L`expérience de la fatigue chez les malades atteints de cancer

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ÉTUDES
Santé publique 2004, volume 16, no 3, pp. 509-520
L’expérience de la fatigue
chez les malades atteints
de cancer
Fatigue experienced patients suffering
from cancer
S. Rosman (*)
Résumé : La fatigue est un symptôme couramment rapporté par les malades atteints de
cancer. Dans cet article, nous nous intéressons à la manière dont les personnes vivent
avec ce symptôme dans le contexte de leur maladie. S’appuyant sur une enquête
qualitative auprès de 35 patients atteints de cancer, l’analyse montre qu’il existe trois
manières différentes de le vivre et de l’interpréter : la fatigue est « positivée » lorsqu’elle est
associée à l’espoir de guérison, elle est « normalisée » lorsqu’elle est interprétée comme
une conséquence inévitable des traitements, et elle est vécue comme une « immersion »
lorsque toute la souffrance autour du cancer est exprimée à travers la fatigue.
Summary : Fatigue is a common symptom experienced by cancer patients. This article
explores the manner in which people handle living with this symptom within the context of
their disease. Based upon a qualitative survey of 35 cancer patients, the analysis proposes
that there are three different ways of living with fatigue and interpreting it: 1. fatigue is
“positive” when it is associated with the hope of being cured, 2. it is “normalised” when it is
interpreted as an inevitable effect of treatment, and 3. it is lived and undergone as a complete
“immersion” when all of the suffering linked to the cancer is expressed through fatigue.
Mots-clés : fatigue - cancer - expérience - qualité de vie.
Key words : fatigue - cancer - experience - quality of life.
Dans le cadre d’un programme de
recherche (1) conduit en collaboration
avec l’Institut Gustave Roussy (Villejuif) sur le symptôme de la fatigue
chez les patients cancéreux, nous
avons mené une enquête sociologique exploratoire auprès de 35 personnes atteintes de cancer du poumon
* Sociologue, INSERM U 537, Centre de Recherche en Économie et Gestion appliquée à la Santé
(CREGAS), 80, rue du Général-Leclerc, 94276 Le Kremlin Bicêtre Cedex.
(1) Ce programme de recherche a été mené en 1999-2000 avec Catherine Le Gales, Nathalie Costet
(INSERM-CREGAS), Ellen Benhamou, Valérie Lapierre et Nadia Oubouza (Institut Gustave Roussy).
Tiré à part : S. Rosman
Réception : 27/05/2003 - Acceptation : 24/12/2003
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S. ROSMAN
et de cancer du sein. Cette enquête
s’inscrit dans un programme comportant également un volet quantitatif qui
avait pour objectif la validation d’une
échelle de mesure de la fatigue, le
« Functional Assessment of Cancer
Therapy » (FACT) avant son utilisation
dans le cadre d’un essai clinique.
Le volet qualitatif avait pour but
d’analyser, par le biais d’entretiens
approfondis, l’expérience de la fatigue, c’est-à-dire, le sens que lui donnent les malades, à quelle cause ils
l’attribuent et les stratégies mises en
œuvre pour la réduire. Pratiquement
tous les patients interviewés (33 des
35) souffrent de la fatigue, mais les
manières dont elle se manifeste, la
signification que lui donnent les personnes malades, et ses conséquences sur la vie de tous les jours,
varient, comme nous le verrons, selon
la trajectoire de la maladie et l’expérience de la « vie avec le cancer ».
Introduction
Cette enquête se situe au carrefour
de deux domaines de recherche :
celui de la qualité de vie et celui de la
sociologie de la maladie chronique.
Dans le premier domaine, la fatigue
chez le patient cancéreux est un
thème de recherche très développé
depuis une quinzaine d’années. Ces
recherches reposent généralement
sur des questionnaires standardisés,
développés pour mesurer la fatigue et
son impact sur la vie des malades.
Ces questionnaires visent à évaluer la
présence et l’intensité d’un ensemble
de symptômes et la fatigue est l’une
des dimensions étudiées [4, 14, 21].
La plupart de ces outils sont multidimensionnels et prennent en compte
les dimensions physiques, cognitives
et émotionnelles de la fatigue. Le
recours à ces outils permet d’identifier les patients et les traitements à
risque de fatigue. Ainsi, ces recherches nous apprennent que les traitements anti-cancéreux, comme la
radiothérapie et la chimiothérapie, ont
un impact important sur la qualité de
vie des malades et que la fatigue en
constitue un élément majeur. En particulier, la chimiothérapie semble avoir
une incidence élevée sur le niveau de
fatigue du malade. Dans différentes
études présentées par Irvine et al.
[18], il est estimé que plus de 80 %
des patients souffrent de ce symptôme. Richardson et Ream [24], dans
une étude auprès de 129 patients,
observent que la fatigue est même
mentionnée par 90 % des répondants. Curt et al. [7] se sont intéressés à l’impact de la fatigue sur la vie
quotidienne. Leur étude auprès de
379 patients traités par chimiothérapie montre que 30 % des répondants
souffrent de fatigue quotidiennement
et pour 90 % d’entre eux, le symptôme empêchait de mener une « vie
normale ». Les auteurs montrent également l’impact économique de la
fatigue : le symptôme a été à l’origine
d’un changement de statut professionnel (congé maladie, invalidité)
pour 75 % des répondants. Dans le
même ordre d’idées, l’étude de Spelten et al. [26], qui porte sur l’influence
de la fatigue sur le retour au travail
des personnes ayant eu un cancer, a
permis de mettre en évidence que le
symptôme perturbe considérablement
la vie sociale et empêche souvent une
reprise des activités professionnelles.
L’impact de la radiothérapie sur la
qualité de vie des malades atteints de
cancer a également été mesuré à
l’aide des questionnaires. Haylock et
Hart [16] ont montré que la fatigue est
plus importante les jours de traitement et qu’elle diminue pendant les
week-ends. Concernant le déroulement et la durée de la fatigue, Greenberg et al. [13] démontrent qu’elle
L’EXPÉRIENCE DE LA FATIGUE CHEZ LES MALADES ATTEINTS DE CANCER
s’accroît à partir de la seconde
semaine pour atteindre un plateau à
la quatrième semaine de traitement.
Toutefois, contrairement à la chimiothérapie, la radiothérapie n’induirait
pas une fatigue persistante. Irvine
et al. [18] montrent en effet, que trois
semaines après la dernière séance de
radiothérapie, la fatigue avait baissé
jusqu’à son niveau d’avant le traitement pour la majorité des patients.
Plusieurs facteurs favorisent l’apparition de la fatigue, comme la perturbation du sommeil, les nausées et la
douleur chronique [27, 28]. Le rôle de
l’anémie est mentionné par Bruera et
Mc Donald [3] et analysé plus en profondeur par Cella [4] qui a développé
un outil de mesure, le FACT-An, pour
évaluer l’impact de l’anémie et de la
fatigue sur la vie du malade cancéreux. Le lien entre la fatigue et les
facteurs psychologiques a également
été démontré. En effet, le stress, l’angoisse et la dépression contribuent à
l’apparition du symptôme [23, 25] et
augmentent avec l’avancement dans
la maladie [15].
La fatigue peut perdurer plusieurs
années après l’arrêt du traitement.
Dans une étude auprès de femmes en
rémission, et ayant été traitées par
chimiothérapie entre deux et dix ans
auparavant, Berglund et al. [2] montrent que 68 % d’entre elles souffrent
encore régulièrement du symptôme
de fatigue. Pour Jacobson et Stein
[19], la réaction cognitive et l’attitude
développées à l’égard de la fatigue
pendant le traitement, contribuent à
la perpétuation de la fatigue. Ainsi, ils
estiment que les patients qui réagissent en se focalisant sur leurs symptômes et en ajustant leur mode de vie
exclusivement à leur maladie tendent
à développer une fatigue chronique
persistante. Dans certains cas extrêmes, la fatigue peut durer jusqu’à dix,
voire quinze ans après la guérison et
511
devenir une maladie à part entière
[17] qui nécessite un traitement. Dans
ce cas, la fatigue prend le relais de la
maladie : les malades ne souffrent
plus du cancer, mais d’un état de
fatigue extrême et persistant qui
détériore considérablement leur qualité de vie. Ainsi, avec le temps, le
cancer, en tant que maladie chronique, peut se transformer pour disparaître quasi totalement de la vie
des malades et laisser la place à un
symptôme-séquelle, qui devient la
nouvelle maladie.
La fatigue chez le patient cancéreux
a essentiellement été étudiée dans
une perspective quantitative. Les études mobilisant la méthode qualitative
sont, en effet, assez rares. Dans le
meilleur des cas, elle est éventuellement utilisée lors de la pré-enquête
pour faire émerger des hypothèses de
travail et/ou des variables. Face à ce
constat, plusieurs tentatives ont été
entreprises pour renforcer, dans ce
domaine, la méthode qualitative. On
peut citer l’étude de Glaus et al. [11]
qui a permis, grâce à des entretiens
approfondis avec des patients cancéreux et des personnes bien portantes,
de rendre compte de la complexité
du concept de la fatigue. Pour les
patients, la fatigue est exprimée en
termes de souffrance physique, affective et cognitive tandis que pour les
bien portants le symptôme est une
conséquence « normale » de l’effort
physique et nécessaire pour alerter le
corps du besoin de repos. Pearce et
Richardson [22] relèvent également
l’apport de l’approche qualitative qui
permettrait d’accéder à des données
non mesurables concernant le sens,
l’impact et l’expérience de la fatigue.
De nombreux écueils des instruments de mesure de la fatigue pourraient être évités si l’on associait systématiquement la méthode qualitative
à ces enquêtes. Ainsi, l’analyse d’en-
512
S. ROSMAN
tretiens approfondis, conduits conjointement à l’enquête quantitative, permettrait de mieux éclairer le concept
de « fatigue », et de comprendre le
processus de réponse ; on sait aujourd’hui que les personnes, lorsqu’elles
répondent à un questionnaire, tendent à se référer aux situations « les
plus représentatives » pour mieux
gérer la tension entre la variabilité des
situations et la nécessité de donner
une réponse unique [12]. On obtient
ainsi non pas la situation réelle, mais
une « image stylisée » d’un état donné.
Or, des entretiens permettraient d’ajouter
du relief à ces images lissées et de
donner du sens aux concepts mobilisés.
Dans le domaine de la sociologie
de la maladie chronique, le thème de
la fatigue reste, à notre connaissance,
encore inexploré. Si Strauss et ses
collaborateurs [26] se sont intéressés
à la manière dont les personnes
gèrent, au quotidien, l’ensemble des
symptômes entraînés par leur maladie chronique, très peu de travaux ont
porté sur l’expérience d’un symptôme
spécifique. Citons l’exception de la
douleur, explorée par Baszanger [1]
qui montre à la fois comment la médecine a intégré ce symptôme dans son
champ d’exercice, pour en faire une
« médecine de la douleur », mais aussi
comment les patients font face à leur
douleur dans la vie quotidienne.
En sociologie, la fatigue a essentiellement été étudiée soit en association
avec la dépression [8] soit dans le
contexte du travail [20] dans lequel
des concepts comme le « burn out »
ont été développés. En revanche, le
syndrome de la fatigue chronique
(SFC) a donné lieu à de nombreux
travaux [6], souvent orientés sur la
problématique de la médicalisation
d’une affection, mais la fatigue dans
le contexte d’une maladie chronique
n’a pas encore fait l’objet d’analyses
spécifiques.
Pour ces deux principales raisons
– manque de données qualitatives
dans le domaine de la qualité de vie
et manque d’études sur la fatigue
dans le domaine de la sociologie de
la maladie –, il nous a paru intéressant de conduire une enquête qualitative sur l’expérience de la fatigue
chez les patients cancéreux, afin
d’apporter un éclairage du point de
vue des patients et une analyse en
termes d’expériences plutôt qu’en
termes de résultats statistiques.
Méthodes d’enquête
Pour analyser l’expérience de la
fatigue chez les patients cancéreux,
nous avons conduit en 1999-2000
une étude exploratoire à l’Institut
Gustave Roussy, en région parisienne.
Trente-cinq patients ont été interviewés avant ou après leur consultation avec le spécialiste. Les critères
de sélection de l’échantillon étaient
les suivants : être atteint de cancer du
sein ou du poumon et avoir connaissance du diagnostic depuis au moins
un an. Il était en effet important d’avoir
un échantillon de personnes ayant un
recul temporel suffisant par rapport à
leur diagnostic pour positionner l’expérience de la fatigue dans l’histoire
de leur maladie. Les deux pathologies
ont été choisies pour leur impact sur
la qualité de vie des personnes. Les
deux formes de cancer sont, en effet,
connues pour entraîner un niveau de
fatigue relativement élevé.
Les patients étaient contactés par
un médecin par téléphone quinze
jours avant leur rendez-vous avec le
spécialiste. Lors de cet appel téléphonique, il leur a été demandé d’accorder un entretien sociologique dans
le cadre d’une étude sur la fatigue.
Pour le patient, cela signifiait de venir
une heure à une heure et demie plus
tôt ou de rester après la fin de la
L’EXPÉRIENCE DE LA FATIGUE CHEZ LES MALADES ATTEINTS DE CANCER
consultation médicale. Sur 50 personnes contactées, 10 ont refusé de
participer, le plus souvent pour des
raisons de disponibilité (impossibilité
de venir plus tôt et volonté de quitter
l’hôpital immédiatement après la
consultation). Cinq entretiens préalablement accordés n’ont pu avoir lieu
(rendez-vous médical annulé). Les
femmes acceptaient plus facilement
de parler de leur maladie que les
hommes, ce qui explique que près
des trois quart de l’échantillon sont
de sexe féminin.
Profil des interviewés
et guide d’entretien
Nous avons interviewé 19 femmes
atteintes de cancer du sein et 16 personnes avec un cancer du poumon,
dont 7 femmes et 9 hommes. L’âge
moyen du premier groupe est de
51,5 ans et celui du second groupe
58 ans. Quatre-vingt pour cent des
personnes interviewées avaient été
traitées par chimiothérapie et 74 %
par radiothérapie, la majorité d’entre
eux ayant reçu les deux traitements.
L’interview semi-directif se déroulait
dans un bureau mis à la disposition
par un médecin. Je suivais un guide
d’entretien comportant deux grands
thèmes : l’historique de la maladie et
l’expérience de la fatigue. Concernant
le premier thème il s’agissait de
mieux comprendre le contexte dans
lequel la maladie avait été découverte
et comment la personne avait appris
qu’elle était atteinte d’un cancer,
quelles avaient été ses réactions et
celles de son entourage, comment la
maladie se manifeste dans sa vie
quotidienne, et quelles stratégies elle
a élaboré pour faire face au cancer.
Concernant le second thème, les
questions s’orientaient sur la perception de l’origine de la fatigue,
comment et quand elle se manifestait, les conséquences de ce symp-
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tôme sur la vie du malade, ainsi que
le sens donné par le patient à cette
fatigue, les réactions de l’entourage
et les stratégies thérapeutiques mises
en place pour la traiter. Les entretiens, d’une durée moyenne d’une
heure et demie, ont été enregistrés au
magnétophone, retranscrits « verbatim » et analysés selon l’approche de
la théorie fondée de Glaser et Strauss
[10]. Il s’agit dans cette approche de
procéder à un codage fin des entretiens afin de faire émerger, à partir
des données du terrain, les catégories d’analyse et les théories plutôt
que d’imposer au corpus la validation
de théories existantes. Le codage et
la catégorisation ont été réalisés à
l’aide d’un logiciel d’analyse qualitative, WinMax.
Résultats
L’expérience de la fatigue
dans la trajectoire de la maladie
Il ressort de l’enquête que la fatigue
est un symptôme ressenti par la
quasi-totalité des patients interviewés
(33 des 35 patients). Cependant,
l’analyse des entretiens montre que la
notion de « fatigue » renvoie à des
manifestations extrêmement variées
comme la faiblesse physique ponctuelle, le manque d’énergie structurelle, l’épuisement, l’instabilité
émotionnelle, le manque de concentration, la dépression ou encore l’angoisse. En écoutant les patients, on
apprend également que l’expérience
de la fatigue s’inscrit dans un ensemble de symptômes qui déséquilibrent la « qualité de vie » de la personne. Ces symptômes touchent au
corps du malade, en diminuant ses
capacités physiques, et changent son
apparence. De ce fait, les malades
sont confrontés à un corps moins
performant qui, de plus, se modifie au
cours de la maladie. Ce changement
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S. ROSMAN
d’apparence est certes lié à la souffrance physique due à l’évolution du
cancer, mais également aux conséquences des traitements anticancéreux. Ainsi, la fatigue est mentionnée par plus de la moitié des
malades comme un effet secondaire
du traitement, modifiant tant l’apparence physique de la personne que
cela peut aller jusqu’à la sensation
d’une « perte de soi » dans certains
cas extrêmes.
En évoquant dans l’entretien ce
que signifie pour les malades le fait
d’avoir un cancer, comment ils intègrent la maladie dans leur vie sociale,
professionnelle, familiale, et quelle
place ils donnent au symptôme de la
fatigue dans cette expérience, l’enquête a mis en évidence que l’apparition et l’évolution de la fatigue sont
avant tout fortement liées à la manière
de vivre et de faire face à la maladie.
Ainsi, l’analyse des entretiens a permis d’identifier trois manières différentes de vivre et d’interpréter le
symptôme de la fatigue que l’on a
intitulé « la fatigue positivée », « la
fatigue normalisée » et « la fatigue
immersion ». Ces trois catégories ont
été construites à partir d’un travail de
codage des entretiens et les éléments pris en compte dans cette
construction sont le rapport aux traitements et au médecin, les stratégies
thérapeutiques mobilisées pour soulager la fatigue et la perception du
cancer dans la vie du malade.
L’expérience de « la fatigue
positivée »
Contrairement à une idée récurrente dans la littérature qui stipule
que la fatigue est vécue comme un
symptôme nécessairement néfaste [3,
24, 25], on découvre dans les entretiens que les patients peuvent également lui donner un sens positif. En
effet, la fatigue peut être considérée
comme un indicateur utile lorsque le
patient perçoit un risque de récidive.
Cette perception est liée au contexte
de découverte de la maladie. Il s’agit
en effet de patients qui ont découvert
leur cancer « grâce à » une fatigue
« anormalement intense » ou « anormalement longue » qui a été le symptôme déclenchant du recours médical.
Dans ce cas, ils ont développé une
certaine vigilance vis-à-vis de la
fatigue qu’ils ne cherchent surtout
pas à traiter puisqu’elle fonctionne
comme une sorte de baromètre utile
pour détecter à temps les éventuelles
modifications du corps :
« J’ai commencé à ressentir une
fatigue pas normale, je dormais
beaucoup, dès 20 heures, c’était du
soir au lendemain 8 heures ! C’était
une fatigue à ne plus pouvoir tenir
un stylo (…) c’était dormir, dormir,
seulement dormir. J’étais un mort
vivant (…). C’est ça qui m’a mis la
puce à l’oreille, j’ai consulté et on a
découvert que j’avais des ganglions
et après on m’a dit que j’avais un
cancer du sein (…). Aujourd’hui, je
fais attention à cette fatigue parce
qu’elle peut être un signe » (femme,
37 ans, styliste, cancer du sein).
La fatigue est également positivée
lorsqu’elle est associée à l’espoir de
guérison. Cet espoir provient de la
croyance au traitement ; les patients
ont une perception positive de la
chimiothérapie et de la radiothérapie
qui, même si elles entraînent des
effets secondaires, sont « le prix à
payer pour guérir ». Dans certains
cas, le niveau de fatigue est directement lié à la puissance et l’efficacité
présumées du traitement. Plus la
fatigue est intense, plus le traitement
semble efficace et donc plus la
confiance en la guérison est grande.
Inversement, l’absence de fatigue
peut créer des doutes concernant
l’efficacité du traitement :
L’EXPÉRIENCE DE LA FATIGUE CHEZ LES MALADES ATTEINTS DE CANCER
515
« Au début de ma chimio, je n’étais
pas fatiguée du tout, et je me suis
dit : le traitement n’est pas assez
fort… je me suis posée des questions. Après la fatigue est bien
arrivée, j’étais épuisée après la
séance, mais je le supportais bien
car je me disais qu’il fallait passer
par là pour s’en sortir » (femme,
60 ans, retraitée, cancer du sein).
prix à payer oui, pour avoir un traitement » (homme, 40 ans, agent
commercial, cancer du poumon).
On observe dans cette expérience
que les personnes n’évoquent pas
avec leur médecin traitant (cancérologue ou médecin généraliste) leur
symptôme de fatigue. En effet, il n’y a
pas de démarches particulières pour
réduire ou éviter cet effet du traitement. Le traiter priverait les malades
d’un indicateur important qui peut
conduire à la découverte d’une récidive.
Comme dans l’expérience de la
« fatigue positivée », les malades évoquent rarement la fatigue dans la
consultation avec le cancérologue.
Cet élément d’analyse rappelle les
résultats de l’enquête de Vogelzang
et al. [27] qui montrent que presque
la moitié des patients interrogés ne
signalent pas leur fatigue à leur
médecin traitant. Il semblerait que
plusieurs raisons sont à l’origine de
ce qu’on pourrait appeler une « attitude d’autocensure ». Tout d’abord, la
plainte de la fatigue devient difficile à
exprimer lorsque le médecin annonce
dès le début du traitement sa survenue et qu’il la considère comme
« normale ». Cette annonce est en
effet à double tranchant : certes elle
rassure le malade, mais elle l’empêche également d’évoquer par la
suite la fatigue en termes de plainte :
L’expérience de « la fatigue
normalisée »
Cette catégorie renvoie à l’expérience où la fatigue est considérée et
acceptée comme un effet secondaire
« inévitable » et « normal » du traitement. Pour les patients vivant cette
expérience, il s’agit d’une conséquence logique de la radiothérapie ou
de la chimiothérapie. Percevant cependant ces traitements comme extrêmement lourds, et anticipant une
détérioration de leur qualité de vie, les
patients acceptent d’emblée d’adapter les activités de leur vie quotidienne aux limites imposées par le
traitement. Cependant, contrairement
à « la fatigue positivée », dans « la
fatigue normalisée » les patients ne lui
donnent pas de sens positif. La
fatigue n’est pas le « prix à payer pour
guérir », mais plutôt le « prix à payer
pour être traité » :
« La fatigue, je le mets sur le dos
des traitements. J’ai été bien soigné, et ça fait partie du lot. C’est le
« C’était pas un problème pour moi
la fatigue, je savais que c’était un
truc… qu’il fallait faire avec. Je
savais que j’étais traitée, il fallait
bien prendre les inconvénients
hein ? » (femme, 53 ans, employée,
cancer du poumon)
« Mon médecin m’avait dit que le
traitement entraînerait certainement
de la fatigue, qu’il ne fallait pas que
je m’inquiète parce que c’était normal et inévitable. Donc quand
j’étais fatiguée, pendant les rayons,
je ne lui en ai pas parlé, je savais
que c’était lié au traitement. De
toute façon, dans mon cas c’était
tellement normal » (femme, 40 ans,
secrétaire, cancer du sein).
Une deuxième raison réside dans le
fait que les malades anticipent la nondisponibilité du cancérologue pour
écouter des plaintes qui touchent à la
qualité de vie et aux préoccupations
516
S. ROSMAN
quotidiennes. S’ils évoquent facilement la souffrance de la douleur, perçue comme une manifestation de la
maladie, par rapport à la fatigue ils
intériorisent la surcharge du travail de
leur médecin. Cette intériorisation
conduit parfois à une attitude qui
consiste à passer sous silence l’expérience, au quotidien, de la vie avec la
maladie :
« Le médecin, j’ai l’impression qu’il
n’a pas le temps, il est débordé. Ils
sont débordés, ça se voit, ils ne
prennent pas le temps de parler
aux gens » (femme, 51 ans, secrétaire, cancer du sein).
Cette attitude paraît liée au déroulement même de la consultation. Pour
les malades interviewés, elle est
vécue comme un « moment expéditif » qui ne laisse pas de temps pour
évoquer des symptômes liés à leur
qualité de vie. En reprenant le terme
de Ford [9] on peut dire que les
malades vivent le face à face avec
leur cancérologue comme une « consultation fermée » : l’interaction est surtout marquée par la transmission, par
le médecin, d’informations biomédicales (résultats d’examens) et par des
questions fermées qui n’offrent pas
l’espace pour évoquer la qualité de
vie, ou les problèmes émotionnels et
psychosociaux liés au cancer :
« Il m’écoute si, par exemple, je dis
“je suis très fatiguée en ce
moment”, là il va me dire : “oui, ce
n’est pas étonnant, vous avez une
analyse très basse”. Quand ça
touche de près les résultats qui
sont sous ses yeux, là il en tient
compte. Quand ça dépasse ce
cadre, on ne passe pas de temps
là-dessus » (femme, 51 ans, secrétaire, cancer du sein).
Ainsi, les patients évoquent rarement le problème de la fatigue avec
leur cancérologue. Par contre, il res-
sort des entretiens que le médecin
généraliste devient la figure centrale
vers laquelle on se tourne pour aborder les symptômes qui détériorent la
qualité de vie. De ce fait, les patients
procèdent à une sorte de séparation
des plaintes : le cancérologue paraît
être mobilisé pour traiter le cancer
(prescrire les traitements qui « tuent »
les cellules cancéreuses et/ou empêchent la rechute), tandis que le médecin généraliste est plutôt sollicité pour
traiter les conséquences de la maladie sur la vie quotidienne (fatigue,
perte de cheveux, nausées, etc.) :
« Le spécialiste est là pour soigner
mon cancer, pas forcément ma
fatigue, ce n’est pas à lui de s’en
occuper. Il dit d’ailleurs très vite
qu’il faut aller chez son généraliste
pour parler de ces choses-là »
(femme, 40 ans, secrétaire, cancer
du sein).
Si la fatigue semble être acceptée
dans cette catégorie, la durée de
cette acceptation est toutefois limitée
dans le temps. Jusqu’à environ
6 mois après la fin de la thérapie, la
fatigue est attribuée logiquement aux
conséquences du traitement ; le corps
a besoin de se reconstituer et la
fatigue est l’une des principales manifestations de ce processus. Après ce
délai de récupération accordé au
corps, deux évolutions de la fatigue
sont possibles.
Lorsque le corps reprend ses
forces et l’état physique du patient
s’améliore, la fatigue sera naturellement attribuée aux activités de la vie
quotidienne (travail, enfants, ménage,
transport…). Les malades adopteront
alors une attitude de banalisation qui
consistera à « normaliser » la fatigue :
« La fatigue est partie très vite, très
très vite. Une fois que c’est fini, on
est tellement content que ce soit
fini, on respire un grand coup, et on
L’EXPÉRIENCE DE LA FATIGUE CHEZ LES MALADES ATTEINTS DE CANCER
est tellement content de ne plus en
avoir… (…) Et puis les vacances
sont arrivées aussi et la fatigue a
disparu très vite, oui. Le corps
devait récupérer un peu parce que
j’ai un peu maigri par exemple, je
n’étais pas au top de la forme
physique. Mais non, je n’ai plus
ressenti la fatigue après, pas du
tout (…) Aujourd’hui, la fatigue vient
comme chez tout le monde, j’ai
mes enfants qui me prennent de
l’énergie, ma maison, ma mère que
je soigne… ça n’a plus rien à voir
avec le traitement ou ma maladie »
(femme, 50 ans, mère au foyer,
cancer du sein).
Cependant, lorsque la fatigue dure,
on constate qu’il devient de plus en
plus difficile pour les patients de la
considérer comme un effet secondaire « normal » du traitement. Dans
ce cas, une inquiétude peut naître sur
l’évolution de la maladie ou l’efficacité
du traitement et cette inquiétude peut
conduire à une situation d’angoisse
qui se manifeste dans ce que nous
avons appelé l’expérience de « la
fatigue immersion ».
L’expérience de « la fatigue
immersion »
Dans cette expérience, toute la
souffrance du patient vis-à-vis de sa
maladie s’exprime par le symptôme
de la fatigue. La maladie chronique
est vécue comme une « maladie
immersion », pour reprendre la notion
développée par Charmaz [5] : le cancer n’est plus seulement une partie
de sa vie mais il est devenu le principal élément de sa vie quotidienne et
de son identité. Les patients décrivent la fatigue en terme « d’épuisement physique », mais aussi, et surtout, « d’instabilité émotionnelle »,
« détresse psychique » et « dépression ». Ces dimensions peuvent être
mises en perspective avec les résul-
517
tats de l’étude de Hayes [15] qui
démontre bien le lien entre la fatigue
et la dépression. Une certaine lassitude s’installe lorsque la personne se
laisse glisser dans cette situation de
dépression :
« J’ai une grande fatigue dans la
journée, je ne tiens pas le coup
longtemps. Cela me gêne dans la
vie quotidienne, bien sûr, par
exemple, il y a trois semaines, j’en
avais marre (…) Pour moi, la fatigue
est parfois une arme, il m’arrive de
dormir jour et nuit, sans manger,
sans rien du tout. J’ai aussi un profond dégoût pour la nourriture (…),
il y a un ras-le-bol, il y a des moments où on est épuisé dans tous
les sens. C’est vraiment épuisant,
je marche comme un petit vieux, je
ne peux plus rien porter, c’est difficile à vivre… psychologiquement
c’est difficile, le fait de savoir qu’on
a un cancer et qu’on risque de
mourir » (homme, 57 ans, cancer du
poumon, commerçant).
La fatigue peut être vécue comme
une conséquence du cancer (avec la
perception d’un cancer qui ronge un
corps sain), mais elle est surtout liée
aux traitements, et en particulier à la
chimiothérapie :
« Là ça fait un an qu’on a arrêté la
chimiothérapie, je suis encore fatiguée, nauséeuse, je m’écœure vite,
je m’essouffle vite, mais c’est dû
aussi à la chimio lourde qui m’a
usée au niveau du cœur. C’est pour
ça qu’on est fatigué longtemps
après. Moi, je n’ai pas récupéré (…).
Est-ce que j’ai le foie plus fragile que
d’autres, moi ça m’a achevé »
(femme, 42 ans, VRP médicale en
arrêt maladie, cancer du sein).
Dans cette expérience, les traitements anti-cancéreux sont perçus
comme extrêmement nocifs, agressifs, qui attaquent le corps plus qu’il
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S. ROSMAN
ne le guérit. Le souvenir du traitement
(l’odeur, les nausées, la fatigue)
marque pendant de longues années
ces patients, qui développent un profond rejet notamment vis-à-vis de la
chimiothérapie :
« Ce sont des produits chimiques
qu’on vous injecte, rien que l’odeur
quand je vais au prélèvement, c’est
près de la salle de chimio, rien que
l’odeur, je suis malade ! C’est peutêtre bon pour la maladie, mais l’organisme réagit quand même pas
trop bien. Pour être malade comme
ça après, c’est que ça doit être très
agressif » (femme, 38 ans, secrétaire de direction en arrêt maladie,
cancer du poumon).
Ce qui caractérise les patients qui
vivent l’expérience de la « fatigue
immersion » est la forte demande de
réparation de l’aspect physique et
d’intervention thérapeutique. En effet,
à l’inverse de ceux qui vivent l’expérience de la « fatigue positivée », on
observe ici un besoin d’écoute, de
traitement et d’accompagnement qui
doit aider à mieux vivre avec la maladie qui est devenue synonyme de
souffrance et de perte d’identité.
Comme dans la catégorie précédente, c’est le généraliste, et non pas
le spécialiste, qui est sollicité. Souvent, l’objectif de la consultation n’est
pas l’obtention d’un traitement, mais
une écoute dans une relation de
confiance, avec une prise en compte
du cadre de vie du malade :
« Avec mon généraliste, j’en parle
(de la fatigue). Il ne me prescrit rien,
mais il m’écoute, il m’explique, et
ça me rassure. Il prend du temps
pour moi et n’hésite pas à me garder une demi-heure quand j’en ai
besoin » (femme, 51 ans, secrétaire,
cancer du sein).
Lorsque le médecin généraliste ne
répond pas à ces attentes, les
patients se tournent vers d’autres
professionnels de ce qu’on peut
appeler une « médecine d’écoute » ;
on se rend compte en effet que c’est
essentiellement pour des capacités
d’écoute que certains professionnels
sont mobilisés (psychologue, psychiatre, homéopathe…). Le recours à
la médecine va ainsi dans deux directions : d’un côté les patients mobilisent une médecine technicisée et
hyperspécialisée pour traiter la pathologie cancéreuse, de l’autre côté ils
font appel à une médecine d’écoute,
à des professionnels qui témoignent
de la compassion, de la compréhension et qui font preuve de reconnaissance vis-à-vis de symptômes par
ailleurs fortement banalisés par la
médecine technicisée.
Les trois types d’expériences de la
fatigue que nous avons décrites (« positivée », « normalisée » et « immersion »)
ne sont pas figées. En effet, au cours
de leur trajectoire de la maladie, les
personnes peuvent passer d’une
expérience à une autre et connaître
plusieurs manières d’interpréter et de
vivre ce symptôme. Plusieurs trajectoires sont possibles, notamment le
passage de la « fatigue positivée »
vers la « fatigue immersion » ; dans ce
cas la confiance accordée au traitement a certes fait naître un grand
espoir de guérison, mais lorsque le
traitement se termine, le sentiment de
protection disparaît et le « vide » qui
apparaît, peut conduire à une dépression et à une « immersion totale »
dans la maladie et la fatigue. Le
patient peut également passer de la
« fatigue normalisée » à « la fatigue
immersion » : lorsque la fatigue dure
et qu’elle ne peut plus être attribuée
aux traitements, le malade s’interroge
sur la « normalité » du symptôme et va
progressivement lui accorder un statut « pathologique ». Si cette trajectoire est la plus fréquente, d’autres
L’EXPÉRIENCE DE LA FATIGUE CHEZ LES MALADES ATTEINTS DE CANCER
sont possibles et l’évolution ne
conduit pas nécessairement vers « la
fatigue immersion ». En effet, le passage de la « fatigue normalisée » vers
la « fatigue positivée » (baromètre) a
également été observé. Il s’agit ici de
patients chez lesquels le symptôme
de la fatigue (accepté comme normal
et inévitable pendant le traitement) a
disparu avec la fin du traitement. Ces
malades considèrent leur cancer
comme une maladie « traitée », voire
« guérie », mais gardent une certaine
vigilance vis-à-vis des symptômes qui
peuvent éventuellement signaler une
rechute de leur cancer.
L’enquête n’a pas permis de distinguer les trois expériences en fonction
du sexe, de la profession ou l’âge des
patients. Pour cela, l’échantillon était
trop réduit et il ne reflétait pas non
plus une représentativité des patients
cancéreux. Toutefois, l’objectif de
cette enquête n’était pas de dégager
ces tendances, ni d’extrapoler les
résultats à l’ensemble des malades
cancéreux, mais bien de décrire, pour
l’échantillon donné, les différents
types d’expériences autour du symptôme de la fatigue.
Conclusion
Cette enquête qualitative, en s’appuyant sur la parole des malades, a
permis de rendre compte que l’expérience de la fatigue ne dépend pas
exclusivement de la « lourdeur » du
traitement, ni du degré de gravité de
la maladie, comme il est souvent stipulé dans les études quantitatives.
D’autres facteurs sont tout aussi
déterminants, comme le contexte de
découverte et l’expérience de la maladie, le sens qui lui est donné et la perception du traitement. Ainsi, nous
avons vu que lorsque la fatigue était
le symptôme déclencheur du recours
médical, elle peut devenir le principal
519
baromètre qui permettra de surveiller
l’évolution de la maladie. Nous avons
également découvert que lorsque le
cancer est vécu comme une maladie
« traitée » ou « guérie », les patients
tendent à revenir à une situation de
normalisation quant à leur fatigue, qui
sera désormais attribuée aux activités
ordinaires de la vie quotidienne. Cependant, lorsque le cancer est vécu
comme une immersion et que l’individu vit essentiellement à travers son
identité de malade cancéreux, la
fatigue devient le centre de sa vie
qui sera entièrement bâtie sur les
contraintes imposées par ce symptôme. Quant à la perception du traitement : s’il est vécu comme bénéfique,
la fatigue sera acceptée comme le
prix à payer pour guérir ou pour être
traité, mais s’il est perçu comme nocif
et destructif pour le corps, le symptôme de la fatigue sera vécu comme
contraignant et détériorant considérablement la qualité de vie.
Le principal apport de cette enquête
qualitative est d’avoir mis en lumière
des dimensions de l’expérience des
malades qui ne peuvent être révélées
par une enquête quantitative. Ces
résultats viennent ainsi compléter les
données issues d’enquêtes quantitatives, indispensables pour connaître la
prévalence, la fréquence, la durée et
l’intensité de la fatigue, ainsi que le
profil des populations concernées, en
termes de sexe, d’âge, situation familiale, mais aussi de type de tumeur,
traitement et durée de la maladie.
D’où l’intérêt, dans ce domaine de
recherche, surtout si l’on s’intéresse à
un symptôme subjectif comme la
fatigue, de relever le défi de conduire
des recherches fondées sur une combinaison équitable d’une enquête
quantitative et d’une enquête qualitative dont les résultats pourront s’éclairer mutuellement.
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S. ROSMAN
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