TEAM - COURS D`ANALYSE MATHEMATIQUE - Chap. 0

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TUTORAT
ELECTRONIQUE EN
ANALYSE
MATHEMATIQUE TEAM
2010
Année scolaire 2010 - 2011
Cours / Exercices
Auteurs de la Ressource Pédagogique
Charnay Michel
Dubois Gérard
Jai Mohammed
Tutorat Electronique en Analyse Mathématique (TEAM)
Avant-propos
Ce tutorat électronique est constitué de cours de référence en analyse mathématique
associés à des tests de connaissance. Même s’il peut se révéler utile à un groupe plus large, ce
tutorat est destiné à un public insalien bien déterminé : celui des admis directs 3ème année, des
DUT+3 et autres étudiants étrangers d’échange.
Il a été conçu pour combler des lacunes éventuelles en analyse, niveau 1er cycle école
d’ingénieurs, ou pour se mettre à ce niveau, à partir de connaissances élémentaires en
arithmétique car les mathématiques qui y sont proposées sont complètes et autosuffisantes.
Les tests de connaissance permettent d’assimiler les notions développées dans les cours de
référence. Ils sont constitués, à partir d’un chapeau introductif, d’un questionnement sur le
thème choisi avec réponses et explications le tout formant autant de problèmes, ou exercices,
avec solutions commentées. Ces tests viennent aussi compléter les cours de référence qui
comportent eux-mêmes maints exemples d’illustration.
Ce tutorat a pour ambition de contribuer à la formation, et l’intégration en 3ème année,
d’élèves ingénieurs en provenance de filières particulières conformément à une des missions
historiques de l’INSA voulues par le Recteur Capelle. Il a été créé par une équipe
expérimentée connaissant bien les enseignements d’un 2ème cycle école d’ingénieurs.
Ce projet de cours électronique a démarré avec l’aide de plusieurs ressources (type
Bonus Qualité Formation), celle du Centre et du Laboratoire de Mathématiques. Il a ensuite
été supporté pendant deux années par le Département Génie Electrique puis par la Direction
de la Formation. Dorénavant le Centre de Mathématiques, devenu Pôle de Mathématiques,
prend en charge le suivi et la gestion de ce tutorat avec l’appui de la Direction des Systèmes
d’ Information.
Les auteurs (INSA-LYON, novembre 2008).
‘Young men should prove theorems, old men should write books.’
G.H. Hardy (mathématicien britannique 1877-1947)
BIBLIOGRAPHIE
Le cours de référence écrit dans le tutorat TEAM est le reflet des actions pédagogiques des
auteurs à l’INSA-Lyon, tant en premier cycle qu’en Département d’option. Ils ont été influencés par
des ouvrages dont la caractéristique est d’être auto-suffisants, bien ciblés, avec un modeste prérequis mais, néanmoins, amenant le lecteur pas à pas au niveau souhaité. Bien souvent, de tels
ouvrages sont écrits par les anglo-saxons et rompent avec l’esprit encyclopédique cher à Bourbaki.
Ils s’éloignent aussi de l’esprit des classes préparatoires françaises dont le programme est imposé (à
cause du concours) lequel s’inscrit dans un cursus pédagogique bien déterminé. Nous donnons ciaprès des exemples de tels ouvrages. Parmi eux nous retiendrons plus particulièrement celui de
Serge Lang (1927-2005) éminent pédagogue franco-américain qui a formé et influencé toute une
génération de mathématiciens.
P. BAXANDALL & H. LIEBECK ‘Vector Calculus’, Clarendon press. Oxford, 1986
R. BORRELLI and C. COLEMAN ‘Differential equations. A modeling perspective’, John Wiley & Sons
Inc., 2004
J.D. DEPREE & C.W. SWARTZ ‘Introduction to Real Analysis’, John Wiley & Sons Inc., 1988
E. KREYSZIG ‘Advanced engineering mathematics’, John Wiley & Sons Inc., 1999
S. LANG ‘Analysis I’, Addison-Wesley Publishing Company, 1976
C. MOLER ‘Numerical Computing with Matlab’, Society for Industrial Applied Mathematics, 2008
M. REED ‘Fundamental ideas of analysis’, John Wiley & Sons Inc., 1998
˝Tout livre se nourrit non seulement des matériaux que lui fournit la vie, mais aussi et peut-être
surtout de l’épais terreau de la littérature qui l’a précédé˝
Julien Gracq in ‘Préférences. Pourquoi la littérature respire mal’, Corti, 1961
COURS D’ANALYSE
MATHEMATIQUE
Chapitre 0 Préliminaires
Version 2009
Année scolaire 2010 - 2011
Cours
Auteurs de la Ressource Pédagogique
Charnay Michel
Dubois Gérard
Table des matières
Préliminaires
1
1 Ensembles et fontions
1
2 Cardinal d'un ensemble
7
3 Démonstrations en mathématique et éléments de
logique
© [M. CHARNAY, G. DUBOIS], [2009], INSA de Lyon, tous droits réservés.
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1
ENSEMBLES ET FONCTIONS
Nous introduisons dans ette partie les notions d'ensemble, de fontion, de ardinal
d'un ensemble ainsi que les bases de la logique sur lesquelles on s'appuie pour faire des
démonstrations. Pour illustrer le propos on ira souvent herher des exemples d'ensembles
de nombres introduits dans le Chapitre 1, Ÿ1, qui traite des propriétés du orps des réels.
Cela n'est pas vraiment un handiap ar tout au long de es préliminaires nous ferons
appel, très souvent, à l'intuition et au bon sens.
1
Ensembles et fontions
Voii la dénition d'un ensemble due à Georg CANTOR (1845-1918) : un ensemble
résulte de la réunion dans une même entité de ertains objets bien déterminés. On
appelle es objets les éléments de l'ensemble. Si E est un ensemble et x un élément de E ,
on note alors x ∈ E . Si x est un élément d'un ensemble X omprenant les éléments de
l'ensemble E , il se peut que x n'appartienne pas à E ; dans e as on note x ∈/ E .
Un ensemble est déni soit par la liste exhaustive de ses éléments (on dit alors qu'il est
déni en extension) soit par la notation en aolade {x | P (x)} ou {x ; P (x)} qui indique
la olletion d'objets x pour lesquels la proposition P (x) est vraie (on dit qu'il est déni
en ompréhension). Par exemple l'ensemble E suivant, déni en extension,
E ≡ {0, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9}
représente tous les hires utilisés dans la notation arabe. Par ailleurs si P (x) représente
la proposition "le nombre entier x est pair", alors l'ensemble des hires pairs est déni
en ompréhension omme suit
F ≡ {x ∈ E | P (x)}
e qui équivaut à
F ≡ {0, 2, 4, 6, 8} .
Comme autres exemples d'ensembles dénis en extension, il y a l'ensemble N des entiers
naturels :
N ≡ {0, 1, 2, 3, . . .}
ou elui des entiers relatifs :
Z ≡ {. . . , −2, −1, 0, 1, 2, . . .}
alors que l'ensemble Q des nombres rationnels est déni en ompréhension :
Q≡
nm
n
o
| m ∈ Z, n ∈ Z, n 6= 0 .
Pour deux ensembles S et T donnés, on dénit leur réunion, S ∪ T , et leur intersetion, S ∩ T , omme suit :
S ∪ T ≡ {x | x ∈ S ou x ∈ T }
S ∩ T ≡ {x | x ∈ S et x ∈ T } .
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1
ENSEMBLES ET FONCTIONS
Nous dirons que l'ensemble S est un sous-ensemble de T si haque élément de S est aussi
dans T , auquel as on érit S ⊂ T . Si S ⊂ T et S 6= T , nous dirons que S est stritement
ontenu dans T . On note l'ensemble n'ayant pas d'élément par ∅ et on observe que ∅ est un
sous-ensemble de tout ensemble X . Remarquons que, lorsque nous parlons d'ensembles et
d'opérations sur les ensembles, nous supposons qu'il y a un ensemble universel qui ontient
tous les ensembles évoqués. Par exemple si nous parlons d'intervalles réels ou de nombres
rationnels, l'ensemble universel est R, le orps des réels.
Si S est un sous-ensemble de X , le omplément de S dans X noté S C , est l'ensemble des
éléments de X qui ne sont pas dans S , 'est à dire :
S C ≡ {x ∈ X | x ∈
/ S} .
La dénition de S C dépend de l'ensemble X qui ontient S . Plus généralement si T et S
sont des sous-ensembles quelonques de X , le omplément de S dans T , noté T \ S , est
déni par :
T \ S ≡ {x ∈ X | x ∈ T et x ∈
/ S} .
Si S et T sont des ensembles, on dénit leur produit artésien, noté S × T , omme
l'ensemble de tous les ouples ordonnés où le premier élément du ouple appartient à S
et le seond à T :
S × T ≡ {(s, t) | s ∈ S et t ∈ T } .
Ainsi deux ouples (x, y) et (x′ , y ′) de S × T sont identiques s'il y a identité entre x et x′
et entre y et y ′ : x = x′ et y = y ′ ; ils sont diérents sinon. Par exemple, si S représente
l'intervalle fermé [2, 3] et T l'intervalle fermé [1, 4] alors [2, 3] × [1, 4] est l'ensemble des
ouples ordonnés de réels (x, y) tels que 2 ≤ x ≤ 3 et 1 ≤ y ≤ 4. Ainsi [2, 3] × [1, 4] est le
retangle du plan réel dont les sommets sont (2, 1), (3, 1), (2, 4), (3, 4).
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•
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•
3
Si maintenant S et T représentent l'ensemble R des réels, le produit artésien de S et T
est le plan eulidien R × R, noté enore R2 .
Dénition d'une fontion. Soit S et T deux ensembles. Une fontion de l'ensemble
S vers l'ensemble T est un sous-ensemble F de S × T tel que haque s ∈ S apparaît dans,
au plus, un ouple ordonné de F . Pour haque paire (s, t) ∈ F on appelle t la valeur de la
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ENSEMBLES ET FONCTIONS
fontion en s et si le nom de la fontion est f nous érivons t = f (s). On remarquera la
distintion entre F et f . L'ensemble F est le sous-ensemble des ouples ordonnés tandis
que f (s) est le nom du seond élément du ouple ordonné dont le premier élément est s.
Le symbole f est le nom de la règle qui assigne f (s) à s ('est le nom de la fontion) alors
que F est appelé le graphe de f . On onvient de représenter la fontion f de la façon
suivante
f
S → T
s → t = f (s) .
Dénitions. L'ensemble {s | (s, t) ∈ F } est appelé le domaine de f et l'ensemble
{t | (s, t) ∈ F } est appelé l'image de f . Ces ensembles seront désignés par les sym-
boles Dom(f ) et Im(f ). Lorsque le domaine de f est l'ensemble S tout entier on parle
d'appliation f au lieu de fontion.
Nous dirons que "f est une fontion de S dans T " pour indiquer que le domaine de f
est ontenu dans S et l'image de f est un sous-ensemble de T . Nous dirons aussi que "f
est une fontion dénie sur S ′ à valeurs dans T " pour indiquer que Dom(f ) = S ′ ave
Im(f ) ⊂ T .
Exemple 1. Soit une fontion de R dans R donnée par la formule f (s) = s2 − 2 pour
haque réel s. L'ensemble F onsiste en tous les ouples ordonnés de nombres réels de la
forme (s, s2 − 2), 'est à dire
F = (s, s2 − 2) | s ∈ R .
Cet ensemble F , sous-ensemble du plan R2 , est le graphe de f .
La néessité que, dans la dénition d'une fontion, haque s apparaisse omme premier
élément d'au plus un ouple ordonné, assure que pour haque s ∈ Dom(f ) la fontion
a exatement une valeur. Ainsi la ligne vertiale passant par le point (s, 0) de R2 oupe
le graphe de f en exatement un point. Ii le domaine de f est R et l'image de f est le
sous-ensemble [−2, +∞) ≡ {x ∈ R | − 2 ≤ x}.
f (s) = s2 -2
−1
-
√
1
2
√
2
−2
■
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ENSEMBLES ET FONCTIONS
Exemple 2. Soit f la fontion de l'ensemble R dans R dénie par la formule f (s) = ln(s)
pour s > 0. On suppose onnue la fontion logarithme népérien utilisée dans la dénition
de f (s). Elle sera dénie plus loin dans le Chapitre 1. Dans et exemple on a S = T = R
et le sous-ensemble F de S × T = R2 tel que
F = {(s, ln(s)) | s ∈ R et s > 0}
est le graphe de la fontion logarithme naturel. Le domaine de la fontion logarithme est
l'ensemble des réels stritement positifs : Dom(f ) = ]0, +∞) et l'image de f est R tout
entier (f. Chapitre 1, Ÿ8) : Im(f ) = R. Tout ei est résumé dans le graphe de la fontion
f représenté i-après.
f (s) = ln(s)
1
0
1
e=2,718...
■
Exemple 3. On onsidère les ensembles S et T dénis en extension par S = {a, b, c} et
T = {α, β, γ, δ, ε, ζ}. La fontion f de S dans T dénie par f (a) = f (b) = α, f (c) = ζ
peut être illustrée de la façon suivante, haque orrespondane entre un élément de S et
l'élément de T qui lui est assoié par f étant matérialisée par une èhe :
T
S
•
•
a
•
xβ
xα
b
γ
c
x
xε
δ
Ii Dom(f ) = S et Im(f ) = {α, ζ}.
x
xζ
■
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ENSEMBLES ET FONCTIONS
Exemple 4. Les opérations lassiques "addition" et "multipliation" sur l'ensemble des
réels sont dénies par des appliations de R × R dans R :
R×R
(a, b)
+
R×R
(a, b)
−→
R
−→ a + b
−→
˙
R
−→ a·b ou ab
Ces opérations qui assoient à un ouple ordonné de R × R une valeur réelle, peuvent être
illustrées omme suit :
R
(+)
(2, 1)
1
•
•
(·)
•
0
1
•
•
2
3
R
Nous avons ii, bien évidemment, Dom(+) = Dom(·) = R × R et Im(+) = Im(·) = R.
■
Dénitions. Soit f une fontion d'un ensemble S vers l'ensemble T . Si Im(f ) = T
nous dirons que la fontion est surjetive. Si pour haque t ∈ Im(f ) il n'y a qu'un seul
s ∈ S tel que f (s) = t alors nous dirons que f est injetive. Si f est à la fois injetive et
surjetive on dira qu'elle est bijetive ou qu'elle met en bijetion les ensembles Dom(f )
et T ou que f est une bijetion de Dom(f ) sur T . De plus, si Dom(f ) = S , on dira que
f met en bijetion les ensembles S et T .
La fontion f (x) = x2 − 2 de l'Exemple 1 n'est pas surjetive puisque son image est
l'intervalle [−2, +∞) 6= R. La fontion f (x) = ln(x) de l'Exemple 2 est surjetive ar pour
haque t ∈ R il existe un réel s > 0 tel que ln(s) = t. De plus, omme elle est stritement
roissante (s1 < s2 implique ln(s1 ) < ln(s2 )), il en déoule qu'elle est injetive. Cette
fontion logarithme est don une bijetion de son domaine de dénition (l'ensemble des
réels > 0) sur son image (l'ensemble des réels).
L'importane de la propriété d'injetivité, pour une fontion, est qu'elle permet de dénir
la notion de fontion réiproque. Supposons que f soit une fontion injetive d'un ensemble
S vers un ensemble T . Nous dénissons f −1 , appelée fontion réiproque de f , omme la
fontion de T vers S dont le domaine de dénition est Im(f ), et telle que pour haque
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ENSEMBLES ET FONCTIONS
t ∈ Im(f ), la valeur de f −1 en t est l'unique élément s ∈ S tel que f (s) = t. Les fontions
f et f −1 sont en relation omme suit. Pour haque t ∈ Im(f ) nous avons
f (f −1 (t)) = t
et pour haque s ∈ Dom(f ) nous avons
f −1 (f (s)) = s .
Il est lair que f −1 est aussi injetive et que la fontion réiproque de f −1 est la fontion
originelle f .
f
S
s
T
•
•
t = f (s)
f −1
La plupart des fontions qu'on onsidérera par la suite sont des fontions de R dans
R. Dans e as il y a plusieurs manières de fabriquer de nouvelles fontions à partir de
deux fontions données f et g . Nous dénissons la somme des fontions f et g , f + g ,
par
(f + g)(x) ≡ f (x) + g(x)
sur le domaine
Dom(f + g) ≡ Dom(f )
\
Dom(g) .
Nous dénissons le produit des fontions f et g , f g , par
(f g)(x) ≡ f (x)g(x)
sur le même domaine de dénition que préédemment. Enn, nous dénissons la omposition de deux fontions f et g , notée f ◦ g , par
f ◦ g(x) ≡ f (g(x))
sur le domaine de dénition
Dom(f ◦ g) ≡ {x ∈ R | x ∈ Dom(g) et g(x) ∈ Dom(f )} .
Ainsi pour aluler la valeur de f ◦g en x, nous alulons d'abord le nombre g(x) et ensuite
nous alulons f (g(x)). La raison de l'expression ompliquée de Dom(f ◦ g) est que x doit
être dans Dom(g) et g(x) dans Dom(f ) pour que f ◦ g(x) ait un sens. Notons que f ◦ g
et g ◦ f ne représentent pas la même fontion omme l'illustre l'exemple i-après.
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CARDINAL D'UN ENSEMBLE
Exemple 5. Soit f la fontion f (x) =
ave Dom(f ) = {x ∈ R | x 6= 0} et dénissons la fontion g par g(x) = sin(x), (on suppose onnues les propriétés de la fontion
trigonométrique sinus). Le domaine de g est R tout entier et le domaine de f ◦ g est
l'ensemble des réels x tels que g(x) 6= 0 puisque 0 ∈/ Dom(f ). Il en déoule que
1
x
Dom(f ◦ g) = R \ {0, ±π, ±2π, . . .}
et
f ◦ g(x) =
1
.
sin(x)
D'un autre té, puisque sin(x) est dénie sur tout R, on a
Dom(g ◦ f ) = {x ∈ R | x 6= 0}
ave
1
g ◦ f (x) = sin
.
x
On voit bien que f ◦ g et g ◦ f ne représentent pas les mêmes fontions.
2
■
Cardinal d'un ensemble
Deux ensembles S et T ont le même nombre d'éléments, on dit enore le même ardinal , s'il existe une fontion f qui met en bijetion les ensembles S et T .
Résultat 2.1. Soit S , T et U des ensembles. Si S et T ont le même ardinal et si T et
U ont également le même ardinal, il est lair que S et U ont aussi le même ardinal.
Preuve. Si f est la bijetion de S sur T et g elle de T sur U , la fontion g ◦ f est
évidemment une bijetion de S sur U . En eet on a Dom(g ◦ f ) = S = Dom(f ), Im(f ) =
T et Im(g ◦ f ) = U = Im(g) par hypothèse. Don g ◦ f est surjetive de S sur U .
Elle est aussi injetive : si u ∈ U , il existe par hypothèse un unique t ∈ T tel que
g(t) = u et un unique s ∈ S tel que f (s) = t ; d'où l'existene d'un unique s ∈ S tel que
g ◦ f (s) = g(f (s)) = g(t) = u. Par dénition S et T ont don le même ardinal.
f
S
T
×
g
×
U
×
g◦f
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CARDINAL D'UN ENSEMBLE
Un ensemble est appelé ni s'il est non vide et s'il a le même ardinal que l'ensemble
{1, 2, 3, . . . , n} pour un ertain entier naturel non nul n. Dans le as ontraire il est appelé
inni. Cette dénition formalise e que nous faisons habituellement quand nous voulons
déterminer la taille d'un ensemble ni : nous omptons. C'est à dire que nous réalisons
une orrespondane bijetive entre les éléments de l'ensemble et les entiers 1, 2, 3, . . .,
n jusqu'à épuisement des éléments de l'ensemble (n est alors la taille de l'ensemble ni).
Qu'en est-il de la taille d'un ensemble quand il est inni ? C'est un sujet déliat que nous
essayons d'aborder maintenant.
On dira d'abord qu'un ensemble inni est dénombrable s'il a le même ardinal que N⋆
l'ensemble des entiers naturels positifs.
Exemple 1. Soit l'ensemble des entiers relatifs Z = {. . . , −2, −1, 0, 1, 2, . . .}. Nous allons
montrer que Z est dénombrable. En eet, il est faile de vérier que la fontion f , dénie
sur Z et d'image N⋆ , telle que
f (n) =
2n
1 − 2n
si
si
n≥1
n≤0
est une bijetion de Z sur N⋆ qui envoie les entiers de N⋆ sur les entiers naturels pairs et
les entiers négatifs ou nuls de Z sur les entiers naturels impairs.
−4
|
−3
|
−2
|
−1
|
0
|
×
×
2
1
×
3
×
4
×
5
×
6
×
7
×
8
Notons que, selon la dénition, Z et N⋆ ont même ardinal alors que N⋆ est stritement
ontenu dans Z.
■
Résultat 2.2. Si S est un sous-ensemble inni d'un ensemble dénombrable T , alors S
est dénombrable.
Preuve. L'ensemble T étant dénombrable il existe une bijetion f de N⋆ sur T . Les
éléments de S sont un sous-ensemble de T = {f (n) | n ∈ N⋆ }. Soit n1 le plus petit entier
dans N⋆ tel que f (n1 ) ∈ S . Puis posons n2 le plus petit entier plus grand que n1 tel que
f (n2 ) ∈ S . En ontinuant indéniment de ette manière on dénit nk le plus petit entier
plus grand que nk−1 tel que f (nk ) ∈ S . Il est faile de vérier que la fontion g dénie par
k ∈ N⋆
g
−→
f (nk ) ∈ S
est une bijetion de N⋆ sur S . Il s'ensuit que S est dénombrable.
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CARDINAL D'UN ENSEMBLE
Résultat 2.3. Si S et T sont des ensembles dénombrables alors l'ensemble produit S × T
est aussi dénombrable.
Preuve. Puisque S et T sont dénombrables, il existe des bijetions f et g de N⋆ sur
respetivement S et T . Chaque élément de S × T est de la forme (f (n), g(m)) pour des
valeurs partiulières n et m de N⋆ . Soit h la fontion dénie sur S × T à valeurs dans
l'ensemble N⋆ telle que
h
−→
(f (n), g(m))
2n 3m .
Par le Théorème fondamental de l'arithmétique (f. i-après), h donne une orrespondane bijetive entre S × T et un sous-ensemble inni de N⋆ . Selon le Résultat 2.2 et
ensemble inni est dénombrable. Ainsi, grâe au Résultat 2.1, nous onluons que S × T
est dénombrable.
Nous avons eu besoin dans le résultat préédent du Théorème fondamental de l'arithmétique que nous donnons à présent sans démonstration. Dénissons d'abord un nombre
premier omme un entier naturel plus grand que 1 qui n'a pas de diviseur autre que 1
et lui-même. Un début de la liste ordonnée des nombres premiers est 2, 3, 5, 7, 11, 13, 17,
19, 23, . . ..
Théorème 2.4 (Théorème fondamental de l'arithmétique). Chaque entier naturel
positif N ≥ 2 peut être érit de façon unique omme un produit ni de puissanes entières
stritement positives de nombres premiers :
N = ps11 ps22 . . . psnn .
Par exemple l'entier 18 est égal au produit 21 · 32 et 'est la seule façon de l'érire ave
des nombres premiers.
En utilisant les résultats préédents nous allons montrer que l'ensemble Q des nombres
rationnels est dénombrable.
Théorème 2.5. L'ensemble Q des nombres rationnels est dénombrable.
Preuve. Chaque nombre rationnel positif peut-être érit sous la forme mn , ave m, n ∈ N
et n 6= 0, la fration mn étant irrédutible (m et n n'ont pas de fateur ommun). La fontion
f dénie par
m
n
f
−→
(m, n)
donne une orrespondane bijetive entre Q⋆+ , l'ensemble des rationnels stritement positifs, et un sous-ensemble inni de N⋆ × N⋆ . Puisque N⋆ × N⋆ est dénombrable (f. Résultat
2.3), les Résultats 2.1 et 2.2 nous assurent que Q⋆+ est dénombrable. En adaptant un
peu, on montre de la même façon que Q⋆− , l'ensemble des rationnelsSstritement
S ⋆+ négatifs,
⋆−
{0} Q , 'est un
est dénombrable. Puisque Q peut être érit omme la réunion Q
ensemble inni dénombrable omme réunion nie d'ensembles dont haun est, soit ni,
soit inni dénombrable (résultat admis).
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CARDINAL D'UN ENSEMBLE
Tous les ensembles innis que nous avons onsidérés jusqu'ii sont dénombrables. Il n'en
va pas toujours ainsi omme le prouve le théorème suivant qui peut paraître surprenant.
Théorème 2.6. Soit S =]0, 1[ l'ensemle des nombres réels stritement ompris entre 0 et
1. L'ensemble S est un ensemble inni non dénombrable.
Preuve. Remarquons d'abord que S n'est pas ni ar tous les réels de la forme n1 , n ∈ N⋆ ,
sont diérents et appartiennent à S .
Dans ette démonstration nous utilisons des propriétés onernant le développement déimal des nombres réels que nous introduirons au Chapitre 1, Ÿ1. Chaque réel x de l'intervalle
[0, 1] a un développement déimal x = 0, x1 x2 x3 . . . ave xi entier ompris entre 0 et 9.
Chaque développement déimal orrespond à un nombre réel diérent exepté pour les
développements se terminant par des 0 qui orrespondent à des nombres qui peuvent aussi
se représenter par un développement déimal se terminant par des 9. Par exemple 12 peut
être érit 0, 5000 . . . ou 0, 4999 . . ..
La démonstration se fait par l'absurde (f Ÿ3). On suppose que ]0, 1[ est dénombrable.
Alors, dans e as, il existe une bijetion f de N⋆ sur ]0, 1[. Notons x(n)
le j-ième entier
j
dans le développement déimal de f (n). C'est à dire
(1)
(1)
(1)
(1)
(2)
(2)
(2)
(2)
(n)
(n)
(n)
f (1) = 0, x1 x2 x3 . . . xj . . .
f (2) = 0, x1 x2 x3 . . . xj . . .
..
. =
f (n) = 0, x1 x2 x3
..
. =
(n)
. . . xj
...
Nous déterminons maintenant une suite d'entiers y1 , y2 , y3 , . . . omme suit. On hoisit
(1)
y1 omme n'importe quel entier entre 2 et 8 qui n'est pas égal à x1 . On hoisit y2 égal
à n'importe quel entier entre 2 et 8 qui n'est pas égal à x(2)
2 . En ontinuant de ette
façon on hoisit yn égal à n'importe quel entier entre 2 et 8 qui n'est pas égal à x(n)
n . Le
développement déimal
y ≡ 0, y1 y2 . . . yn . . .
orrespond à un unique nombre réel ompris stritement entre 0 et 1 puisqu'il ne se termine
ni par des 0 ni par des 9. Cependant y n'est pas égal à f (1) puisque le développement
déimal de y dière de elui de f (1) en première position. Par ailleurs y ne peut être égal
à f (2) puisque son développement déimal dière de elui de f (2) en deuxième position.
En ontinuant de ette façon on onstate que y dière de n'importe quel f (n), n ∈ N⋆ ,
don y ne peut appartenir à l'image de f . Nous aboutissons don à une ontradition
puisque nous avons supposé que Im(f ) =]0, 1[. Il en déoule qu'une telle bijetion f ne
peut exister et que ]0, 1[ n'est pas dénombrable.
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3
DÉMONSTRATIONS EN MATHÉMATIQUE ET ÉLÉMENTS DE
LOGIQUE
Un ensemble inni qui n'est pas dénombrable est dit non-dénombrable ou qu'il a la
puissane du ontinu (omme on dit que Z, Q et N ont la puissane du dénombrable).
Puisque R ontient l'intervalle ]0, 1[, R est aussi non-dénombrable. En fait R peut être mis
en bijetion ave l'intervalle ]0, 1[. En eet, onsidérons la fontion f (x) = tan(x) dénie
sur l'intervalle ] − π2 , π2 [. Le graphe de f montre que la fontion tangente est une bijetion
de ] − π2 , π2 [ sur R. Puisque la fontion g(x) = πx − π2 est une bijetion de l'intervalle ]0, 1[
sur ] − π2 , π2 [, la omposition f ◦ g donne une orrespondane bijetive entre ]0, 1[ et R. En
onséquene ]0, 1[ et R ont la même puissane, elle du ontinu.
f(x) = tan(x)
0
− π2
π
2
x
f ′ (x) = 1 + tan2 (x)
On a dit préédemment qu'une réunion nie d'ensembles dénombrables est dénombrable.
Ce résultat général est admis ; il a été illustré par l'Exemple 1. Puisque R est la réunion des
nombres rationnels Q et des nombres irrationnels et que les nombres rationnels forment un
ensemble dénombrable, les nombres irrationnels sont néessairement non-dénombrables.
En e sens, il y a beauoup plus de nombres irrationnels que de nombres rationnels.
Toutes les notions développées dans ette partie ont été introduites par Georg CANTOR
(1845-1918) au XIX ème sièle.
3
Démonstrations en mathématique et éléments de
logique
Apprendre à établir des démonstrations, ou preuves, est une étape indispensable
quand on débute en mathématiques. Souvent un résultat ou théorème peut être démontré
de plusieurs façons et on tirera beauoup de prot à omparer plusieurs démonstrations
entre elles. La onstrution de démonstrations mathématiques orretes et élégantes est
un travail diile, qui néessite de la réexion et qui apporte beauoup de satisfations
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3
DÉMONSTRATIONS EN MATHÉMATIQUE ET ÉLÉMENTS DE
LOGIQUE
quand il est réussi.
Un énoné type de théorème onsiste en un ensemble , P , de délarations dites hypothèses et un ensemble, Q, de délarations appelées onlusions. L'énoné du théorème
est que si les délarations de P sont vraies (la proposition P est vraie) alors il s'ensuit que
les délarations de Q sont vraies également (la proposition Q est vraie). Et démontrer le
théorème revient à prouver ette impliation logique. Si la preuve est établie, on dit en
résumé que P implique Q (et on note P ⇒ Q). Les Résultats 2.1, 2.2 et 2.3 ont exatement ette forme. Quelquefois un énoné de théorème ne ontient que les onlusions Q.
C'est le as pour le Théorème 2.5 et le Théorème fondamental de l'arithmétique. C'est
pour faire ourt quand on suppose que le leteur onnaît les hypothèses P . Par exemple
pour le Théorème 2.5 les hypothèses non érites sont : 1) les nombres réels satisfont les
propriétés qui en font un orps ommutatif (f Chapitre 1, §1.) ; 2) Q est l'ensemble des
réels de la forme mn ave m ∈ Z et n ∈ Z⋆ . La première hypothèse pourrait gurer dans
la liste des hypothèses de haque théorème de ette partie du ours, mais ela alourdirait
l'énoné, aussi ette hypothèse est-elle impliite. La seonde hypothèse n'est autre que la
dénition de l'ensemble Q.
Il est très important de noter qu'un théorème qui arme que P implique Q n'arme pas
que l'une ou l'autre de es propositions est vraie. Il arme seulement que si P est vraie
alors Q l'est aussi. Par ailleurs, le fait que P implique Q (proposition direte) ne signie
pas que Q implique P qui est appelé la proposition réiproque. Par exemple onsidérons l'ensemble des élèves d'une ertaine lasse d'un ertain lyée. Soit P la proposition
'x est un garçon' et Q la proposition 'x est blond'. On suppose que P implique Q (tous
les garçons de la lasse sont blonds) ; ela ne signie pas que Q implique P (un membre
x de la lasse peut être une lle blonde).
Dans le as où P implique Q et Q implique P , nous disons que P et Q sont des propositions équivalentes ou que P est vraie si et seulement si Q est vraie (et on note P ⇔ Q).
Si P implique Q nous disons que P est la ondition susante pour Q, pare que si P
est vraie alors Q l'est également. Si Q implique P nous disons que P est une ondition
néessaire pour Q ar Q ne peut pas être vraie sans que P le soit. Ainsi, dire que P est à
la fois ondition néessaire et susante pour Q revient à dire que P et Q sont équivalentes
(elles sont simultanément vraies ou simultanément fausses).
La proposition 'non P ' est une proposition qui est vraie quand la proposition P est fausse
et qui est fausse quand P est vraie. Et si P onsiste en un ensemble d'hypothèses, alors
P aura la valeur fausse si au moins une de es hypothèses est fausse.
Les propositions 'P implique Q' et 'non Q implique non P ' sont logiquement équivalentes,
'est à dire que si l'une est vraie l'autre l'est aussi et inversement. C'est e que nous voyons
maintenant. Supposons que P ⇒ Q et que non Q est vraie ; si non P est fausse alors P
est vraie e qui impliquerait que Q est vraie d'où une ontradition. Don non P doit être
vraie et on a bien non Q ⇒ non P . Supposons maintenant que non Q ⇒ non P et que
P est vraie ; alors Q doit être vraie sinon non P serait vraie (puisque non Q entraîne non
P ) e qui ne peut être ; ainsi on a bien P ⇒ Q.
Cette équivalene logique de 'P ⇒ Q' et 'non Q ⇒ non P ' nous donne don deux moyens
pour prouver que P implique Q. Il y a la preuve direte qui onsiste à supposer P vraie
et à prouver que Q l'est aussi. Et il y a la preuve par ontraposition qui onsiste à
supposer non Q vraie et à montrer que non P est vraie, 'est à dire à montrer l'impliation non Q ⇒ non P qu'on appelle proposition ontraposée de la proposition initiale
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3
DÉMONSTRATIONS EN MATHÉMATIQUE ET ÉLÉMENTS DE
LOGIQUE
P ⇒ Q.
Nous donnons à la fois une preuve direte et par ontraposition pour le résultat de
l'exemple suivant.
Exemple 1. Supposons que x est un nombre réel vériant les inégalités strites x2 −x > 0
et x > 0. Alors e réel vérie l'inégalité x > 1.
Démonstration direte : supposons que x2 −x > 0 et x > 0. Puisque x(x−1) = x2 −x 6= 0,
ni x ni x−1 ne peut être nul ; puisque leur produit est positif ils sont tous les deux positifs
ou tous les deux négatifs. Comme x est positif x − 1 doit l'être aussi ; 'est à dire x − 1 > 0
ou enore x > 1.
Démonstration par ontraposition : supposons non Q vraie, 'est à dire x ≤ 1 ; nous
désirons montrer que non P est vraie 'est à dire que les propriétés x2 − x > 0 et x > 0 ne
sont pas vraies simultanément. Si x > 0, alors en multipliant x ≤ 1 par x nous obtenons
x2 ≤ x e qui implique x2 − x ≤ 0. Maintenant supposons x2 − x = x(x − 1) > 0 alors
puisque x − 1 ≤ 0, nous devons avoir x < 0 puisque le produit x(x − 1) est positif. Ainsi
x2 − x > 0 et x > 0 ne peuvent être vraies simultanément, don non P est vraie.
■
Exemple 2. Soit m un entier naturel quelonque. Si m2 est un nombre pair alors m est
aussi pair.
Démonstration par ontraposition : on remarque tout d'abord que l'ensemble des naturels
se déompose en la réunion des entiers pairs et impairs
N = {2k | k ∈ N}
[
{2k + 1 | k ∈ N} .
Supposons non Q, à savoir m est impair ; m s'érit don m = 2k + 1 ave k ∈ N d'où
m2 = (2k + 1)2 = 4k 2 + 4k + 1 = 2(2k 2 + 2k) + 1 = 2l + 1 e qui montre que m2 est impair
('est non P ).
■
Une méthode de preuve très répandue est la démonstration par l'absurde. Pour montrer que P implique Q on suppose que P est vraie et que Q n'est pas vraie et on montre
alors que ela onduit à une ontradition (ou une absurdité). La preuve du Théorème
2.6 est une preuve par l'absurde.
√ Au Chapitre 1, Ÿ1 nous donnons une démonstration par
l'absurde du résultat : 'le réel 2 n'est pas un nombre rationnel'. Cette démonstration a
été réée dans l'antiquité par Eulide il y a plus de 2000 ans.
Une autre méthode de démonstration est la démonstration par réurrene que nous
expliquons maintenant. Supposons que pour tout entier n positif, Q(n) soit une proposition
dépendant de n. Nous voulons montrer que Q(n) est vraie pour tout n ∈ N⋆ . On établit
que Q(1) est vraie et nous montrons, pour un entier positif k quelonque, que si Q(k) est
vraie alors Q(k + 1) l'est aussi. La proposition Q(k) vraie est appelée l'hypothèse de
réurrene. La proposition 'Q(k) implique Q(k+1)' est l'étape de réurrene. Puisque
Q(1) est vraie, nous onluons de l'étape de réurrene que Q(2) est vraie. Puisque Q(2)
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DÉMONSTRATIONS EN MATHÉMATIQUE ET ÉLÉMENTS DE
LOGIQUE
est vraie, nous onluons, en vertu de l'étape de réurrene, que Q(3) l'est aussi. En
itérant de ette manière nous montrons que Q(n) est vraie pour tout n ∈ N⋆ . Ainsi
une démonstration par réurrene onsiste don à vérier Q(1) et à prouver l'étape de
réurrene. Dans le résultat suivant nous en donnons un exemple simple tiré de la théorie
des nombres.
Résultat 3.0.1. Si n est un entier positif alors on a l'égalité
n(n + 1)
2
1+2+3+···+n =
(E)
Preuve. Ii Q(n) est l'égalité (E). Q(1) est vraie puisque 1 =
. Supposons maintenant
que Q(k) soit vraie pour k entier naturel quelonque, 'est à dire 1 + 2 + · · · + k = k(k+1)
.
2
Alors, ave ette hypothèse de réurrene, on a :
1·2
2
k(k + 1)
+k+1
2
k
= (k + 1)( + 1)
2
(k + 1)(k + 2)
=
2
(k + 1)((k + 1) + 1)
=
.
2
1 + 2 + · · · + k + (k + 1) =
Nous venons de montrer que si Q(k) est vraie alors Q(k + 1) l'est aussi. Il en déoule, par
réurrene, que Q(n) est vraie pour tout n ∈ N⋆ .
Quantiateurs. Pour érire des énonés ou propositions en mathématiques on a souvent reours au quantiateur universel ∀ (pour tout, ou, quel que soit) et au quantiateur existentiel ∃ (il existe au moins un). Par exemple la proposition (vraie) 'tout
entier multiple de 6 est multiple de 2' peut s'érire sous la forme :
(∀n ∈ N)
(6 divise n ⇒ 2 divise n) .
Et la proposition 'il existe un nombre réel dont le arré est 2' peut s'érire :
(x2 = 2) .
(∃x ∈ R)
La plupart des énonés mathématiques demandent pour être orretement formulés l'usage
suessif de plusieurs quantiateurs. Par exemple la proposition 'tout nombre omplexe
admet une raine arrée' se traduit par :
(∀z ∈ C)
ou
(∀z ∈ C)
(∃u ∈ C)
(u2 = z)
(∃u ∈ C ; u2 = z) .
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DÉMONSTRATIONS EN MATHÉMATIQUE ET ÉLÉMENTS DE
LOGIQUE
Deux quantiateurs de même nature qui se suivent dans une proposition peuvent être
intervertis. Ainsi la proposition
(∀x ≥ 0)
(∀y ≥ 0)
(x + y ≥ 0)
(∀y ≥ 0)
(∀x ≥ 0)
(x + y ≥ 0) .
a le même sens que
Mais ei tombe en défaut dès qu'il s'agit de quantiateurs de nature diérente : dans
une proposition mathématique on ne peut pas intervertir les quantiateurs ∀ et ∃ sans
en hanger le sens. Ainsi, par exemple
(∀x ∈ R)
(∃y ∈ R)
(x + y = 0)
(∃y ∈ R)
(∀x ∈ R)
(x + y = 0)
et
n'ont pas du tout la même signiation. La première proposition est vraie ar pour tout
réel x il existe un réel y (= −x) tel que x + y = 0. La seonde est manifestement fausse
ar il ne peut exister une valeur réelle y telle que x + y = 0 pour tout élément x de R.
Les onneteurs logiques et tables de vérité. Ils permettent de relier deux propositions élémentaires pour en faire une seule plus omplexe. Commençons par le "et". Si P
et Q sont deux propositions, 'P et Q' est une nouvelle proposition qui, par dénition, est
vraie lorsque les propositions P et Q sont toutes les deux vraies, et fausse dans tous les
autres as. Voii e que l'on appelle la table de vérité du "et" :
P
V
V
F
F
Q
V
F
V
F
P et Q
V
F
F
F
.
Terminologie : La proposition 'P et Q' est enore appelée onjontion de P et Q.
Par exemple si P est la proposition '12 est divisible par 2' et Q '12 est divisible par 3', la
proposition 'P et Q' orrespond à '12 est divisible par 2 et par 3' et toutes es propositions
sont vraies.
Poursuivons par le onneteur "ou". Si P et Q sont deux propositions, 'P ou Q' est une
nouvelle proposition, vraie dès que l'une au moins des deux propositions P et Q est vraie.
Voii la table de vérité du "ou" :
P
V
V
F
F
Q
V
F
V
F
P ou Q
V
V
V
F
.
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DÉMONSTRATIONS EN MATHÉMATIQUE ET ÉLÉMENTS DE
LOGIQUE
Terminologie : La proposition 'P ou Q' est enore appelée disjontion de P et de Q.
Exemple 3. Soit n un entier naturel et les deux propositions P (n) : 'n est pair' et
Q(n) : 'n est impair'. La proposition 'P (n) ou Q(n)' est vraie pour tout entier n alors
que la proposition 'P (n) et Q(n)' est toujours fausse (tout entier naturel est soit pair soit
impair). Cei est illustré par la table de vérité suivante :
P (n) Q(n)
V
F
F
V
P (n) ou Q(n)
V
V
P (n) et Q(n)
F
F
■
Conernant les propositions P et Q nous avons expliqué préédemment e que signie
'P implique Q' que nous avons noté 'P ⇒ Q'. Le symbole impliation "⇒" est en fait
un onneteur qui dénit une nouvelle proposition à partir de P et de Q. La proposition
'P ⇒ Q' est, par dénition, la proposition 'non P ou Q' dont voii la table de vérité :
P
V
V
F
F
non P Q non P ou Q P ⇒ Q non Q non Q ⇒ non P
F
V
V
V
F
V
F
F
F
F
V
F
V
V
V
V
F
V
V
F
V
V
V
V
et l'on retrouve bien le fait que 'P ⇒ Q' est vrai lorsque P étant vrai Q l'est aussi
(mais pas seulement) et faux lorsque P étant vrai Q est faux. Dans ette table on vérie
également l'équivalene logique entre les propositions P ⇒ Q et non Q ⇒ non P dont on
a parlé plus haut.
Le dernier onneteur logique est l'équivalene noté "⇔". Si P et Q sont des propositions, on dira que P est équivalente à Q, et on notera 'P ⇔ Q', si on a à la fois 'P ⇒ Q'
et 'Q ⇒ P '. Voii la table de vérité permettant de déterminer les valeurs de la proposition
'P ⇒ Q et Q ⇒ P ' selon les valeurs des propositions P et Q :
P
V
V
F
F
Q
V
F
V
F
P ⇒Q
V
F
V
V
Q⇒P
V
V
F
V
P ⇒ Q et Q ⇒ P
V
F
F
V
P ⇔Q
V
F
F
V
.
On notera que la proposition 'P ⇔ Q' est vraie lorsque P et Q sont toutes les deux vraies
ou toutes les deux fausses et seulement dans es as là.
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DÉMONSTRATIONS EN MATHÉMATIQUE ET ÉLÉMENTS DE
LOGIQUE
Négation d'une proposition. Soit P une proposition. On a vu que la négation de P ,
notée 'non P ', est la proposition qui prend la valeur vraie lorsque P est fausse et la valeur
fausse quand P est vraie.
Si P et Q sont des propositions, voii quelques règles à retenir onernant des propositions
logiques érites ave P et Q et impliquant la négation.
Règle 1 : La négation de 'P et Q' est 'non P ou non Q' omme le onrme le tableau
de vérité suivant :
non ( P et Q )
F
V
V
V
P
V
V
F
F
Q
V
F
V
F
P et Q
V
F
F
F
non P non Q non P
F
F
F
V
V
F
V
V
ou non Q
F
V
V
V
Exemple 4. Si P (n) est la proposition 'l'entier n est multiple de 14', on peut érire P (n)
sous la forme 'n est multiple de 2' et 'n est multiple de 7' ; d'où l'ériture de la négation
de P : 'n n'est pas multiple de 2' ou 'n n'est pas multiple de 7'.
■
Règle 2 : La négation de 'P ou Q' est 'non P et non Q' et voii la table de vérité :
non ( P ou Q )
F
F
F
V
P
V
V
F
F
Q
V
F
V
F
P ou Q
V
V
V
F
non P
F
F
V
V
non Q non P
F
V
F
V
et non Q
F
.
F
F
V
Exemple 5. Si P (n) est la proposition 'l'entier n est pair' et Q(n) la proposition 'l'entier
n est impair', la négation de 'P (n) ou Q(n)' est 'l'entier n est impair et n est pair' et ette
proposition est toujours fausse. La proposition 'P (n) ou Q(n)' est don, elle, toujours
vraie.
■
Règle 3 : P et Q étant deux propositions, la négation de 'P ⇒ Q' est la proposition 'P
et non Q' omme l'indique la table suivante :
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DÉMONSTRATIONS EN MATHÉMATIQUE ET ÉLÉMENTS DE
LOGIQUE
P
V
V
F
F
Q
V
F
V
F
P ⇒Q
V
F
V
V
non (P ⇒ Q) non Q P et non Q
F
F
F
.
V
V
V
F
F
F
F
V
F
Exemple 6. Pour n entier naturel, soit P (n) la proposition 'n2 est pair' et Q(n) la
proposition 'n est pair'. On a vu dans l'Exemple 2 que la proposition 'P (n) ⇒ Q(n)' est
vraie. Comme non Q(n) est 'n est impair', la négation de l'impliation préédente s'érit
'n2 est pair et n est impair' et ette proposition est fausse (si n2 est pair n l'est aussi).
■
En e qui onerne la négation de propositions faisant intervenir des quantiateurs la
règle est la suivante, sahant que, pour un élément x d'un ensemble E , on note P (x) et
Q(x) des propositions onernant x.
Règle 4 : La négation de '(∀x ∈ E) (P (x))' est '(∃x ∈ E) (non P (x))'. De même la
négation de '(∃x ∈ E), Q(x))' est '(∀x ∈ E) (non Q(x))'.
Exemple 7. Soit la proposition, manifestement fausse, '(∀n ∈ N) (n est divisible par
2)' ; sa négation s'érit '(∃n ∈ N) (n n'est pas divisible par 2)' et ette proposition est
vraie (n = 3 onvient).
■
Exemple 8. Revenons sur la situation évoquée en début de paragraphe ave E l'ensemble des élèves d'une ertaine lasse d'un ertain lyée. Soit P (x) la proposition 'l'élève
x est un garçon' et Q(x) la proposition 'l'élève x est blond'. La proposition 'tous les
garçons de la lasse sont blonds' s'érit
(∀x ∈ E) (P (x) ⇒ Q(x)) .
La négation de ette proposition est 'il existe un élève de la lasse qui soit un garçon et
non blond' 'est à dire
(∃x ∈ E) (P (x) et non Q(x))
et l'on retrouve bien la Règle 4 ar 'non (P (x) ⇒ Q(x))' est 'P (x) et non Q(x)' selon la
Règle 3.
■
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