a aucune séquelle fonctionnelle après son prélèvement (à la différence du lambeau de muscle grand dorsal.) b) Le TRAM Elle permet de se passer de prothèse. Mais il existe un risque de hernie abdominale non négligeable. Il existe aussi un taux de reprise important pour exérèse du tissu de nécrose. Dans de nombreux cas, le TRAM est insuffisant pour reproduire la projection désirée. Il est aussi difficile de faire accepter à certaines patientes une opération du « ventre » pour une chirurgie à visée « esthétique. » Dans certaines séries, le taux de complication après chirurgie de reconstruction par TRAM pédiculé est de 30%(2). On retrouve dans les séries de TRAM les complications suivantes : - Phlébite 2%. Le lambeau mammaire interne ne nécessite pas un alitement prolongé et est peu douloureux, ce qui diminue le risque de phlébite postopératoire. - Transfusion 3,5% Le lambeau mammaire est une intervention peu hémorragique. - Nécrose partielle du lambeau 12,2% Seules une série plus importante de lambeau mammaire nous permettront d’établir des statistiques convenables. - Eventration : 6% Les complications pariétales représentent la complication majeure des interventions de reconstruction par TRAM. Elles nécessite souvent une reprise chirurgicale et sont très mal vécue par les patientes. Le lambeau mammaire n’est pas délabrant pour l’organisme. Souvent, une laparotomie est nécessaire, ajoutant une nouvelle cicatrice chez une patiente déjà très affectée par la chirurgie. 2) Les points forts. a. Un tissu identique. En premier lieu c’est un procédé de reconstruction qui permet d’apporter à l’organe que l’on souhaite reconstruire un tissu identique à celui d’origine, ce qui n’est pas le cas des autres techniques de reconstruction. Le lambeau mammaire permet donc d’apporter du tissu cutané et glandulaire. La consistance, l’aspect et la couleur du sein reconstruit sont identiques au sein d’origine. Ce qui permet d’éviter « l’effet patch » que peuvent produire les autres lambeaux de reconstruction mammaire. b. Une évolution stable dans le temps. Le lambeau reste souple, la rétraction est quasi-inexistante. Le lambeau garde un volume constant, nous n’avons pas noté de cytostéatonécrose majeure. c. Une intervention peu traumatisante. Cette intervention est peu hémorragique, le temps de l’intervention est d’environ 2h, elle peut donc être utilisée chez des patients ayant un risque chirurgical élevé. Les suites opératoires sont simples avec une sortie possible de la patiente entre J2 et J4 post-opératoire. d. Les autres techniques restent possibles… Elle permet, en cas d’échec de l’intervention, de réaliser d’autres techniques de reconstruction plus classiques sans effet délétère sur cellesci. En effet, la réalisation d’une reconstruction mammaire par lambeau mammaire interne n’interdit en aucun cas la réalisation secondaire d’un lambeau musculaire de grand dorsal ou de grand droit. e. Une rançon cicatricielle minime. La rançon cicatricielle de cette technique est minime, elle n’ajoute aucune cicatrice supplémentaire par rapport à une réduction mammaire pour symétrisation du sein restant. Chez une patiente souvent très affectée par la mastectomie, il est très appréciable de ne pas rajouter de nouvelles cicatrices au niveau du ventre (lambeau de muscle grand droit) et au niveau du dos (lambeau de muscle grand dorsal.) f. Un suivi carcinologique possible. Au niveau du suivi carcinologique, l’examen clinique du sein reconstruit ne diffère pas de l’examen classique, de plus il est tout à fait possible de réaliser une mammographie de contrôle du sein reconstruit, les images retrouvées sont similaires aux images de références pour des seins ayant subi une réduction mammaire. En cas de doute sur le sein restant avant reconstruction, une IRM pourrait être réalisée à la recherche d’une tumeur primitive infra-clinique. e. Une intervention bien acceptée. Au niveau psychologique, après interrogation des patientes, il paraît plus acceptable et plus compréhensible pour une femme de bénéficier d’une reconstruction mammaire à partir du sein restant plutôt que d’utiliser le muscle grand dorsal ou grand droit. En cas d’échec de ce lambeau, la réduction du sein restant est déjà effectuée, permettant de mieux ajuster le volume du nouveau lambeau pour la reconstruction. 3) Les points faibles a. Le risque carcinologique. L’inconvénient majeur de cette technique est l’apport de tissu potentiellement cancérigène au niveau du sein reconstruit. Il est vrai que la probabilité de développer un second cancer du sein primitif controlatéral est plus élevée que dans la population générale(référence Marpeau). C’est pour cela qu’il faut réfuter cette technique pour les patientes ayant un risque de récidive élevé (mutations génétiques, carcinome lobulaire infiltrant.) i. Au niveau du sein reconstruit. En cas de récidive de cancer sur le sein reconstruit nous préconisons une exérèse totale du lambeau. D’autres procédés de reconstruction plus classique pourront alors être utilisés. Le risque de récidive n’est pas augmenté par cette technique. ii. Au niveau du sein donneur. En cas de nouveau cancer diagnostiqué sur le sein donneur, le traitement sera un traitement classique du cancer du sein en fonction de sa taille, de son type histologique et de son extension. Il n’y a pas lieur d’effectuer un geste sur le sein reconstruit car les deux entités anatomiques, après section du pédicule du lambeau, sont indépendantes. b. Les complications classiques Comme dans toutes chirurgie, il existe un certains nombre de complications comme l’hématome, l’infection, la nécrose partielle ou totale du lambeau, la désunion de cicatrice… c. Divers L’autre inconvénient est la nécessité d’un deuxième temps opératoire afin de sectionner le pédicule du lambeau. Mais La plupart des reconstructions mammaires se font aussi en plusieurs temps. Le second temps opératoire peut permettre de reconstruire l’aréole si la patiente le souhaite. Bibliographie : 1. David W. Chang, Yoav Barnea, Geoffrey L. Robb. Effects of an Autologous Flap Combined with an Implant for Breast Reconstruction: An Evaluation of 1000 Consecutive Reconstructions of Previously Irradiated Breasts. Plast Reconstr Surg. 2008 Aug ;122(2) :356-62. 2. P. Tribondeau, F. Soffray. Reconstruction mammaire par lambeau musculocutané unipédiculé de muscle grand droit de l’abdomen (115 cas consécutifs.) Ann. Chir. Plast. Esth. (2008) 53, 309—317