PAC • Précis d’Anesthésie Cardiaque CHAPITRE 27 ECHOCARDIOGRAPHIE TRANSOESOPHAGIENNE 3ème partie : pathologies cliniques Edition: Mai 2010 Mise à jour : Novembre 2011 ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 1 Table des matières Ischémie myocardique Altérations cinétique segmentaire IM ischémique Complications de l’ischémie Monitorage de l’ischémie Chirurgie à cœur battant OPCAB Laser transmyocardique Endoprothèses valvulaires Plastie mitrale percutanée Cardiomyopathies Cardiomyopathie dilatative Cardiomyopathie hypertrophique Autres cardiomyopathies Dysfonction ventriculaire Insuffisance ventriculaire Insuffisance ventriculaire : chirurgie Pathologie péricardique Péricardite Tamponnade Tamponnade postopératoire Transplantation et urgences Transplantation cardiaque 2 2 10 13 19 21 21 24 24 30 34 34 35 41 47 47 50 56 57 59 65 68 68 Transplantation pulmonaire Traumatisme thoracique Aorte thoracique Examen de l’aorte thoracique Athéromatose Echographie épiaortique Anévrysme Dissection Traumatisme aortique Endoprothèses vasculaires Interventions chirurgicales Cardiopathies congénitales Nomenclature anatomique Retour veineux et oreillettes Jonction auriculo-ventriculaire Pathologies ventriculaires Jonction ventriculo-artérielle Segment artériel ETO chez les congénitaux Conclusions Bibliographie Auteurs 74 75 79 79 84 86 87 90 97 99 100 103 103 113 122 125 140 149 152 154 155 162 Ischémie myocardique Altérations de la cinétique segmentaire (ACS) Anatomie coronarienne Dans une position intermédiaire entre la vue court-axe de la valve aortique (40°) et la vue court-axe de l’aorte ascendante (0°), on aperçoit clairement l’origine du tronc commun (TC) au milieu du sinus de Valsalva gauche (à 2 heures). Le départ de la coronaire droite (CD), au milieu du sinus de Valsalva droit, est situé à 6-7 heures (Figure 27.1). Comme le trajet des deux vaisseaux n’est pas dans le même plan, il est rare de les voir dans la même vue. La dimension des ostia coronariens est de 4-8 mm. Le TC se divise en artère interventriculaire antérieure (IVA), qui se dirige verticalement vers le bas de l’écran (flux parallèle à l’axe Doppler), et en artère circonflexe (CX), qui se dirige vers le sillon auriculo-ventriculaire gauche et passe sous l’appendice auriculaire gauche (à droite de l’écran); on la retrouve en court-axe en vue 2-cavités à 90°. La CD se coude peu après son départ pour s’orienter vers la gauche de l’écran. La CD est également visible en long axe de la valve aortique (120°), où elle se détache du sinus de Valsalva droit et se dirige vers le bas de l’écran. Selon l'orientation de l'aorte, notamment dans les bicuspidies, il arrive que l'autre sinus de Valsalva en long-axe ne soit pas le noncoronarien mais le coronarien gauche; on y voit alors le départ du TC (Figure 27.1C). Il existe une multitude de variations anatomiques congénitales de l’arbre coronarien (voir Figure 27.147). Au moyen du Doppler couleur, il est possible de visualiser le flux dans les 2-3 premiers centimètres des troncs coronariens ; la limite de Nyquist est fixée à 0.5 m/s. Le flux est essentiellement diastolique dans le TC, mais systolo-diastolique dans la CD. Le Doppler pulsé peut être correctement aligné avec ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 2 le flux dans l’IVA et dans la CD, ce qui en permet l’affichage spectral (Figure 27.2). Toutefois, cet examen est peu précis parce que les vaisseaux suivent le mouvement translationnel et rotationnel du cœur en systole ; ils se déplacent de haut en bas, ce qui modifie la Vmax enregistrée, et sortent souvent de la fenêtre d’échantillonnage au cours du cycle cardiaque. A B Septum interauric OG TC CX APD FCG FNC CCVG FCD FCD IVA Ao * CD CD VD OG D C ST VAo OD CCVD Anévr Figure 27.1 : Schéma anatomique des coronaires. A : Vue court-axe de l’aorte ascendante et de la valve aortique 0° - 40°, avec le tronc commun jusqu’à sa bifurcation (à 2 heures) et la coronaire droite (à 6 heures). B : Vue long-axe 120° de la valve aortique et de l’aorte ascendante. C : Tronc commun court. Un TC court ou une origine séparée de l’IVA et de la CX sont deux malformations précieuses à connaître avant d’administrer une cardioplégie par canulation directe des coronaires. D : anévrysme de la coronaire droite. TC : tronc commun. CX : artère circonflexe. IVA : artère interventriculaire antérieure. CD : artère coronaire droite. FCD : feuillet coronarien droit de la valve aortique. FCG : feuillet coronarien gauche. FNC : feuillet non-coronaire. APD : artère pulmonaire droite. ST : sinus transverse. Systole Systole Diastole Diastole D S Vélocité A B D S © Chassot 2010 Figure 27.2 : Flux coronaire. A : flux dans l’artère interventriculaire antérieure (IVA) en vue basale court axe de la valve aortique à 40° ; la composante systolique S est de faible vélocité. B : flux dans la coronaire droite en vue long axe de la valve aortique à 120° ; le flux systolique S est plus important que le flux diastolique D. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 3 Contraction segmentaire La perfusion myocardique est répartie en 3 territoires correspondant aux 3 troncs coronariens : artères coronaire droite (CD), interventriculaire antérieure (IVA) et circonflexe (CX) (Figure 27.3). Le VG est subdivisé en 4 parois selon son court-axe (parois antérieure, latérale, postérieure et septale) et en 3 régions selon son long axe (régions basale, médio-ventriculaire et apicale), qui sont mises en évidence dans les différentes vues : En vue 4-cavités rétrocardiaque à 0°, parois septale et latérale du VG ; En vue 2-cavités rétrocardiaque à 90°, parois antérieure et inférieure du VG ; En vue long-axe rétrocardiaque à 120°, paroi postérieure et antéro-septale ; En vue transgastrique court-axe à 0°, parois septale, inférieure, postérieure, latérale et antérieure du VG (en tournant dans le sens horaire) ; cette incidence visualise simultanément les trois territoires coronariens dans leurs segments médio-ventriculaires, mais les deux tiers du VG échappent à cette vue, qui ne met en évidence que 17% des altérations de la cinétique segmentaire [140] ; L'apex anatomique est visible en 2 cavités à 90° et en long-axe à 120° ; c’est la région la plus difficile à visualiser correctement en ETO ; elle présente un degré d’épaississement supérieur au reste du VG. Figure 27.3 : Territoires coronariens en vue court axe transgastrique (TG), en vues 2 cavités et 4 cavités rétrocardiaques, et en vue schématique. Cette dernière est une projection circulaire de la vascularisation des différents segments. CD : artère coronaire droite. CX : artère circonflexe. IVA : artère interventriculaire antérieure. Les segments 13, 15 et 17 peuvent être vascularisés par la CD (interventriculaire postérieure) ou l’IVA (interventriculaire antérieure). Le segment 14 peut être vascularisé par l’IVA ou la CX, et le segment 16 par la CX ou la CD. 5 11 CD 4 10 16 6 12 13 17 15 9 14 7 8 2 1 CX IVA Vue court axe TG 3 Vue schématique CD CX 0° 90° Ant IVA Post Lat Apex © Chassot 2011 Vue 2 cavités Vue 4 cavités Selon la nomenclature actuelle, le corps du VG est divisé en 17 segments (Figure 27.4) [28]. Cette numérotation commence au sillon interventriculaire antérieur à la base (segment 1) et tourne dans le sens anti-horaire en regardant le VG depuis devant. La zone basale et la zone médio-ventriculaire comprennent chacune 6 segments, et la zone apicale seulement quatre ; le 17ème segment est la coiffe apicale au-delà de la cavité ventriculaire. La contraction segmentaire est caractérisée par deux mouvements : un épaississement et un raccourcissement. Les deux éléments doivent être présents pour que la contraction puisse être qualifiée ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 4 de normale. En systole, le myocarde s'épaissit de 30 à 45% ; le raccourcissement radiaire est de 2045% et le raccourcissement longitudinal de 15-20%; la torsion systolique du VG est de 15-20°. La grande fourchette de ces valeurs vient du fait que la course radiaire de chacune des 4 parois du VG n’est pas la même (Figure 27.5) [94]. Paroi latérale : Paroi antérieure : Paroi postérieure : Paroi septale : 45% ; 38% ; 30% ; 20%. 5 6 Figure 27.4 : Numérotation des 17 segments du VG. La numérotation débute au sillon interventriculaire antérieur à la base du ventricule et tourne dans le sens anti-horaire ; il y a 6 segments au niveau du tiers basal, 6 au niveau du tiers médio-ventriculaire et 4 au tiers apical ; le 17ème segment est la coiffe apicale [20]. 4 1 3 2 VD 11 12 7 10 9 8 16 15 13 14 17 © Chassot 2011 Figure 27.5 : Les quatre quadrants du VG n’ont pas le même raccourcissement radiaire. Ce dernier est plus important dans les parois latérale et antérieure, et plus faible dans les parois postérieure et septale. Il est plus marqué à la base qu’à l’apex dans les parois antérieure et latérale, mais plus faible à la base dans la paroi postérieure ; de ce fait, la partie postéro-basale semble souvent hypokinétique par rapport au reste du VG. Le septum a la course radiaire la plus faible [94]. Lat Ant Post Sept Base Mi-VG Apex 40 20 40 20 40 20 40 20 Raccourcissement radiaire (%) La partie sous-endocardique a un déplacement radiaire qui est le double de celui de la partie sousépicardique. L’épaississement et le mouvement de torsion systolique sont plus importants à l’apex. La contraction commence à l’apex et se termine dans la chambre de chasse. Cette hétérogénéité de la contraction ventriculaire gauche a des conséquences sur l’examen échocardiographique. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 5 Le grand déplacement des parois latérale et antérieure en fait les régions les plus importantes pour la performance ventriculaire. Il faut un minimum de deux quadrants fonctionnels pour assurer la survie du patient. Ayant une course radiaire de moindre amplitude, la paroi postéro-basale peut paraître hypokinétique à l’examen échocardiographique alors que sa contraction est physiologique. Le septum basal, partiellement fibreux, a peu d’épaississement. La contraction des segments basaux (grand diamètre) propulse davantage de volume que celle des segments apicaux (petit diamètre). Un infarctus a un retentissement hémodynamique différent selon sa localisation. Ischémie myocardique La recherche d’ACS commande obligatoirement de balayer la totalité des différents territoires coronariens et d’y observer le degré de raccourcissement radiaire et d’épaississement de paroi. Il se peut que certains segments aient un déplacement vers le centre du à la contraction des zones adjacentes, d’où l’importance d’en observer simultanément le degré d’épaississement, et de visualiser chaque région dans plusieurs plans. Les vues tronquées ou tangentielles induisent en erreur ; il est de la plus haute importance de respecter strictement les plans de coupe standards. Les ACS sont classées en cinq catégories (Tableaux 27.1 et 27.2) : 1 - normokinésie ; la paroi du VG s’épaissit de 35-45% en systole. 2 - hypokinésie légère ; épaississement de 10-30% ; correspond à une diminution de 50% du flux coronaire. 3 - hypokinésie sévère ; épaississement de ≤ 10% ; correspond à un infarcissement de 20% de l’épaisseur de paroi. 4 - akinésie ; absence d’épaississement, paroi inerte ; diminution du flux coronaire à 5-10% de la norme, infarcissement de > 35% de l’épaisseur de paroi. La zone immobile peut apparaître plus importante que celle qui est réellement ischémiée à cause de la traction effectuée sur le voisinage par la région akinétique (tethering effect). 5 - dyskinésie ; le segment s’expand en systole au lieu de se contracter (mouvement paradoxal) ; l’anévrysme en un cas particulier. 0 - absence d’image, segment inobservable. Tableau 27.1 Evaluation de la contractilité segmentaire Raccourcissement radiaire (%) 1 – Contraction normale 2 – Hypokinésie modérée 3 – Hypokinésie sévère 4 – Akinésie 5 – Dyskinésie Epaississement (%) > 30% 10 – 30% < 10% 0 allongement > 25% 20% 10% 0 amincissement L’addition des points (1 à 5) divisée par le nombre de segments observés permet de construire un score d’ischémie utile pour quantifier les ACS. Pour être significative, une nouvelle ACS doit représenter une aggravation de 2 échelons. Il faut une réduction du flux coronarien d’au moins 50% pour voir apparaître une ACS. Une hypokinésie correspond à un infarctus de 20% de l’épaisseur de paroi, et une akinésie à un infarctus de > 40%. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 6 Tableau 27.2 Traduction échocardiographique de l’ischémie coronarienne Diminution du flux coronarien de 50% : Diminution du flux coronarien de 80% : Interruption totale du flux : hypokinésie akinésie nécrose en 20 minutes* Infarctus sous-endocardique : Infarctus de 20% de l’épaisseur de paroi : Infarctus de 40% de l’épaisseur de paroi : en général pas d’ACS hypokinésie akinésie Infarctus de > 15% de la masse ventriculaire : Infarctus de > 35% de la masse ventriculaire : FE diminuée choc cardiogène * : en l’absence de collatéralisation ACS : altération de la cinétique segmentaire. FE : fraction d’éjection. En cas d’akinésie, l’aspect structurel du myocarde a une valeur pronostique : s’il paraît normal, il se peut que le myocarde puisse récupérer après une revascularisation , car il s'agit le plus souvent d'une hibernation ; au contraire, une zone très échogène et amincie (< 6 mm) est probablement infarcie et cicatricielle (tissu fibreux). Une reprise de la contraction sous perfusion de dobutamine (5-10 mcg/kg/min) est caractéristique d’une zone récupérable, donc justifiant un pontage aorto-coronarien, alors qu’une zone infarcie ne réagit pas. Ce phénomène a son importance en salle d’opération, car une revascularisation incomplète quadruple les risques de complications cardiaques. Toutefois, l'IRM est actuellement la meilleure technique pour juger la viabilité du myocarde. La maladie de Takotsubo est une ballonisation apicale aiguë transitoire du VG; cette dysfonction soudaine de l'apex du VG mime un infarctus mais ne montre aucune lésion coronarienne à l'angiographie (voir Chapitre 13, Maladie de Takotsubo). Les ACS peuvent également apparaître suite à des causes non-ischémiques : Hétérogénéité accentuée de la contraction ventriculaire, hypokinésie relative normale de la paroi postéro-basale ; Mouvements de translation et de rotation du coeur ; Bloc de branche ou ou électro-entraînement par un pace-maker ; Extrasystolie ventriculaire ; Asynchronisme de contraction dù à une dilatation ventriculaire ; Traction effectuée sur le voisinage par la région akinétique ; Dyskinésie du septum interventriculaire lors de l’ouverture du péricarde (modification de l’interdépendance ventriculaire) ; Aplatissement du septum interventriculaire en cas de surcharge ventriculaire droite systolique (hypertension pulmonaire) ou diastolique (surcharge de volume) ; ce phénomène mime une hypokinésie septale ; Immobilisation basale par une prothèse mitrale ; Augmentation brusque de postcharge ou baisse soudaine de précharge ; Sensibilité abaissée lorsque la fonction ventriculaire est mauvaise ; Image oblique et coupe tronquée de la paroi (le plus fréquent !). Dans ces situations, l’observation du degré d’épaississement systolique de la paroi est un critère plus fiable que son déplacement. Le septum interventriculaire peut présenter un mouvement paradoxal sous forme d’un bascule droitegauche au cours de la systole. Plusieurs origines sont possibles. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 7 Bloc de branche : la désynchronisation fait que le septum ne se contracte pas simultanément avec le reste du ventricule ; il bascule entre la droite et la gauche en fonction de la pression intraventriculaire gauche et de sa propre contraction, qui est tardive. Pace-maker : la stimulation du septum est précoce, et sa relaxation a lieu avant la fin de la contraction du reste du VG. Péricardotomie : n’étant plus contenu par le péricarde, les ventricules peuvent se dilater ; le septum bascule dans le VD dont la pression baisse. Hypertension pulmonaire : comme le pic de pression du VD est plus retardé que normalement par rapport à celui du VG à cause de la postcharge élevée, le septum est d’abord repoussé vers la droite lorsque la pression intraventriculaire gauche est maximale, puis vers la gauche lorsque la pression intraventriculaire droite maximale droite est atteinte ; la haute pression droite en cas d’hypertension pulmonaire fait alors basculer le septum dans le VG en télésystole et protodiastole. Surcharge de volume : la dilatation diastolique du VD repousse le septum vers la gauche ; ce dernier reprend sa position en systole. Péricardite constrictive ou tamponnade : en respiration spontanée, le septum a un mouvement oscillant synchrone avec la fréquence respiratoire, puisqu’il suit les variations de remplissage des deux ventricules en fonction de la pression intrathoracique (voir Chapitre 16). De nouvelles modalités échocardiographiques peuvent faciliter le diagnostic d’ischémie myocardique. La colorisation des déplacements de l’endocarde (ColorKinesis) permet de mieux apprécier le degré de déplacement radiaire de la paroi (voir Figure 25.15). La déformation (strain), la vitesse de déformation (strain rate) et le Speckle-tracking permettent d’affiner la visualisation et la quantification des mouvements segmentaires (voir Figure 25.17). Ils mettent bien en évidence le retard de contraction systolique (tardokinésie) et la contraction post-systolique accompagnée d’un retard de relaxation typiques de l’ischémie aiguë (Figure 27.6) [165]. Ces techniques sont toutefois difficiles à réaliser en temps réel en salle d’opération. La reconstruction tridimensionnelle des segments du VG est une application récente de la technologie 3D qui facilite l'évaluation des zones ischémiques; elle illustre bien le déplacement radiaire mais non l'épaississement de paroi. Une autre voie possible est l’échocardiographie de contraste. La sonication ultrasonique permet de produire des microbulles de gaz dans des solutés stables comme les perfluorocarbones. Ces microbulles circulent librement dans le lit capillaire et font écho aux ultrasons ; le territoire perfusé apparaît en contraste renforcé sur l'écran. Cette technique permet de visualiser le flux coronaire intramyocardique, de contrôler l’adéquation de la cardioplégie et d’évaluer la perméabilité des greffons. D’importantes difficultés techniques en limitent la portée en peropératoire. Evaluation de l’ischémie myocardique L’altération de la cinétique segmentaire (ACS) est définie par 2 éléments : - diminution de l’épaississement myocardique (normal 25-45% selon les segments) - diminution du raccourcissement radiaire (normal 25-45%) Gradation : 1- normokinésie, 2 - hypokinésie légère, 3 - hypokinésie sévère, 4 - akinésie, 5 - dyskinésie Les ACS sont recherchées systématiquement dans les 4 quadrants au niveau basal, médio-ventriculaire et apical (vues 4-cavités. 2-cavités, long-axe mi-œsophage et court-axe transgastrique) Les différents quadrants n’ont physiologiquement pas le même degré de contraction En cas d’ACS, seule la règle de Simpson permet d’évaluer la fraction d’éjection En présence d'altérations segmentaires de la contraction, la forme du VG est asymétrique; de plus, sa silhouette en systole est différente de celle en diastole. Les approximations géométriques avec lesquelles on calcule la fraction d'éjection, telle la formule de Teichholz, ne sont donc plus valides. La ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 8 règle de Simpson, dans laquelle on dessine manuellement le pourtour ventriculaire sur deux plans orthogonaux, est seule utilisable pour le calcul de la FE (voir Figure 25.64). Apex Mode TM Base A Figure 27.6: Doppler tissulaire et ischémie myocardique. A: déformation (strain rate) du septum interventriculaire (ETT) ; le segment basal se raccourcit en systole (flèche bleue), alors que le segment apical s’allonge (dyskinésie, flèche rouge) [174a]. B : comparé à la perfusion normale (courbe noire), l’occlusion de l’IVA (courbe rouge) modifie la contraction segmentaire correspondante ; la contraction est plus faible (hypokinésie) (1) et retardée (tardokinésie) ; elle est suivie par une contraction post-systolique (2) [26a]. ACS (%) Pré-occlusion IVA 5 min dʼocclusion 30 20 2 1 10 B Infarctus La distribution anatomique des troncs coronaires permet de définir les territoires dont la contraction est altérée en fonction du vaisseau obstrué (voir Figure 27.3). Lésion de la CD : paroi libre du VD (vue 4-cavité 0° et admission-chasse du VD 60°), paroi postéro-inférieure du VG (vues 2-cavité 90° et transgastrique 0° + 90°), tiers proximal du septum interventriculaire (vue 4-cavité 0°) ; Lésion de la CX : paroi latérale du VG en vues 4-cavité 0° et transgastrique 0° ; dans ces deux vues, les fibres myocardiques sont en majeure partie parallèles à l’axe des ultrasons, ce qui donne peu d’écho en retour ; la paroi paraît peu dense et semble deshabitée, sans que cela représente un signe d’ischémie ; Lésion de l’IVA : paroi antérieure et apex du VG (vue 2-cavité 90°), paroi antérieure (vues transgastrique 0° et 90°), paroi antéro-septale (4-cavité 0° et long-axe 120°). L’évaluation de la fonction ventriculaire globale et la mesure de la FE du VG doivent tenir compte des ACS. Les approximations géométriques comme la formule de Teichholz ne sont plus applicables, car elles sont conçues pour une contraction homogène et symétrique du ventricule. Seule la règle de Simpson (voir Chapitre 25, Indices éjectionnels) permet une quantification qui prenne en compte la fonction des différentes parois du VG (voir Figure 25.64). L’évaluation fonctionnelle doit différencier deux éléments différents : ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 9 La mesure de la fonction globale du VG (FE avec la règle de Simpson) ; celle-ci tient compte des zones akinétiques et dyskinétiques ; sa valeur est abaissée comme celle du débit cardiaque ; La mesure de la fonction du myocarde valide en excluant les ACS; celle-ci peut se faire par la formule de Teichholz ou la fraction de raccourcissement de diamètre dans les zones saines ; elle est importante pour évaluer la capacité fonctionnelle du myocarde actif. L’infarctus du VD, lié à une obstruction de la CD, est en général associé à un infarctus de la paroi inférieure du VG. Le VD se dilate lorsqu’il dysfonctionne parce que sa structure est mince. Sa paroi libre est akinétique ou sévèrement hypokinétique. L’apex échappe à l’akinésie parce qu’il est vascularisé par l’IVA. Très richement pourvue de récepteurs β, la chambre de chasse du VD conserve habituellement une contractilité importante malgré la défaillance du corps du ventricule. La chambre d'admission peut conserver une certaine contractilité radiaire parce que ses fibres circulaires sont communes avec celles du VG. L’OD est dilatée et le septum interauriculaire bombe dans l’OG ; en cas de perméabilité du foramen ovale, il s’installe un shunt D→G visible au flux couleur et confirmé par un test aux microbulles. La dilatation du VD entraîne une insuffisance tricuspidienne dont la vélocité maximale (2-2.5 m/s) est inversement proportionnelle au degré de dysfonctionnement du ventricule : la Vmax de l'IT s'abaisse lorsque la force motrice du ventricule diminue. Dysfonction diastolique Bien que très précoce, la dysfonction diastolique ne présente pas de modifications spécifiques à l’ischémie, mais est altérée par le défaut de relaxation (voir Chapitre 25, Phases de la diastole) : Prolongation de la phase de relaxation isovolumétrique (> 100 ms) ; Diminution de la Vmax du flux protodiastolique E et prolongation de sa phase de décélération (dtE > 250 ms) (voir Figure 4.80) ; Diminution de la vélocité de propagation du flux mitral (< 40 cm/s) (voir Figure 25.81). Avec l’infarctus et la rigidité imposée par la cicatrice non-contractile, les pressions de remplissage du VG et de l’OG augmentent et les flux présentent une allure restrictive (voir Figure 25.81) : Raccourcissement de la phase de relaxation isovolumétrique (< 70 ms) ; Augmentation de la Vmax du flux protodiastolique E et raccourcissement de sa phase de décélération (dtE < 150 ms) ; Rapport E/E’ élevé (≥ 15) (voir Figure 25.84D). Le développement d’une dysfonction diastolique restrictive est de mauvais pronostic pour la fonction ventriculaire et pour la survie à long terme [110]. Insuffisance mitrale ischémique La prévalence de l’IM est de 30% après infarctus et de 20% chez les coronariens qui subissent des PAC [59,93]. L’IM d’origine ischémique est la traduction d’un problème ventriculaire et non valvulaire. Lorsqu’elle est modérée ou sévère (grade > II), elle double la mortalité et quadruple le risque de défaillance ventriculaire [61]. Elle peut prendre trois formes principales (Figure 27.7) [121]. L’akinésie ou la dyskinésie pariétale déplace un pilier vers l’apex et vers l’extérieur en systole (61% des cas) ; ceci maintient une tension excessive sur les cordages et empêche le feuillet de rejoindre son point de coaptation. Le pilier postérieur est le plus souvent concerné. Cette IM restrictive (type IIIb) induit un jet excentrique dirigé du côté du feuillet atteint. En cas de cardiomyopathie ischémique avec dilatation et dysfonction globale du VG, la restriction porte symétriquement sur les deux feuillets et l’IM est centrale. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 10 L’ischémie ou la rupture partielle du pilier (24% des cas) donne trop de course aux cordages en systole puisque le muscle papillaire ne se contracte plus. Le résultat est un prolapsus de la commissure correspondante (IM type II), avec un jet oblique dont la direction dépend du degré de bascule de chaque feuillet. L’ischémie des segments basaux du VG empêche l’anneau mitral de modifier sa forme en systole (contraction majoritairement postérieure et accentuation de la forme en selle) ; sa surface augmente de 14-20% par dilatation de sa partie postérieure [53,142]. Ceci provoque une IM fonctionnelle équivalant à une dilatation de l’anneau (type I) (15% des cas) ; le jet est en général central. < FA B A C FA A FP P L L D E F © Chassot 2011 Figure 27.7 : insuffisance mitrale ischémique. L’IM peut être de type IIIb restrictif (A,B et C), de type II (D et E) ou de type I (F). A : akinésie ou dyskinésie segmentaire entraînant le pilier vers l’extérieur et vers l’apex en systole ; le feuillet correspondant est restrictif ; l’IM est excentrique. B : akinésie ou dyskinésie segmentaire entraînant le pilier vers l’extérieur avec une traction excessive sur les codages de 2ème ordre ; ceci se traduit par une image en aile de mouette du feuillet antérieur. < FA : angle du feuillet antérieur à son extrémité avec le plan de l’anneau en systole. C : cardiomyopathie ischémique avec dilatation homogène du VG ; l’IM restrictive est centrale. D : la rupture complète d’un pilier provoque un bascule total de la commissure dans l’OG en systole ; on voit un morceau du pilier rompu oscillant au bout des cordages. E : ischémie d’un pilier occasionnant un prolapsus de la commissure correspondante parce que le pilier s’allonge au lieu de se contracter en systole. F : ischémie basale causant une dilatation postérieure de l’anneau mitral [121]. L’importance de la restriction se mesure par plusieurs éléments (voir Figure 26.26 et Figure 27.8A). Les valeurs suivantes définissent une restriction sévère [143]. Distance entre le plan de l’anneau mitral et le point de coaptation (tenting height) > 1.0 cm ; Surface triangulaire comprise entre le plan de l’anneau et les feuillets (tenting area) > 2.0 cm2 ; en écho 3D, on calcule le tenting volume, qui est une mesure plus pércise; Angle fait par le feuillet antérieur avec le plan de l’anneau en systole > 25°; ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 11 Dilatation de l'anneau mitral (diamètre > 37 mm). Il est important de distinguer une restriction du feuillet postérieur et un prolapsus du feuillet antérieur, car leur traitement est très différent. Dans les deux cas, le jet de l’IM est excentrique et dirigé vers la paroi latérale et postérieure de l’OG, par-dessus le feuillet postérieur. En cas de prolapsus (IM type II), le feuillet antérieur est basculé dans l’OG en systole, alors que le feuillet postérieur se situe au plan de coaptation. Dans la restriction (IM type IIIb), le feuillet antérieur est au plan de coaptation mais le feuillet postérieur est retenu en dessous de celui-ci par traction sur les cordages en systole (Figure 27.8B). 1 2 Plan de l’anneau Tenting distance OG VD VG Figure 27.8A : insuffisance mitrale restrictive. 1 : traction homogène sur les cordages lors de dilatation du VG ; le point de coaptation est situé en dessous du plan de l’anneau mitral en systole (tenting distance). 2 : traction excessive sur les cordages de 2ème ordre du feuillet antérieur à cause de la dilatation sphérique du VG et du déplacement des piliers vers l’extérieur (seagull sign). Figure 27.8B : différenciation entre un prolapsus et une restriction présentant la même géométrie du jet d’insuffisance mitrale excentrique en direction de la paroi latérale de l’OG. 1 : prolapsus du feuillet antérieur, le feuillet postérieur est en position correcte par rapport au plan de l’anneau mitral (pointillé blanc). 2 : restriction du feuillet postérieur, le feuillet antérieur est en position correcte. Malgré l’apparence identique du Doppler couleur, le traitement chirurgical de chacune de ces deux entités est différent. On observe une image analogue en miroir en cas de prolapsus du feuillet postérieur ou de restriction du feuillet antérieur. 1 © Chassot 2010 2 Prolapsus Restriction L’ischémie du pilier n’est pas en soi la cause principale de l’IM, et peut même la corriger (Figure 27.7E). En effet, lorsque le pilier est ischémique, il s’allonge au lieu de se contracter en systole à cause de la tension sur les cordages ; ceci donne davantage de course à ces derniers, et le feuillet se rapproche du point de coaptation dont il était maintenu éloigné par l’akinésie pariétale [104]. Selon qu’elle déplace un pilier davantage vers l’extérieur ou vers l’apex, l’akinésie de la paroi induit des situations différentes [93]. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 12 Si l’ischémie segmentaire déplace le pilier vers l’extérieur, ce qui est fréquemment le cas pour le pilier postérieur, la tension est particulièrement grande pour les cordages de 2ème ordre du feuillet antérieur ; ceci crée une angulation dans le corps du feuillet qui prend une allure en aile de mouette (seagull sign) ; cette déformation est la cause principale de l’IM (Figure 27.7B). La correction chirurgicale consiste en une section des cordages de 2ème ordre. Si l’ischémie déplace le pilier vers l’apex, ce qui le plus souvent le cas pour le pilier antérieur, la traction est plus homogène sur les cordages, mais l’angle de fermeture du feuillet antérieur est plus important. Si l’ischémie nécrose le point d’insertion d’un ou de plusieurs cordages, le feston correspondant de la valve prolabe dans l’OG en systole (Type II). Une nécrose complète du pilier aboutit à sa rupture et à une IM massive, habituellement accompagnée de choc cardiogène et d’OAP ; la Vmax de l’IM est basse (< 3 m/s) à cause de la grande taille de l’orifice et de la dysfonction du VG. Lorsque l’IM est un phénomène aigu et que l’OG est de taille normale, le reflux systolique dans les veines pulmonaires est massif (voir Figure 26.18). Ces différents mécanismes de l’IM ischémique sont importants à diagnostiquer en salle d’opération, car ils modifient la technique de valvuloplastie (voir Chapitre 26, Plastie valvulaire). D’autre part, l’IM ischémique est un phénomène dynamique qui varie au cours du temps ; son augmentation sous stimulation sympathique est un facteur de mauvais pronostic [80]. Les critères de sévérité de l’IM ischémique sont plus restrictifs que ceux de l’IM organique, car sa présence péjore davantage le pronostic des patients. Une IM ischémique est considérée comme sévère (degré IV) à partir des seuils suivants [93,183] : Largeur du jet à la vena contracta > 0.4 cm ; Surface de l’orifice de régurgitation ≥ 0.3 cm2 ; Distance plan de l’anneau – point de coaptation > 1 cm ; Angle feuillet antérieur – plan de l’anneau > 25° en systole ; Volume régurgité ≥ 30 mL ; Fraction de régurgitation ≥ 30%. IM ischémique Mécanismes - Akinésie pariétale : traction asymétrique sur des cordages (IM type IIIb) - Ischémie ou rupture partielle d’un pilier : prolapsus commissural (IM type II) - Ischémie des segments basaux : non-contraction de l’anneau (IM type I) - Rupture totale de pilier (choc cardiogène) Quantification - PISA (IM sévère : r 1er aliasing ≥ 0.7 cm si Valiasing = 0.4-0.5 m/s) - Vena contracta (IM sévère : diamètre ≥ 0.4 cm) - Orifice de régurgitation (IM sévère : S ≥ 0.3 cm2) Complications de l’ischémie L’utilisation peropératoire de l’ETO est vivement recommandée lors de correction chirurgicale des complications de l’ischémie parce qu’elle permet de définir la stratégie, de contrôler le résultat et de gérer l’hémodynamique. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 13 Ruptures myocardiques Les ruptures de structures myocardiques (paroi libre, septum interventriculaire, muscle papillaire) sont le fait de l’obstruction aiguë d’un vaisseau terminal non collatéralisé. Elles surviennent typiquement dans les premiers jours qui suivent un infarctus de petite taille chez des malades souffrant en général d’une maladie monotronculaire. Elles se caractérisent par la survenue brutale d’un choc cardiogène accompagnée d’un souffle systolique. Sans traitement chirurgical d’urgence, leur pronostic est catastrophique. Ces lésions sont souvent inféro-postérieures et ne sont pas visibles dans les vues rétrooesophagiennes, en particulier en 4-cavités ; on ne les met en évidence que dans des vues transgastriques, en balayant le coeur de 0° à 120° et en les recherchant en 2D et avec le Doppler couleur. Une rupture de paroi libre se manifeste souvent par une tamponnade et des caillots péricardiques, cloisonnés de manière plus ou moins étanche. L’image 2D montre la rupture et le flux couleur met en évidence un va-et-vient systolo-diastolique (Figures 27.9). L’image est parfois difficile à différencier de celle d’un anévrysme ou d’un pseudo-anévrysme, mais la cavité n’a en général pas de forme géométrique précise et se présente plutôt comme une zone de flux systolo-diastolique extraventriculaire. La survie n’est possible que si la rupture est contenue par une ancienne réaction péricardique, sans quoi le patient décède brutalement de tamponnade aiguë. A OG C B Rupt AP Rupt VD VG VG Rupture Ao Ep Poche Figure 27.9 : Rupture ventriculaire inférieure. A : orifice de rupture dans la paroi inférieure en vue 2-cavités ; le collet est relativement étroit. B : poche située entre les ventricules et le diaphragme en vue transgastrique court axe du VG (0°) ; elle contient un flux couleur systolique turbulent ; le VD est écrasé par cette poche ; il existe par ailleurs un épanchement péricardique. C : reconstruction 3D du coeur ; la rupture inférieure du VG débouche dans une poche située sous le coeur, délimitée par des adhérences péricardiques fibreuses dues à une ancienne péricardite. La communication interventriculaire (CIV) peut survenir dans le corps ou dans la base du septum. Lorsqu’elle est due à une obstruction de la CD, elle apparaît sur la partie postérieure du septum et n’est visible qu’en vue transgastrique 0° (Figure 27.10A); due à une lésion de l’IVA, elle apparaît dans la partie moyenne et antérieure du septum. La CIV peut se présenter comme une perforation à l’emporte-pièce bien visible en imagerie 2D, mais elle est souvent serpentigineuse et n’est alors mise en évidence qu’au flux couleur. Celui-ci présente 3 caractéristiques (Figure 27.10B): Une zone d’accélération concentrique (PISA) sur le versant gauche, dont la dimension est un bon indice de l’importance de la CIV. Un flux à travers le septum, rectiligne ou sinueux, dont l’image est inconstante à cause du trajet parfois tortueux du flux. Une zone tourbillonnaire au sein du VD, en général mieux visible en diastole qu’en systole. Le flux à travers la CIV est systolo-diastolique. En cherchant une vue qui permette d’aligner l’axe du Doppler continu avec celui du chenal, il est possible d’en mesurer la vélocité maximale (Vmax CIV ≈ 3- ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 14 4 m/s), et d’en déduire le gradient de pression entre les deux ventricules (équation de Bernoulli : ΔP = 4 V2). En l’absence de lésion aortique, on peut calculer la pression systolique du VD, donc la PAPsyst, par soustraction du ΔP de la pression artérielle systémique (PAs) : PAPsyst = PAs - ΔPCIV CIV OG OD VD VG IT L V PISA VD Turb A B © Chassot 2010 Figure 27.10 : communication interventriculaire (CIV). A : vue court-axe transgastrique du VG (0°) montrant une CIV postérieure au pied du septum sur occlusion de la coronaire droite. B : schéma du flux Doppler couleur en cas de CIV, avec la zone d’accélération côté ventriculaire gauche (PISA), le flux trans-septal et la zone de turbulence (Turb) au sein du VD ; celle-ci est surtout visible en diastole, car le flux est emporté par l’éjection du VD en systole. Une insuffisance tricuspidienne est fréquente (IT) ; elle ne permet toutefois pas de calculer la PAPsyst parce que la pression systolique du VD est contaminée par celle du VG à travers la CIV. Le PAPsyst ne peut pas être estimée à partir de la Vmax de l’insuffisance tricuspidienne, souvent présente à cause de la défaillance du VD, parce que la pression du VD est contaminée par celle du VG à travers la CIV. Le ΔP mesuré serait en réalité celui qui règne entre le VG et l’OD, ce qui donnerait une pression pulmonaire équivalente à la pression systémique. La présence d’une IM ou d’une IT est en général liée à la dilatation ventriculaire ; dans ce cas, l’insuffisance est de type restrictive centrale. Toutefois, l’IT peut être due au dysfonction du muscle papillaire septal, auquel cas elle est excentrique par restriction ou prolapsus de la commissure septale. La rupture de muscle papillaire est plus fréquente dans le muscle papillaire postéro-médian, qui est vascularisé seulement par la CD, que dans le muscle antéro-latéral doublement vascularisé par l’IVA et la CX. Les ruptures complètes se traduisent par le bascule total d’une commissure et une IM massive non compatible avec la survie, sauf si on l’opère en urgence (Figure 27.11A). A cause de la défaillance ventriculaire et de la grande taille de l’orifice de régurgitation, la Vmax de l’IM est basse (1-3 m/s) ; il n’y a que peu de flux tourbillonnaire au Doppler couleur. On rencontre plus fréquemment des ruptures partielles caractérisées par le bascule systolique dans l’OG de la partie commissurale d’un ou des deux feuillets mitraux, accompagné d’un fragment de pilier qui oscille indépendamment de la paroi dans le VG (Figure 27.11B) ; le jet de l’IM est excentrique. Anévrysme et pseudo-anévrysme L’anévrysme est un cas extrême de dyskinésie survenant après un infarctus transmural : le ou les segments non perfusés et cicatriciels sont amincis, inertes, et bombent vers l’extérieur en systole. A l’origine, l’anévrysme est constitué de toute l’épaisseur de la paroi ventriculaire ; son collet est large. Il contient fréquemment un thrombus mural et est à l’origine d’arythmies ventriculaires malignes. Le flux systolique tournoie à l’intérieur. Les deux endroits les plus fréquents sont l’apex du VG et la paroi inféro-basale (Figure 27.12). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 15 A B Figure 27.11 : rupture de muscle papillaire antérieur. A : rupture totale. On aperçoit un fragment de pilier à l’extrémité de cordages, flottant dans l’OG en systole et dans le VG en diastole. L’orifice de régurgitation est si grand et la dysfonction du VG si profonde que la Vmax de l’IM est basse (1-2 m/s) ; le flux Doppler couleur est laminaire en diastole et en systole, seule sa couleur change. B : rupture partielle du muscle papillaire postérieur ; la commissure postérieure est basculée dans l’OG en systole (vue bicommissurale 60°). A B OG OG Anévr VG MPP VG Figure 27.12 : images d’anévrysme ventriculaire gauche. A : anévrysme postéro-basal (AN) en vue 2-cavités (90°) ; sur cette image, l’occlusion de la valve mitrale est satisfaisante. B : anévrysme postéro-latéral en vue long-axe du VG (120°) ; le collet englobe le pilier postérieur (MPP), la valve mitrale est incompétente. Le pseudo-anévrysme est une rupture partielle de la paroi ventriculaire sous forme d’une poche contenue par l’épicarde. Plus fréquent dans la paroi postérieure, son collet est en général étroit et sa paroi mince. Le pseudo-anévrysme contient du contraste spontané mis en mouvement en systole et fréquemment des thrombi muraux (Figure 27.13). C’est souvent un diagnostic anatomo-pathologique, car le pseudo-anévrysme ne se différencie de l’anévrysme que par son collet plus étroit et la minceur de sa paroi. La fragilité de sa paroi fait courir un risque élevé de rupture lors de la dissection intrapéricardique ; il est prudent de réaliser cette dernière une fois le malade en CEC et l’aorte clampée. Lors de ces différentes situations de nécrose pariétale du VG (CIV, anévrysme, rupture), il est important de bien évaluer le fonctionnement des muscles papillaires et le mécanisme de l’IM si elle est présente, car le dysfonctionnement de l’appareil sous-valvulaire de la valve mitrale modifie la stratégie chirurgicale. L’examen doit également tenter d’évaluer le volume ventriculaire qui subsistera après résection de la masse nécrosée, en tenant compte du fait que les sutures de l’orifice ou du patch se placent en tissu sain; le VG sera donc amputé de davantage de masse contractile que ne le laisse prévoir l’image échocardiographique. La résection d’un volume non-contractile améliore la fraction ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 16 d’éjection du ventricule mais diminue considérablement son volume systolique : malgré une FE satisfaisante, le débit cardiaque est bas et la tachycardie obligatoire. A B C © Chassot 2010 Figure 27.13 : différence entre un anévrysme (A, dilatation de toute la paroi ventriculaire) et un pseudoanévrysme (B, rupture partielle de la paroi avec contention par les couches externes). En général, le collet du pseudo-anévrysme est plus étroit et sa paroi plus mince ; il contient fréquemment un thrombus mural. C : vue transgastrique en court-axe du VG après résection d’un anévrysme postéro-latéral ; la flèche montre le patch qui ferme l’ancien collet. Après la correction en CEC, il est nécessaire de contrôler un certain nombre d’éléments (Figure 27.13C). Etanchéité du patch ; Degré de restriction : volumes ventriculaires télédiastolique et télésystolique (règle de Simpson) ; Modifications de la cinétique segmentaire (le patch fonctionne comme une zone dyskinétique) ; Recherche d’une IM résiduelle et de son mécanisme ; Recherche d’une IT résiduelle, particulièrement en cas de correction de CIV. Thrombus L’immobilité d’une zone akinétique et un bas débit ventriculaire peuvent créer les conditions pour la formation d’un thrombus mural, que l’on rencontre le plus fréquemment à l’apex du VG (Figure 27.14). Un thrombus peut être laminaire et ancré dans les trabéculations ou arrondi et mobile ; il est en général bien visible en vue mi-oesophagienne 2 cavités 90°, long axe 120° et transgastrique long axe 100-120°. Le diagnostic différentiel avec des trabéculations ou un muscle papillaire est parfois difficile : le thrombus est inhomogène, ne se contracte pas et est séparé de la paroi par un plan de clivage. Son échogénicité est sensiblement différente de celle du muscle. Il doit apparaître de manière identique dans au moins deux plans de coupe orthogonaux pour pouvoir poser le diagnostic. Le thrombus laminaire est bien ancré dans les trabéculations et ne présente pas de risque embolique ; un thrombus arrondi et sessile est plus dangereux. Il est habituel de réséquer ce dernier par ventriculotomie en cours d’opération, mais pas le premier. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 17 Figure 27.14 : thrombus intraventriculaire gauche. A : thrombus antéro-apical laminaire en vue 4cavités. B : thrombus apical mobile en vue 2-cavités (90°). C : thrombus localisé à la base de la paroi antérieure akinétique (vue 2-cavités 90°). D : image tronquée d’un apex normal en vue 2-cavités 90°, montrant simplement des trabéculations coupées tangentiellement. Pour poser le diagnostic de thrombus, il faut que la même image apparaisse dans au moins 2 vues différentes, si possible orthogonales. A B Thrombus C D Thrombus Trabéculations Messages pour le chirurgien en cas de complications d’infarctus Anévrysme, pseudo-anévrysme, rupture couverte - Dimension (volume de la cavité), présence de thrombus, localisation de l’orifice, taille du collet, fonctionnement des muscles papillaires, présence d’IM - Epaisseur de la paroi, communication avec le péricarde - Epanchement et caillots péricardiques, tamponnade - Evaluation de la masse ventriculaire saine et de sa fonction - Evaluation du volume ventriculaire probable après résection Communication interventriculaire - Localisation, dimension, état du myocarde adjacent - Flux systolo-diastolique, gradient de pression VG – VD (PAPsyst = PAs – ΔP) - Fonction et taille VG et VD - Présence d’IT, d’IM Rupture de muscle papillaire - Rupture partielle ou totale, pilier concerné, état de la commissure correspondante - Vmax de l’IM, flux veineux pulmonaire (reflux systolique) - Fonction VG et VD Thrombus Localisation, taille, degré d’ancrage dans les trabéculations ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 18 L’ETO comme monitorage de l’ischémie Revascularisation coronarienne versus chirurgie générale Lors d'angioplastie coronarienne, les modifications de la cinétique segmentaire apparaissent 30 à 90 secondes avant les signes électriques (ECG) ou hémodynamiques (PAPO). Lorsqu’elles surviennent chez les patients souffrant de lésions transmurales tronculaires et qu’elles sont persistantes, les ACS sont un signe sensible et précoce d’ischémie, puisque le 50 % des incidents visibles à l'ETO au cours de revascularisation coronarienne ne s'accompagne pas de modifications hémodynamiques enregistrables et qu'il n'y a pas d'altérations électriques décelables dans le 40 % des cas [85]. En chirurgie non-cardiaque, le 5% de malades qui développe des ACS en peropératoire présente un risque d’infarctus et de défaillance ventriculaire augmenté de 2.5 fois et une mortalité cardiaque en hausse de 2.6 fois [34]. Toutefois, l’ETO n’a qu’une valeur prédictive négligeable (33%) pour l’infarctus lorsque l’ischémie est sous-endocardique et non pas tronculaire, ce qui est fréquemment le cas en chirurgie non-cardiaque [36]. Dans ce cas, les modifications du segment ST à l’ECG sont plus sensibles et plus spécifiques. Bien qu'il ait une haute sensibilité pour l'ischémie (85%), l'ETO n'a qu'une modeste spécificité pour ce diagnostic (70%). L'ETO a une valeur additionnelle par sa capacité à prédire les décompensation hémodynamiques liées à l'ischémie : dysfonction ventriculaire gauche (dilatation, sidération ou hibernation, lésion d’un tronc coronarien), dysfonction droite (lésion de la coronaire droite), insuffisance mitrale (ischémie de pilier ou de paroi adjacente, dilatation ventriculaire aiguë). Elle prend toute sa valeur trois circonstances : Pathologie dynamique : insuffisance valvulaire sévère, sténose hypertrophique sous-aortique ; Pressions de remplissage équivoques : dysfonction diastolique, sténose valvulaire serrée, modification de position (cœur battant) ; Dysfonction et dilatation ventriculaire. Pontages aorto-coronariens (PAC) En chirurgie cardiaque, le diagnostic de l’ETO est déterminant pour la mise en route de thérapeutique anti-ischémique (21% des cas) et de reprise chirurgicale de pontages à cause d'ACS apparues après revascularisation (1-5% des cas) [11,36,48]. Le taux de modifications de la stratégie chirurgicale suite aux découvertes de l'ETO est de 6-7% avant CEC et 2-3% après revascularisation [31a,48]. L’ETO ne modifie probablement pas le devenir des malades dont le risque opératoire est faible, mais elle améliore certainement celui des patients ischémiques à haut risque [38]. Dans ce dernier cas, son impact est doublé sur les décisions médicales, et il est quadruplé sur les décisions chirurgicales [92]. Dans les cas lourds, les modifications dans la prise en charge hémodynamique sont commandées dans 51% des cas par l’ETO seule [146]. Le taux de modifications thérapeutiques liées à l’ETO est d’ailleurs plus important dans la chirurgie coronarienne (20% pré-CEC et 27% post-CEC) que dans la chirurgie valvulaire (respectivement 8% et 11%) [108]. D’autre part, la présence d’ACS persistantes après revascularisation a une valeur pronostique pour les complications cardiaques postopératoires : 71% d’entre elles surviennent chez les patients dont les ACS ne récupèrent pas en peropératoire [84,109]. Comme les conditions de la salle d’opération sont difficiles pour les observations fines, la sensibilité du monitorage ETO de l'ischémie en temps réel varie entre 67 et 82% (moyenne 76%) en fonction de la formation et de l'expérience des anesthésistes [12]. Si la reconnaissance d'une contractilité normale ne semble guère dépendante de l'expérience, il n'en est pas de même de la détection d'anomalies de la contraction segmentaire et de leur étendue, qui est très opérateur-dépendante. D’autre part, l’ETO ne fonctionne comme moniteur de la contraction segmentaire que pour autant qu’un observateur attentif regarde l’écran. Or la conduite simultanée de l’échocardiographie et de l’anesthésie par le même ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 19 individu n’est guère possible. Ce n’est donc pas un moniteur continu et automatique comme la surveillance du segment ST de l’ECG, puisque l’observation par l’anesthésiste est momentanée. Bien que l'échocardiographie soit un moyen sensible et spécifique pour le diagnostic de l'ischémie myocardique, il ne s'avère pas que ce soit un moyen de surveillance peropératoire efficace en-dehors de la chirurgie coronarienne. Le diagnostic échocardiographique d’ischémie n'est fondé qu'en l'absence de perturbations hémodynamiques telles que la tachycardie, l'hypovolémie ou l'hypertension, qui peuvent être elles-mêmes à l'origine de perturbations de la cinétique segmentaire. Quelle que soit son étiologie, une akinésie segmentaire apparue pendant la période opératoire n’a de valeur pronostique que si elle est persistante. Monitorage de l’ischémie par ETO Les ACS persistantes diagnostiquées à l’ETO ont une valeur prédictive élevée pour l’infarctus postopératoire en cas de lésions tronculaires et d’infarctus de type STEMI (chirurgie de revascularisation coronarienne), mais une valeur prédictive faible en cas de lésions sousendocardiques et d’infarctus non-STEMI (prédominant en chirurgie non-cardiaque) L’ETO est efficace pour évaluer le retentissement sur le VG ischémique (fonction et ACS) d’évènements hémodynamiques peropératoires comme l’hypotension ou le clampage aortique ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 20 Chirurgie à coeur battant Revascularisation coronarienne (OPCAB) Perturbations hémodynamiques et ischémiques Au cours d'une revascularisation à coeur battant (Off-pump coronary artery bypass ou OPCAB), le coeur est déplacé et redressé pour obtenir une bonne exposition des vaisseaux coronariens; il est également comprimé localement pour diminuer les mouvements de sa paroi (Figure 27.15A). D’autre part, le clampage du vaisseau pour réaliser l’anastomose implique un certain temps d’ischémie aiguë (voir Chapitre 10, Problèmes associés à la chirurgie à coeur battant) [31]. La verticalisation du coeur place les oreillettes sous les ventricules ; leur pression s’accroît sans rapport avec le remplissage ; à l’ETO, leur taille augmente (Figure 27.15C). La compression pariétale par le stabilisateur restreint le remplissage diastolique ; la paroi concernée devient rigide et immobile, bien que souvent s’épaississant encore (Figure 27.16A) ; les flux auriculo-ventriculaires sont de type restrictifs. Lorsqu’on dresse le ventricule gauche, le coeur se plie au niveau du sillon auriculoventriculaire ; cette distorsion de l’anneau mitral et de l’anneau tricuspidien induit une insuffisance valvulaire (Figure 27.16B). Lors d’anastomoses très proximales, il se peut que la chambre de chasse du VG ou du VD soit coudée ; la situation est alors la même que dans une sténose dynamique sous-aortique ou souspulmonaire (effet CMO). On peut également voir apparaître une insuffisance aortique. L’ischémie aiguë entraîne une altération de la cinétique segmentaire sous forme d’akinésie dans les territoires vascularisés par le vaisseau clampé. A B C OG OG VG VG Figure 27.15 : Verticalisation du cœur. A: Le coeur est verticalisé dans le péricarde pour avoir accès à ses faces latérales et postérieures. Un stabilisateur est en place pour permettre une anastomose sur l'IVP. La paroi est comprimée par l'appareil; le vaisseau apparaît entre les deux branches du stabilisateur. Celui-ci est muni de petites ventouses qui permettent d'aspirer la paroi pour mieux l'immobiliser. B. changement de volume de l'OG et du VG lorsque le coeur est verticalisé. Vue ETO 2-cavités à 90° dans la position normale. La taille de l'OG est le tiers de celle du VG. C. Sans modifier la position de la sonde d'ETO, le coeur a été placé en position verticale. Les dimensions relatives de l'OG et du VG se sont inversées. L'OG, qui est sous le VG, est plus grande que le VG dont le volume a diminué de moitié [31]. Echocardiographie transoesophagienne L'ETO est un moyen de surveillance extrêmement précieux en chirurgie à coeur battant [31,73,109,151], même si la présence d'air entourant le coeur dressé dans le péricarde et l'utilisation de ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 21 compresses enfouies postérieurement dans le voisinage de l'oesophage limitent considérablement ses performances. La position transgastrique est habituellement inutilisable, le coeur étant décollé du diaphragme, mais la position rétrocardiaque à mi-oesophage permet de visualiser les 16 segments des ventricules en utilisant les plans 4-cavités, 2-cavités et long-axe, même si les images sont parfois de mauvaise qualité. De cette manière, on peut identifier correctement au moins 14 segments dans 94% des anastomoses sur la CD, dans 83% des anastomoses sur la CX et dans 76% des anastomoses sur l'IVA [175]. Un sac plastic souple ou un gant chirurgical rempli de liquide cristalloïde enfoui au fond du péricarde à la place des compresses permet de rétablir une imagerie transgastrique lorsque celle-ci est nécessaire. A B OG OD 1 VD VG 2 3 Figure 27.16 : Déformation des structures cardiaques lors de pontages à cœur battant. A: La paroi latérale du VG est comprimée par le stabilisateur (flèches) dans une vue 4-cavités à l'ETO. Le septum est repoussé dans le VD, lui-même comprimé contre la plèvre droite. B: Modifications de la forme de l'anneau mitral reconstruit en 3 dimensions à partir d'images ETO. 1. Forme normale en selle de l'anneau mitral lorsque le coeur est dans sa position normale. 2: L'anneau est tordu lorsque le coeur est dressé verticalement. 3: L'anneau est replié sur luimême lorsque le coeur est placé en position pour une anastomose sur la face latérale [57]. Un examen détaillé de l’anatomie cardiaque, des valves, de la contraction segmentaire et de la fonction ventriculaire droite et gauche doit impérativement avoir lieu en début d’intervention pour pouvoir servir de comparatif lorsque des modifications s’installent en cours d’opération. L’impact de l’ETO au cours de la chirurgie à coeur battant porte sur plusieurs points. Recherche d’éventuelles contre-indications à une opération à coeur battant (thrombus intraventriculaire, insuffisance aortique importante). Evaluation dynamique pendant les anastomoses : effet du stabilisateur, apparition d’altérations de la cinétique segmentaire (hypokinésie sévère ou akinésie), détérioration de la fonction ventriculaire globale. Diagnostic différentiel des causes d’instabilité hémodynamique : ischémie, dysfonction VG ou VD, hypovolémie, torsion excessive du coeur, insuffisance valvulaire majeure ; vu les modifications de position, les pressions de remplissage ne sont plus un guide fiable. Guide pour l’administration des vasopresseurs, du volume et des agents inotropes ; tolérance du VG à l’augmentation de postcharge ou au β-blocage (éventuelle dilatation ou baisse excessive de fonction systolique). Contrôle du succès des anastomoses par la récupération d’une contractilité segmentaire normale en postopératoire. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 22 L'ETO met en évidence des ACS dans 40-64% des cas d’OPCAB, alors que le segment ST ne permet d’identifier que 8-19% des évènements ischémiques [109,175]. Le stabilisateur à lui seul diminue la contractilité du segment sous-jacent dans 23% des cas [175]. Pendant l’interruption du flux coronarien, le degré de modification de la contractilité est inversement porportionnel à celui de la collatéralisation du segment concerné [76]. Le segment distal à l'anastomose montre une baisse de vélocité tissulaire et un allongement systolique pendant l'ischémie [155]. L'utilisation d'un shunt intracoronarien pendant l'anastomose rétablit la contractilité du segment dans la plupart des cas [90]. L'importance des ACS a une valeur pronostique. En effet, plus la modification est profonde, plus elle a tendance à persister après le rétablissement du flux (Figure 27.17) [175]. La moitié des ACS récupère rapidement et complètement une fois l'anastomose complétée, 33% ne récupère que partiellement et 17% ne récupère pas du tout [109]. Il est intéressant de noter que 71% des complications cardiaques postopératoires se retrouvent chez les patients qui n'ont pas récupéré de leur ACS en peropératoire, mais aucune complication n'est enregistrée chez ceux qui ont une contractilité segmentaire normale en fin d'intervention. Figure 27.17 : Altération de la cinétique segmentaire en cours d'OPCAB. Les deux tiers des patients présentent des ACS (altération de la cinétique segmentaire) en cours d’intervention ; un tiers récupère entièrement à la revascularisation (ACS transitoires), mais un tiers conserve un certain degré de dysfonction segmentaire (ACS persistants) [175]. Ces derniers sont les malades qui présentent les ACS les plus importants en cours d’intervention. Score d’ACS : 1 : normokinésie ; 2 : hypokinésie ; 3 : akinésie ; 4 : dyskinésie. L’échelle représente le score moyen des 60 patients. Score d’ACS 60 patients pour OPCAB 3 troncs 41 avec ACS 2.2 1.8 * ACS persistants 22 patients 1.4 1.0 ACS transitoires 19 patients Contrôle Stabilisateur p < 0.05 Anastomose Fin L'ETO est aussi une technique de choix pour évaluer la fonction ventriculaire et le volume du ventricule en télédiastole, notamment pour juger si le VG tolère la postcharge qui lui est imposée lorsqu'on utilise des vasopresseurs pour maintenir la pression de perfusion coronarienne. Comme on évite les catécholamines β-stimulantes avant la revascularisation, seul l'ETO permet de juger à quel moment la situation devient suffisamment critique pour en commencer l'administration. L'ETO met aussi en évidence le degré de dysfonction diastolique propre à la verticalisation du coeur par l'analyse du flux mitral (Figure 27.18). La quantification de l'insuffisance mitrale qui peut se développer lorsque le coeur est manipulé permet d’interpréter correctement la survenue d'une onde "v" sur le tracé de PAPO [57] ; l’apparition d’une IM sévère est plus fréquente chez les malades qui souffrent déjà d’une régurgitation mitrale modérée. L'ETO est encore utile pour diagnostiquer la présence d'un foramen ovale perméable responsable d'une hypoxie réfractaire par shunt droite – gauche au cours des manipulations du cœur [5] ou d'un thrombus intracavitaire gauche qui est une contre-indication à la chirurgie à coeur battant. L’impact de l’ETO sur la prise en charge chirurgicale et anesthésique est considérable. Sur une série de 744 cas à cœur battant, l’impact global est significatif dans 27.4% des cas [63] : Pathologies inconnues obligeant à modifier la stratégie chirurgicale (CIA, IM ou IA majeure impliquant un remplacement valvulaire) : 1.3% ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 23 Conversion en CEC pour dysfonction ventriculaire : 1.6% Dysfonction du VG entraînant la mise en place d’une CPIA : 3.2% Athéromatose aortique justifiant une chirurgie tout artérielle : 4.1% Révision d’une anastomose après pontage 5.2% Nouvelle altération peropératoire de la cinétique segmentaire : 10.3% Figure 27.18 : Flux de type restrictif tel qu'il apparaît lors de la dysfonction diastolique aiguë qui accompagne les modifications de position du coeur. Par rapport au flux normal (N), le temps de décélération du flux E (Edt) est bref, sa vélocité maximale est élevée. N Edt A A E ⇓ Edt ⇑ E Vmax E Utilité de l’ETO en revascularisation coronarienne à coeur battant Recherche d’éventuelles contre-indications à l’OPCAB Suivi de la fonction ventriculaire, de la volémie et de la tolérance du VG aux manipulations Suivi de la cinétique segmentaire des territoires pontés Mise en évidence de l’apparition d’IM, d’IT ou d’IA Diagnostic différentiel d’une instabilité hémodynamique (hypovolémie, dysfonction VG, dysfonction VD, ischémie, positionnement inadéquat) Laser transmyocardique La revasculariation par laser transmyocardique (RLTM) est une technique réservée au traitement de l’angor réfractaire non revascularisable par les moyens conventionnels. En dirigeant le rayon laser perpendiculairement à la paroi du VG, on créée une série de canaux destinés à revasculariser la paroi myocardique depuis la cavité ventriculaire. L’ETO est essentielle à la conduite de l’intervention : Détection des microbulles certifiant l’ouverture endocavitaire du conduit ; Détection d’une lésion de cordage ou de pilier par l’apparition ou l’augmentation d’une insuffisance mitrale ; Contrôle du remplissage ventriculaire pendant les émissions laser ; Contrôle fonctionnel du VG. Implantation d’endoprothèse valvulaire aortique (TAVI) Technique d’implantation L’implantation endovasculaire d’une prothèse valvulaire sans CEC (transcatheter aortic valve implantation ou TAVI) permet de diminuer la mortalité opératoire chez les patients âgés souffrant de ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 24 sténose aortique à qui l’on refuse la chirurgie parce que leur risque est trop élevé. Quatre prothèses sont actuellement sur le marché, mais d’autres modèles sont en préparation. Elles consistent en une valve biologique faite de trois feuillets de péricarde bovin ou porcin montée dans une armature métallique analogue à celle des endoprothèses vasculaires (Figure 27.19). CoreValve™ : le stent de nitinol est auto-expensif ; elle existe en deux tailles (26 et 29 mm) correspondant à des anneaux aortiques de 20-23 mm et 24-27 mm respectivement ; Edward’s Sapien™ : elle est dilatée au moyen d’un ballon ; elle existe en 2 tailles (23 et 26 mm) prévues pour des anneaux de 18-21 mm et 22-25 mm ; une taille 29 mm est annoncée ; Symetis Acurate TA™ : valve aortique porcine fixée sur un stent en nitinol auto-extensible ; prévue pour des tailles d’anneau de 21 à 27 mm ; JenaValve™ : biovalve porcine montée sur un stent en nitinol équipé d’un dispositif de clippage. Ces deux dernières valves ont reçu leur label CE en septembre 2011. Figure 27.19 : Valves aortiques implantables (transcatheter aortic valve implantation ou TAVI). A: Corevalve™ (Medtronic, Minneapolis, MN, USA); la valve biologique est montée dans un stent autoexpensif en nitinol. B: Sapien™ (Edwards Lifesciences, Irvine, CA, USA); la valve, fixée dans un stent en acier inoxydable souple, est dilatée au moyen d’un ballon lors de sa mise en place C: Valve Acurate TA™ (Symetis SA, Lausanne, Suisse), montée dans un stent auto-expansif en nitinol et utilisée par voie transapicale seulement; elle peut être repositionnée en cours d'intervention et laisse les ostia coronariens accessibles. D : JenaValve™ (JenaValve Technology GmbH, Münich, Allemagne) ; le même cathéter permet la dilatation de la valve native et l’expansion de la prothèse. A © Medtronics™ B © Edwards™ C D © Symetis™ © JenaValve Technology™ La valve est intentionnellement surdimensionnée pour réduire le risque de fuite paravalvulaire, car l’étanchéité est difficile vu que l’anneau aortique est calcifié, bosselé et inhomogène. Mais le surdimensionnement doit rester modeste, car il empêche le dépliement correct des feuillets et cause une régurgitation centrale s’il est excessif. Les contre-indications sont la bicuspidie, à cause de la forme elliptique des structures, l’endocardite, les thrombus ventriculaire ou auriculaire, et la dilatation de l’aorte ascendante (> 4.5 cm). Ces valves sont introduites repliées sur un cathéter par voie fémorale ou transapicale et sont déployées au niveau de l’anneau aortique après dilatation de la valve par un ballon. Un peu plus de la moitié de la prothèse doit se trouver du côté ventriculaire de l’anneau [150]. Deux approches sont possibles pour implanter une valve aortique. Voie percutanée rétrograde par canulation fémorale ; bien que d’apparence moins invasive, elle présente certains inconvénients : ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 25 • Lésions artérielles sur l’axe fémoro-iliaque par le matériel d’implantation rigide et de grande taille (22-24 French, diamètre externe 8.5-9.3 mm) ; • Impossibilité d’ascension de la valve montée sur son cathéter à cause de sténoses ou de tortuosités artérielles ; • Risque d’accident neurologique par embolisation de matériel athéromateux de l’aorte ascendante et de la crosse aortique détaché par les mandrins et les cathéters. Voie transapicale antérograde par mini-thoracotomie antérieure gauche ; elle est plus invasive et réclame une anesthésie générale ; ses inconvénients sont : • Manipulation du coeur et ventriculotomie apicale ; • Douleurs postopératoires de la thoracotomie ; • Etanchéité de la bourse apicale parfois difficile (taille de l’introducteur : 33 F). La voie fémorale nécessite des vaisseaux d’au moins 8 mm de diamètre ; elle est plus aisée en cas d’anévrysme apical ou de status adhérentiel et cicatriciel (péricardite, irradiation, réopération). La voie transapicale est préférable en cas de polyvasculopathie ou d’athéromatose aortique importante, à cause du risque embolique lors des manipulations de cathéter dans l’aorte [17]. Contrôle radiologique Un CT-scan préopératoire, plus discriminant que l'échocardiographie, fournit des données numériques précises sur la valve aortique et les structures voisines (Figure 27.20) : Diamètres de l’anneau, de la chambre de chasse et de la jonction sino-tubulaire ; Distance entre l’anneau et les ostia coronariens droit et gauche ; Calcifications aortiques, anomalies coronariennes ; Orientation de la valve aortique (plan des 3 cuspides) permettant de positionner ultérieurement l’arc-en-C radiologique dans le plan de la valve sans erreur de parallaxe (moyenne : 17° d’orientation latérale gauche et 10° d’orientation céphalique) [51]. Ao Figure 27.20 : CT-scan préopératoire permettant une mesure précise de l’anneau aortique et de la distance des ostia coronariens [51]. OG CCVG V G Le positionnement de la prothèse à cheval sur l’anneau aortique est contrôlé par fluoroscopie et par ETO (Figure 27.21). L’inconvénient de la radiologie est un taux d’irradiation majeur pour l’équipe soignante. L’angiographie de contrôle (positionnement et fonction de la prothèse, flux coronarien) consomme une quantité importante de produit de contraste (100-300 mL), ce qui augmente l’incidence d’insuffisance rénale postopératoire chez ces malades à haut risque souffrant déjà de néphropathie liée à l’âge, au diabète ou à l’hypertension. Pour pallier à cet inconvénient, il est possible de se passer d’angiographie et de n’utiliser que l’échocardiographie, soit intracavitaire [50] soit transoesophagienne [51,52], accompagnée d’une utilisation minimale de la fluoroscopie. Ceci n’est ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 26 possible qu’en l’absence d’interférences avec l’image échocardiographique (artéfacts, prothèse mitrale en place, etc). Cathéter pigtail Mandrin ETO Introducteur transapical © Edwards™ Figure 27.21 : Exemple de mise en place d’une endoprothèse valvulaire aortique en situation peropératoire. La prothèse Edward’s Sapien™ (flèche) est positionnée au niveau de l’anneau aortique natif, montée sur son cathéter d’introduction, dont le mandrin est placé loin dans l’aorte thoracique. Le cathéter pigtail est introduit par une artère périphérique. Contrôle échocardiographique Très utile pour la surveillance hémodynamique (fonction ventriculaire, volémie, ischémie), l’examen ETO peropératoire est capital pour assurer le succès de l’implantation. Il permet tout d’abord d’évaluer et de mesurer les structures anatomiques (voir Figure 26.30) : Diamètre de l’anneau aortique en mésosystole (3 mesures en vue long-axe 120°), mesuré entre les points d’insertion du feuillet coronarien droit et du feuillet non-coronaire en incluant les calcifications annulaires. En réalité, ce diamètre sous-estime légèrement le diamètre de l’anneau, car il est un peu décalé postérieurement par rapport au centre ; seule la reconstruction 3D permet une mesure fiable du diamètre de la valve. La prothèse choisie est surdimensionnée de 2-3 mm. De fortes calcifications limitent la précision de la mesure, en particulier pour la partie antérieure de l’anneau qui est masquée par les calcifications postérieures. Diamètre et éventuelle hypertrophie de la chambre de chasse du VG ; exclusion d’une sténose sous-aortique dynamique, qui est une contre-indication au TAVI. Diamètre et hauteur des sinus de Valsalva ; Diamètre de la jonction sino-tubulaire ; Diamètre de l’aorte ascendante ; Position des ostia coronariens ; distance entre l’anneau aortique et l’ostium coronarien droit en vue long-axe 120° ; Surface de la valve aortique (en vue court-axe 40° ou par l’équation de continuité) ; Gradient transvalvulaire de la valve aortique : ΔP = 4 • (V2VAo - V2CCVG) en vues transgastriques profonde 0° ou long-axe 120° ; Evaluation de la valve mitrale (éventuelle fuite mitrale) ; Diagnostic et localisation d’athéromes dans l’aorte ascendante et la crosse. La distance anneau – ostium droit est bien mesurable à l’ETO, mais la distance anneau – ostium gauche est invisible, parce que l’implantation du tronc commun (TC) ne se repère qu’en court-axe à 40°. Seule une reconstruction 3D (full volume) permet d’évaluer la distance qui sépare le TC de l’anneau aortique ; cette distance est toutefois mesurable au CT-scan ou à l’IRM préopératoire. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 27 L’importance de cette mesure (normalement 12-15 mm) tient au fait qu’elle doit être plus grande que la hauteur des cuspides correspondantes pour éviter une occlusion coronarienne lorsque la valve native est écrasée contre les parois par la prothèse [180a]. Les dimensions mesurées à l’ETO sont essentielles au succès de l’opération, car le choix d’une prothèse trop petite entraîne un écartement excessif des feuillets avec fuite centrale, une forte incidence de fuite paravalvulaire et un risque d’embolie. A l’inverse, une prothèse trop grande ne s’expand pas complètement et limite les mouvements des feuillets ; elle peut léser la racine aortique, obstruer un orifice coronarien ou gêner le fonctionnement de la valve mitrale. A B 2-3 mm BE CCVG Aorte CCVG BE Ostium coronarien C Ostium coronarien D 2-3 mm Aorte CCVG CCVG Ostium coronarien Ostium coronarien Figure 27.22 : mise en place d’une endoprothèse aortique sous guidage échocardiographique. A: la prothèse Edward’s Sapien™ est introduite sur son mandrin et placée à cheval sur la valve aortique sténosée ; un gonflement très partiel du ballon d’expansion (BE) permet de localiser précisément la prothèse par rapport à l’anneau aortique à l’ETO [52]. B : prothèse déployée ; la prothèse Edward’s Sapien™ déborde de 2-3 mm l’insertion du feuillet mitral antérieur en direction de la chambre de chasse du VG (CCVG) ; les orifices coronariens sont dégagés. C : la prothèse Core-Valve™ est introduite sur son mandrin et placée à cheval sur la valve aortique sténosée. D : prothèse déployée ; la prothèse Core-Valve™ déborde de 2-3 mm l’insertion du feuillet mitral antérieur en direction de la chambre de chasse du VG (CCVG) et s’appuie dans la racine de l’aorte ascendante avec sa partie grillagée. Lors de sa mise en place, la prothèse doit se trouver à cheval sur la valve native, avec 2/3 de sa longueur sur le versant ventriculaire de l’anneau et 1/3 sur le versant aortique aortique. Pour la prothèse Edward’s Sapien™, l’extrémité proximale doit se trouver 5 mm en dessous de l’anneau aortique, juste en amont de l’insertion du feuillet mitral antérieur ; l’extrémité distale doit se situer au niveau de l’extrémité des feuillets aortiques natifs. Pour la prothèse CoreValve™, l’extrémité ventriculaire doit se trouver 5-10 mm en dessous de l’anneau aortique (Figure 27.22). A l’ETO, les repères dans une vue long axe à 120° sont l’anneau aortique, l’extrémité des cuspides aortiques, l’extrémité du feuillet mitral antérieur (en diastole), l’ostium coronarien droit et la jonction sinotubulaire [17,50,150,180a]. Sur l’écran ETO, on contrôle (Figure 27.23A) : ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 28 Avancement et positionnement des guides et introducteurs ; Positionnement du ballon de valvuloplastie pour dilater la sténose aortique ; la partie centrale rétrécie du ballon doit être placée au niveau de l’anneau aortique ; Positionnement de la prothèse ; un gonflement partiel du ballon de dilatation intravalvulaire permet une localisation précise de la prothèse (Figure 27.22A) ; un déploiement trop en amont fait courir le risque d’une chute dans le VG ou d’un dysfonctionnement mitral, alors qu’un déploiement trop en aval favorise une embolisation dans l’aorte ascendante ou une occlusion coronarienne. Sur les nouvelles machines permettant le 3D, le mode x-Plane permet de visualiser simultanément deux plans orthogonaux sur l’écran, en l’occurrence un long-axe à 120° et un court-axe à 30°. A B E C D F OG VG Prothèse Figure 27.23 : contrôles peropératoire à l’ETO lors d’implantation de prothèse valvulaire aortique de type Edwards-Sapien™. A : dilatation de la valve native. B : placement de la prothèse à cheval sur l’anneau aortique. C : déploiement de la prothèse. D : prothèse en place [51]. La fluoroscopie montre la position de la prothèse au cours de son expansion. E: contrôle postopératoire; vue ETO court-axe (54°) de la prothèse aortique en place (position adéquate). F: contrôle postopératoire; fuite paravalvlulaire (flèche verticale). Après la mise en place, l’ETO est cruciale pour l’évaluation fonctionnelle de la prothèse et le diagnostic d’éventuelles complications immédiates (Figure 27.23E et 23F). Quantification de fuites paravalvulaires et intravalvulaires ; les fuites paravalvulaires mineures (degré I-II) sont fréquentes, les fuites modérées surviennent dans 10% des cas [17] ; il est capital de les rechercher systématiquement sous plusieurs angles de vue avant de retirer le ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 29 guide, car une ré-expansion de la prothèse avec le ballon intra-aortique permet souvent de les diminuer. Les signes d’une fuite paravalvulaire majeure sont : • PISA bien visible sur le versant ventriculaire ; • Diamètre de la vena contracta > 4 mm ; • Orifice en court-axe représentant > 15-20% de la circonférence ; • Mouvement de bascule de la prothèse à chaque systole ; • Signes d’IA majeure : temps de demi-pression < 250 msec, reflux diastolique dans l’aorte descendante. Quantification des fuites intravalvulaires (largeur du jet d’IA par rapport au diamètre de la CCVG) ; l’IA diminue en général lorsqu’on retire le guide ; une IA degré I est présente chez 60% des malades [62a]. Une IA excessive et persistante (degré > II) peut demander le déploiement d’une seconde prothèse dans la première. Il peut arriver qu’un feuillet reste accolé à la paroi et ne se ferme pas en diastole, provoquant une IA massive ; il est possible de le rabattre en augmentant la postcharge avec un vasoconstricteur (phényléphrine). Gradient transvalvulaire (en conditions hémodynamiques normales), en prenant soin de soustraire l’éventuel gradient de la CCVG ΔP = 4 • (V2PrAo - V2CCVG). ΔPmoy habituel : 8-12 mmHg ; ΔPmoy acceptable : 10-20 mmHg ; le gradient est tributaire du volume systolique et de la force d’éjection du VG. La vélocité de la CCVG doit être enregistrée bien en amont de la prothèse, et non dans sa partie intraventriculaire, juste en-dessous de la valve, qui est une zone déjà rétrécie ; ceci conduirait à sous-estimer le gradient transvalvulaire et à surestimer la surface de la prothèse. Surface d’ouverture de la prothèse, qui est en moyenne de 1.1 cm2/m2. Fonctionnement de la valve mitrale (éventuelle fuite mitrale). Flux dans le tronc commun et la coronaire droite au Doppler couleur. Altérations de la cinétique segmentaire en rapport avec une obstruction coronarienne aiguë. Tamponnade sur rupture de la racine aortique ou perforation ventriculaire. Dissection aortique. Epanchement pleural gauche. L’examen ETO en fin de procédure est capital pour mettre en évidence les complications qui requièrent un traitement immédiat : tamponnade, déchirure ou dissection aortique, akinésie étendue traduisant l’occlusion d’un tronc coronarien, insuffisance mitrale. Utilité de l’ETO lors d’implantation de prothèse valvulaire aortique Mesure des repères anatomiques Guidage pour la mise en place de la prothèse Substitut à l’angiographie (absence de produit de contraste) Contrôle fonctionnel après implantation Evaluation et correction immédiate des complications Plastie mitrale percutanée Chez les patients âgés souffrant de dysfonction ventriculaire et de comorbidités importantes, la chirurgie mitrale comporte des risques élevés et entraîne une mortalité opératoire ≥ 15%. Pour ne pas refuser tout traitement à ces patients, plusieurs techniques percutanées permettent de réaliser une plastie mitrale sans thoracotomie ni CEC. La plus couramment appliquée en clinique est une suture bout-à-bout de l'extrémité médiane des deux feuillets par un clip (MitraClip™); en diastole, l'ouverture est transformée en deux hémi-orifices de taille limitée (Figure 27.25A) [49a]. Cette ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 30 technique, basée sur la plastie selon Alfieri, est la plus utilisée et la seule à avoir obtenu le label CE. Le clip possède deux bras en alliage chrome-cobalt recouverts de tissu polyester ; il peut s’ouvrir et se fermer lorsqu’il est monté sur son guide, qui est introduit dans l’OG par voie trans-septale. Le taux de succès immédiat est de l'ordre de 75%, mais le taux de réintervention sur la valve pour IM résiduelle est dix fois plus élevé qu'après correction chirurgicale (20% versus 2.2%) [49a]. OG OG OD VCS VG OD A B OG OG Ao VG VG C D Figure 27.24 : Images ETO de la mise en place du Mitraclip™. A : effet de tente (tenting) lors de la perforation du septum interauriculaire (vue bicave 80°). B : mesure de la distance entre le point de ponction et le plan de l’anneau mitral (flèche jaune) en vue 4-cavités (0°). C : clip en position intraventriculaire, les deux bras ouverts en direction des feuillets mitraux. D : accrochage des feuillets. Implantation du MitraClip™ et ETO L’ETO est nécessaire tout au long de la procédure pour évaluer la valve, guider l’implantation et contrôler le résultat (Figures 27.24 et 27.25) [180a]. Les vues 3D sont extrêmement utiles pour préciser la position du clip. Contrôle de la situation anatomique pour vérifier que les critères d’indications soient remplis : jet d’IM partant d’un orifice central (A2-P2), surface d'ouverture de la valve ≥ 4 cm2, hauteur de coaptation > 2 mm, distance entre le point de coaptation et le plan de l’anneau ≤ 10 mm, écart entre les feuillets < 10 mm (prolapsus). L'accès à la valve mitrale se fait par voie trans-septale depuis une ponction veineuse fémorale. Ponction trans-septale : l’ETO identifie le cathéter de ponction par le sommet de la déformation en tente du septum membraneux (vue bi-cave 80-100° ou vues simultanées 60° et 100° en X-plane 3D). Le point de ponction est réalisé dans la portion médiane postérieure du septum, supérieurement par rapport à la fosse ovale; il doit être situé 3.5 – 4.0 cm au-dessus du plan de l'anneau mitral (vue 4-cavités 0-20°) (Figure 27.24B). Avancement du guide de stabilisation de l'introducteur trans-septal : il est dirigé dans une veine pulmonaire gauche; on évite soigneusement l’appendice auriculaire gauche à cause du risque de perforation. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 31 Avancement du clip et de son système de mise en place à travers l'introducteur : contrôle dans les plans orthogonaux de la valve mitrale, en vues bicommissurale (60°) ou long-axe (120°), et simultanément en vue basale court-axe (X-plane 3D) ; le cathéter surplombe la valve mitrale. Positionnement du système en face de la valve mitrale, à la verticale de son ouverture; le clip est orienté perpendiculairement à celle-ci. Franchissement de la valve mitrale : avancement du clip juste en amont de l’orifice de régurgitation, au centre du PISA ; contrôle en vue 4-cavités (0°), bicommissurale (60°), longaxe (120°), 3D (full volume), avec et sans Doppler couleur. Contrôle de position du clip avant accrochage : le clip est maintenant en dessous de la valve mitrale, sur son versant ventriculaire ; il est ouvert : ses deux bras doivent être perpendiculaires à la ligne de coaptation de la valve, il est situé au milieu de la valve, dont les mouvements restent libres. Accrochage des feuillets : le cathéter est retiré en douceur pour que le clip accroche l’extrémité des feuillets, ce qui exerce une tension sur les cordages. Le clip est fermé partiellement pour permettre un contrôle échocardiographique, puis on procède à la fermeture complète des bras et à l’accrochage définitif des feuillets. Contrôle de la mise en place sur les deux feuillets en vues 4-cavités 0-20° et long-axe 120° (2D), en vues simultanées 60° et 120° (3D X-plane), en vues 3D (full volume) et au Doppler couleur. Le clip peut être ré-ouvert et repositionné si nécessaire. Mise en place du MitraClip™ par cathétérisme droit A FA FP B Systole Diastole FP Suture médiane bout-à-bout des feuillets mitraux C Figure 27.25 : Techniques de plastie mitrale percutanée. A : Suture de l'extrémité médiane des deux feuillets par un clip (MitraClip™); en diastole, l'ouverture est transformée en deux hémi-orifices de taille limitée [49a]. B : vue intra-auriculaire du clip surplombant la valve mitrale (flèche); les bras sont orientés perpendiculairement à la commissure mitrale. C : une fois le clip en place et le guide retiré, les feuillets mitraux sont fixés l’un à l’autre par leur extrémité distale (A2 et P2) (flèche rouge) ; en diastole, la valve mitrale présente une double ouverture (flèches vertes). FA : feuillet antérieur ; FP : feuillet postérieur. Contrôle immédiat : stabilité du clip, présence de fuite(s) résiduelle(s), mouvement des feuillets, planimétrie du double orifice en court-axe transgastrique ou en 3D (full volume) (surface d’ouverture combinée ≥ 2.5 cm2), gradient diastolique (ΔPmax ≤ 5 mmHg). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 32 En cas de fuite résiduelle excessive, on peut ajouter un deuxième clip ; il faut contrôler au préalable qu’il existe suffisamment de tissu mitral libre pour éviter que ce clip supplémentaire ne sténose l’orifice diastolique. Il arrive que la perforation septale laisse un orifice significatif, équivalant à une CIA; s’il existe une composante droite-gauche importante (désaturation artérielle) ou un risque de surcharge de volume pour le VD, la CIA est fermée immédiatement avec un système d’occlusion. Les complications sont essentiellement une perforation cardiaque (tamponnade), une rupture de cordage ou une déchirure de feuillet aggravant la régurgitation mitrale. Le traitement de ces complications est chirurgical. Plastie mitrale percutanée La technique la plus utilisée pour réaliser une plastie mitrale percutanée est la mise en place d’un clip reliant bout-à-bout les extrémités médianes (A2 et P2) des feuillets (plastie selon Alfieri). L’ETO est indispensable pour guider la procédure et contrôler le résultat (XPlane, 3D). - contrôle de la faisabilité - mise en place du guide trans-septal - accrochage des feuillets et fermeture du clip - contrôle fonctionnel après implantation (IM résiduelle) ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 33 Cardiomyopathies Cardiomyopathie dilatative D’une manière générale, la cardiomyopathie est définie par une atteinte fonctionnelle propre du myocarde disproportionnée par rapport aux modifications de la cinétique segmentaire ou des conditions de charge [43]. La forme dilatative est la plus fréquente des cardiomyopathies (60% des cas); elle est caractérisée par une dilatation et une dysfonction du VG ou des deux ventricules. Son origine peut être ischémique, valvulaire, infectieuse, métabolique, médicamenteuse, systémique ou idiopathique. Elle s’accompagne très fréquemment d’une insuffisance mitrale et/ou tricuspidienne de type restrictif, dont l’origine est triple (voir Figures 27.7 et 27.8): Dilatation de l’anneau auriculo-ventriculaire; Déplacement apical et extérieur des piliers à cause de la dilatation et de la sphéricisation des ventricules; Akinésie pariétale d’origine ischémique empêchant la coaptation normale d’une zone des feuillets correspondant aux cordages amarrés au pilier concerné. La présence d'une insuffisance tricuspidienne (IT) peut être due à une dysfonction primaire du VD (dysplasie arythmogène du VD, par exemple), ou être secondaire à une surcharge de volume ou de pression dans la circulation pulmonaire. Figure 27.26 : cardiomyopathie dilatée. A : dilatation du VG (vue 4cavités 0°) ; en systole l’apex reste arrondi ; la position des feuillets mitraux indique une restriction, le point de coaptation en très en dessous du plan de l’anneau mitral. B : même patient, vue long-axe 120° ; dans ce plan également, l’apex reste arrondi et le VG dilaté. C: cardiomyopathie biventriculaire (vue 4-cavités). Dans ces 3 images, la paroi ventriculaire gauche est mince par rapport à la taille du VG. D: cardiomyopathie dilatative du VG (vue transgastrique courtaxe); le diamètre télédiastolique du VG est 7.5 cm. A B C D Image bi-dimensionnelle Dilatation ventriculaire (diamètre télédiastolique du VG > 4.0 cm/m2); le VG devient sphérique, l’apex est arrondi (Figure 27.26); le diamètre au niveau des piliers peut être plus grand (≥ 8 cm) que celui de la base; on voit fréquemment des zones de contraste spontané dans le ventricule. Paroi ventriculaire normale ou amincie, mais augmentation de la masse ventriculaire globale; ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 34 L’OG est dilatée à cause de l’élévation chronique des pressions de remplissage. La présence de thrombus muraux est fréquente, notamment à l’apex du VG, et moins souvent dans l’appendice auriculaire gauche. La FE est < 0.35; il est judicieux de la calculer au moyen de la règle de Simpson (surface du VG en systole et en diastole dans 2 plans orthogonaux), car les approximations géométriques comme la formule de Teichholz ne sont pas appropriées lorsque le remodelage ventriculaire est important et lorsque le VG devient sphérique. Flux Doppler Au flux couleur, présence fréquente d’une IM et/ou d’une IT; l’insuffisance est en général modérée; lorsqu’elle est sévère, elle instaure un cercle vicieux: la surcharge de volume augmente la congestion ventriculaire, d’où baisse du débit et stase pulmonaire ou systémique, qui à son tour augmente la dilatation et l’importance de la fuite. La Vmax (3-4 m/s) et la pente ascentionnelle de l’IM sont abaissées à cause de la dysfonction ventriculaire (voir Figure 25.67). La Vmax de l’IT est fonction de la contractilité du VD et de la pression pulmonaire; le pic de vélocité de l’IT a une bonne valeur pronostique pour le devenir des cardiomyopathies dilatatives du VG [2]. L’insuffisance systolique s’accompagne d’une dysfonction diastolique proportionnelle à la dilatation ventriculaire; la présence d’un flux mitral de type restrictif (relaxation isovolumétrique ↓, Vmax E ↑, décélération E ↓, flux A minime) signe un mauvais pronostic [135]. Cardiomyopathie dilatative VG dilaté et arrondi (Dtd > 4.0 cm/m2), hypokinésie généralisée, FE < 0.35 IM restrictive (Vmax et pente d'accélération diminuée) Dilatation de l'OG, dysfonction diastolique secondaire Cardiomyopathie hypertrophique La cardiomyopathie hypertrophique est une maladie primaire du sarcomère ; sa prévalence est de 0.2% (1:500) chez le jeune adulte [97,134]. Les zones hypertrophiques, qui représentent environ 30% du myocarde, s'étendent sur un plus ou moins grand volume du septum interventriculaire à partir de la partie supérieure de celui-ci (chambre de chasse) ; elles se continuent dans la paroi antéro-latérale du VG dans 70% des cas. L'épaisseur du septum est au moins 1.5 fois celle de la paroi postérieure du VG (≥ 15 mm, en moyenne 22 mm). Ces zones représentent probablement le substrat anatomique à l'arythmogénicité de la maladie. L'hypertrophie de la chambre de chasse (CMO – cardiomyopathie obstructive, HOCM – hypertrophic obstructive cardiomyopathy, ou HISS – hypertrophic idiopathic subaortic stenosis) représente un obstacle à l'éjection du VG et induit une hypertrophie secondaire du reste du ventricule, mais les cellules des autres parois sont en général normales. Lorsque la maladie affecte tout le ventricule, il peut arriver que l'obstruction se situe dans le corps du ventricule ; l'oblitération de la cavité en télésystole isole la zone apicale qui ne se vide pas normalement et donne une fausse impression de dyskinésie apicale [128]. Le rétrécissement de la cavité ventriculaire est associée à une diminution des dimensions télésystoliques (diamètre < 2.5 cm) et à une accélération des flux intracavitaires (> 1.4 m/s). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 35 La fonction systolique est normale, voire hyperdynamique ; la fraction d'éjection tend à être supranormale à cause du rétrécissement de la cavité ventriculaire (diminution du Vts). La dysfonction diastolique d’accompagnement provoque une agrandissement de l'OG du à l’augmentation des pressions de remplissage [129]. La fonction diastolique est altérée par défaut de relaxation (diminution de la reprise du Ca2+ par le reticulum sarcoplasmique) secondaire à l'hypertrophie musculaire, et se traduit par des pressions de remplissage télédiastoliques élevées [98]. Vu ce défaut de relaxation protodiastolique, le remplissage ventriculaire devient très dépendant de la contraction auriculaire : sa contribution est > 30%. Sténose sous-aortique dynamique Pour en arriver à une obstruction mésosystolique de la chambre de chasse, il faut une combinaison de deux facteurs : Rétrécissement de la CCVG par l’hypertrophie septale, dont la contraction systolique rétrécit le conduit et accélère la vélocité du flux ; Déplacement antérieur de la zone de coaptation des feuillets mitraux du à une anomalie des feuillets, de l’anneau et/ou de l’appareil sous-valvulaire. Normalement, le point de coaptation entre les deux feuillets de la valve mitrale est maintenu éloigné postérieurement de la chambre de chasse par plusieurs éléments (Figure 27.27) [87]. Figure 27.27: Occlusion normale de la valve mitrale. Le point de coaptation de la valve mitrale est situé au quart postérieur du diamètre de la valve ; la paroi postérieure a moins de course que la paroi antérieure et est activée en dernier ; la pression intraventriculaire maintien l’occlusion de la mitrale (flèches vertes). MA: angle mitro-aortique. MPP: muscle papillaire postérieur OG Aorte MA Activée en dernier MPP Ant Post © Chassot 2010 L'angle mitro-aortique est assez ouvert pour éloigner la chambre d'admission de la chambre de chasse ; le flux de remplissage diastolique et le flux d'éjection systolique sont presque parallèles (angle < 30°) ; Le feuillet mitral antérieur est plus long que le postérieur ; En systole, la déformation physiologique en selle de l’anneau mitral fait reculer postérieurement le point de coaptation; Le déplacement radiaire vers l’intérieur de la paroi postérieure est plus faible que celui de la paroi antérieure et de la paroi latérale ; La paroi postéro-basale est activée électriquement en dernier ; ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 36 La pression intraventriculaire assure l'étanchéité de la valve mitrale en appuyant l’extrémité des deux feuillets l'une contre l'autre. Plusieurs phénomènes contribuent au déplacement antérieur du point de coaptation de la valve mitrale (Figure 27.28 et Figure 27.29A) [83,99,123]. Lors d’hypertrophie concentrique du VG, la cavité ventriculaire diminue de taille, la paroi postérieure se rapproche de la chambre de chasse. L'angle mitro-aortique est plus fermé à cause de l’hypertrophie septale asymétrique et du déplacement vers l’avant de la paroi postérieure ; la distance entre le point de coaptation de la mitrale et le septum est < 2.6 cm (voir Figure 26.69). Le flux mitral diastolique normal est dirigé vers la paroi postérieur et tournoie dans le VG pour se diriger vers la CCVG ; si l’appareil sous-valvulaire est déplacé vers l’avant ou si la longueur du feuillet postérieur est excessive, le flux diastolique est dirigé antérieurement et tourne en sens inverse dans le VG. Lorsque la systole commence, le flux vient normalement pousser le feuillet antérieur vers l’occlusion, alors que dans le deuxième cas il le repousse en direction de la CCVG. L’hypovolémie et la vasoplégie diminuent le volume ventriculaire au point que le diamètre antéro-postérieur se réduit trop au cours de la systole. Une stimulation β excessive augmente la course systolique radiaire de la paroi postérieure qui vient trop en avant. Un excès de tissu mitral modifie le rapport de longueur entre les deux feuillets et déplace le point de coaptation vers l’avant en direction de la CCVG ; ceci survient dans la maladie de Barlow ou après plastie mitrale. A B OG OG Aorte Aorte MPP Ant Post Ant Post © Chassot 2010 Figure 27.28: Obstruction dynamique de la chambre de chasse du VG (effet CMO). A : le flux mitral diastolique normal est dirigé vers la paroi postérieur et tournoie dans le VG pour se diriger vers la CCVG ; lorsque la systole commence, la masse sanguine vient normalement pousser le feuillet antérieur vers l’occlusion, en direction de l’arrière. B : si l’appareil sous-valvulaire est déplacé vers l’avant ou si la longueur du feuillet postérieur est excessive, le flux diastolique est dirigé antérieurement et tourne en sens inverse dans le VG ; en début de systole, la masse sanguine est postérieure et repousse le feuillet antérieur en direction de la CCVG [83]. Normalement, l’angle fait par la direction du flux diastolique et celle du flux systolique (flèches bleues pointillées) est faible (< 25°). Dans le deuxième cas, il est > 35°. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 37 Ces phénomènes rapprochent le point de coaptation mitral de la chambre de chasse au cours de la systole. La zone de coaptation des feuillets est asymétrique : comme elle devient plus longue sur le feuillet antérieur, l’extrémité de celui-ci est basculée dans la cavité ventriculaire. La pression intraventriculaire pousse alors le feuillet antérieur dans la CCVG au lieu de le plaquer contre le feuillet postérieur (Figure 27.29A) [114,138]. A B OG OG Aorte Aorte MPP Ant MPP Post Ant Post © Chassot 2010 Figure 27.29 : Obstruction dynamique de la chambre de chasse du VG (effet CMO). A : si la cavité du VG se rétrécit et que la paroi postéro-basale devient plus centrale, le point de coaptation avance en direction antérieure, l’occlusion n’a plus lieu sur le bord distal du feuillet antérieur, et la pression intaventriculaire le repousse antérieurement en direction de la chambre de chasse du VG (CCVG). B: la forte accélération systolique dans la CCVG rétrécie par l’hypertrophie septale crée un effet Venturi qui aspire le feuillet antérieur dans la CCVG, ce qui l’occlut plus ou moins complètement. C’est le SAM (systolic anterior motion). Le flux baisse dans l’aorte et la réouverture de la mitrale en cours de systole induit une insuffisance méso-télésystolique. L'hypertrophie du septum interventriculaire empiète sur la lumière de la CCVG lorsque le muscle se contracte, et y provoque une subobstruction systolique dynamique. Ce rétrécissement est la cause d'une accélération majeure du flux systolique. La vélocité devient telle que le feuillet antérieur de la valve mitrale, déjà déplacé antérieurement par l’avancement du point de coaptation, est aspiré dans la CCVG par effet Venturi ; c'est le Systolic Anterior Motion (SAM). Le feuillet antérieur contribue encore à l'obstruction de la chambre de chasse (Figure 27.29B et 27.30). La vélocité maximale atteinte dans la CCVG est > 2.5 m/s (ΔP > 25 mmHg). Le gradient de pression peut s'élever jusqu'à 170 mm Hg. L'aspiration du feuillet antérieur de la mitrale (SAM) ouvre la valve à mi-systole et provoque une insuffisance mitrale méso-télésystolique. Il existe une relation directe entre la Vmax dans la CCVG et l’importance de l’IM ; le jet de cette dernière présente une direction typiquement postéro-latérale [138]. Le rétrécissement mésosystolique de la CCVG diminue brusquement le volume systolique, ce qui se traduit par deux phénomènes (Figure 27.31) : ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 38 Déformation en dague du flux aortique ; au milieu de l’éjection, le flux accélère mais le volume systolique baisse ; l’image spectrale du flux devient donc plus étroite, puisque sa surface est proportionnelle au VS ; Collapsus partiel des feuillets de la valve aortique (notching) ; la baisse méso-systolique du VS ne permet plus de maintenir la valve aortique complètement ouverte ; en mode TM, on voit les cuspides collaber. Ce signe est pathognomonique de l’obstruction dynamique de la CCVG. OG FP FA OG Aorte FP VG FA CCVG CCVG Ao VG Orifice résiduel Figure 27.30 : SAM ou systolic anterior motion. Le feuillet antérieur (FA) de la valve mitrale est poussé puis aspiré dans la chambre de chasse du VG (CCVG) ; il se plie en son milieu au cours de la systole de manière caractéristique. FP : feuillet postérieur. Figure 27.31 : Chute brusque du débit aortique en cours de systole lorsque le feuillet antérieur de la valve mitrale vient subocclure la chambre de chasse du VG. A : l’image spectrale du flux aortique prend une allure en dague (flèche) due à baisse soudaine du volume systolique. B : une coupe TM à travers la valve aortique en court-axe (40°) ou en long-axe (120°) offre une haute résolution temporelle et permet de suivre la position des cuspides aortiques au cours de la systole ; normalement, la valve maintient sa forme ouverte tout au long de l’éjection (cartouche). C : lors de cardiomyopathie obstructive (CMO) et de SAM, le volume systolique devient insuffisant pour ouvrir complètement la valve aortique et celle-ci se referme partiellement en cours de systole (flèche) ; cette fermeture partielle prématurée de la valve aortique est pathognomonique de la CMO. A B 40° Ouverte Fermée C ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 39 L'effet CMO Un patient ne souffrant pas de cardiomyopathie obstructive peut reproduire une sténose sous-aortique dynamique lorsque certaines conditions sont remplies. Hypertrophie ventriculaire gauche concentrique avec petite cavité ventriculaire, telle qu'elle se rencontre fréquemment chez les hypertendus chroniques et les porteurs de sténose aortique ; Baisse du remplissage ventriculaire par hypovolémie ; Baisse de l'impédance aortique et des résistances artérielles systémiques (vasoplégie) ; elle augmente le gradient trans-aortique ; ceci survient aussi après un remplacement valvulaire aortique pour sténose, parce que l'obstacle à l'éjection du VG a disparu ; Augmentation de la contractilité par β-stimulation. Le résultat de cet effet CMO est un bas débit cardiaque caractérisé par une pression artérielle systémique basse et une tachycardie, mais des pressions de remplissage conservées, voire élevées. Le diagnostic ne peut être posé qu'à l'échocardiographie. La seule thérapeutique est l'arrêt des catécholamines β, l’élévation de la précharge (remplissage) et l'augmentation des résistances artérielles systémiques (vasoconstricteur α) ; dans les cas rebelles, le β-blocage est nécessaire. En situation aiguë, l'échocardiographie est le seul moyen de pouvoir affirmer la présence d'un effet CMO. Les caractéristiques principales sont les suivantes (voir Figure 25.87). Cavité ventriculaire de petite taille et VG hyperdynamique ; Présence d'un éperon septal à l'entrée de la CCVG ; le diamètre de la chambre de chasse est rétréci (valeurs normales: 2 cm chez la femme et 2.2 cm chez l'homme) (voir Figure 26.62) ; Epaisseur du septum > 1.5 fois celle de la paroi postérieure du VG ; Présence de turbulences de haute vélocité dans la CCVG en systole ; Aspiration du feuillet antérieur de la valve mitrale dans la CCVG pendant la deuxième partie de la systole (SAM) ; le feuillet se coude en son milieu en un genou caractéristique ; Vélocité excessive (> 2.5 m/s) du flux systolique dans la CCVG ; la silhouette du flux en dague est caractéristique de l'accélération qui survient en deuxième partie de systole ; Au Doppler couleur, flux turbulent systolique dans la CCVG ; Insuffisance mitrale apparaissant à mi-systole, de direction postéro-latérale ; La combinaison d’une IM et de turbulences systoliques dans la CCVG donne une image de double jet couleur en V, avec une branche dans la chambre d’éjection et l’autre dans l’OG ; Fermeture prématurée de la valve aortique en milieu de systole à cause de la baisse du volume éjecté secondaire à la subocclusion de la CCVG (mode TM de la valve aortique). Chirurgie de la CMO L’indication à une myectomie transaortique de la CCVG est un gradient > 30 mmHg au repos ou > 60 mmHg à l’effort, une épaisseur du septum > 18 mm et la présence d’un SAM typique (450). L’ETO est nécessaire pour déterminer le point de contact entre le feuillet antérieur et le septum et pour mesurer l’épaisseur du septum sous la valve aortique. Cette mesure s’effectue en vue long-axe du VG, entre 90° et 140° selon la position du coeur, dans un plan qui offre une bonne image en long-axe de la chambre de chasse et de la valve aortique (Figure 27.30). Après la sortie de CEC, plusieurs points sont à vérifier: La Vmax (Doppler continu) et le gradient résiduel dans la CCVG en vue transgastrique profonde 0° ou long-axe du VG 120°; la Vmax ne doit pas dépasser 2 m/s et le ΔP 16 mmHg; L’absence de SAM et d’IM méso-systolique; L’éventualité d’une CIV sur résection excessive (0.6% des cas); Une insuffisance aortique sur déstabilisation de la cuspide coronarienne droite (l’incision a lieu sous la cuspide droite); ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 40 Un bloc de branche complet (10% des cas). Un retour en CEC pour compléter la résection est nécessaire dans 5% des cas [114]. L’alternative à la chirurgie est l’alcoolisation de la première branche septale de l’IVA qui permet une nécrose partielle de la musculature septale. Cardiomyopathie hypertrophique Lorsqu’elle est primaire, la cardiomyopathie hypertrophique touche préférentiellement le septum; l’HVG secondaire à un excès de postcharge est homogène dans tout le VG. L’hypertrophie septale peut occasionner une cardiomyopathie obstructive (CMO), ou sténose dynamique de la CCVG, qui est liée à plusieurs phénomènes : - hypertrophie musculaire concentrique et rétrécissement systolique de la CCVG - déplacement antérieur du point de coaptation de la valve mitrale - fermeture de l’angle mitro-aortique - aspiration du feuillet mitral antérieur dans la CCVG (SAM : systolic anterior motion) - hypovolémie, vasoplégie, sur-stimulation béta-adrénergique - en cas de remplacement valvulaire aortique pour sténose : baisse de postcharge - en cas de plastie mitrale : excès de tissu mitral ou anneau trop restrictif La CMO est définie par : - Vmax > 2.5 m/s dans la CCVG (Doppler pulsé, Doppler continu avec double enveloppe) - présence de SAM (vue long-axe 120° de la CCVG) - IM méso-télésystolique - fermeture prématurée de la valve aortique (mode TM de la valve aortique) - déformation "en dague" du flux aortique (Doppler spectral). Messages pour le chirurgien en cas de CMO Diamètre de la chambre de chasse du VG, présence d’un éperon septal (vue long axe 120°) Présence de SAM, position du point d’occlusion dans la CCVG Epaisseur du septum interventriculaire en dessous de la valve aortique (long axe CCVG 90 – 140°) Longueurs du feuillet antérieur et du feuillet postérieur (vue long-axe VG 120°) Vmax et ΔP dans la CCVG (vue transgastrique profonde 0° ou 120°) Post-CEC - ΔP résiduel (doit être < 16 mmHg) - SAM résiduel - IM résiduelle (doit être < degré I, ou due à une autre cause que la CMO) - Présence de CIV - Présence d’IA Autres cardiomyopathies Cardiomyopathie restrictive La cardiomyopathie restrictive (CMR) est caractérisée par une dysfonction diastolique majeure. L'infiltration du myocarde par du tissu pathologique fibreux, non-contractile et rigide (amyloïdose, ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 41 sclérodermie, endomyofibrose, lésion postactinique) effondre la compliance ventriculaire mais altère peu la fonction systolique (FE normale). La relaxation et la distensibilité du ventricule sont extrêmement basses ; la pression télédiastolique est élevée et s'accroît brusquement à la moindre augmentation de volume ou de débit. L'affection atteint presque exclusivement le VG. Le pronostic de la maladie est très sombre. L’imagerie bidimensionnelle de la CMR est peu spécifique, à l’exception de zones granulaires tachetées de l’amyloïdose ou de l’épaississement fibreux endocardique hyperéchogène de l’endomyofibrose. Le VG est de taille, d’épaisseur et de fonction systolique normales ; l’OG est dilatée par l’élévation chronique des pressions de remplissage. Au flux Doppler, par contre, l’image est caractéristique de la physiologie restrictive (Figure 27.32) [9]. Phase de relaxation isovolumétrique raccourcie à < 60 ms; Vmax E élevée à > 1.5 m/s à cause de la haute pression auriculaire gauche; Décélération du flux E très brève (< 140 ms); Flux A minime, parce que le VG n’est plus distensible en télédiastole; Composante systolique du flux veineux pulmonaire diminuée (flux de type “sD”); Flux rétrograde Ar dans les veines pulmonaires (VP) augmenté; Rapport de la durée A/Ar (A antérograde à travers la mitrale / Ar rétrograde dans les VP): la durée de Ar est > 30 msec supérieure à celle de A. Figure 27.32 : Vélocités du flux mitral et du déplacement de l’anneau mitral dans la cardiomyopathie restrictive (insuffisance diastolique majeure), comparées à la situation normale. E : flux mitral protodiastolique. A : flux de la contraction auriculaire. E’ : déplacement protodiastolique de l’anneau mitral au Doppler tissulaire. A’ : déplacement de l’anneau mitral simultané à la contraction auriculaire (Doppler tissulaire). tRI: temps de relaxation isovolumétrique. tDE: temps de décélération du flux E. Vélocité du flux mitral tRI Vélocité de l’anneau mitral tDE E E’ A Normal A’ tRI tDE E’ A A’ Cardiomyopathie restrictive E © Chassot 2010 Au Doppler tissulaire, le déplacement diastolique de l’anneau mitral, qui reflète la relaxation active longitudinale du VG, montre une diminution de la vélocité protodiastolique E’. Dans la CMR, cette vélocité E’ est abaissée à < 5 cm/s [156]. Normalement, le mouvement E’ précède le flux E, puisqu’il le déclenche ; en cas de défaut de relaxation et de POG élevée, le flux E précède le mouvement E’. Comme E’ quantifie la relaxation alors que le flux E dépend de la relaxation et de la pression auriculaire gauche, le rapport E/E’ permet d’évaluer la POG : plus il augmente, plus cette dernière est élevée. Il est typiquement > 15 dans la CMR (POG > 18 mmHg) [125]. Le diagnostic différentiel entre la CMR et la péricardite constrictive peut être difficile, car les deux entités présentent un aspect hémodynamique et clinique superposable: hypotension, tachycardie, intolérance à l’effort et insuffisance diastolique sévère ; la fonction systolique est conservée. A part la présence d’un péricarde hyperéchogène et épaissi (> 3 mm) dans la péricardite, trois données ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 42 échocardiographiques permettent de bien différencier la cardiomyopathie restrictive de la péricardite constrictive (Figure 27.33). Comme les cavités cardiaques ne sont pas isolées des variations de pression intrathoracique et que la Ptd est très élevée, la morphologie du flux mitral est peu variable avec la respiration spontanée dans la cardiomyopathie restrictive [64,182] ; au contraire, la péricardite constrictive est caractérisée par une variation respiratoire excessive du flux mitral (> 25%). La vélocité du mouvement de l’anneau mitral examiné au Doppler tissulaire est basse (E’ < 5 cm/s) dans la cardiomyopathie restrictive puisqu’il s’agit d’une maladie de la relaxation diastolique, alors qu’elle est haute dans la péricardite constrictive (E’ > 10 cm/s) où la relaxation est normale [130,156]. La torsion systolique de l’apex est diminuée dans la péricardite constrictive (< 7°) alors qu’elle est conservée dans la cardiomyopathie restrictive (> 15°) [39a]. Figure 27.33 : Différentiation de la péricardite constrictive et de la cardiomyopathie restrictive en respiration spontanée à l'ETO. A : Flux mitral de péricardite constrictive ; E: flux mitral passif protodiastolique, A: flux mitral de la contraction auriculaire. B : Vélocité de l’anneau mitral au Doppler tissulaire ; E’: mouvement proto-diastolique, A’: mouvement de la contraction auriculaire, S : mouvement systolique (descente de l’anneau mitral du à la contraction longitudinale du VG). C : Les variations respiratoires très marquées de la péricardite constrictive sont absentes en cas de cardiomyopathie restrictive. tRI: phase de relaxation isovolumétrique (n : 90 ms). tDE: temps de décélération du flux E (n : 160ms) [64]. D: La vélocité du mouvement de l’anneau mitral, normal dans la péricardite constrictive (1215 cm/s), est très faible dans la cardiomyopathie restrictive (< 5 cm/s) et n’a pas de variations respiratoires [156]. E ’ A ’ A S E A B Inspirium Inspirium Expirium Expirium tRI tDE Normal E Doppler tissulaire de l’anneau mitral A E’ Péricardite constrictive E’ Cardiomyopathie restrictive C D © Chassot 2010 La réponse hémodynamique à une manoeuvre de Valsalva ou à la ventilation en pression positive est également une manière de différencier les deux affections : voir ci-dessous Péricardite. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 43 Dysplasie arythmogène du ventricule droit Dans cette affection rare, le myocarde du ventricule droit est progressivement remplacé par une infiltration de fibrocytes et d'adipocytes qui prédomine dans la chambre de chasse, l’apex et la région tricuspidienne ; les trabéculations du VD sont souvent hypertrophiées mais la paroi est amincie. Ceci s'accompagne d'une dysfonction droite progressive sévère et de troubles du rythme. L'incidence est estimée à 1:5'000 patients. A l’échocardiographie, la paroi libre est akinétique, et seule la contraction du septum interventriculaire assurée par le VG propulse du sang dans l’artère pulmonaire; la régurgitation tricuspidienne due à la dilatation est de basse vélocité (< 2 m/s) à cause de la mauvaise fonction systolique droite (Figure 27.34). L'infiltrat de la paroi libre par le tissu adipeux donne un signal hyperéchogène [54]. Figure 27.34 : dysplasie arythmogène du ventricule droit. Le VD et l’OD sont dilatés, le septum interventriculaire bombe dans le VG qui est comprimé ; la texture myocardique de la paroi libre du VD est hyperéchogène ; la FE du VD est < 15%. Au Doppler couleur, la Vmax de l’IT est très basse (0.5 – 1.0 m/s) à cause de la défaillance systolique et de la dilatation massive de l’anneau tricuspidien ; en systole, le flux rétrograde de l’IT est laminaire. Entre l’image en diastole (à gauche) et en systole (à droite), seule la position du septum interventriculaire a changé ; c’est lui qui assure la majeure partie de la propulsion du sang dans l’AP. Maladie de Tako-tsubo La ballonisation apicale aiguë transitoire du VG consiste en une dysfonction de l'apex du VG mimant un infarctus mais ne montrant aucune lésion coronarienne à l'angiographie. Elle a été décrite tout d'abord au Japon, où on lui a donné le nom de maladie de Tako-tsubo parce que la dysfonction akinétique de l'apex ventriculaire gauche (Figure 27.35) donne des images ressemblant au pot à col étroit qu'utilisent les pêcheurs japonais pour piéger les poulpes. La clinique est identique à celle d'un infarctus aigu, mais l’affection présente des caractéristiques particulières [24,25]. Figure 27.35 : maladie de Tako-tsubo, ou ballonnisation aiguë transitoire de l’apex du VG, ici en systole. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 44 Akinésie transitoire apicale et antéro-apicale étendue du VG ne suivant pas la distribution segmentaire habituelle; hyperkinésie de la base du VG ; Dysfonction ventriculaire globale, pouvant conduire à des arythmies sévères ou au choc cardiogène ; la FE est abaissée (0.2 – 0.4) mais la récupération est rapide ; Dans certains cas, l’hyperkinésie des segments basaux peut conduire à une obstruction dynamique médioventriculaire ou dans la chambre de chasse. Non-compaction du VG La non-compaction du VG est une cardiomyopathie fréquemment associée à des cardiopathies congénitales, caractérisée par de nombreuses trabéculations très proéminentes entrecoupées de profonds récessus communicant avec la cavité ventriculaire (présence de flux). Ces malformations sont localisées dans la paroi apicale, latérale moyenne et inférieure moyenne [48a]. A ces endroits, la paroi ventriculaire semble constituée de deux couches distinctes : une couche profonde épaisse et trabéculée et une mince couche épicardique continue. La maladie est associée à une dysfonction du VG et à des arythmies graves. La silhouette bi-dimensionnelle caractéristique des quatre cavités dans chacune des différentes cardiomyopathies est représentée dans la Figure 27.36. Les cardiomyopathies Cardiomyopathie dilatative - Dilatation (Dtd > 4 cm/m2) et sphéricisation du VG; dilatation du VD - FE < 0.3 (règle de Simpson) - IM restrictive (Vmax ≤ 4 m/s), IT - Contraste spontané et thrombus muraux fréquents Cardiomyopathie hypertrophique - HVG concentrique symétrique ou asymétrique (prédominance septale) - Epaisseur ≥ 15 mm (rapport épaisseur septum / paroi postérieure > 1.5) Cardiomyopathie obstructive (sténose sous-aortique dynamique) - Vmax CCVG > 2.5 m/s (vue transgastrique 0° ou 120°) - SAM (vue long-axe VG 120°) - IM méso-télé-systolique - Image en dague du flux aortique - Fermeture prématurée de la valve aortique (mode TM) Cardiomyopathie restrictive - Fonction systolique et taille VG normales, OG dilatée - Dysfonction diastolique restrictive majeure - Relaxation isovolumétrique < 60 ms, Vmax E ≥ 1.5 m/s, décélération E < 140 ms, A minime - Vmax E’ < 5 cm/s, E/E’ > 15 ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 45 OG VG Normal IM Cardiomyopathie restrictive Cardiomyopathie hypertrophique OG dilatée Dysf. diastolique FE > 0.5 HVG concentrique OG agrandie CMO OG OD OG IT VG VG VD BA Cardiomyopathie dilatative Cardiomyopathie de stress VG très dilaté OG dilatée, IM++ FE ≤ 0.3 Ballonisation apicale FE < 0.4 Dystrophie VD Dilatation VD et OD Akinésie étendue VD IT ++ © Chassot 2010 Figure 27.36 : Schéma différenciant les cinq types de cardio-myopathies citées. FE: fraction d'éjection. IM++: insuffisance mitrale de degré 2/4. IT : insuffisance tricuspidienne 2/4. CMO: cardiomyopathie obstructive de la chambre de chasse du VG, ou sténose sous-aortique dynamique. BA : ballonisation de l’apex du VG. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 46 Dysfonction ventriculaire Insuffisance ventriculaire Insuffisance ventriculaire gauche Trois ordres de mesures sont nécessaires pour évaluer réellement la fonction systolique gauche : 1) les dimensions ventriculaires (épaisseur, taille, FE, volume éjecté), 2) la pression générée dans l’aorte (PAsyst), et 3) l'évolution temporelle de la contraction (durée d'éjection, accélération, Vcf, indice de Tei). Même en intégrant ces trois éléments, il importe de déterminer le degré de dysfonction ventriculaire sur un faisceau de données et non sur une mesure isolée. Bien que le remodelage des cavités gauches soit lié à la chronicité de l’insuffisance cardiaque, l’image échocardiographique d’ensemble d’une insuffisance gauche sévère est caractéristique (Figure 27.37). Le VG est dilaté ; diamètre télédiastolique > 4 cm/m2, diamètre télésystolique > 2.5 cm/m2 ; Le VG est de forme sphérique, l’apex est arrondi, le septum interventriculaire bombe dans le VD; L’OG est dilatée, le septum interauriculaire bombe dans l’OD ; L’amplitude des mouvements de contraction et d’épaississement est faible ; Il peut apparaître un contraste spontané dans l’OG et parfois dans le VG ; on peut rencontrer des thrombus muraux, le plus souvent à l’apex et dans l’appendice auriculaire gauche ; L’amplitude de mouvement des feuillets mitraux est faible ; la course systolique de l’anneau mitral est < 0.5 cm ; Il existe fréquemment une insuffisance mitrale centrale de degré I à II et de type restrictif, dont la Vmax est diminuée (≤ 4 m/s) ; la pente ascentionnelle de l’IM est basse (≤ 1'200 mmHg/s); Les mesures quantitatives sont basses: FAC < 0.25, FE < 0.35, Vcf < 0.5 ; Au Doppler tissulaire, la Vmax de la composante systolique S’ est ≤ 5.0 cm/s ; La durée d’éjection est prolongée > 300 msec (mode TM à travers la valve aortique) ; La vélocité d’éjection du flux aortique est abaissée (Vmax < 1 m/s), la durée jusqu'au pic de vélocité est allongée (> 35% de la durée d'éjection) ; L’indice de Tei, dont la valeur est indépendante de la géométrie du VG, est > 0.5 ; l’indice de Tei est le rapport entre la durée des phases de contraction (CI) et de relaxation (RI) isovolumétriques et la durée d’éjection : (CI + RI) / Ej (voir Figure 25.69). OG OG Valve mitrale VD A VD VG VG B Figure 27.37 : Image 4-cavités d'insuffisance ventriculaire gauche. A: le VG est dilaté, arrondi, l'OG est dilatée, la valve mitrale ne coapte pas correctement car ses feuillets sont retenus en dessous du plan de coaptation (ligne pointillée) en systole par la dilatation ventriculaire; les cavités droites sont de taille normales. B: situation similaire, avec présence d’une insuffisance mitrale restrictive. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 47 Des discordances entre ces différents éléments doivent faire rechercher d’autres pathologies que l’insuffisance ventriculaire. La FE traduit la position d’équilibre du VG entre son volume télédiastolique, sa performance systolique et sa postcharge ; elle n’est pas en soi une mesure de contractilité. A l’exception de la règle de Simpson, son calcul repose sur des approximations géométriques ; celles-ci ne sont valables qu’en l’absence de remodelage ou de modification de taille du VG, ce qui n’est pas le cas dans l’insuffisance ventriculaire. Comme le VG est dilaté, une FE basse peut correspondre à un volume systolique normal et à un débit cardiaque maintenu. La FE n’est pas valide en cas de valvulopathie sévère ; il est préférable d’utiliser les dimensions télédiastoliques dans les sténoses et les dimensions télésystoliques dans les insuffisances. La dilatation du VG signe la chronicité, car le ventricule gauche se dilate peu lors de défaillance aiguë, contrairement au VD. Insuffisance ventriculaire droite L'insuffisance ventriculaire droite présente des signes pathognomoniques à l’ETO (Figure 27.38). Dilatation du VD (Vtd > 120 ml/m2) ; de structure fine et très sensible à la postcharge, le VD se dilate très rapidement en cas d’augmentation de la résistance vasculaire pulmonaire ou de surcharge de volume; En vue 4-cavités, la surface VD est égale à celle du VG en cas de dilatation modérée et plus grande en cas de dilatation sévère ; l’apex du coeur est constitué par le VD; Diminution de la contraction de la paroi libre du VD ; Bombement du septum interventriculaire en direction du VG ; ce bombement réduit le remplissage diastolique du VG, donc diminue le débit systémique ; Insuffisance tricuspidienne (degré ≥ 2/4) ; Dilatation de l'OD et bombement du septum interauriculaire dans l'OG ; cet élément est souvent le premier qui attire l’attention en cas de dysfonction aiguë ; En cas de foramen ovale perméable (FOP), un shunt droit – gauche peut survenir, visible au Doppler couleur ; Fraction de raccourcissement de diamètre < 0.3, fraction de raccourcissement de surface (FAC) < 0.3 ; Diminution de la course de l'anneau tricuspidien < 15 mm (TAPSE en mode TM), diminution de la Vmax S < 6 cm/s (Doppler tissulaire de l’anneau tricuspidien), indice de Tei > 0.5 ; Augmentation du diamètre de la VCI, de la VCS et du sinus coronaire ; présence de flux veineux rétrograde important en systole (IT) et pendant la contraction auriculaire (perte de compliance du VD) (VCI, veine sus-hépatique). OG OG OD OD VG VG VD VD Figure 27.38 : insuffisance ventriculaire droite. L’OD et le VD sont dilatés, alors que l’OG et le VG sont comprimés ; les septa interauriculaire et interventriculaire bombent en diastole dans les cavités gauches. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 48 Trois phénomènes contractiles localisés peuvent conduire l’observateur à sous-estimer l’importance de l’insuffisance droite. En vue admission – chasse à 60°, il est fréquent de constater une persistance de la contraction au niveau de la chambre de chasse malgré une défaillance ventriculaire droite majeure chez les malades sous catécholamines, parce que cette zone est plus richement dotée en récepteurs β que le reste du ventricule. Malgré une hypokinésie sévère de la paroi libre et une dilatation du VD, on rencontre souvent une persistance de la contraction à l’apex, notamment en cas d’embolie pulmonaire; ce phénomène est lié à la continuité des fibres apicales des deux ventricules qui fait que l'apex droit est entrainé par la contraction circulaire gauche. Il en est de même lors d’infarctus droit, car l’apex du VD est vascularisé par l’IVA. Il arrive que la base du VD, bien que dysfonctionnelle, soit entraînée par la contraction du VG parce que les fibres circulaires de la chambre d’admission du VD se continuent avec celles du VG ; à un examen plus approfondi, on voit cependant que la paroi ne s’épaissit pas et présente un défaut de contraction longitudinale. C’est donc le non-épaississement de la paroi libre du VD qui est le plus pertinent pour en définir le degré de dysfonction droite. Insuffisance diastolique Quelques indices simples permettent d’évaluer les trois phases du flux diastolique (Figure 27.39). Figure 27.39 : indices correspondant aux trois phases physiologiques de la diastole. I : la vitesse de propagation du flux mitral (Vp) et le rapport E/E’ pour la phase de relaxation active protodiastolique. II : le temps de décélération du flux mitral E (tDE) et la pente de décélération du flux veineux pulmonaire diastolique (tDD) pour l’élasticité ventriculaire (diastasis). III : la différence entre la durée de l’onde A rétrograde dans les veines pulmonaires et la durée de l’onde A antérograde à travers la valve mitrale (Dur Ar/A) pour la phase de distensibilité télédiastolique. I II III D Vp E tDD Ar A Flux veineux pulmonaire E/E’ Durée Ar-A E’ tDE tRI E A Flux mitral Relaxation Elasticité Distensibilité © Chassot 2011 Phase de relaxation active protodiastolique : la propagation du flux mitral (normal : ≥ 55 cm/s) et le rapport E/E’ (Vmax E flux mitral / Vmax E’ anneau mitral, normal = 10) ; Phase du diastasis (compliance ventriculaire passive) : la pente de décélération du flux veineux pulmonaire diastolique (normal > 160 msec) ; ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 49 Phase de distensibilité télédiastolique : le rapport entre la durée de l’onde A rétrograde dans les veines pulmonaires et la durée de l’onde A antérograde à travers la valve mitrale ; normalement, Am > Ar. Le diagnostic de dysfonction diastolique, ou insuffisance cardiaque congestive à fonction systolique préservée (FE > 0.5), se base sur les éléments suivants [125] : Dilatation de l’OG (> 40 mL/m2) ; Masse VG > 150 g/m2, épaisseur de paroi > 1.2 cm ; Propagation du flux mitral < 40 cm/s ; Décélération de la composante E du flux mitral < 140 msec ; Décélération de la composante D du flux veineux pulmonaire < 160 msec ; Rapport E/E’ > 15 ; Ar –Am > 30 ms. ETO et insuffisance ventriculaire Caractéristiques de la défaillance du VG - dilatation et sphéricisation du VG (Dtd > 4.0 cm/m2, Dts > 2.5 cm/m2) - hypokinésie généralisée, paroi amincie - faible amplitude des mouvements mitraux, IM restrictive (Vmax diminuée) - FAC < 0.25, FE < 0.35, Vcf < 0.5, indice de Tei > 0.5 - S’ (Doppler tissulaire) ≤ 5.0 cm/s - durée jusqu’à la Vmax du flux aortique > 35% de la durée d'éjection Caractéristiques de la défaillance du VD - dilatation du VD (surface identique ou plus grande que celle du VG en 4-cavités) - hypokinésie sévère de la paroi libre - bombement du septum interventriculaire dans le VD - IT (II-III), Vmax diminuée - bombement du septum interauriculaire dans l’OG - FAC < 0.3, indice de Tei > 0.5, TAPSE < 15 mm - S’ (Doppler tissulaire) ≤ 6.0 cm/s Caractéristiques de l’insuffisance diastolique sévère - dilatation de l’OG (> 40 mL/m2) - propagation du flux mitral < 40 cm/s - décélération de la composante E du flux mitral < 140 msec - rapport E/E’ > 15 - durée Ar –Am > 30 ms Chirurgie de l’insuffisance ventriculaire Chirurgie de remodelage Plusieurs techniques chirurgicales sont basées sur la réduction du stress de paroi en diminuant la dilatation du VG; elles sont souvent accompagnées d’une plastie mitrale pour réduire l’importance de l’IM. Ventriculectomie partielle de la paroi latérale selon Batista (opération abandonnée). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 50 Anévrysectomie et patch endocavitaire circulaire selon Dor; la zone infarcie est excisée, la géométrie ventriculaire est reconstruite par un patch cousu à l’intérieur de la cavité. Emballage externe avec un filet (Acorn CorCap™); un sac de forme conique entoure les 2 ventricules de l’apex jusqu’au sillon auriculo-ventriculaire où il est cousu; il réduit la dilatation ventriculaire de 5-10% sans causer de restriction diastolique. Tenseurs transventriculaires amarrées à des attelles épicardiques (Myosplint™, Coapsys™); 3 tiges souples traversent le VG dans le court-axe au niveau basal, médian et apical pour réduire la dilatation ventriculaire. Cardiomyoplastie externe au moyen du muscle grand dorsal emballant les ventricules; sa contraction est réglée par un pace-maker. L’ETO a un rôle essentiel dans ces interventions pour évaluer la situation avant l’intervention et pour contrôler le résultat après la reconstruction. L’examen préopératoire doit viser certains points particuliers [62]. Dimensions et forme du VG, épaisseur de paroi; recherche de zones anévrysmales. Etendue de l’akinésie et évaluation de la viabilité des zones ischémiques; les régions viables présentent une image myocardique normale, alors que les cicatrices d’infarctus sont minces et hyperéchogènes. Un test à la dobutamine (10 mcg/kg/min) sous surveillance ETO permet d’évaluer le potentiel contractile; les zones viables augmentent leur contractilité dans un premier temps et la baissent à haute dose de dobutamine; cette réponse définit les régions qui méritent une revascularisation. Les zones qui restent akinétiques peuvent être excisées. Ce test est particulièrement important pour définir le potentiel de récupération de la zone bordante et l’étendue de la résection. Actuellement, il tend à être supplanté par l’angio-IRM qui est très performante pour évaluer la viabilité tissuaire. Calcul du volume ventriculaire prévisible après résection de la zone infarcie et évaluation de la fonction du myocarde restant. Les sutures de la zone réséquée doivent être implantées dans du myocarde sain et renforcées par des patches; ce matelassage fait perdre davantage de volume ventriculaire que ce qui est apparant par les dimensions du territoire akinétique ou anévrysmal. Présence d’une IM; définition de son importance et de son mécanisme: dilatation de l’anneau (> 3.5 cm), restriction sur ischémie pariétale ou sur dilatation globale, pathologie propre des feuillets (Barlow). La définition de ce mécanisme oriente la procédure chirurgicale: plastie de réduction par un anneau restrictif, reconstruction pariétale ventriculaire, résection de feuillet. D’une manière générale, la chirurgie ne se justifie que si l’IM est modérée-à-sévère ou sévère (≥ degré III). Recherche de thrombus intracavitaire. Evaluation de la taille, de l’hypertrophie et de la fonction du VD; position du septum interventriculaire traduisant une surcharge de volume (bombement diastolique dans le VG) ou de pression (bombement systolique dans le VG) du VD. Lorsque le VG est décomprimé, le VD perd une partie de son assistance à l’éjection. Evaluation de l’IT, de son étiologie et de la pression systolique pulmonaire. La présence d’une IT significative biaise le calcul du débit cardiaque par thermodilution pulmonaire. Le calcul du volume systolique par l’échocardiogrpahie à travers la CCVG ou la valve aortique est alors utile: VS = 0.785 • D2 • ITV (D: diamètre, ITV: intégrale des vélocités). Recherche de FOP: passage spontané, test aux microbulles; l’amélioration fonctionelle du VG peut induire un passage droit – gauche cyanogène en cas de dysfonction droite car la POG baisse alors que la POD reste élevée. Comme son jet est en général dirigé vers le septum interauriculaire, l’IT peut aggraver dangereusement ce passage droit – gauche. Recherche d’une valvulopathie modifiant significativement l’hémodynamique: sténose aortique ou mitrale, insuffisance aortique. Après la correction chirurgicale, l’ETO est necessaire pour contrôler certains points et pour identifier les situations où un retour en CEC est nécessaire (Figure 27.40). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 51 Instabilité hémodynamique: fonction ventriculaire systolique et diastolique, nouvelles altérations de la cinétique segmentaire, volémie, vasoplégie, tamponnade. Volume télédiastolique du VG après résection, mesuré par la règle de Simpson; calcul du volume systolique. Fonction diastolique, éventuelle restriction au remplissage par une emballement trop serré. Fonction ventriculaire droite: dilatation, défaillance, empiètement du septum sur le VG, IT; contrôle de l’efficacité du traitement de l’insuffisance droite, décision éventuelle en faveur d’une assistance ventriculaire droite. Shunt droit – gauche cyanogène par réouverture du FOP. IM résiduelle et mécanisme, fuite paravalvulaire ou para-annulaire. IM ou IT nouvelles dues à une modification de la géométrie des piliers lors de la résection ventriculaire. Figure 27.40 : résection d’anévrysme ventriculaire gauche et pose de patch. A : vue du patch de la paroi latérale du VG en court-axe transgastrique ; en diastole, le patch s’invagine légèrement. B : même image en systole ; le patch bombe vers l’extérieur ; il se comporte donc comme une zone dyskinétique. C : vue 4-cavités du patch de la paroi latérale épargnant le pilier antérieur. D: apparition d’une IT sévère après patch d’une CIV par traction excessive sur l’appareil sous-valvulaire de la tricuspide. A B VG VG VD VD C D VG VD VD Assistance ventriculaire Le mode d’assistance le plus simple est la contre-pulsion intra-aortique (CPIA). L’ETO a son rôle dans la mise en place de celle-ci. Contrôle de l’absence d’IA ; une IA > degré I est une contre-indication à la CPIA ; Evaluation de l’aorte descendante : athéromatose, athérome mobile, tortuosité, anévrysme, dissection ; Lors de l’implantation du système, contrôle de l’arrivée du guide dans l’aorte descendante ; il peut se fourvoyer dans un anévrysme abdominal ou disséquer la paroi vasculaire ; Contrôle de la position du cathéter de CPIA ; l’extrémité doit se trouver 1 cm en dessous du départ de l’artère sous-clavière gauche ; le guide, très échogène, doit être retiré pour pouvoir distinguer le cathéter lui-même. Avant l’implantation des appareils d’assistance mécanique (Figure 27.41), l’examen ETO doit vérifier l’absence d’insuffisance aortique, de sténose mitrale, de thrombus intraventriculaire (apex) ou intraauriculaire (appendice auriculaire gauche), d’athéromatose ou d’anévrysme de l’aorte ascendante, et ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 52 de FOP ou de CIA. Les pompes coaxiales à cheval sur la valve aortique ne fonctionnent pas correctement en cas de cardiomyopathie obstructive de la chambre de chasse gauche. Il est capital d’évaluer précisément la fonction ventriculaire droite. Le degré de dysfonction du VD a une valeur pronostique pour l’évolution clinique de l’assistance gauche [27]. Dysfonction VD modérée : fraction de racourcissement de surface de 30%, TAPSE de 30% (10-15 mm), insuffisance tricuspidienne II à III, hypertension pulmonaire postcapillaire ; l’assistance gauche diminuera la postcharge droite (disparition de la stase pulmonaire) et améliorera la fonction du VD. Si la pression artérielle pulmonaire est modérément élevée, un soutien pharmacologique maximal sera nécessaire après implantation de l’assistance gauche : dobutamine et/ou adrénaline, milrinone, NO•, nitroglycérine. Dysfonction VD sévère et hypertension pulmonaire précapillaire élevée : akinésie de la paroi libre, dilatation massive, POD > 20 mmHg, PAP > 65 mmHg ; une assistance biventriculaire sera nécessaire car la décompression du VG supprime l’aide éjectionnelle fournie au VD et l’augmentation du débit gauche le place dans une situation congestive sans diminuer sa postcharge. A B Canules gauches Canules droites Pompes Assistance droite Assistance gauche Figure 27.41 : Coeurs artificiels. A: Système HeartMate™ II. Mue électriquement, une turbine rotative (5’00015'000 rev/min) pompe le sang veineux par l'apex du VG et le renvoie dans l’aorte ascendante. Le système est implanté, mais l’alimentation de la turbine est externe. B : Système Thoratek™. Une seule chambre par ventricule mue par air comprimé contient un sac flexible; des valves mécaniques d'entrée et de sortie dirigent le flux sanguin dans la paroi abdominale. Débit: 7 L/min. Entrées veineuses par l'OD, l'OG ou l'apex du VG. Le système est implanté. Dès que l’assistance gauche est mise en marche, l’ETO devient le mode de surveillance essentiel pour s’assurer du bon fonctionnement du système et pour diagnostiquer ses dysfonctionnements (Figure 27.42) [27,145]. Débullage soigneux ; l’air est recherché dans les cavités gauches et dans l’aorte ascendante au niveau de l’implantation de la canule artérielle de la pompe ventriculaire (vue long-axe 120°). La dysfonction du VD, qui survient dans 20% des cas d’assistance gauche, se traduit pas une dilatation et l'éventuelle apparition/aggravation d'une insuffisance tricuspidienne ; le septum bombe dans le VG et peut gêner le flux de la canule apicale d’aspiration. Comme il est précharge-dépendant, le débit de la pompe gauche dépend de la pression et du volume dans l’OG, donc de la performance ventriculaire droite. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 53 La canule artérielle est implantée à la face antérieure de l’aorte ascendante (vue basale 120°), ≥ 2 cm au-dessus des sinus de Valsalva ; sa Vmax est 1-2 m/s. La canule apicale est dans l’axe du VG ; son flux est légèrement pusatile, unidirectionnel, de Vmax 0.6-1.2 m/s ; en cas d’obstruction, la Vmax est > 2.5 m/s (vues rétrocardiaques 0°, 90° et 120°). Sa fonction dépend du remplissage gauche ; elle s’obstrue si le VG collabe par hypovolémie. En cas de système coaxial transaortique, l’extrémité aspiratrice de la canule doit se trouver au niveau de l’extrémité du feuillet antérieur de la valve mitrale (vue 120°), environ 3 cm en dessous du plan de la valve aortique ; elle ne touche pas les parois ventriculaires ; son extrémité distale est au moins 2 cm au-dessus des sinus de Valsalva. En cas d’assistance droite, la canule auriculaire droite doit se trouver au milieu de l’OD et non buter contre le septum interauriculaire ; la canule artérielle pulmonaire est implantée 2 cm audelà du plan de la valve pulmonaire (vue rétrocardiaque basale 60-100°). Le VG et l’OG sont décomprimés, le septum interventriculaire est en position neutre, l’insuffisance mitrale est diminuée ou absente ; si la pompe dysfonctionne, l’OG et le VG se dilatent, le septum bombe dans la droite, la valve mitrale fuit, la valve aortique a des mouvements d’ouverture, et du contraste spontané apparaît dans le VG. En cas d’hypovolémie, le VG collabe autour de la canule ; l’effet de suction de la pompe sur un ventricule vide (dépression de – 5 mmHg environ) peut aspirer de l’air par les points de la bourse autour de la canule apicale ; cet air, bien visible à l’ETO, entraîne une embolie gazeuse systémique. La fermeture sternale peut comprimer tout le système et obstruer des canules ; les flux doivent être soigneusement contrôlés à ce moment. A B VG VD VG VD OD 1 2 3 4 Figure 27.42 : canules d’assistance biventriculaire (Thoratek™). A : les 4 canules sur la face antérieure du cœur ; 1 : canule venant de l’OD ; 2 : canule allant dans l’aorte ; 3 : canule allant dans l’AP ; 4 : canule apicale dans le VG. B : canule dans l’OD ; cette canule est trop profonde et appuie fortement contre le septum interauriculaire. C : canule anastomosée à l’artère pulmonaire (AP). C AP Dans le postopératoire, un état de choc peut s’installer suite à plusieurs éléments bien mis en évidence par l’échocardiographie. Lorsque le fonctionnement est correct, les septa interauriculaire et interventriculaire sont en position neutre ; ce point permet de régler le remplissage. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 54 Hypovolémie : le débit des assistances ventriculaires est dépendant de la précharge ; l’hypovolémie sévère entraîne le collapsus du ventricule et bloque le retour vers la pompe. Tamponnade : les signes cliniques habituels sont en général absent ; seule l’échocardiographie peut mettre en évidence la compression externe des chambres cardiaques. Insuffisance droite : dilatation du VD et bombement du septum dans le VG. Obstruction de canule : vélocité excessive dans la canule, flux tourbillonnaire au Doppler couleur. Thrombose intracavitaire : thrombus dans le VG (autour de la canule ou dans le territoire inféro-septal), dans l’appendice auriculaire gauche ; présence de contraste spontané dans les zones de bas débit thrombogène (VG, OG, sinus de Valsalva). Panne de la pompe : flux rétrograde dans l’aorte ascendante et dans la canule apicale, contraste spontané massif dans le VG et l’OG, mouvements d’ouverture de la valve aortique, insuffisance mitrale importante. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 55 Pathologie péricardique La physiopathologie de la constriction péricardique est caractérisée par trois éléments (voir Chapitre 16, Physiopathologie). Restriction au remplissage : la coque péricardique ou le liquide de la tamponnade bloque l'expansion diastolique normale des cavités. • Insuffisance diastolique restrictive ; • Péricardite constrictive : les oreillettes ne peuvent se remplir par les grandes veines que lorsqu'elles se vident dans les ventricules, car leur expansion est impossible à cause de la coque rigide; le remplissage veineux est essentiellement diastolique (aspect "xY" de la courbe de pression auriculaire et "sD" du flux veineux central) (Figure 27.43). Couplage des cavités cardiaques par la compression de l'épanchement péricardique : lorsque la pression du liquide péricardique atteint celle des cavités cardiaques en diastole, la pression s'égalise entre les cavités et l'épanchement. • Tamponnade liquidienne : égalisation des pressions diastoliques ; • Tamponnade : comprimées par le liquide, les oreillettes ne peuvent se remplir que lorsque la diminution de taille des ventricules en systole dégage de l'espace dans le péricarde pour que l'épanchement les décomprime; leur remplissage est essentiellement systolique (aspect "Xy" de la courbe de pression auriculaire et "Sd" du flux veineux central) (voir Figures 27.45 et 27.51). Isolation du coeur par rapport à la pression intrathoracique (Pit) : • Les ΔPit respiratoires s’exercent sur les poumons et les vaisseaux, non sur les cavités cardiaques ; • Les ΔPit créent des gradients de pression entre les veines caves et les veines pulmonaires d’une part et les oreillettes de l’autre. • Alternance du remplissage VD / VG avec le cycle respiratoire: la restriction par la coque péricardique couple les ventricules entre eux; l'augmentation de volume du VD à l'inspirium spontané bascule le septum interventriculaire dans le VG; l'inverse survient en expirium. La constriction péricardique due à une péricardite ou une tamponnade modifie les interactions cardiorespiratoires parce qu’elle abrite les cavités cardiaques des variations de pression intrathoracique [89,118]. En respiration spontanée : Inspirium (Pit et pression intrapulmonaire subatmosphériques, pressions intracardiaques inchangées) : • Augmentation du flux artère pulmonaire (aspiration) ; • Augmentation flux veine cave inférieure (contraction diaphragme) ; • Augmentation du flux tricuspidien (+ 25-40%) ; • Baisse du flux veineux pulmonaire et mitral (- 25-40%) ; • Baisse du volume systolique VG (pression artérielle ↓ > 15%) ; Expirium (Pit et pression intrapulmonaire élevées, pressions intracardiaques inchangées) : • Situation inversée ; Remplissage VD / VG alterné au cours du cycle respiratoire avec bascule du septum interventriculaire (couplage par constriction péricardique) ; Pouls paradoxal : chute inspiratoire excessive de la pression artérielle. La ventilation contrôlée modifie le régime de pression intrathoracique et supprime la phase de dépression subatmosphérique : Inspirium (Pit et pression intrapulmonaire élevées, pressions intracardiaques inchangées) : ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 56 • Baisse du flux dans l’artère pulmonaire (augmentation de postcharge VD) ; • Curarisation : suppression de la pompe diaphragmatique ; • Augmentation du flux veineux pulmonaire et mitral (+ 15%) ; Expirium (Pit et pression intrapulmonaire basses mais non subatmosphériques, pressions intracardiaques inchangées) ; c’est l’équivalant d’une apnée ; Alternance du remplissage VD / VG moins importante qu’en spontanée : • Pas de phase subatmosphérique ; • Inspirium : ↑ précharge VG mais ↑ postcharge VD : bascule septal bascule septal et augmentation de volume du VG plus faibles qu'en spontanée ; • Expirium : flux tricuspidien et mitral identiques ; Le pouls paradoxal et les variations du flux mitral sont plus faibles qu’en spontanée ; ils ne sont plus des critères fiables de tamponnade en ventilation contrôlée / assistée. Péricardite constrictive Courbe de pression auriculaire Flux veineux pulmonaire a x S v Tamponnade y D a x S y v D © Chassot 2010 Figure 27.43 : Courbes de pression et de flux de remplissage en cas de péricardite constrictive et de tamponnade. Péricardite constrictive : dans l’oreillette, la descente de pression "x" est faible ou inexistante, alors que la descente "y" est prédominante (aspect xY). Dans les veines pulmonaires, le flux diastolique "D" prédomine (aspect sD). Dans le ventricule, la courbe de pression présente un aspect dip-and-plateau pendant la diastole : après une relaxation protodiastolique normale (dip), la paroi ventriculaire bute contre le péricarde et le remplissage cesse, la pression ne se modifiant plus (plateau). Le pointillé bleu indique les courbes normales [89]. Tamponnade : par rapport à la situation normale (pointillé bleu), la courbe de pression auriculaire affiche une profonde descente "x", mais pas de descente "y" (aspect Xy) ; le flux diastolique dans les veines pulmonaires est effacé (aspect Sd). Les ventricules prenant toute la place en diastole, les oreillettes sont comprimées par le liquide refoulé et ne peuvent se remplir que pendant la systole (voir Figures 27.45 et 27.51). Péricardite Péricardite constrictive La péricardite constrictive est caractérisée par plusieurs éléments échocardiographiques [39a,61]. Epaississement péricardique échodense (> 3 mm), parfois localisé ou calcifié ; Flux de remplissage auriculaire prédominant en diastole, avec un aspect du flux veineux pulmonaire de type "sD" (Figure 27.43) ; Variations respiratoires du flux mitral > 30% (abaissé en inspirium spontané) (Figure 27.44) ; ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 57 Bascule du septum interventriculaire dans le VG en inspirium spontané (↑ remplissage du coeur droit) et dans le VD en expirium (↑ remplissage du coeur gauche) ; ce bascule suit le rythme respiratoire et non le rythme cardiaque ; Doppler tissulaire : relaxation longitudinale normale du VG (Vmax E’ ≥ 10 cm/s à l’anneau mitral), mais diminution de la déformation circulaire et de la torsion apicale (≤ 7°) en systole. Inspirium Vmax Expirium ΔVmax > 25% Figure 27.44 : Variations du flux mitral en cas de péricardite constrictive lors de ventilation spontanée (enregistrement par échocardiographie transoesophagienne). Les variations du flux mitral sont supérieure à 25% au cours d'un cycle respiratoire, alors qu'elles ne dépassent pas 10% normalement en normovolémie. La chute de la Vmax à l’inspirium débute brusquement avec le premier battement cardiaque qui suit l’inspiration ; dans l’hypovolémie ou le BPCO, où l’on rencontre aussi de fortes variations respiratoires du flux mitral, la chute est plus progressive. Le flux tricuspidien subit les même amplitudes de variations, mais de manière inversée : il augmente à l'inspirium et diminue à l'expirium [118]. Péricardite constrictive et cardiomyopathie restrictive Le diagnostic différentiel entre ces deux entités peut être difficile, car elles présentent un aspect hémodynamique et clinique superposable: hypotension, tachycardie, intolérance à l’effort et insuffisance diastolique sévère ; la fonction systolique est conservée. La cardiomyopathie restrictive est en général secondaire à une infiltration myocardique par du tissu non-contractile qui rigidifie sa paroi : amyloïdose, sarcoïdose, fibrose endomyocardique, maladie du collagène ou fibrose post-actinique. L’affection atteint exclusivement la fonction diastolique du VG. La cavité ventriculaire est de dimension normale, mais l’oreillette est très dilatée, à cause de l’augmentation des des pressions de remplissage. La PAPO est élevée et les variations respiratoires de la pression artérielle peu marquées. La rigidité de la paroi ventriculaire provoque une insuffisance diastolique gravissime caractérisée par un flux mitral passif protodiastolique (flux E) très brusque et très court, mais de haute vélocité (1.5 m/s) parce que la POG est élevée ; le flux de la contraction auriculaire (flux A) est faible car le ventricule ne se laisse plus distendre en fin de diastole [64]. La composante systolique "S" du flux veineux pulmonaire est très abaissée puisque la POG élevée diminue le gradient entre les veines pulmonaires et le coeur gauche. Trois données échocardiographiques permettent de bien différencier la cardiomyopathie restrictive de la péricardite constrictive (voir Figure 27.33). Comme les cavités cardiaques ne sont pas isolées des variations de pression intrathoracique et que la Ptd est très élevée, le flux mitral varie peu avec la respiration spontanée dans la cardiomyopathie restrictive [182] ; au contraire, la péricardite constrictive est caractérisée par une variation respiratoire excessive du flux mitral (> 25%). La vélocité du mouvement de l’anneau mitral examiné au Doppler tissulaire est basse (E’ < 5 cm/s) dans la cardiomyopathie restrictive puisqu’il s’agit d’une maladie de la relaxation ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 58 diastolique, alors qu’elle est haute dans la péricardite constrictive (E’ > 10 cm/s) où la relaxation est normale [130,156]. La torsion systolique de l’apex est diminuée dans la péricardite constrictive (< 7°) alors qu’elle est conservée dans la cardiomyopathie restrictive (> 15°) [39a]. Ce diagnostic différentiel est important parce que le traitement des deux affections est très différent. Hormis la transplantation cardiaque, il n'y a aucune thérapeutique pour la cardiomyopathie restrictive, dont la survie moyenne est de 5 ans après le début des symptômes cliniques ; au contraire, la péricardectomie est curative dans 90% des cas de péricardite constrictive [103]. D’autre part, la tolérance à la ventilation en pression positive est radicalement différente, ainsi que le démontre une manoeuvre de Valsalva. Comme la dépression endothoracique inspiratoire accentue le déséquilibre hémodynamique de la constriction, la surpression du Valsalva ramène les conditions de charge ventriculaire vers l’équilibre ; les ventricules eux-mêmes sont protégés de cette surpression par la coque péricardique. La manoeuvre de Valsalva est bien tolérée. Dans la restriction, au contraire, le débit systolique est extrêmement dépendant de la précharge (courbe de Starling très redressée) ; la baisse du retour veineux périphérique compromet immédiatement le débit cardiaque. D’autre part, l’augmentation de la pression transmurale du VG non protégé limite l’expansion diastolique du ventricule, déjà compromise par la maladie. La pression s’effondre au cours du Valsalva. Tamponnade L’échocardiographie met en évidence la compression péricardique, mais la tamponnade est un diagnostic clinique caractérisé par l’hypotension artérielle, la tachycardie et la dyspnée. Comme ces symptômes sont peu spécifiques, la tamponnade est un diagnostic de présomption, jusqu'à ce qu'elle soit confirmée par une échocardiographie. Le point central de l’examen est l’indication au drainage. Son degré d’urgence est essentiellement commandé par la clinique. Epanchement et thrombus L’espace péricardique, normalement virtuel, devient visible à l’ETO aux deux temps du cycle cardiaque lorsque son volume est supérieur à 30-50 ml. Un épanchement circonférentiel liquidien et homogène de ≥ 1 cm est considéré comme modéré. Un épanchement de > 2 cm correspond en général à une accumulation liquidienne de > 500 mL; il est considéré comme sévère (Figure 27.45). Lors d’accumulation liquidienne circonférentielle de > 500 ml, le coeur "danse" au sein du liquide péricardique à chaque systole, ce qui explique l’alternance électrique à l’ECG (Figure 27.46) [41]. Cette image est caractéristique des épanchements de longue durée secondaires à une polysérosite, à une insuffisance rénale ou à une pathologie néoplasique. La dimension de l'épanchement est un critère diagnostique majeur mais insuffisant pour poser l’indication au drainage [95]. Celui-ci est indiqué si l’épanchement est accompagné de collapsus pariétal, d’hypotension et de tachycardie, ou s’il est d’accumulation rapide. Dans le postopératoire de chirurgie cardiaque, on ne rencontre que rarement un épanchement liquidien. La tamponnade est le plus souvent due à une hémorragie avec compression par des caillots, des amas de fibrine et des épanchements cloisonnés par la réaction péricardique. Citons parmi les images bi-dimensionnelles caractéristiques de la tamponnade chirurgicale : Hématome localisé comprimant une seule cavité cardiaque (Figure 27.47); Présence de fibrine et/ou de caillots échodenses (Figures 27.48) ; Compression de la base du coeur (Figure 27.49) ; Flou de l’image (images brumeuses) ne permettant pas de distinguer nettement les parois (Figure 27.50) ; il est du à l’accumulation de fibrine et de sang coagulé qui absorbent les ultrasons. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 59 Ep OG OG OD VG VG VD OD D VD Ep Ep S A B Figure 27.45 : épanchement péricardique circonférentiel. A : l’épanchement (Ep) ceinture les 4 cavités, il mesure 1-1.5 cm ; l’OG est décollée de l’oesophage. B : l’épanchement est bien visible autour de l’OD et derrière l’OG. L’agrandissement des ventricules en diastole (D, flèche jaune) refoule le liquide autour des oreillettes et les comprime ; à l’inverse, la systole ventriculaire (S vert) crée de l’espace et dégage les oreillettes. Ep Ep VD VG A VG B Figure 27.46 : épanchement péricardique circonférentiel en vue transgastrique. A: le coeur est posé sur une masse liquidienne de > 3 cm, au sein de laquelle il "danse" avec chaque battement. Le volume du VG est très diminué. B: l'épanchement hémorragique est en-dessous des cavités cardiaques; on voit un thrombus (flèche). OG VCS OD A B Figure 27.47 : Images de tamponnade postopératoire : caillot comprimant sélectivement une oreillette. A : vue 4-cavités; un thrombus comprime l'OG sur ses faces postérieure et latérale. B : vue bicave à 100° (vue sagittale de l'OD) d'un thrombus comprimant la face antérieure de l'OD; la veine cave supérieure (VCS) se trouve à droite de l'image. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 60 Figure 27.48 : Images ETO de tamponnade postopératoire. A: épanchement et fibrine accumulés contre le VG. B: caillot comprimant sélectivement la face latérale du VG (vue 2-cavités long-axe). C: épanchement cloisonné inférieur, invisible en vue 4cavités. D: épanchement pleural et péricardique comprimant la face latérale du VG. EP: épanchement péricardique. VM: valve mitrale. EP VG VD EP A B Ep VG C D OD Ao CCVD A C B Figure 27.49 : Images de tamponnade comprimant sélectivement l'artère pulmonaire après une opération de Bentall. A: Image en court-axe basal centrée sur l'aorte ascendante (Ao) et la chambre de chasse du VD (CCVD) montrant un caillot contre l'origine de l'AP (flèche). B: le tronc de l'AP est comprimé et sa lumière rétrécie. C: au flux couleur, il ne passe qu'un filet de sang à haute vélocité à travers l'AP. Ce patient présentait une POD élevée, mais une PAP et une PAPO basses. En vue 4-cavités, ce thrombus est invisible. Figure 27.50 : Image floue des structures cardiaques (image brumeuse) caractéristique des tamponnades postopératoires, dans lesquelles le péricarde est rempli de sang partiellement coagulé et de fibrine qui absorbent les ultrasons. La compression auriculaire droite est pourtant bien présente (épanchement de 3.8 cm). OG OD ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 61 Collapsus pariétal A l’exception de la très brève phase de relaxation ventriculaire active en protodiastole, les cavités cardiaques sont toujours en surpression par rapport au péricarde : la pression transmurale (Ptm) est positive. Lorsque la pression intrapéricardique augmente par accumulation liquidienne, la Ptm diminue, alors même que le volume intravasculaire reste constant. Dès l’instant où la pression qu’exerce l’épanchement excède la pression intracavitaire, la paroi cardiaque collabe et s’invagine. Cette indentation constitue un signe spécifique et sensible de la tamponnade en cas d'épanchement liquidien homogène [133]. Il est habituellement bien marqué aux endroits et aux moments où la Ptm est la plus faible (Figure 27.51) : La paroi antérieure de l'oreillette droite en télédiastole; le collapsus de l'OD a une sensibilité de 75% et une spécificité de 66% pour la tamponnade ; il est spécifique lorsqu'il dure plus du tiers de la diastole [42]. La paroi libre du ventricule droit en protodiastole; le collapsus du VD est moins sensible (sensibilité 65%) que celui de l’OD mais plus spécifique (spécificité 90%) [67] ; il survient lorsque le débit cardiaque a déjà baissé de ≥ 20% [133]. Comme les invaginations de l’OD et du VD n’ont pas lieu au même moment du cycle cardiaque, la silhouette du coeur droit donne l’impression d’osciller de manière alternée. L’oreillette gauche est serrée par le péricarde postérieur et maintenue par les veines pulmonaires (sinus oblique) ; les épanchements peuvent y devenir rapidement compressifs ; le collapsus pariétal de l’OG survient dans 25% des cas ; il est très spécifique (> 90%) [95]. Le ventricule gauche, très charnu, résiste au collapsus et n'est en général touché qu'après chirurgie cardiaque lors de tamponnade localisée [148] ; le collapsus diastolique du VG a une sensibilité > 95% pour le diagnostic de tamponnade postopératoire [33]. OG OD VD D EP S A B Figure 27.51 : Collapsus pariétal du à l'accumulation liquidienne péricardique. Image d'échocardiographie transoesophagienne en 4-cavités. A: invagination de la paroi libre du VD en protodiastole, lorsque sa pression de remplissage est la plus basse. B: invagination de la paroi de l’OD pendant la télédiastole, lorsqu'elle achève de se vider dans le ventricule (descente "y" sur une courbe de pression auriculaire normale). EP: épanchement. L’agrandissement des ventricules en diastole (D, flèche jaune) refoule le liquide autour des oreillettes et les comprime ; à l’inverse, la systole ventriculaire (S, flèche verte) crée de l’espace et dégage les oreillettes. La valeur prédictive positive du collapsus pariétal droit reste modeste (40-66%), parce que ce dernier est fonction de la pression diastolique intracavitaire. Il apparaît plus tôt en hypovolémie, mais est retardé par une hypervolémie (insuffisance congestive) ou par une résistance accrue de la paroi (hypertrophie ventriculaire). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 62 Flux Doppler L’analyse des flux flux Doppler lors de tamponnade est caractérisée par une diminution, voire une disparition, de la composante diastolique "D" du flux veineux cave et veineux pulmonaire (configuration « Sd »), et par une amplification de la variation des flux en respiration spontanée [10,100]. En inspirium spontané, on observe (Figure 27.43) : Diminution de ≥ 30% du flux mitral (normal < 10%) ; cette variation porte sur le flux protodiastolique E, le flux A de la contraction auriculaire est peu modifié ; Diminution de la vélocité du flux aortique de ≥ 20% (normal < 5%) ; Augmentation de > 30% du flux tricuspidien (flux E) (n < 20%) ; Augmentation du flux artériel pulmonaire de 30-40% (normal < 10%) ; Allongement du temps de relaxation isovolumétrique du VG > 150 ms ; Agrandissement du VD et restriction du VG avec bascule du septum interventriculaire dans la cavité gauche. L’expirium spontané se caractérise par une inversion de ces phénomènes. En ventilation en pression positive (IPPV), les modifications inspiratoires sont très différentes : Inversion de l’alternance droite – gauche ; en inspirium, les flux augmentent dans le coeur gauche et diminuent dans le coeur droit ; l’expirium correspond à une apnée et les flux s’égalisent. Augmentation simultanée de la précharge du VG et de la postcharge du VD (↑ PVD) à l’inspirium ; le bombement du septum interventriculaire vers la droite est plus faible qu’en spontanée. Diminution de la variabilité respiratoire des flux atrio-ventriculaires ; les variations respiratoires sont de l’ordre de 10 -15%. Augmentation discrète du flux mitral avec la PEEP. Diminution globale des flux tricuspidien et artériel pulmonaire. Inspirium Expirium Flux mitral Variations du flux mitral % 40 30 Contrôle 20 10 Tamponnade Contrôle Epanch Tamponn Relâche Figure 27.52 : Ventilation en pression positive lors d'expérimentation chez le chien. Les variations respiratoires du flux mitral sont importantes pendant la phase de contrôle (36% ± 5%). Lorsque le péricarde est rempli de liquide pour provoquer une tamponnade, les variations du flux mitral tombent à 16% ± 4%. Lorsque le péricarde est vidé du liquide (relâche), les variations de flux remontent à 29% ± 2% [49]. En ventilation mécanique, on ne retrouve donc pas le pouls paradoxal ni la diminution inspiratoire des vélocités mitrales (Figure 27.52 et Figure 27.53) [1]. L’injection de liquide dans le péricarde de ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 63 chiens ventilés en pression positive montre que les variations respiratoires du flux mitral sont importantes pendant la phase de contrôle (36% ± 5%), mais qu’elles tombent à 16% lorsque le péricarde est rempli de liquide pour provoquer une tamponnade ; lorsque le péricarde est vidé de ce liquide, les variations de flux remontent à 29 [49]. Les modifications typiques des flux peuvent toutefois se rencontrer en cas de ventilation assistée impliquant un effort inspiratoire important du patient, mais elles sont amorties [26]. D’autre part, la volémie et la dysfonction ventriculaire interfèrent avec la silhouette des flux et peuvent biaiser leur interprétation. Il est donc important de noter que l’accentuation des variations respiratoires du flux mitral est absente en ventilation contrôlée et n’est pas donc pas un critère de tamponnade dans cette situation (Figure 27.53). Expirium A Inspirium Expirium Expirium Inspirium Expirium B Figure 27.53 : Variation du flux mitral lors de tamponnade chez le même malade avant (A) et après (B) l’induction de l’anesthésie et de la ventilation en pression positive. A: au cours de la respiration spontanée (examen échocardiographique trans-thoracique); la variation est de plus de 30%; l'échelle des vélocités est en cm/sec. B: en ventilation contrôlée, la variation ventilatoire est très atténuée et ne porte que sur l'onde E, non sur l'onde A de la contraction auriculaire (examen transoesophagien). Signes échocardiographiques de tamponnade Epanchement > 2 cm (> 500 mL) Danse du coeur dans le liquide Collapsus pariétal de l’OD Collapsus pariétal du VD (moins sensible mais plus spécifique) Variations respiratoires du flux mitral > 30% - Signe valide en respiration spontanée seulement, minime ou absent en IPPV Compression localisée par un caillot ou du sang cloisonné - Thrombus / fibrine, images imprécises - Absence de danse du coeur et de collapsus pariétal - Variation respiratoire peu prononcée du flux mitral Dans la tamponnade postopératoire chez un malade ventilé, les signes classiques peuvent être absents ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 64 Tamponnade : indication au drainage Signes cliniques : - Tachycardie persistante - Hypotension artérielle - Dyspnée - Elévation des pressions de remplissage Signes échocardiographiques de compression, globale ou localisée L’hypovolémie accentue les effets de la tamponnade L'hypervolémie (insuffisance congestive) et l'épaisseur de paroi (HVG) retardent les effets de la tamponnade Tamponnade postopératoire Dans le postopératoire de chirurgie cardiaque, les épanchements péricardiques sont fréquents (> 60% des patients), mais l'incidence de tamponnade n'est que de 1 à 2.5% [126]. En soins intensifs chirurgicaux, la tamponnade présente des caractéristiques particulières et souvent trompeuses. Contrairement aux épanchements liquidiens circonférentiels, les remaniements postopératoires ou post-péricarditiques tendent à localiser le liquide, l'hémorragie ou le caillot dans une zone restreinte. Chez le patient alité, l'accumulation de sang est de préférence postérieure, dans la partie déclive du péricarde ; à l’échocardiographie transoesophagienne, il faut la rechercher en vue 2-cavités (90°), long-axe du VG (120°) et transgastrique court-axe (0°), entre le coeur et le diaphragme (Figure 27.48). Un épanchement cloisonné peut comprimer une seule cavité, sans altérer la fonction normale des autres. Le pouls paradoxal est alors absent dans la moitié des cas, et l'égalisation des pressions de remplissage n'est présente que dans 25-30% des cas [20,26,33]. Les tamponnades localisées surviennent le plus souvent aux abords de l'OD ou de l’OG (Figure 27.47). Les tamponnades gauches (Figure 27.48) ne s'accompagnent pas d'une élévation de la PVC. On peut également observer des compressions isolées des veines caves, des veines pulmonaires ou de l'artère pulmonaire (Figure 27.49). Les images échocardiographiques sont souvent peu nettes, parce que le coeur est ceinturé par des amas de fibrine et de caillots partiellement lysés qui absorbent les ultrasons (Figure 27.50). L’examen échocardiographique doit donc rechercher toutes les localisations possibles de la compression, car ces lésions localisées ne sont en général pas visibles dans une vue standard 4-cavités (0°). Il peut arriver de confondre une accumulation de graisse épicardique avec un thrombus localisé (Figure 27.54) ; le diagnostic différentiel tient au fait que la graisse suit les mouvements de la paroi cardiaque. Figure 27.54 : Piège diagnostique d’une vue 4cavités (0°) dans le postopératoire. La zone de 3 cm qui semble comprimer l’OD et le VD (double flèche rouge) est en réalité de la graisse épicardique; on la reconnaît au fait qu’elle se meut solidairement avec les cavités cardiaques. OD ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 65 Comme l’épanchement postopératoire n’est pas fluide ni circonférentiel, les collapsus diastoliques de l'OD et du VD ne sont présents respectivement que dans 43% et 28% des cas postopératoires [20]. La "danse" du coeur au sein du liquide péricardique est exceptionnelle. Une variation respiratoire importante (> 30%) du flux mitral ne survient que chez 14% des patients sous ventilation mécanique ; elle est plutôt tributaire d’une hypovolémie sévère [20]. Une hémorragie rétrosternale extrapéricardique ou un épanchement pleural sous tension peuvent comprimer la face antérieure ou latérale du coeur et induire une situation analogue à une tamponnade, quand bien même le péricarde est vide. Cette tamponnade pleurale est un piège particulièrement traître ; elle se caractérise par un épanchement pleural gauche et un hémothorax, comprimant le coeur gauche par la paroi latérale [42] ; en présence d’une brèche pleuro-péricardique, comme lors de prélèvement d'artère mammaire interne gauche, l’épanchement peut apparaître dans le péricarde. Après une transplantation cardiaque, le péricarde du receveur est en général trop grand pour le coeur normal du donneur; cette discordance laisse un espace parfois considérable qui se remplit d’exsudat sans pour autant qu’il y ait de tamponnade. La tamponnade postopératoire se distingue donc de la tamponnade classique ("médicale") par le fait que plusieurs critères cliniques et échocardiographiques peuvent manquer. L’image 4-cavités peut paraître normale si la compression est postérieure, diaphragmatique ou basale ; Le pouls paradoxal est en général absent ; La variation respiratoire des flux (mitral, tricuspidien) n'est pas significative en ventilation en pression positive ; L'égalisation des pressions de remplissage est rare à cause de l'asymétrie des compressions et de l'absence de liquide péricardique ; les pressions diastoliques des cavités ne sont pas solidaires entre elles ; Le collapsus ventriculaire droit en diastole et la "danse" du coeur au sein du liquide sont l’exception ; Les délais d’apparition du choc restrictif varient selon la volémie, la pression diastolique des cavités et l’épaisseur de paroi des ventricules. Signes échocardiographiques de tamponnade postopératoire (Patient en ventilation contrôlée) Examen systématique de toutes les vues transoesophagiennes et transgastriques Thrombus/fibrine/épanchement localisés, souvent postérieurs (patient alité) Compression de l’OD (hémorragie rétrosternale) ou de l’OG (compression postérieure) Compression du VD (compression antérieure) Compression VG (compression postérieure ou tamponnade pleurale) Compression haute : CCVD, CCVG, artère pulmonaire (chirurgie aortique) Images brumeuses Variations du flux mitral, collapsus pariétal et danse du coeur : le plus souvent absents Les signes cliniques (hypotension et tachycardie) sont plus précoces en hypovolémie Indication au drainage "Faut-il drainer de suite ?" est la question la plus fréquemment posée à l'échocardiographeur. En réalité, la tamponnade est un diagnostic clinique, dont l'ETO ne vient que préciser la cause. Les signes échocardiographiques eux-mêmes varient avec la précharge, la ventilation (spontanée ou contrôlée) et ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 66 le type de compression (liquidienne circonférentielle ou localisée). L'indication dépend essentiellement de quatre données. Signes cliniques: tachycardie soutenue, hypotension, bas débit cardiaque, dyspnée; Contexte : traumatisme, dissection A, anticoagulation; Vitesse d'accumulation; Evidence de compression à l'écho. La tachycardie signale que le patient ne peut plus augmenter son volume systolique; il est contraint à augmenter sa fréquence pour maintenir son débit cardiaque: c'est le seuil de la décompensation. La tachycardie est une indication au drainage en urgence. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 67 Transplantation et urgences L’utilisation de l’ETO dans les situations d’urgence pose un problème de stratégie hospitalière. Sa disponibilité 24/24 heures à longueur d’année implique un système de garde assuré par une personne ayant les compétences pour prendre des décisions thérapeutiques majeures. Que cette personne soit un cardiologue, un anesthésiologiste ou un intensiviste est secondaire; ce qui compte est que sa formation soit adéquate et reconnue. Un système d’astreinte pour l’ETO est très vite contraignant, car la demande augmente proportionnellement à l’offre. Il s’agit donc de mettre en place une équipe d’au moins 5-6 personnes pour un centre tertiaire (hôpital de référence, CHU). Les principales pathologies rencontrées en urgences sont l’ischémie coronarienne et ses complications (voir Complications de l’ischémie), l’insuffisance mitrale et aortique aiguës sur rupture de l’appareil sous-valvulaire ou sur endocardite (voir Chapitre 26), la dissection aortique et la rupture d’anévrysme thoracique (voir Aorte thoracique), la tamponnade (voir Tamponnade), la transplantation, le traumatisme thoracique et l’embolie plmonaire. Nous n’aborderons ici que ces trois derniers sujets. En plus de cette liste, l’ETO est extrêmement utile pour le diagnostic différentiel et la gestion de toutes les instabilités hémodynamique sévères ou inexpliquées. Transplantation cardiaque L’ETO apporte une contribution capitale à la gestion de la transplantation cardiaque. Avant la CEC, elle permet la surveillance d’un coeur qui doit assurer la perfusion des organes alors qu’il est en phase terminale. Après la CEC, elle évalue de manière immédiate la fonction ventriculaire doite et gauche et la qualité des anastomoses. Ultérieurement, elle permet une prise en charge optimale de l’hémodynamique et un suivi du fonctionnement de l’allogreffe (fonction, rejet). Les indications principales à la transplantation cardiaque sont l’ischémie coronarienne (46%), les cardiomyopathies (45%), les valvulopathies (5%) et les cardiopathies congénitales (3%) [68]. ETO du donneur Le manque chronique de donneurs pousse à élargir les critères de sélection vers des patients en mort cérébrale plus âgés ou souffrant de cardiopathie de stress. En effet, la mort cérébrale s’accompagne souvent d’une décharge sympathique extrême conduisant à une surcharge de calcium libre intrasarcoplasmique (↑ [Ca2+]i). Ce phénomène se traduit par une dysfonction globale (FE < 0.5) chez 67% des donneurs et par des altérations de la cinétique segmentaire chez 36% d’entre eux; ces ACS, qui épargnent le plus souvent l’apex, sont plus fréquentes lors d’hémorragie intracrânienne que lors de mort cérébrale traumatique [181]. Lorsqu’elles sont modérées, ces modifications sont en général réversibles après transplantation [19,79]. Toutefois cette attitude n’est pas sans risque, puisque les ACS du donneur sont un prédicteur indépendant de la dysfonction du greffon (OR 1.7) [180]. Il est donc recommandé de respecter les valeurs suivantes comme critères de sélection [170] : Fraction d’éjection (FE) > 45% ; Raccourcissement de surface (FAC) > 35% ; Altérations de la cinétique segmentaire (ACS) mineurs (hypokinésie). Il est prudent de considérer l’akinésie de territoires majeurs (parois antérieure et latérale) comme une contre-indication. Il est également important d’identifier la présence de valvulopathies. Alors qu’une affection évolutive (maladie de Barlow, RAA) est une contre-indication, une insuffisance mineure (degré I-II) ou une biscuspidie aortique sont acceptables. On recherche la présence de FOP ou de CIA à cause du risque de shunt D → G chez le receveur en cas de dysfonction droite; ces anomalies peuvent être réparées en passant et ne contre-indiquent pas l’utilisation du greffon. La taille des cavités ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 68 cardiaques et des gros vaisseaux fait l’objet de mesures précises pour s’assurer d’une discordance < 20% avec les structures du receveur. Examen pré CEC L’examen ETO réalisé avant la CEC a deux buts: Surveillance hémodynamique; Recherche de pathologies ayant une incidence chirurgicale. La cardiopathie terminale dont souffre le patient transplanté est en général caractérisée par plusieurs éléments bien surveillés par l’ETO. Dysfonction systolique et dilatation ventriculaire, IM restrictive (Figure 27.8A et Figure 27.37); comme des vasopresseurs sont souvent nécessaires pour maintenir la pression de perfusion, l’image ETO permet de contrôler la tolérance du VG à cette augmentation de postcharge. Dysfonction diastolique; le volume systolique est très dépendant de la précharge; cette dernière n’est pas évaluable par la PVC ou la PAPO pour trois raisons: la compliance est anormale, l’IT et l’IM sont courantes et le malade est ventilé en pression positive. Dysfonction du VD; s’il est introduit avant la CEC, le cathéter pulmonaire de Swan-Ganz doit être retiré assez tôt dans sa housse de protection pour éviter de se retrouver dans le champ opératoire. L’ETO offre alors la seule technique de surveillance continue du VD et de mesure de la PAPsyst par la Vmax de l’insuffisance tricuspidienne: PAPs = 4 Vmax2IT + POD. Il est rare qu’une dysfonction ventriculaire droite ne s’accompagne pas d’IT. La présence d’une hypertrophie ventriculaire droite suggère celle d’une hypertension pulmonaire chez le receveur, qui va occasionner une décompensation droite du greffon. L’ETO peut pallier à l’absence de Swan-Ganz pour la mesure du débit cardiaque; le volume systolique (VS) est calculé par le produit de la surface (S) de la valve aortique ou de la CCVG et de l’intégrale des vélocités (ITV) à cet endroit: VS (ml) = S (cm2) • ITV (cm). La surface de la CCVG est calculée à partir du diamètre (D): S = 0.785 D2. Celle de la valve aortique est mesurée en mésosystole (forme triangulaire). L’ITV est mesurée au Doppler pulsé dans la CCVG et au Doppler continu à travers la valve aortique. Le débit cardiaque est donc: Q = 0.785 D2 • ITV • FC (CCVG) Q = SAo • ITV • FC (valve aortique) où: FC fréquence cardiaque Quelques découvertes pathologiques ont une influence sur la stratégie chirurgicale. Athéromatose de l’aorte ascendante: modification des sites de canulation. Calcifications massives ou pendulaires de l’aorte descendante: risque excessif en cas de contre-pulsion intra-aortique. Thrombus intracardiaque lié au bas débit ou à une akinésie pariétale: dans l’appendice auriculaire gauche (fréquent en cas de fibrillation auriculaire), à l’apex du VG (à rechercher en cas d’akinésie apicale). Dans ces cas, les manipulations du coeur doivent être limitées et prudentes jusqu’au clampage de l’aorte. Assistance ventriculaire: la décanulation d’une assistance ventriculaire préalable peut entraîner des embolies gazeuses que l’ETO peut repérer en vue long-axe de l’aorte ascendante (120°). Cardiopathies congénitales: identification de la position et de la taille de l’aorte, de l’artère pulmonaire et des veines caves; recherche de veine cave supérieure gauche. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 69 Examen post-CEC Avant la mise en charge, un premier examen permet de contrôler les manoeuvres de débullage et la présence éventuelle d’air dans le territoire coronarien droit (Figure 27.55). Il faut attendre le rétablissement du débit cardiaque pour que le retour par les veines pulmonaires ait totalement vidangé l’air qui peut s’y être accumulé lors de la reconstruction de l’OG. Le coeur du donneur, qui est de taille normale, se retrouve dans un sac péricardique en général très agrandi par la dilatation du coeur explanté. Il tend à se placer dans une position plus médiane que le coeur normal, avec une certaine rotation dans le sens horaire. Les plans de coupe seront donc sensiblement modifiés par rapport aux vues habituelles. Dès la mise en charge, on surveille attentivement la reprise fonctionnelle des deux ventricules. Figure 27.55 : Accumulation d’air dans le cœur gauche en fin de CEC. A : l’air provient de la cardiotomie gauche et des veines pulmonaires droite (VPD) et gauches (VPG) ; il s’accumule aux endroits les plus surélevés : angle entre le septum interauriculaire et le toit de l’OG, angle mitro-aortique, septum interventriculaire antéro-apical (en position de Trendelenburg). B : vue 4 cavités avec d’innonbrables bulles dans l’OG et le VG, ainsi que deux zones d’accumulation contre le septum inter-auriculaire et dans les trabéculations du septum interventriculaire. C : embolisation d’ait dans le muscle papillaire postérieur (territoire de la coronaire droite). A VPG VPD B OG Aorte VG C Ant Post © Chassot 2010 Dès sa reperfusion, le VG du coeur greffé présente certaines caractéristiques [157,164,166]. Démarrage plus ou moins lent de la reprise fonctionnelle systolique; elle varie selon la fonction du greffon avant prélèvement, la durée d’ischémie du greffon, les conditions de préservation, les lésions de reperfusion, la discordance de taille donneur-receveur, les résistances artérielles du receveur. Augmentation de l’épaisseur de paroi due à l’oedème (solution de préservation, cardioplégie, ischémie); la masse ventriculaire gauche est augmentée. Aplatissement du septum interventriculaire et nouvement paradoxal du septum, accentué en cas de dysfonction droite. Dysfonction diastolique de type restrictif; le flux mitral montre un raccourcissement de la phase de relaxation isovolumétrique, une élévation de la Vmax E, une accélération de la pente de décélération E et une nette diminution de la Vmax du flux auriculaire A. Le flux veineux pulmonaire affiche une baisse de la composante systolique et une élévation de la composante diastolique. Ces caractéristiques ne sont malheureusement pas dissociables de la dysfonction auriculaire qui survient après la transplantation. La technique chirurgicale de la greffe implique une suture de l’OG du donneur à la paroi postérieure de l’OG du receveur comprenant l’abouchement des quatre veines pulmonaires. De ce fait, l’OG est consitutée partiellement de tissu du receveur et de tissu du donneur. Il s’ensuit une désynchronisation ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 70 de la contraction et une dysfonction mécanique, souvent caractérisée par un contraste spontané auriculaire malgé un débit cardiaque satisfaisant; comme le risque de thrombose auriculaire est élevé, il est important de rechercher systématiquement un éventuel thrombus, en particulier au niveau des lignes de sutures et de l’AAG [45]. Le phénomène est identique pour l’OD lorsqu’on pratique une anastomose à mi-corps de celle-ci; on obtient alors une OD de grande taille très thrombogène et très arythmogène. La technique préférée actuellement est de suturer les racines des deux veines caves du donneur aux veines caves du receveur de manière à ce que l’OD soit normale. Caractéristiques échocardiographiques du coeur transplanté Epaisseur de paroi et masse augmentées Aplatissement ou mouvement paradoxal du septum interventriculaire Rotation horaire par rapport aux plans de coupe Epanchement péricardique (coeur de petite taille par rapport au péricarde) Oreillettes agrandies (bourrelet anastomotique) et dysfonctionnelles Image Doppler de dysfonction diastolique restrictive Dysfonction VD aiguë fréquente En vue 4-cavités (0°), on voit nettement le bourrelet échodense provoqué par la ligne de suture auriculaire gauche (Figure 27.56). Il peut arriver que cette suture provoque un rétrécissement médioauriculaire avec un aspect en sablier de l’OG (cor triatriatum acquis). Si le flux au niveau du rétrécissement présente une accélération importante (turbulences au Doppler couleur), la sténose est significative et impose une révision immédiate de l’anastomose auriculaire, car il se développera une hémodynamique de sténose mitrale [117]. Il est rare que le flux soit perturbé dans les veines pulmonaires puisque la paroi postérieure de l’OG du donneur est restée en place; toutefois, ce flux peut présenter une Vmax élevée en cas de torsion des veines si la suture auriculaire est très déséquilibrée. Une Vmax > 1.5 m/s n’est pas acceptable. Le recherche de FOP doit être systématique même si elle a été pratiquée sur le donneur. En effet, les conditions hémodynamiques sont modifiées, et un passage D → G cyanogène peut apparaître à la faveur d’une dysfonction du VD. Figure 27.56 : image 4-cavités 0° d’un coeur transplanté. Les oreillettes paraissent plus grandes que sur un coeur normal. Les lignes de sutures auriculaires sont bien visibles au niveau de l’OG (flèches) ; elles forment des bourrelets. Le septum interauriculaire bombé dans l’OG signale une dysfonction droite. OG OD VG VD Les anastomoses des veines caves peuvent donner lieu à des rétrécissements significatifs; elles doivent être systématiquement investiguées dès le sevrage de la CEC (Figure 27.57) [179]. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 71 Anastomose de la veine cave supérieure (VCS): en vue bicave 100°, le Doppler couleur (limite de Nyquist 0.5 m/s) met en évidence un flux tourbillonnaire, mais ne permet pas de mesurer la vélocité. Comme l’oesophage et la VCS sont parallèles, il n’existe aucune vue transoesophagienne qui permette d’être dans l’axe du flux avec le faisceau Doppler. La seule vue qui offre cet alignement est une vue transgastrique à 60 – 120° dérivée de la vue chambre d’admission du VD avec rotation de sonde dans le sens horaire; on voit alors la VCS au bas de l’écran, à 6 heures par rapport à l’OD (Figure 27.57B). Anastomose de la veine cave inférieure (VCI): en vue bicave 100° profonde (sonde au niveau du diaphragme), on voit l’abouchement de la VCI dans l’OD et la zone de l’anastomose. Dans cette position, le flux est dans l’axe du capteur Doppler et la mesure de la Vmax aisée. Dans une veine centrale, la vélocité du flux est en moyenne de 0.3 à 0.7 m/s. Une Vmax de 1.0 – 1.5 m/s est anormale mais encore tolérée; elle représente un gradient de pression maximal de 4 – 9 mmHg. Une Vmax > 1.5 m/s est considérée comme pathologique et commande une révision immédiate de l’anastomose. OG VTr ic VD OD VCS CCVD VCS Ao OD A B VCI OD C D Figure 27.57 : sutures caves restrictives après greffe cardiaque. A: flux turbulent dans la veine cave supérieure (VCS); vu l’échelle de couleur (limite de Nyquist 0.75 m/s), la Vmax du flux est > 1 m/s. B : la seule vue ETO dans laquelle on puisse mesurer adéquatement la Vmax du flux veineux cave supérieur est une vue transgastrique du VD à 70-120° avec rotation horaire de la sonde. Elle met en évidence la VCS à 6 heure par rapport à l’OD, avec l’axe du Doppler parallèle au flux de la veine. C : flux turbulent à la jonction entre la veine cave inférieure (VCI) et l’OD en vue bi-cave 100° basse (sonde au niveau du diaphragme). On voit une zone d’accélération concentrique en amont de la sténose (Vmax > 1.2 m/s d’après l’échelle couleur). Le Doppler est bien aligné avec le flux. D : image spectrale du flux de la vue précédente ; la Vmax est 1.6 m/s ; le gradient de pression maximal est de 11 mmHg et le gradient moyen de 7 mmHg ; ces valeurs sont excessives et justifient une reprise chirurgicale de l’anastomose. Les flux artériels doivent être contrôlés au même titre que les flux veineux [179]. Anastomose aortique; elle est visible en vue long-axe de l’aorte ascendante à 120°; la Vmax du flux est mesurée en vue transgatsrique profonde 0° ou long-axe 120° au Doppler continu, ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 72 pour autant qu’on puisse avoir un bon déroulement de la racine de l’aorte. Le flux doit être laminaire au Doppler couleur et la Vmax < 1.7 m/s. Il est exceptionnel de rencontrer un problème de sténose à ce niveau, sauf dans les cas de cardiopathies congénitales présentant des anomalies de la jonction ventriculo-artérielle. Anastomose pulmonaire; elle est visible en vue court-axe de l’aorte ascendante à 0° (long-axe du tronc de l’AP qui permet un bon alignement entre le flux et l’axe Doppler) et en vue admission-chasse du VD 60-90°. Le flux couleur doit être laminaire et la Vmax < 1.5 m/s. En cas de rétrécissement, le gradient maximal tolérable est 15-20 mmHg (Vmax 1.9 – 2.3 m/s). Une Vmax > 2.3 m/s commande une révision de l’anastomose. La dysfonction droite aiguë représente 50% des complications cardiaques après transplantation; elle est responsable de 19% des décès précoces [68]. Elle se caractérise par une dilatation et une dysfonction du VD, une dilatation de l’OD, un bascule du septum dans l’OG, et une insuffisance tricuspidienne majeure. Elle est liée à la postcharge excessive que représente pour un VD normal l’hypertension pulmonaire, même modeste, du receveur. Cette dysfonction a plusieurs origines. Excès de postcharge du receveur (hypertension pulmonaire); Tempête sympathique du donneur; Lésion de préservation, ischémie prolongée; Lésion de reperfusion; Embolie gazeuse de la CD Sténose ou coudure de l’anatomose de l’artère pulmonaire. La dilatation du VD dans le champ opératoire est confirmée par la dysfonction visible sur l’image ETO en vue 4-cavités (0-20°) et en vue admission – chasse du VD (60°). Cette dysfonction peut progresser très rapidement. Fréquemment, l’attention est attirée par une bombement exagéré et permanent du septum interauriculaire en direction de l’OG. La dysfonction est confirmée par la mesure du TAPSE et par celle de la vélocité de l’anneau tricuspidien au Doppler tissulaire (voir Chapitre 25 Fonction ventriculaire droite, Indices échocardiographiques). Le suivi de l’IT permet de voir évoluer la situation de manière simple et rapide (Figure 27.58). La persistance d’une dilatation du VD et d’un petit VG hyperdynamique est une indication à une assistance ventriculaire droite. B A OG OG OD IT VG OD VG IT Figure 27.58 : Evolution d’une dysfonction droite après transplatation cardiaque. A: IT degré II après la mise en charge. B: 11 minutes plus tard, l’IT a augmenté à une degré III ; le septum interauriculaire est clairement bombé dans l’OG. Les flèches indiquent les lignes de suture de l’OG. Après la mise en charge, on découvre une IM mineure dans le 60% des cas et une IT mineure-modérée dans le 85% des cas [46]. Elles sont dues en bonne partie aux modifications géométriques des oreillettes et à la tension exercée sur la partie musculaire de l’anneau atrio-ventriculaire par les sutures auriculaires. Elles sont plus fréquentes quand la taille du greffon est très différente de celle du receveur. Elles correspondent aussi à l’insuffisance du ventricule sous-jacent. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 73 Examen ultérieur Outre la surveillance fonctionnelle et l’observation d’un épanchement l’échocardiographie présente un intérêt majeur pour suspecter un rejet de l’allogreffe. péricardique, Augmentation de l’épaisseur de paroi et de la masse du VG; Augmentation de l’échogénicité myocardique; Epanchement péricardique nouveau; Baisse de la FE de > 10%; Dysfonction diastolique restrictive; Apparition ou aggravation d’une insuffisance mitrale. Le diagnostic de rejet est fondé sur le rapport histologique de la biopsie. ETO et transplantation cardiaque Critères de sélection du donneur - FE > 0.45, FAC > 0.35 - Altérations mineures de la cinétique segmentaire acceptables - Absence de valvulopathie (IM et IT mineures acceptable) - Recherche de FOP Examen pré-CEC - Surveillance hémodynamique - Recherche de modifications anatomiques, athéromatose aortique, thrombus intracavitaire Examen post-CEC - Fonction VG et VD (dysfonction VD fréquente) - Contrôle des sutures auriculaires gauches - Contrôle de l’anastomose de l’AP (Vmax < 2.0 m/s) - Contrôles des anastomoses de la VCI (vue bicave 100° basse) et de la VCS (vue transgastrique VD – OD 60-120°) - Vmax veines caves < 1.5 m/s Transplantation pulmonaire Outre le diagnostic de l’hypovolémie, l’ETO permet d’évaluer la fonction du VD en cas d’hypertension pulmonaire et surtout de surveiller sa tolérance au clampage itératif de chaque artère pulmonaire [112,115]. Monitorage de la taille et de la fonction du VD ; Surveillance de l’IT ; Surveillance du flux dans l’AP proximale ; En cas de dysfonction aiguë sévère, il est nécessaire de déclamper l’AP et de poursuivre l’opération en CEC. Pendant la phase de reperfusion, il existe un risque de sténose infundibulaire dynamique de la chambre de chasse droite (effet CMO à droite) du à la baisse brutale de la PAP dans le poumon greffé par rapport au poumon malade. Ce phénomène peut s’accompagner d’une dysfonction du corps du VD, quand bien même la chambre de chasse est hypercontractile puisque cette dernière est plus richement dotée en récepteurs β que le reste du ventricule. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 74 L’évaluation de l’anastomose artérielle pulmonaire est possible sur le tronc de l’AP ou sur l’AP droite, mais elle est impossible sur l’AP gauche à cause de l’interposition de la bronche-souche entre l’AP et l’oesophage. Le gradient maximal à travers l’anastomose doit être < 20 mmHg (Vmax 2.0 – 2.3 m/s). Les veines pulmonaires étant réimplantées dans l’OG, il est important d’évaluer le flux à travers l’anastomose des 2 veines pulmonaires (pour chaque côté en cas de greffe bipulmonaire). La Vmax du flux d’entrée dans l’OG doit être < 1.0 m/s, avec une tolérance jusqu’à 1.5 m/s (gradient de pression maximal 4-9 mmHg) ; au-delà de ces valeurs, une révision chirurgicale s’impose. Comme on n’héparinise pas systématiquement les patients pour la greffe pulmonaire, il faut soigneusement rechercher la présence d’un thrombus dans l’OG en fin d’intervention ; souvent, le thrombus est fixé à l’anastomose de la veine et de l’OG (Figure 27.59) [45,115]. A OG B OG Ao OD Ao OD VD Figure 27.59 : thrombus dans l’OG apparu en fin d’opération lors d’une transplantation bi-pulmonaire. A : le thrombus est fixé à l’anastomose entre les veines pulmonaires droites et l’OG. B : il s’étend dans le corps de l’OG et mesure 5-6 cm de longueur. Une CEC avec arrêt circulatoire a été nécessaire pour l’extraire chirurgicalement. Traumatisme thoracique L'échocardiographie est un examen très performant en cas de traumatisme thoracique fermé. Elle met en évidence les lésions valvulaires, les altérations de la cinétique segmentaire d'un ventricule, l'épanchement péricardique, le pneumopéricarde (Figure 27.60) et peut déceler des irrégularités locales de l'échogénicité myocardique (contusion, hématome) [122]. Après traumatisme fermé, environ 25% des patients ayant un écho anormal développent des complications nécessitant un traitement spécifique, alors que seuls 1-2% de ceux qui ont un écho normal font une complication [74]. Il est évident que la voie transoesophagienne offre des images de bien meilleure qualité, surtout lorsqu'il y a des lésions pariétales thoraciques, des pansements et des drains. Toutefois, l'ETO est formellement contre-indiqué en cas de lésion de la colonne cervicale, du larynx ou de l’oesophage. Les traumatismes venant en général de l'avant (décélération brutale, agression), les structures antérieures sont les plus exposées: ventricule droit, valve tricuspide, oreillette droite, insertion des veines caves. Le ventricule gauche est aussi fréquemment lésé, car il est la plus grande masse de tissu myocardique. Mais toutes les structures cardiaques peuvent être touchées, et entraîner des complications requérant un traitement spécifique. Contusion cardiaque: histologiquement, le myocarde contus est similaire au myocarde infarci; il cicatrise et se fibrose de la même manière; il peut développer des lésions anévrysmales et arythmogènes. La paroi antérieure du VD est la plus souvent touchée. L’image ETO est peu spécifique : altération de la cinétique segmentaire, hyperéchogénicité locale, réaction ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 75 péricardique. En l'absence d'ACS et de manifestation sur l'ECG, c'est souvent un diagnostic de présomption. La contusion est présente dans 5-35% des traumatismes thoraciques, et fait courir un risque majeur de troubles du rythme, de rupture pariétale ou d’évolution anévrysmale [81]. Rupture cardiaque: c'est la lésion la plus fréquente à l'autopsie, car la mortalité sur le site est de 75%; elle reste de plus de 50% chez les patients qui présentent encore des signes vitaux au déchocage [70]. Hémopéricarde et tamponnade: toute déchirure externe d'une structure cardiaque y conduit; le diagnostic est suspecté en présence d'une tachycardie et d'une hypotension à pression de remplissage haute ; il est confirmé par l'échocardiographie. En urgence, le drainage de 50 ml de sang suffisent à décomprimer le coeur, mais les tamponnades traumatiques contiennent souvent des caillots et de la fibrine qui cloisonnent l'épanchement (Figure 27.48). L’ETO est très utile pour guider la péricardiocentèse et contrôler l’évacuation du liquide. Hémothorax : la plèvre gauche est bien visible en avant de l’aorte descendante. A B VD VG Figure 27.60 : traumatisme thoracique. A : pneumopéricarde (flèche) lors d'un traumatisme thoracique. L'air apparaît à l'échocardiographie sous forme d’une lame brillante très échogène sur la face antérieure du coeur. B : hémopéricarde en vue transgastrique, avec présence de caillots à l’apex. Insuffisance tricuspidienne (IT): rupture de cordage ou déchirure de feuillet; elle ne réclame pas d'intervention en urgence si elle est isolée car elle est en général hémodynamiquement bien tolérée (Figure 27.61). S’il persiste une IT ≥ III, l’indication à une opération élective est posée. Insuffisance mitrale (IM): elle est beaucoup moins bien tolérée, et demande une correction chirurgicale rapide (plastie ou remplacement) si elle est sévère; elle est également associée à des traumatismes plus violents. Insuffisance aortique (IA): encore moins bien tolérée que l'IM, l'IA est souvent associée à une dissection ou une déchirure traumatique de la racine de l'aorte; c'est une indication à opérer en urgence (remplacement d’emblée) si elle est sévère. CIV: due en général à une plaie perforante, elle se diagnostique à l'échocardiographie par une surcharge du VD, un flux au travers du septum, des turbulences diastoliques dans la cavité du VD, et un PISA du côté du VG. Elle est visible en vue 4-cavités 0-20°, en vue 2-cavités 90° avec rotation horaire de la sonde pour mettre en évidence la partie haute du septum entre les deux chambres de chasse, et en vue transgastrique court-axe 0° en parcourant le coeur de l’apex à la base. Lésion coronarienne: la coronaire la plus exposée aux traumatismes perforant est l'IVA; la lésion peut entraîner une tamponnade ou un infarctus. A long terme, il peut se développer une fistule avec une oreillette ou un ventricule, caractérisée par un shunt, une surcharge de volume, un vol coronarien, et un risque d'endocardite. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 76 Même en urgence au déchocage, l’examen ETO doit être complet. Les lésions traumatiques de l’aorte sont traitées dans les pages suivantes (voir Traumatisme aortique). OD A B VD Figure 27.61 : Insuffisance tricuspidienne massive par rupture de cordage de la valve. A: le feuillet postérieur flotte librement dans l’OD (flèche). B: Doppler couleur montrant une IT sévère avec dilatation de l'OD et du VD. ETO et traumatisme thoracique Examen complet de toutes les structures Recherche particulière - Contusion cardiaque (ACS, hyperéchogénicité) - Insuffisance tricuspidienne, mitrale et aortique - Rupture de l’aorte (racine aortique, isthme) - Hémopéricarde, tamponnade - Hémothorax (plèvre gauche) Contre-indication à l’ETO: lésion instable de la colonne cervicale, lésion du cou et de l’oesophage Embolie pulmonaire Dans les embolies pulmonaires aiguës, on peut visualiser des embols en transit dans l’OD et le VD ; ils apparaissent sous forme de grandes masses onduleuses et libres (voir Figure 25.104). Un thrombus en selle sur la bifurcation pulmonaire ou un thrombus situé proximalement dans l’AP droite est bien visible à l’ETO, mais l’image de l’AP gauche est trop tronquée pour que l’on puisse voir une occlusion de sa lumière. Pour être diagnostique, l’image du thrombus doit être décelable dans plus d’un plan et doit modifier le flux couleur dans l’AP. Le diagnostic échocardiographique d’embolie pulmonaire aiguë repose sur la mise en évidence des embols. Si ces derniers ne sont pas visibles, on peut poser un diagnostic de présomption sur l'image de surcharge droite aiguë dans un contexte de dyspnée, de choc cardiogène et d'anamnèse typique. Dilatation et dysfonction majeure du VD; Dilatation de l’OD et bascule du septum interauriculaire dans l’OG ; ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 77 Bascule du septum interventriculaire dans le VG en systole, mouvement paradoxal du au prolongement de la contraction du VD en début de diastole ; Malgré une hypokinésie sévère de toute la paroi libre du VD, l’apex démontre une contractilité conservée ; cet aspect, typique de l’embolie pulmonaire, est lié à la traction exercée sur l’apex droit par les fibres du VG hypercinétique [90a] ; IT avec Vmax 3-4 m/s ; la Vmax baisse en cas de dysfonction sévère du VD ; Présence d’embols en transit dans l’OD, le VD ou un éventuel FOP; Thrombus visible dans l’AP. Lorsqu’un thrombus est visible, la spécificité de l’ETO est de 100%, mais sa sensibilité est de 80% et sa valeur prédictive négative de 53% seulement [129a]. L’ETO peut donc affirmer le diagnostic d’embolie pulmonaire en cas d’examen positif, mais ne peut pas l’exclure en cas d’examen négatif. Toutefois, la présence d’une défaillance du VD et de signes d’hypertension pulmonaire aiguë dans le contexte d’un état de choc oriente le diagnostic vers celui d’embolie pulmonaire. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 78 Aorte thoracique Examen de l’aorte thoracique Anatomie L’aorte thoracique comprend 3 parties: L’aorte ascendante; sa racine est connectée à la valve aortique; elle comprend les sinus de Valsalva avec le départ des coronaires et la partie tubulaire ascendante; sa longueur est de 712 cm, son diamètre de 3.5 cm (mesuré en diastole) et son épaisseur de 2 mm; un diamètre > 5.0 cm est un avévrysme. La crosse aortique, avec le départ des 3 vaisseaux de la gerbe (tronc brachio-céphalique, carotide gauche et sous-clavière gauche). L’aorte descendante, qui donne les artères intercostales et se prolonge en dessous du diaphragme par l’aorte abdominale dont les deux premières branches sont le tronc coeliaque et l’artère mésentérique supérieure; son diamètre normal en diastole est de 2.5 cm; un diamètre > 4 cm est un anévrysme. L’isthme, qui est la jonction entre la crosse et la descendante, est une zone légèrement rétrécie, dont la sténose donne naissance à la coarctation (voir cardiopathies congénitales, Coarctation); elle est située 2 cm distalement par rapport au départ de la sousclavière gauche. Alors que l’oesophage a un trajet vertical rectiligne, l’aorte est enroulée autour de celui-ci. L’aorte ascendante et la crosse sont antérieures par rapport à l’oesophage, mais l’aorte descendante tourne de 180° autour de celui-ci: antéro-latérale dans sa partie supérieure, elle est sur son côté gauche dans sa partie moyenne et lui devient postérieure au niveau du diaphragme. La sonde transoesophagienne doit donc pivoter sur elle-même d’un demi-tour pour suivre l’aorte sur toute sa longueur (Figure 27.62) [14]. Comme elles compriment l’oesophage, les dilatations de l’aorte (anévrysme, dissection, rupture partielle) peuvent géner la progression de la sonde et même la rendre dangereuse à cause du risque de rupture lorsque on en fléchit l’extrémité. Il faut être particulièrement précautionneux en cas de dysphygie, de raucité de la voix, de toux chronique et de syndrome de Horner. Dans ces situations, une grande prudence est recommandée dans les manipulations de la sonde ETO. L’interposition de la trachée et de la bifurcation des bronches-souches entre l’oesophage et l’aorte crée une zone aveugle à l’ETO depuis la moitié de l’aorte ascendante jusqu’après le tronc brachiocéphalique. L’aorte ascendante distale depuis le croisement de l’artère pulmonaire droite et la crosse proximale jusqu'au tronc brachio-céphalique sont donc invisibles à l’ETO. On peut contourner ce problème en introduisant dans la bronche-souche gauche un ballon rempli de NaCl monté sur une cathéter, qui rétablit la vision sur toute la longueur du vaisseau mais qui oblige à interrompre la ventilation [168]. Vues ETO La courte distance entre l’aorte et le capteur oesophagien associée à la forte réflexion des ultrasons par la paroi du vaisseau donnent fréquemment lieu à des reverbérations (voir Chapitre 25, Artéfacts physiques et Figure 25.28A). Ce phénomène a lieu lorsqu’un objet très échogène proche du transducteur renvoie un écho si puissant qu’une partie de celui-ci est réverbérée par la surface du transducteur et se trouve renvoyée en direction de l’objet, ce qui donne naissance à un deuxième écho. Comme le temps mis à recevoir ce deuxième écho est le double de celui mis pour recevoir le premier, le processeur l’assimile à un objet situé au double de la distance du premier. Il construit donc une deuxième image de l’objet à une distance double. Il n’est pas rare de voir des réverbérations de l'artère pulmonaire droite ou de la paroi postérieure de l’aorte ascendante sous forme de traces échogènes à l’intérieur de la lumière de celle-ci, donnant l’impression d’une membrane ou d’une dissection. Au ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 79 niveau de la descendante, la réverbération peut donner une image de deuxième vaisseau accolé à l'aorte. Les réverbérations se distinguent par plusieurs caractéristiques: Elles ont un tracé linéaire perpendiculaire à l'axe des ultrasons; Elles dépendent du plan de coupe (elles disparaissent dans un autre plan); Elles traversent les structures anatomiques; Leurs mouvements correspondent à ceux de la structure réfléchie, non à ceux de l'aorte (mode TM). Les images sont de meilleure qualité si l’on règle la fréquence d’émission du transducteur sur des valeurs élevées (≥ 5 MHz) et si l’on réduit la profondeur d’examen (4-8 cm). Antérieur Postérieur Post Figure 27.62 : relation entre l’oesophage et l’aorte thoracique. L’aorte est enroulée autour de l’oesophage ; elle est antérieure dans sa partie haute (crosse), latérale gauche dans sa partie médiothoracique et postérieure au niveau du diaphragme. Pour la suivre, la sonde ETO doit pivoter de 180°. Dans un plan de coupe en courtaxe (0°), elle apparaît circulaire, sauf la crosse qui est oblongue. Au milieu du thorax, le corps vertébral commence à apparaître à droite au bas de l’écran ; dans la partie inférieure, il est au milieu de l’écran [14]. Post Post Post Post A l’échographie transoesophagienne, l’aorte est examinable sous 6 angles de vue différents (Figure 27.63). Vue court-axe de l’aorte ascendante 0° (position de la sonde mi-oesophage haute) : aorte ascendante, artère pulmonaire et AP droite en long axe, veine cave supérieure en court-axe. Vue long-axe de l’aorte ascendante 110-140° (position de la sonde mi-oesophage haute) : aorte ascendante, artère pulmonaire droite (APD) en court-axe, sinus transverse. Le croisement entre l’aorte ascendante et l’APD est l’endroit le plus céphalique dont la vue est constante, quelle que soit la position de la bronche-souche droite (celle-ci se trouve au dessus de l’APD). Dimensions normales (bord interne à bord interne) (voir Figure 26.30) [48b] : • Chambre chasse VG 1.8 – 2.4 cm (en systole) • Anneau aortique 1.8 – 3.0 cm (en systole) • Sinus de valsalva 2.5 – 4.5 cm (en diastole) ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 80 • Jonction sino-tubulaire 2.2 – 3.6 cm (en diastole) • Aorte ascendante 2.2 – 3.6 cm, ou 2.1 cm/m2 (en diastole) Vue long-axe de la crosse 0° (position de la sonde dans le haut oesophage, à 20 cm de l’arcade dentaire) : crosse de l’aorte de forme oblongue vers la gauche de l’écran ; la manière la plus simple d'obtenir les vues de la crosse est de remonter la sonde depuis une vue court-axe de l'aorte descendante. Vue court-axe de la crosse 90° (même position de la sonde) : crosse d’aspect circulaire, artère pulmonaire en long-axe, veine innominée. En pivotant la sonde dans le sens horaire depuis la gauche (isthme), on aperçoit dans l'ordre le départ de l’artère sous-clavière gauche, de la carotide gauche et, de manière inconstante, du tronc brachio-céphalique. Vue court-axe de l’aorte descendante 0° (sonde pivotée vers la gauche en position médiothoracique et vers l’arrière en position basse) : aorte thoracique, plèvre gauche (en avant de l’aorte); l'aorte descendante jouxte la face postéro-latérale gauche de l'OG en vue rétrocardiaque mi-oesophagienne. Le diamètre de la descendante est de 2.0 - 3.0 cm [48b]. Le niveau des lésions est défini par leur distance par rapport à l’origine de la sous-clavière gauche ou par la distance par rapport aux incisives lue sur le corps de la sonde. Cette distance se mesure en retirant la sonde depuis le niveau de la lésion jusqu'à celui de la sous-clavière gauche, et en notant la longueur d'après les chiffres apparaissant aux incisives sur les marques de la sonde. L’extrémité d’un cathéter de contre-pulsion intra-aortique doit se trouver 1 cm en dessous du départ de la sous-clavière gauche. Vue long-axe de l’aorte descendante 90° (même position de la sonde): aorte descendante. Lorsqu'elle est tortueuse, l'aorte thoracique prend des formes très variables; les rapports anatomiques sont modifiés et l'ETO perd de sa pertinence; l'IRM et le CT-scan donnent des images de meilleure qualité. Figure 27.63 : vues ETO de l’aorte thoracique. A : vue court-axe de l’aorte ascendante 0°. B : vue long-axe de l’aorte ascendante 120°. C : vue long-axe de la crosse 0°. D : vue court-axe de la crosse 90°. E : vue courtaxe de l’aorte descendante. F : vue long-axe de l’aorte descendante. AP : artère pulmonaire. APD : artère pulmonaire droite. VI : veine innominée. VCS : veine cave supérieure. En A, on voit très nettement un artéfact au centre de la lumière aortique (reverbération). A B APD APD OG VCS Ao V Ao AP C Aorte asc D Ao Crosse VI AP E F Ao desc ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 81 Un épanchement pleural gauche se différencie d’un épanchement péricardique par sa position antérieure par rapport à l’aorte descendante, alors que l’épanchement péricardique est situé entre l’oreillette gauche et l’aorte. En court axe de l’aorte, le Doppler couleur (limite de Nyquist 0.4 m/s) indique que le sang avance en tournoyant dans le sens anti-horaire, selon le mouvement qui lui est imparti par la torsion du VG au cours de la contraction systolique (Figure 27.64). Ce flux spiralé est laminaire. La présence de turbulences localisées indique la présence d’un obstacle (athérome massif, coarctation) ou d’une déchirure (dissection, traumatisme). La pulsatilité de l’aorte descendante représente normalement une variation de diamètre de 5-10% ; elle diminue lorsque l’aorte se rigidifie ou lorsque la fonction systolique du VG baisse. Elle est accentuée au-dessus d’une coarctation (pulsatilité environ 30%) et dépulsée en dessous (< 5%). En cas de bas débit dans une aorte dilatée, on voit apparaître un contraste spontané qui tournoie lentement dans le sens anti-horaire. A B Figure 27.64 : flux spiralé dans l’aorte descendante. A : le Doppler couleur indique que le sang avance en tournoyant dans le sens anti-horaire, selon le mouvement qui lui est imparti par la torsion du VG au cours de la contraction systolique. B : la présence de contraste spontané dans un anévrysme montre le même mouvement spiralé anti-horaire ; la flèche marque un thrombus mural. Branches artérielles de l’aorte Les deux premières branches sont les artère coronaires ; elles ont été décrites en début de chapitre (voir Figure 27.1 et Figure 27.2). Les trois troncs artériels de la crosse ont un trajet céphalique et postérieur. On peut les suivre à partir de la vue court-axe de la crosse de l’aorte à 90°, en réglant la profondeur à 6 cm. A partir de la gauche (départ de l'aorte descendante), on tourne progressivement la sonde dans le sens horaire pour mettre en évidence le départ de la sous-clavière gauche, puis de la carotide gauche et enfin du tronc brachio-céphalique. La vue de ce dernier est inconstante, car elle est partiellement obstruée par la trachée. On peut également partir de la vue long-axe de la crosse à 0° et retirer quelque peu la sonde vers le haut en maintenant une légère antéflexion ; la sous-clavière gauche apparaît à la droite de l’écran, la carotide gauche au centre et le tronc brachio-céphalique sur la gauche [144]. A partir de cette position, on peut suivre les carotides sur plusieurs centimètres en s’aidant du Doppler couleur (limite de Nyquist 0.2 m/s) et en retirant doucement la sonde vers le haut jusqu’à la bouche oesophagienne (Figure 27.65A). La carotide primitive gauche se divise en carotide externe (plus proche du transducteur) et interne (plus éloignée). On différencie les deux vaisseaux par l’image spectrale de leurs flux (Figure 27.65B et 27.65C) : la carotide interne a un flux systolo-diastolique alors que la carotide externe a un flux strictement systolique, sans composante diastolique mais avec un léger reflux protodiastolique. Cette image est typique des vaisseaux somatiques à haute résistance périphérique, alors que les vaisseaux qui perfusent des organes jouissant d’une autorégulation ont une résistance plus basse et une persistance du flux en diastole. On retrouve les même images à droite au dessus du tronc brachio-céphalique, bien que celui-ci soit souvent obscurci par la trachée. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 82 Figure 27.65 : vue de la bifurcation carotidienne gauche. A: Doppler couleur dans les carotides commune, externe et interne [144]. B: flux spectral de la carotide interne, avec présence d’un flux systolique et diastolique. C: flux spectral de la carotide externe, avec un flux strictement systolique, pas de flux diastolique mais un léger reflux protodiastolique; on retrouve la même image dans les sous-clavières. Cette image est typique des vaisseaux somatiques à haute résistance périphérique, alors que les vaisseaux qui perfusent des organes jouissant d’une autorégulation ont une résistance plus basse et une persistance du flux en diastole (B). C comm C ext VJint C int A B C L’embranchement de artère sous-clavière gauche, qui marque la frontière entre la crosse et l’aorte descendante, est souvent mieux visualisé entre 40 et 60°. Dans une vue à 0°, l’artère sous-clavière gauche a un trajet vers la droite de l’écran puis oblique vers le bas. Sa première branche vers le haut est l’artère vertébrale ; sa deuxième branche, la seule orientée vers la gauche de l’écran, est l’artère mammaire interne (AMIG) (Figure 27.66). Cette dernière présente une image de flux spectral de type somatique à haute résistance ; après pontage aorto-coronarien, ce flux devient systolo-diastolique comme le flux coronarien, pour autant que la perfusion distale soit bien assurée : le rapport entre l’ITV du flux diastolique et l’ITV du flux systolique est > 1 [120]. Le taux de succès dans la visualisation des vaisseaux de la crosse est de 70-90% [119]. Entre des mains expertes, il est possible de contrôler la perfusion carotidienne pendant la chirurgie de l’aorte et celle de la mammaire interne après des pontages coronariens. A sousclav G Figure 27.66 : bifurcation de l’artère mammaire interne (AMIG) à partir de l’artère sous-clavière gauche [144]. AMI G En suivant l’aorte descendante, on voit émerger de grosses artères intercostales, dont le flux est de type somatique. Lorsqu’on passe le diaphragme, la distance entre le transducteur et l’aorte augmente. Avec davantage de rotation sur la sonde, on peut suivre l’aorte jusqu’au départ du tronc coeliaque et de l’artère mésentérique supérieure, qui sont toujours visibles. Le tronc coeliaque émerge de l’aorte dans le quadrant supérieur droit du vaisseau à l’écran (à 1 heure) ; il s’en éloigne et se bifurque ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 83 rapidement. 2-3 cm plus loin, l’artère mésentérique supérieur prend son départ à l’horizontale (à 3 heures) et longe l’aorte sans se subdiviser [144]. Examen ETO de l’aorte thoracique Six vues différentes : court-axe ascendante 0°, long-axe ascendante 120°, long-axe crosse 0°, courtaxe crosse 90°, court-axe descendante 0°, long-axe descendante 90° Dimensions normales : - Anneau aortique 1.8 – 3.0 cm - Sinus de Valsalva 2.5 – 4.5 cm - Jonction sino-tubulaire 2.2 – 3.6 cm - Aorte ascendante 2.2 – 3.6 cm - Aorte descendante 1.5 – 2.0 cm - Aorte descendante 2.0 – 3.0 cm L’aorte est mesurée bord interne à bord interne en diastole Athéromatose aortique A partir de 50 ans, 30% de la population occidentale souffre d’athéromatose aortique [136]. C’est la première cause d’embolie et de séquelles neurologiques en CEC. Lorsqu’un athérome est visible à l’ETO dans l’aorte ascendante, le risque d’AVC est de 10-12% ; le risque d’embolie cérébrale ou viscérale augmente à 45% lorsque la plaque est mobile (Figure 27.67 et Figure 27.68) [40,136]. Les facteurs de risque sont l’âge, le diabète et l’artériopathie périphérique. Les athéromes sont habituellement classés en 5 catégories [75] : 1 – paroi épaissie de 2-3 mm ; 2 – épaississement laminaire et lisse de 3 – 5 mm ; 3 – athéromes irréguliers jusqu’à 5 mm ; 4 – protrusions irrégulières et sessiles de > 5 mm ; 5 – athérome mobile (quelle que soit sa taille). Figure 27.67 : deux images d’athéromes de l’aorte descendante. La paroi, qui est épaissie et calcifiée, a un aspect bosselé avec une protrusion d’athéromes fixes. Certaines lésions sont mal interprétables à l’échographie, comme l’aorte porcelaine dont la paroi calcifiée est fine, fragile et friable, et où la couche lipidique souple peu échogène répand une espèce de pâte jaunâtre à l’ouverture du vaisseau [106]. Les manipulations et les clampages de l’aorte ascendante sont particulièrement dangereux, mais le sang débité à haute vélocité par la canule aortique de CEC a ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 84 un effet de sablage sur la paroi adjacente qui peut à lui seul détacher une pluie de micro-embols athéromateux tout au long de l’opération [66]. La découverte de lésions athéromateuses dans l’aorte ascendante à l’examen pré-CEC (Figure 27.69) peut obliger à modifier la stratégie chirurgicale : changement de site de canulation, opération à coeur battant, pontage tout-artériel (pas de clampage aortique), canule avec filtre-panier, canulation sous-clavière droite ou fémorale. Cette dernière solution est aisée mais présente un risque en cas d’athéromatose de l’aorte descendante et abdominale. En effet, les plaques sont disposées sur la paroi aortique dans le sens du flux sanguin, comme les tuiles d’un toit. Une perfusion rétrograde peut soulever des fragments de ces plaques et provoquer des embolies viscérales et cérébrales. S'il s’infiltre entre les plaques, le flux sanguin peut également provoquer une dissection aortique qui s’étend fréquemment à tout le vaisseau. Figure 27.68 : images d’athérome mobile dans l’aorte descendante en vue court-axe et long-axe ; il est fixé sur une plaque de 5 mm d’épaisseur faisant protrusion dans la lumière et probablement ulcérée. OG APD VAo Aorte Figure 27.69 : images d’athéromatose calcifiée de l’aorte ascendante. Ce type de lésion oblige à bien choisir le site de canulation ou à modifier la stratégie de CEC. La sensibilité et la spécificité de l’ETO pour les lésions de l’aorte descendante sont excellentes, mais la technique est moins performante pour la crosse et l’aorte ascendante: dans ces deux dernières localisations, la sensibilité n’est que de 21%, même si la spécificité est de 99% [169]. Par contre, dans 35% des cas d’athéromatose de l’aorte descendante on retrouve le même type de lésion dans l’aorte ascendante [77]. La découverte d'athéromes dans la descendante doit donc faire suspecter la présence de lésions identiques dans l'ascendante et la crosse. L’interposition de la trachée et de la bifurcation des bronches-souches entre l’oesophage et l’aorte, qui crée une zone aveugle à l’ETO depuis le croisement de l’artère pulmonaire droite jusqu’au tronc brachio-céphalique, empêche de visualiser l’aorte ascendante distale et la crosse proximale. Or ces ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 85 zones sont la localisation préférentielle des athéromes. Pour en améliorer le dépistage, la technique la plus élégante est l’échographie épiaortique (voir ci-dessous), mais on peut aussi contourner le problème en introduisant dans la bronche-souche gauche, via le tube endotrachéal, un ballon monté sur une cathéter que l’on remplit de 20-50 mL de NaCl une fois en place. Ce système rétablit la vision sur toute la longueur de l’aorte, mais supprime toute possibilité de ventilation ; l’examen doit donc se dérouler pendant 1-2 minutes d’apnée ou une fois en CEC [168,169]. En utilisant la vue long-axe 90° avec la sonde retirée dans le haut œsophage, on peut ainsi investiguer la présence d’athéromatose dans l’aorte ascendante distale. La sensibilité de cette vue particulière pour détecter les athéromes est de 95% et sa spécificité de 79% ; la valeur prédictive négative est de 97% [168a]. L’hématome intrapariétal est une complication majeure de l’athéromatose. Il survient en général sur une plaque ulcérée et consiste en une dissection plus ou moins circulaire de l’aorte. La paroi mesure > 5-7 mm d’épaisseur; elle a un aspect lamellé ou vacuolaire, mais ne contient pas de flux au Doppler couleur. C’est une lésion dangereuse dont le traitement est chirurgical, car car le risque de rupture ou de dissection est de 46% à 30 jours [137]. Athéromatose de l’aorte thoracique Facteurs de risque : âge > 50 ans, diabète, vasculopathie périphérique Aorte descendante : examen aisé ; 1/3 des patients a les mêmes lésions dans l’aorte ascendante Aorte ascendante : examen moins sensible ; si doute ; échographie épiaortique Classification des athéromes (risque embolique croissant) 1 – paroi lisse épaissie < 3 mm ; 2 – épaississement lisse de 3 – 5 mm ; 3 – athéromes irréguliers jusqu’à 5 mm ; 4 – athéromes sessiles > 5 mm ; 5 - athéromes mobiles (quelle que soit la taille) Messages pour le chirurgien en cas d’athéromatose aortique Localisation, taille et mobilité des athéromes Aorte ascendante et descendante Proposition de modification des sites de canulation Echographie épiaortique L’échographie épiaortique consiste à examiner l’aorte ascendante et la crosse dans le champ opératoire au moyen d’une sonde à haute fréquence d’émission (8-12 MHz) emballée dans une housse stérile. Afin de placer la paroi proximale du vaisseau dans la zone focale du transducteur, il est habituel d’interposer un coussinet de gelée stérile ou de remplir la housse de suffisamment de NaCl. Alors que la palpation chirurgicale ne détecte que les lésions très calcifiées (taux de détection: 50%), cette technique permet d’identifier aisément toutes les lésions athéromateuses, y compris dans la zone aveugle de l’ETO (ascendante distale et crosse proximale) (Figure 27.70). L’examen systématique de l’aorte au-delà de 50 ans montre la présence d’athéromatose légère (plaques lisses de < 3 mm) dans 57% des cas, d’athéromatose modérée (plaques étendues de 3-5 mm) dans 19% des cas, et de lésions sévères (plaques > 5 mm, mobiles, ulcérées, aorte porcelaine) dans 8% des cas. Le taux d’ictus après ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 86 chirurgie cardiaque est respectivement de 2.5%, 3.5% et 10% [132,141]. Contrairement à l’ETO, l’échographie épiaortique mobilise le champ opératoire et interrompt l’acte chirurgical. Figure 27.70 : images de l’aorte ascendante et de la crosse en échographie épiaortique. A: long-axe de l’aorte ascendante. B: racine de l’aorte. C: aorte ascendante distale en court-axe. D: long-axe de la crosse. Cette technique met bien en évidence la zone aveugle de l’ETO (ascendante distale et crosse proximale) [132]. Tronc BC: tronc brachiocéphalique. A B Aorte Aorte VAo AP CCVG C D Crosse Tronc BC AP Anévrysme L’anévrysme est défini comme un vaisseau dont la taille est plus d’une fois et demi sa dimension normale supérieure. Les dimensions maximales normales de l’aorte thoracique sont : Aorte ascendante: Crosse de l’aorte: Aorte descendante: < 4 cm; < 3.5 cm; < 3 cm. La prévalence de l'anévrysme aortique est de 6:100’000 habitants par an, et la répartition par ordre de fréquence: ascendante (50%), descendante (30%) et crosse (20%) [72]. L’anévrysme tend à s’agrandir de 0.1 – 0.2 cm par an. L’accroissement est plus rapide (0.5 cm/an) chez les hypertendus porteurs de bicuspidie. Les dimensions considérées comme une indications opératoire sont [124] : Aorte ascendante: Crosse: Aorte descendante: > 5.5 cm; > 4.5 cm; > 4.0 cm. Un anévrysme de 6 cm chez un hypertendu non contrôlé a un taux de rupture de 43% à 1 an [124]. Les anévrysmes peuvent être de deux types: Sacculaires: ils n’englobent pas toute la paroi et apparaissent comme un poche avec un collet à l’ETO; on les rencopntre fréquemment dans la crosse; Fusiformes: toute la circonférence est concernée sur une certaine longueur; ils apparaissent comme une longue dilatation du vaisseau. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 87 Les anévrysme contiennent souvent du contraste spontané à cause du ralentissement du flux dans le grand diamètre du vaisseau (voir Figure 27.64B); les thrombus muraux sont fréquents (Figure 27.71). Dans l’aorte ascendante, les anévrysme englobent souvent la racine et l’anneau aortique, particulièrement lors de syndrome de Marfan. La dilatation de l’anneau empêche la coaptation des cuspides de la valve et celle-ci fuit de manière importante (Figure 27.72A). L’ETO doit définir l’anatomie précise des cuspides, de l’anneau aortique, des sinus de Valsalva et de la jonction sinotubulaire, car leur état respectif détermine le type d’opération à envisager (resuspension, plastie ou remplacement) (voir Figures 26.30 et 27.72B): Dimensions de l'anneau aortique, des sinus de Valsalva et de la jonction sino-tubulaire; Hauteur de coaptation (normal 4-10 mm) et hauteur des cuspides (≥ 8 mm) en diastole; Rapport des diamètres de la jonction sino-tubulaire et de l'anneau valvulaire (normal 1.1 – 1.4). Figure 27.71 : anévrysmes de l’aorte decendante. A: anévrysme sacculaire. B: anévrysme fusiforme avec un important thrombus pariétal. C: courtaxe d’un anévrysme fusiforme avec un thrombus pariétal et du contraste spontané (flèche). D: la même lésion en long-axe; les deux flèches indiquent un thrombus mural ; la double flèche verte montre la lumière de l’aorte remplie de contraste spontané. A B Aorte Aorte Thrombus Anévrysme C Figure 27.72 : Anévrysme de l’aorte ascendante chez un malade souffrant de syndrome de Marfan. L’aorte est très dilatée (diamètre 6 cm, double flèche verte). L’anneau aortique est de taille conservée, mais la valve fuit massivement (IA sévère) parce que l’implantation des commissures est très écartée par la dialtation de la jonction sino-tubulaire, ce qui empèche les cuspides de se rejoindre en diastole. D Thrombus OG IA Aorte ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 88 L’anévrysme d’un sinus de Valsalva est un cas particulier de l’annulo-ectasie caractéristique du syndrome de Marfan (Figure 27.73). Il est asymptomatique, mais peut déstabiliser la cuspide aortique correspondante et provoquer son bascule. Il peut se confondre avec un anévrysme de la partie membraneuse du septum interventriculaire (Figure 27.74). A B OG CCVG Aorte CCVG Figure 27.73 : maladie annulo-ectasiante de Marfan. A : anévrysme isolé du sinus de Valsalva droit. B : dilatation majeure de l’anneau aortique, des sinus de Valsalva (6 cm) et de la jonction sino-tubulaire. A B OG OD CCVG CCVG Aorte VD CCVD Figure 27.74 : anévrysme de la partie membraneuse du septum interventriculaire (flèche) en vue long-axe de l’aorte ascendante (A) et court-axe de la valve aortique (B). La confusion est aisée avec un anévrysme du sinus de Valsalva. Anévrysme de l’aorte thoracique Dimensions normales maximales de l’aorte (dilatation non chirurgicale) - Aorte ascendante < 4.0 cm - Crosse < 3.5 cm - Aorte descendante < 3.0 cm Indications opératoires - Aorte ascendante > 5.5 cm - Aorte descendante > 4.0 cm ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 89 Messages pour le chirurgien en cas d’anévrysme aortique Localisation et dimension, présence et taille des collets Présence de thrombus Position par rapport aux vaisseaux issus de l’aorte Taille de l’anneau aortique, des sinus de Valsalva et de la jonction sino-tubulaire Présence d’IA et mécanisme (orifice de régurgitation central, prolapsus de cuspide, direction du jet) Dissection La dissection aortique est une déchirure qui progresse dans la média; elle peut être due à une rupture intimale à partir d’un athérome ulcéré ou d’un traumatisme, ou à une rupture de vasa vasorum au sein de la paroi (ectasie, Marfan). Elle s’étend en fonction directe de la force d’éjection du VG, de la pression artérielle différentielle et de la fréquence cardiaque. La déchirure primaire est située à un point de stress maximal: racine de l’aorte dans 68% des cas, isthme dans 24% [82]. La prévalence est de 3:100’000 habitants par an. La mortalité de la dissection aortique est de 50% à 48 heures et de 90% à 3 mois [65]. L’ETO est particulièrement efficace pour le diagnostic, puisqu’il a une sensibilité de 86-100%, une spécificité de 85-95% et une valeur prédictive négative de 85-100% [32,48b]. La baisse de la spécificité est liée au diagnostic différentiel parfois difficile avec les artéfacts de reverbération qui sont fréquents (50% des cas) et donnent des images très ressemblantes à une membrane de dissection; ces artéfacts sont responsables de faux-positifs dans 3.5% des cas [48b]. L’ETO a l’avantage d’être rapide, de pouvoir se pratiquer au lit du malade et de ne pas nécessiter de produit de contraste, mais le passage de la sonde peut induire une poussée hypertensive et sa manipulation peut mettre en danger la paroi très fragile de la dissection descendante qui appuie contre l’oesophage (Tableau 27.3). Tableau 27.3 Comparaison des examens diagnostiques dans la dissection aortique Sensibilité (%) Spécificité (%) Remarques Angiographie 80-90 88-95 indiquée uniquememt si coronarographie Angio-CT 90-100 90-100 déplacement du patient, produit de contraste IRM 98-100 98-100 le plus performant, impossibilité si réanimation ETO 90-99 85-98 rapide, au lit du malade, sédation nécessaire ETT 60-80 80-95 non-invasif mais seulement racine de l'aorte IVUS 95-100 95-100 invasif, lecture difficile La disponibilité des appareils et la performance des examinateurs sont les critèpres de choix prioritaires. ETO: échocariographie transoesophagienne. ETT: échocardiographie transthoracique. IVUS: Intravascular ultra-sounds. Sources: références 48b, 124, Denault AY, ed. Transesophageal echocardiography. New-York : Informa Health, 2011, 577-8 La classification de Stanford divise les dissections en 2 groupes selon la localisation de la déchirure primaire (Figure 27.75) [39] : ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 90 Type A (70% des cas): déchirure dans l’aorte ascendante, dissection englobant l’ascendante et pouvant se prolonger dans la crosse et la descendante; le traitement est chirurgical (remplacement de l’aorte ascendante par une prothèse tubulaire). Type B (30% des cas): déchirure située à l’isthme et dissection s’étendant dans la descendante; le traitement est médical, la chirurgie étant réservée aux cas accompagnés d’anévrysme ou d’ischémie viscérale. Figure 27.75 : les deux types de dissection selon la classification de Stanford. Type A (70% des cas) : orifice de rupture dans la partie proximale de l’aorte ascendante ; des orifices secondaires existent le plus souvent ; la dissection peut s’étendre à la crosse et à la descendante. Type B (30% des cas) : la rupture primaire est à l’isthme et la dissection s’étend distalement sur la descendante. Cette classification est basée sur l’impact chirurgical. Type A Type B Les images ETO de la dissection sont caractéristiques et souvent spectaculaires. On voit une membrane (flap) danser au sein de la lumière aortique; elle sépare la vraie lumière de la fausse [116]. Au Doppler couleur, on remarque un flux inégal dans les deux chenaux. Mais pour être utile, l’examen ETO doit préciser certains éléments. Diagnostic différentiel avec des artéfacts; la membrane a des limites claires, elle est à l’intérieur de la lumière aortique et bien visible dans au moins 2 plans orthogonaux, elle ondule et oscille avec les pulsations et sépare des flux différents au Doppler couleur (Figure 27.76), alors que les reverbérations et les side-lobes franchissent les limites anatomiques ou les flux et se meuvent indépendamment des structures (Figure 27.77). Une image linéaire intra-luminale ne peut pas être retenue comme seul critère diagnostique de dissection [48b]. Rupture primaire: située dans la partie proximale de l’aorte ascendante (dissection A) ou à l’isthme (dissection B), la déchirure est souvent visible en 2D, car elle mesure en général > 5 mm; à défaut, le Doppler couleur peut mettre en évidence un flux turbulent à cet endroit (Figure 27.78). La localisation de la (des) déchirure(s) définit le type de dissection; elle est une indication précieuse pour l’opérateur. Sites de réentrée et ruptures secondaires: pertuis de passage aller-et-retour entre la vraie et la fausse lumière, en général dans la crosse ou la descendante (Figure 27.79); le flux va de la vraie vers la fausse lumière en systole, et de la fausse vers la vraie en diastole (Figure 27.80). Distinction entre la vraie lumière et la fausse lumière; la vraie lumière s’expand en systole, son flux est plus rapide, elle est en général la plus petite; la fausse lumière présente un bas débit et souvent du contraste spontané, elle est en général plus grande et s’expand en diastole (Figure 27.81). Cette distinction est capitale pour contrôler que la canule de CEC ou ou le mandrin de l’endoprothèse soient bien dans la vraie lumière. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 91 Implantation des gros vaisseaux (artères de la gerbe, tronc coeliaque, mésentérique supérieure): il est important de définir si leur flux provient de la vraie ou de la fausse lumière, et si la dissection se prolonge à l’intérieur d’un vaisseau; ces notions sont souvent difficiles à mettre en évidence à l’ETO, qui est moins performant que l'angio-CT de ce point de vue. Insuffisance aortique (40-75% des cas): elle peut être due à un bascule de la membrane à travers la valve en diastole ou à une désinsertion partielle de cuspides (Figure 27.82). L’ETO doit en élucider le mécanisme afin de prévoir la stratégie opératoire (remplacement, plastie, resuspension, etc). Obstruction coronarienne: la membrane peut disséquer l’origine des coronaires, le plus souvent celle de la CD (Figure 27.83). Contrôle des flux périphériques: la membrane peut obstruer l’orifce des gros vaisseaux ou s’insinuer à l’intérieur et y compromettre la perfusion; au Doppler couleur, on recherche la présence de flux dans les troncs coronariens, dans les carotides (voir Figure 27.65), dans le tronc coeliaque et dans les artères médullaires (Figure 27.84) [144,174]. Dissection étendue de l’aorte descendante: recherche de grosses artères intercostales qu’il est prudent de réimplanter pour garantir la perfusion médullaire. Présence d’épanchement péricardique, d’hémopéricarde ou de tamponnade; présence d’épanchement pleural gauche (Figure 27.45). Fonction ventriculaire gauche, éventuelles altérations de la cinétique segmentaire sur ischémie coronarienne. OG OG CCVG Ao asc Ao asc Figure 27.76 : dissection A. Exemples de membrane (flap) flottant dans la lumière de l’aorte ascendante (flèches vertes). A B OG OG Ao Ao Figure 27.77 : artéfacts dans l’aorte ascendante. A: reverbération (flèche jaune). B: side-lobe (flèche rouge) à côté d’une dissection (flèche verte). Ces artéfacts se meuvent indépendamment des structures qui les contiennent et traversent les barrières anatomiques. Ils ne se présentent pas de la même manière selon différents plans de coupe, raison pour laquelle toute pathologie doit être recherchée dans deux vues orthogonales. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 92 B A C OG Ao asc VAo Figure 27.78 : dissection A. Rupture primaire dans l’aorte ascendante visible en 2D (A), dans la crosse en 2D (B) et par le flux couleur (C). VL VL FL FL Figure 27.79 : dissection aortique. Jets de réentrée entre la vraie lumière (VL) et la fausse lumière (FL) dans l’aorte descendante. FL VL Figure 27.80 : flux spectral du jet de réentrée à travers une déchirure secondaire dans l’aorte descendante. En systole, le flux va de la vraie vers la fausse lumière; en diastole, le flux correspond à une équilibration de pression entre les deux lumières, mais il prédomine de la fausse vers la vraie lumière ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 93 A B FL VL FL VL FL C Vraielumière D VL FL Fausselumière Passage vraie → fausse lumière Figure 27.81 : distinction entre la vraie (VL) et la fausse lumière (FL) dans une dissection A. A : crosse de l’aorte ; la Vmax du flux est plus élevée dans la vraie lumière (turbulences orange) que dans la fausse (flux laminaire bleu foncé). B : aorte descendante ; la FL tend à être plus grande que la VL ; la VL est pulsatile, elle s’expand en systole. C : aorte descendante ; la VL est un mince croissant situé entre 12 et 3 heures ; il existe un fort contraste spontané dans la fausse lumière ; l’orifice de réentrée est marqué par un flux tourbillonnaire . D : schéma de C. A B OG OG Aorte VAo Aorte CCVG VG CCVD Figure 17.82 : Dissection A. A : insuffisance aortique par bascule de la membrane à travers la valve aortique en diastole (flèche). B : insuffisance aortique d’origine double ; on voit une IA centrale (flèche verte) due à la noncoaptation de la valve parce que la membrane s’y introduit en diastole, et deux petites IA (flèches jaunes) dues à des ruptures de la membrane. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 94 B A C Figure 27.83 : dissection A. A: Membrane s’insérant dans la coronaire droite et la disséquant partiellement. B: flux diastolique à travers la déchirure d’une dissection A située dans la cuspide coronarienne droite. C : désinsertion de la cuspide coronaire gauche et de la cuspide non-coronaire. Figure 27.84 : contrôle du flux médullaire. En pivotant la sonde vers l’arrière, on aperçoit le canal médullaire et la moëlle épinière entre les corps vertébraux ; cette observation ne peut être faite que si les disques intervertébraux (Div) sont assez translucides, soit jusque vers 30-35 ans. En abaissant l’échelle du flux couleur à 0.2 m/s, on voit le flux dans l’artère spinale antérieure (flèche verte). Div Canal médul Moëlle Si la perfusion des viscères est assurée et que la paroi aortique résiste, la dissection peut s’installer dans la chornicité. La membrane s’épaissit et se fibrose; elle donne une image plus échodense et moins souple à l’ETO. Au Doppler couleur, il n’est pas rare de voir un flux quasi-identique dans les deux lumières (Figure 27.85). La dissection de type B est caractérisée par une déchirure initiale dans la partie proximale de l’aorte descendante (Figure 27.86). Contrairement à la dissection de type A, cette lésion n’est pas une indication chirurgicale en urgence pour autant que les viscères et la moëlle ne souffrent pas d’ischémie. Si c’est le cas, la technique première est une fénestration de la membrane par voie percutanée. Un hématome intramural peut être confondu avec une dissection dont la fausse-lumière serait thrombosée. Il se présente comme un épaississement circulaire ou en croissant de la paroi de > 5-7 mm sans flux à l'intérieur, qui a un aspect lamellé ou vacuolaire. Le traitement est chirurgical, car le risque de rupture ou de dissection est de 46% à 30 jours [137]. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 95 B A VL VL FL FL Figure 27.85 : dissection chronique dans l’aorte descendante. A : la membrane est fibrosée, épaissie et peu mobile (flèche). B : les flux sont identiques dans les deux lumières en systole. A B Figure 27.86 : dissection de type B. A : aorte descendante en court-axe ; on voit la membrane à l’origine de la déchirure. B : aorte descendante en long-axe. Cette lésion n’est pas une indication chirurgicale en urgence pour autant que les viscères et la moëlle ne souffrent pas d’ischémie. Si c’est le cas, la technique première est une fénestration de la membrane par voie percutanée. Dissection de l’aorte thoracique Membrane oscillant avec les pulsations à l’intérieur la lumière aortique, visible dans au moins 2 plans orthogonaux, et séparant des vélocités différentes au Doppler couleur Recherche des orifices et des insertions de la membrane Recherche d’IA et de flux dans les vaisseaux issus de l’aorte Vraie lumière : expansion en systole, flux systolique rapide, en général plus petite Fausse lumière : : compression en systole, flux lent, contraste spontané, en général plus grande Type A : déchirure primaire dans l’aorte ascendante Type B : déchirure primaire à l’isthme ou dans l’aorte descendante ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 96 Messages pour le chirurgien en cas de dissection aortique Dissection de type A ou B Localisation de la rupture primaire et des sites de réentrée Localisation de la vraie et de la fausse lumière sur tout le trajet de l’aorte Débit aortique dans la vraie et la fausse lumière (Vmax au flux couleur, échelle 0.5 m/s) Sites d’implantation de la membrane Extension de la dissection dans les vaisseaux et dans la valve aortique Présence d’IA et mécanisme (orifice de régurgitation, prolapsus/désinsertion, direction du jet) Taille de l’anneau aortique, des sinus de Valsalva et de la jonction sino-tubulaire Epanchement péricardique et/ou pleural, tamponnade Fonction VG, altérations de la cinétique segmentaire En début de CEC: observation du flux (cavitation) dans la vraie lumière Traumatisme aortique Une lésion de l’aorte est présente dans 0.5% des traumatismes fermés du thorax [101]. Le mécanisme est une décélération brutale survenant au moment où le volume systolique est dans l’aorte ascendante ou la crosse; le coeur étant en télésystole, son inertie est faible, alors que celle de l’aorte pleine de sang est élevée. L’aorte est projetée en avant sans que le coeur suive le mouvement. D’autre part, l’aorte ascendante et la crosse sont des structures libres, alors que l’aorte descendante est fixée à la colonne vertébrale. On comprend alors que les ruptures traumatiques surviennent à deux endroits préférentiels: La racine de l’aorte; cette lésion conduit à une tamponnade foudroyante et les patients décèdent en général sur le lieu de l’accident; L’isthme aortique; cette rupture est en général couverte par l’adventice qui est en continuité avec le tissu fibreux périvertébral; toutefois, 30% des malades décèdent dans les 6 heures et 50% à 24 heures. Par sa rapidité et sa facilité d’utilisation au déchocage, l’ETO est un instrument de choix dans le diagnostic de rupture traumatique de l’aorte. Sa sensibilité est de 60-95% et sa spécificité de 85-95% selon l’expérience de l’examinateur l’examinateur (Tableau 27.4) [107]. En effet, les images sont souvent difficiles à interpréter et les artéfacts fréquents [58,173]. De plus, la situation ne se prête pas à un examen minutieux dans un endroit calme. Hématome péri-aortique; la distance entre l’oesophage et l’aorte descendante est augmentée, alors qu’elle est normalement < 1 cm (Figure 27.87). Déchirure subadventitielle transverse se présentant comme une membrane flottant dans la lumière; la déchirure peut être fine (intima seule) ou épaisse et comprendre les couches de la média avec l’intima (Figure 27.88). Epaississement flou et asymétrique de la paroi aortique (Figure 27.87). Baisse de pulsatilité locale de l’aorte. Présence de turbulences au Doppler couleur (limite de Nyquist 0.5 m/s) (Figure 27.89). Epanchement pleural gauche. Epanchement péricardique et tamponnade en cas de déchirure de la racine aortique. Si la lésion ne dépasse pas le tiers de la circonférence et que la géométrie de la paroi est intacte, il est possible de la contenir avec une endoprothèse, ce qui est une intervention rapide et peu invasive. Si la lésion est plus importante ou que la paroi est dilatée, un remplacement tubulaire par thoracotomie s’impose. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 97 Figure 27.87 : éloignement anormal de l’aorte par rapport à l’oesophage lors d’une rupture traumatique de l’isthme de l’aorte, dont la paroi est floue, épaisse et asymétrique. A B C D E F Figure 27.88 : images 2D de rupture de l’isthme aortique. A et B : membrane épaisse perpendiculaire à l’axe de l’aorte, augmentation de la distance entre l’oesophage et l’aorte. C et D : rupture partielle de la paroi aortique. E et F : déchirure intimale en court-axe et en long-axe. Figure 27.89 : deux éléments caractéristiques d’une rupture traumatique de l’aorte. 1 : augmentation de la distance entre l’aorte et l’oesophage. 2 : turbulences localisées contre la paroi aortique au Doppler couleur (limite de Nyquist < 0.6 m/s) ; ces dernière indiquent la présence d’un obstacle au flux et d’une irrégularité de paroi. 1 2 ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 98 Traumatisme de l’aorte thoracique Lésion de l’isthme aortique - Hématome périaortique (↑ distance aorte - oesophage) - Paroi épaissie, floue, irrégulière, peu pulsatile - Membrane libre dans la lumière, déchirure intimale - Turbulences localisées au Doppler couleur (échelle 0.5 m/s) Lésion de la racine aortique (rare) - Hémopéricarde, tamponnade - Hématome périaortique - IA, bascule de cuspide(s) Endoprothèses vasculaires L’endoprothèse est un tube de Dacron armé, introduit replié autour d’un guide par voie généralement fémorale, et immobilisé en place dans l’aorte par auto-expansion ou par le gonflement d’un ballon. Pour être stable, la prothèse doit être ancrée proximalement et distalement sur du vaisseau sain; les collets d’ancrage doivent mesurer 1-2 cm de long, ne pas dépasser 4 cm de diamètre et ne pas présenter d’angle trop important l’un par rapport à l’autre. L’endoprothèse permet de ponter une lésion anévrysmale ou d’exclure une déchirure (traumatisme, dissection) (Figure 27.90) [60,69]. Endoprothèse Anévrysme A B Figure 27.90 : endoprothèse aortique. A : tube d’endoprothèse ; on voit le système d’ancrage aux deux extrémités. B : endoprothèse en court-axe dans l’aorte descendante, pontant une lésion anévrysmale. L’ETO est très utile au cours des manoeuvres de mise en place pour seconder l’opérateur [69]. Localisation de la lésion; Localisation de l’origine des gros vaisseaux; Identification de la vraie et de la fausse lumière; Guidage du mandrin dans la vraie lumière (éviter qu’il s’enroule dans un anévrysme ou s’introduise dans la fausse lumière); Appréciation de la zone d'implantation (diamètre, athéromes, coudure, etc); ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 99 Positionnement de la prothèse; Identification des endofuites; Contrôle de la disparition du flux dans la lésion exclue (limite de Nyquist 0.4 m/s), qui doit se remplir de contraste spontané ; L'ETO est performant lors d'implantation de prothèse en Dacron™ mais non en Gore-Tex™, car cette dernière substance est opaque aux ultrasons. L’endofuite est une communication entre la circulation native et la cavité exclue. On en décrit quatre types différents (Figure 27.91) [171]. I: fuite entre la prothèse et la paroi aortique au niveau du collet; II: fuite par des vaisseaux collatéraux débitant dans la lésion exclue; III: défauts dans la prothèse; IV: porosité normale de la prothèse (disparaît avec le dépôt de fibrine). Le taux d’endofuites immédiates est de 17%; il baisse à 9% à 30 jours. Figure 27.91 : endofuites caractéristiques de l’endoprothèse. A : schéma des différents types d’endofuites. 1 : fuite au niveau du collet. 2 : fuite de branches vasculaires. 3 : défauts dans la prothèse. 4 : porosité normale de la prothèse. B : image ETO d’une endofuite de type 1 située au collet, entre la prothèse et la paroi aortique. C : court-axe de la crosse montrant une endoprothèse située à ras le départ de l’artère sousclavière gauche. 1 3 4 A Endoprothèse 2 © Chassot 2010 Endoprothèse Paroi A s-clav G Ao B C Interventions chirurgicales Pour faciliter la compréhension de l’ETO postopératoire, les principaux types d’interventions chirurgicales sur l’aorte thoracique sont schématiquement représentés dans les Figures 27.92, 27.93, 27.94 et 27.95 [124]. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 100 Figure 27.92 : Interventions chirurgicales sur l’aorte thoracique. A : remplacement de l’aorte ascendante par un tube de Dacron, avec ou sans intervention sur la valve aortique (plastie ou prothèse valvulaire) ; ceci est possible si l’anneau aortique, les sinus de Valsalva et la jonction sino-tubulaire sont de tailles normales. B: opération de Bentall, ou remplacement en-bloc de la valve aortique, de la racine aortique et de l’aorte ascendante par une prothèse tubulaire comprenant une valve prothétique (biologique ou mécanique) ; les coronaires sont réimplantées dans la prothèse. A Manchon suturant le flap et la paroi distale Prothèse Aorte descendante Réimplantation coronaire A Prothèse valvulaire B © Chassot 2010 B Pseudosinus Suspension des commissures Pseudosinus Figure 27.93 : Interventions chirurgicales sur l’aorte thoracique. A : opération de Yacoub, ou resuspension de la valve aortique par la prothèse tubulaire de l’aorte ascendante dont l’extrémité proximale est découpée de manière trilobée pour épouser l’anatomie des sinus de Valsalva. B : opération de Tirone-David, ou ancrage de l’extrémité du tube prothétique au niveau de l’anneau aortique et resuspension des commissures de la valve dans la prothèse ; cette intervention diminue le risque de dilatation annulaire secondaire. Dans les deux cas, les coronaires sont réimplantée dans la prothèse. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 101 B Manchon englobant les vaisseaux de la gerbe A Reconstruction totale Prothèse Anastomose distale Anastomose proximale Prothèse Anastomose proximale Anastomose distale Figure 27.94 : Interventions chirurgicales sur l’aorte thoracique. A : prothèse de remplacement de la crosse ; les vaisseaux de la gerbe sont réimplantés dans la prothèse avec une collerette de la paroi aortique. B : reconstruction totale de la crosse et de la gerbe des 3 vaisseaux avec une prothèse trifurquée. TBC CG SCG 1 2 A B Figure 27.95 : Interventions chirurgicales sur l’aorte thoracique. A : prothèse tubulaire pour remplacer l’aorte descendante, implantée dans la coque de l’anévrysme ; une prothèse tubulaire annexe (1) permet de vasculariser 2 grosses artères intercostales ; une autre prothèse (2) alimente le tronc coeliaque et l’artère mésentérique supérieure. B : intervention hybride consistant en une longue endoprothèse dans la crosse couvrant le départ des 3 vaisseaux de la gerbe ; le tronc brachiocéphalique (TBC) et la carotide primitive gauche (CG) sont revascularisés par l’intermédiaire d’une prothèse implantée sur l’aorte ascendante. La sous-clavière gauche (SCG) n’est revascularisée que si cela s’avère nécessaire : on peut réaliser un pontage carotido-sousclavier dans un deuxième temps [69]. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 102 Cardiopathies congénitales Une cardiopathie congénitale est présente chez 0.5 – 1% des nouveau-nés, si l’on exclut la bicuspidie aortique (1-2%) et le foramen ovale perméable (24%). Chez les adultes, la prévalence est de 0.4% (dont 9% de lésions sévères) [96]. Comme environ 85% des enfants cardiopathes opérés survivent jusqu’à l’âge adulte, on peut s’attendre à ce que, dans le monde Occidental, 1 adulte sur 150 souffre d’une forme de cardiopathie congénitale [91]. Cette pathologie n’est donc pas rare, et l’anesthésiste peut la croiser aussi bien en chirurgie générale qu’en chirurgie cardiaque. Chez les adultes, on rencontre trois situations différentes. Patients non-corrigés, le plus souvent en provenance de pays peu industrialisés; Patients ayant subi une intervention palliative qui ne rétablit pas la normalité; Patients corrigés; même si l’anatomie est rétablie, le fonction cardiaque de ces malades reste altérée. Seules la CIA, la CIV simple et la coarctation opérées avant l’âge de 2 ans et jouissant d’une fonction ventriculaire normale au moment de l’intervention peuvent être considérés comme guéries. Toutes les autres pathologies laissent des séquelles plus ou moins importantes. Bien que les cardiopathies congénitales soient en général classées par leur impact sur la circulation pulmonaire (augmentée, diminuée ou inchangée), nous adopterons ici une description basée sur l’anatomo-pathologie en suivant une analyse segmentaire, parce que cette technique permet de mieux structurer l’examen échocardiographique. Nomenclature anatomique L’analyse segmentaire est un concept pratique pour l’analyse structurelle des cardiopathies congénitales. Elle repose sur une division du coeur en 3 segments (retour veineux et oreillettes, ventricules, troncs artériels) reliés entre eux par 2 jonctions (atrio-ventriculaire et ventriculo-artérielle) (Figure 27.96) [153]. La définition des chambres cardiaques est basée sur leur morphologie intrinsèque et non sur leur taille ou leur position, qui peuvent être très perturbées chez les congénitaux [29]. Cinq critères sont utilisés pour définir les structures anatomiques. Figure 27.96 : Analyse segmentaire du coeur. Celui-ci est divisé en 3 segments (auriculaire, ventriculaire et artériel) reliés entre eux par 2 jonctions (auriculo-ventriculaire et ventriculo-artérielle). Le retour veineux fait partie du segment auriculaire ; les valves auriculo-ventriculaires font partie du segment ventriculaire et les valves ventriculoartérielles du segment artériel [29]. Segment auriculaire Segment artériel Jonction auriculoventriculaire Jonction ventriculoartérielle Segment ventriculaire Situs: il peut être solitus (normal) ou inversus; il est concordant avec le status abdominal. Le situs cardiaque est défini par la position de l’OD, qui reçoit les veines sus-hépatiques (la veine cave inférieure peut manquer). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 103 Concordance ou discordance de 2 segments successifs; il y a discordance lorsque 2 segments sont dans une position relative inappropriée (transposition des gros vaisseaux, par exemple). Connections segmentaires: la jonction entre les segments sont le canal atrio-ventriculaire entre les oreillettes et les ventricules, et le conus arteriosus entre les ventricules et les gros vaisseaux. Marqueurs anatomiques: ils déterminent chaque chambre et vaisseaux et permettent de l’identifier quelle que soit sa position ou son développement; Lésions associées: chambre dysmorphique, lésion obstructive, défaut dans un septum. Pour éviter de se perdre dans la jungle des lésions congénitales, l’examen échocardiographique doit être conduit avec logique. 1 - Vue mi-oesophagienne rétrocardiaque 0° (4-cavités) pour s’orienter sur le nombre, la taille, la forme et la position des cavités; 2 - Segment auriculaire: définition du situs par la position de l’OD (chambre qui reçoit les veines sus-hépatiques et la VCI si elle existe), connexions veineuses, oreillette unique; 3 - Jonction atrio-ventriculaire: état des valves AV, chambre d’admission unique (singleinlet), surplomb (overriding); 4 - Segment ventriculaire: ventricule unique ou double, taille et position de chacun; 5 - Connexion ventriculo-artérielle: ventricule à double issue (double-outlet) ou à issue unique (single-outlet), position des chambres de chasse, état des valves, discordance ventriculoartérielle; 6 - Segment artériel: identification des gros vaisseaux, sténose, dilatation, embranchements; 7 - Présence de shunt, direction du flux, gradient de pression; 8 - Evaluation du débit et de la pression pulmonaires; 9 - Evaluation de la fonction ventriculaire droite et gauche (ventricule unique, VD systémique, dysfonction). Lors d’atrésie ou de sténose, la cavité d’aval reçoit insuffisamment de sang et devient hypoplasique, alors que celle d’amont subit une surcharge de pression et de volume, donc se dilate et s’hypertrophie. La surcharge de volume provoquée par un shunt se traduit au contraire pas une dilatation et une hypertrophie de la chambre de réception. Segment auriculaire La discordance transdiaphragmatique étant extrêmement rare et liée à des pathologies ne permettant pas la survie, le situs cardiaque est concordant avec celui de l’abdomen et peut se définir par la position de l’OD, car celle-ci est la cavité qui reçoit les veines sus-hépatiques, en général par l’intermédiaire de la veine cave inférieure (VCI), mais cette dernière peut être absente. La veine cave supérieure (VCS) peut être droite, gauche, double ou absente. Le retour veineux pulmonaire peut être anormal et ne permet pas de définir quelle oreillette est l’OG. Les appendices auriculaires ont des morphologies différentes, mais peuvent être identiques en cas d’isomérisme. L’appendice auriculaire droit est court, large et obtus; L’appendice auriculaire gauche est long et pectiné; il a une forme en doigt de gant et une connexion étroite avec l’OG; En cas d’isomérisme, les deux appendices auriculaires sont de même type (droit ou gauche). D’autres détails anatomiques permettent de reconnaître l’OD (Figure 27.97). Le côté droit du septum interauriculaire contient la fosse ovale; c’est là que se termine la membrane d’Eustache, qui a son origine à l’abouchement de la VCI et qui dirigeait le sang foetal oxygéné en provenance du placenta dans l’OG à travers le foramen ovale. La crista terminalis est un repli souvent très échogène qui court de l’origine de la VCI à celle de la VCS. Une partie de l’OD est trabéculée alors que la surface ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 104 endocavitaire de l’OG est entièrement lisse. La membrane de la fosse ovale est appliquée contre la partie musculaire du septum interauriculaire du côté de l’OG. Figure 27.97 : critères anatomiques définissant l’OD en vue bi-cave 100°. 1 : veine cave inférieure (VCI) ; à défaut de VCI, ce sont les veines sus-hépatiques (VSH) qui se drainent dans l’OD. 2 : membrane d’Eustache. 3 : fosse ovale. 4 : crista terminalis. 5 : appendice auriculaire, large et obtus. 6 : partie trabéculée. Il est capital de déterminer quelle oreillette est l’OD parce que ceci permet de définir le situs. 90-100° OG VSH VCI 1 VCS 3 2 4 OD 5 AAD 6 Dans les cas où il est difficile de déterminer quelle oreillette est de quel côté, on peut se repérer par une injection de microbulles dans une veine du membre supérieur gauche (éventuelle VCS gauche aboutissant dans le sinus coronaire), du membre supérieur droit (VCS droite) ou d’un membre inférieur (VCI). Définitions anatomiques des oreillettes Oreillette droite - Connectée à VCI / veines sus-hépatiques (définition du situs) - Présence de la fosse ovale, de la membrane d’Eustache, de la crista terminalis - Partiellement trabéculée - Appendice auriculaire large, court et obtus Oreillette gauche - Surface endocavitaire lisse - Appendice auriculaire long, en forme de doigt, pectiné Isomérisme: les deux appendices auriculaires sont de même type Jonction auriculo-ventriculaire (AV) La crux est la jonction anatomique centrale du coeur où se rejoignent le septum interauriculaire, le septum interventriculaire, la base du feuillet antérieur de la valve mitrale et celle du feuillet septal de la tricuspide. Dans une vue 4-cavités, l’anneau tricuspidien est décalé de 5 – 10 mm en position plus apicale que l’anneau mitral (Figure 27.98). Ce rapport anatomique est utile pour différencier le VD du VG. Lors de canal atrio-ventriculaire commun, par contre, les deux valves sont insérées sur le même plan. Lors de discordance AV, l’oreillette est connectée au ventricule de type contro-latéral, mais la valve auriculo-ventriculaire est celle correspondant au ventricule. Un ventricule anatomiquement droit est toujours lié à une valve tricuspide et un gauche à une valve mitrale. Lorsque les deux oreillettes sont connectées à un seul ventricule, on parle de ventricule à double entrée (double-inlet). Le terme d’overriding définit une valve AV qui s’ouvre sur les deux ventricules, et celui de straddling s’applique à la situation où l’appareil sous-valvulaire d’une valve s’insère dans les deux ventricules à travers une communication interventriculaire (Figure 27.99). La valve AV correspond au ventricule qui est connecté à plus de 50% de son ouverture. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 105 Situation normale Figure 27.98 : jonction auriculo-ventriculaire. Dans la situation normale, l’insertion septale de la valve tricuspide est dans une position plus apicale que celle de la valve mitrale. Le décalage est de l’ordre de 1 cm chez l’adulte. Les deux valves sont sur le même plan lors de canal auriculoventriculaire commun (canal AV). OD Canal AV OG VD OD VG OG VD VG 1 cm © Chassot 2011 Figure 27.99: Jonction atrioventriculaire. A: surplomb (overriding); la valve mitrale surplombe le septum, son orifice s'abouche dans les deux ventricules, mais l'appareil sous-valvulaire est du même côté. Elle est connectée au ventricule qui reçoit > 50% de sa surface. B: Straddling; l'appareil sous-valvulaire de la valve qui surplombe, en l’occurence la mitrale, est inséré des deux côtés du septum ; une partie des cordages croise la CIV. OD OD OG OG CIV CIV VD VD VG © Chassot 2011 Segment ventriculaire Un ventricule est fait de trois parties: une chambre d’admission, un corps trabéculé et une chambre de chasse. La chambre d’admission s’ouvre à > 50% de la surface d’une valve AV; en dessous de cette valeur, le ventricule est considéré comme une chambre rudimentaire hypoplasique. Si cette dernière est antérieure, elle correspond à une hypoplasie du VD; si elle est postérieure, elle correspond à une hypoplasie du VG [177]. La position, la forme et l’épaisseur de paroi ne sont pas des critères d’identification utiles pour déterminer quel ventricule est droit ou gauche. Dans les cardiopathies congénitales, on utilise d’autres données (Figure 27.100). Le VG a une forme conique avec une chambre d’admission et une chambre de chasse disposées côte-à-côte, alors que le VD a une forme en croissant enroulé autour du VD et une construction en 3 éléments (chambre d’admission, chambre apicale trabéculée et chambre chasse orientée à 60°). La valve AV est toujours connectée au ventricule correspondant; une valve mitrale est reliée à un ventricule anatomiquement gauche, et une valve tricuspide à un ventricule droit; L’insertion septale de l’anneau tricuspidien est plus apicale que celle de l’anneau mitral; ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 106 Le VG a 2 muscles papillaires de tailles égales, l’un antéro-latéral et l’autre postéro-médian; Le VD a 3 muscles papillaires, dont l’un est inséré sur le septum (ce qui n’est jamais le cas dans le VG); Les trabéculations sont plus marquées dans le VD; celui-ci possède une bande modératrice musculaire qui traverse le ventricule entre le septum et la paroi libre (elle peut manquer); La chambre de chasse du VD est un tube entièrement musculaire, alors que celle du VG est partiellement fibreuse (entre le feuillet mitral antérieur et la valve artérielle). CCVD CCVG 3 Figure 27.100 : différentiation du VD et du VG. Le VD est relié à une valve tricuspide (1) et contient 3 piliers dont un est situé sur le septum (2) ; sa chambre de chasse est entièrement musculaire (3) ; il présente une forte trabéculation (4) et en général une bande modératrice musculaire bien différenciée (5). Le VG est connecté à une valve à 2 feuillets (6) et ne contient que 2 piliers (antéro-latéral et postéro-médian) (7), dont aucun n’est implanté sur le septum ; il est faiblement trabéculé (8) et sa chambre de chasse comprend une partie fibreuse à la continuité entre la valve aortique et le feuillet antérieur de la mitrale (9). Le décalage entre les insertions septales de la tricuspide et de la mitrale (10) différencie le VD (insertion basse) du VG (insertion haute) (vue 4-cavités 0-20°) ; cet élément est perdu en cas de canal AV, puisque dans cette pathologie les deux valves sont insérées au même niveau. VD 9 VG 2 1 4 Ventricule droit Ventricule gauche 6 10 1 L V 4 7 7 2 5 8 © Chassot 2011 Définitions anatomiques des ventricules Ventricule droit - connecté à une valve AV tricuspide et bas-insérée sur le septum (sauf canal AV) - trois piliers, dont un septal - trabéculations importantes, bande modératrice - chambre de chasse entièrement musculaire Ventricule gauche - connecté à une valve AV à 2 feuillets, insérée plus haute sur le septum (sauf canal AV) - deux piliers (antéro-latéral et postéro-médian) - trabéculations fines - chambre de chasse partiellement fibreuse (liaison feuillet antérieur mitral – valve aortique) ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 107 Jonction ventriculo-artérielle Normalement, la chambre de chasse droite est antérieure par rapport à l’aorte et la croise avec un angle de 45° (Figure 101). L’artère pulmonaire se dirige ensuite postérieurement et se bifurque en deux branches. Il existe 4 possiblités différentes de jonction ventriculo-artérielle. Concordance: ventricule et artère se suivent dans l’ordre normal; Discordance: la continuation ventriculo-artérielle est inadéquate; l’aorte faite suite au VD et l’AP au VG (transposition des gros vaisseaux); Un ventricule à double issue (double-outlet) est caractérisé par le fait que > 50% des valves ventriculo-artérielles est connecté au même ventricule, qui peut être droit, gauche ou unique; Un seul tronc artériel émerge d’un ventricule unique (single-outlet, truncus arteriosus). Les valves ventriculo-artérielles (VA) peuvent être en surplomb (overriding) d’une CIV mais ne peuvent pas manifester de straddling puisqu’elles n’ont pas de cordages. La valve VA est toujours connectée au vaisseau correspondant: la valve pulmonaire à l’AP et la valve aortique à l’aorte ascendante. Ao Ao AP Ao AP AP VG VG VG VD A VD VD B C © Chassot 2010 Figure 27.101 : pathologies de la jonction ventriculo-artérielle. A : situation normale, l’aorte (Ao) et l’artère pulmonaire (AP) se croisent à 45°, l’AP étant antérieure. L’AP se reconnaît au fait qu’elle se bifurque en deux branches 4-5 cm après son origine ; l’aorte ascendante est un long tube qui ne donne aucune branche avant les vaisseaux de la crosse ; les nombreuses anomalies coronariennes ne permettent pas d’utiliser l’implantation des coronaires comme un critère définissant l’aorte. B : ventricule droit à double issue (VDDI, double-outlet right ventricle ou DORV) ; le bascule du septum, avec ou sans CIV, fait que les deux vaisseaux sont originaires du VD. C : transposition des gros vaisseaux (TGV) ; l’aorte est issue du VD et l’AP du VG ; les deux vaisseaux sont parallèles en vue long-axe 120°, les deux valves sont sur le même plan en court-axe (0-40°). Segment artériel Deux vaisseaux émergent du coeur, l’artère pulmonaire en avant et l’aorte en arrière. L’AP côtoie le côté gauche de l’aorte. En cas de transposition, les deux vaisseaux sont parallèles (Figure 27.101C). Ils apparaissent circulaires en court-axe (0°) et parallèles en long-axe (90°). Ils se distinguent entre eux par leurs embranchements. L’AP se bifurque en deux branches identiques quelques centimètres après son origine; L’aorte ne donne aucune branche avant la crosse (vaisseaux de la gerbe aortique). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 108 Les coronaires peuvent avoir des trajets aberrants et provenir de l’AP (syndrome ALPACA). Elles ne sont pas un critère anatomique fiable pour définir l’aorte. Définitions anatomiques des gros vaisseaux Aorte ascendante Vaisseau tubulaire sans branches avant la crosse Artère pulmonaire Vaisseau bifurqué en 2 branches à 4-5 cm de son origine Les coronaires ne sont pas un critère (multiples anomalies d’insertion) Défauts de septation: shunts Un défaut de continuité dans un septum en vue bidimensionnelle indique la présence d’un shunt. Toutefois, l’image 2D peut être trompeuse. Si le septum est membraneux et parallèle à l’axe des ultrasons, l’absence d’écho peut être due à une résolution spatiale insuffisante (echo dropout); S’il est dans le septum musculaire, le défaut peut être serpentigineux et ne pas se présenter comme un orifice à l’emporte-pièce. Le shunt peut également exister au niveau veineux (retour veineux pulmonaire anormal) ou artériel (canal artériel, fistule aorto-pulmonaire ou coronarienne). Un shunt est défini par 3 caractéristiques (Figure 27.102). OD OG OG OD L V L VVG VG VD A VD B © Chassot 2011 Figure 27.102. Surcharge ventriculaire en cas de shunt G→D. A : Lorsque le shunt est situé en amont des valves auriculo-ventriculaires (CIA, retour veineux pulmonaire anormal), le VD subit une surcharge de volume ; l’OD, le VD et l’AP sont dilatés ; une insuffisance tricuspidienne (IT) est fréquente. B : Lorsque le shunt est situé en aval des valves auriculo-ventriculaires (CIV, canal artériel), c’est le VG qui subit la surcharge de volume, car le volume sanguin dont il assure la propulsion lui revient après un passage transpulmonaire ; l’AP, l’OG et le VG sont dilatés ; le VD ne se dilate et ne s’hypertrophie que lorsque s’installe une hypertension pulmonaire. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 109 La direction du flux: G→D, D→G ou bidirectionnel; la direction et la vélocité du shunt dépendent du gradient de pression instantané entre la chambre d’amont et celle d’aval. La dimension du passage; un shunt restrictif, de petites dimensions, cause un ΔP important entre les cavités; sa Vmax est élevée et son flux turbulent. Un shunt non-restrictif tend à égaliser les pressions entre les deux cavités; bien que le volume sanguin soit important, la Vmax est basse et le flux laminaire. La Vmax n’est donc pas proportionnel au débit. Un shunt est caractérisé par la dilatation de sa cavité de réception; lorsqu’il est situé en amont de la valve AV, il provoque une surcharge droite (dilatation OD, VD et AP), alors qu’il cause une surcharge gauche s’il est localisé en aval de la jonction AV (dilatation AP, OG et VG). Le diagnostic est établi par la présence d’un flux couleur systolo-diastolique continu qui franchit le septum ou fait communiquer les deux vaisseaux. Lorsqu’on peut s’aligner avec la direction du flux, le Doppler pulsé ou continu renseigne sur la séquence des composantes du flux, dont la Vmax oscille entre 1 et 4 m/s (ce qui le distingue d’une flux veineux, lui aussi continu mais de Vmax < 1 m/s) (Figure 27.103). Une étude par contraste aux microbulles injectées par une voie veineuse, si possible centrale, peut être doublement utile. La composante droite-gauche du shunt occasionne un passage de microbulles dans les cavités gauches; Si le shunt est strictement gauche-droite, le sang du shunt apparaît comme un “contraste négatif” dans la cavité droite remplie de microbulles. Figure 27.103: Images spectrales de flux. A: flux artériel. B: flux de shunt; il comprend deux composantes, une systolique de vélocité élevée (1-4 m/s), et une diastolique de plus basse vélocité; entre les deux composantes, le flux ne rejoint pas la ligne de base. C: flux veineux central; il comprend aussi deux composantes, mais il rejoint la ligne de base entre les deux et sa vélocité maximale est plus basse (0.3-0.6 m/s) [30]. A 1 m/s B C 0.6 m/s 2 m/s Systole Systole Diastole S D Le flux des shunts est tributaire du gradient de pression entre les cavités, donc des conditions hémodynamiques. Seules des mesures réalisées dans des conditions de pression systémique et pulmonaire voisines de la normale permettent de déterminer l’importance réelle d’un shunt. Calcul du shunt Le rapport entre le flux pulmonaire et le flux systémique détermine l’importance du shunt. Le flux est le produit de la Vmax et de la surface du vaisseau: Q (cm3/s) = S (cm2) • Vmax (cm/s) Le volume systolique est le produit de la surface du vaisseau et de l’intégrale des vélocités: ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 110 VS (cm3) = S (cm2) • ITV (cm) Les mesures sont faites dans le tronc de l’AP (vue court-axe aorte ascendante 0°) ou dans la CCVD (vue transgatrique 40-90°), et dans la CCVG ou la valve aortique (vue transgastrique 0° ou 120°) (Figure 27.104). Le shunt est calculé par le rapport Qp/Qs ou VSp/VSs. Un Qp/Qs > 1.5 est une indication à fermer chirurgicalement le shunt G→D. A 40-60° B C 0° 120° OD VD VG Ao AP Ao A P Figure 27.104 : calcul du shunt (Qp/Qs). A : mesure du flux pulmonaire (Qp) dans la chambre de chasse droite ou dans l’AP en vue transgastrique droite 60-100°. B : mesure du flux pulmonaire dans l’AP en vue court-axe de l’aorte ascendante 0°. C : mesure du flux systémique (Qs) dans la chambre de chasse gauche ou la racine de l’aorte en vue transgastrique long-axe 120° (aussi réalisable en vue transgastrique profonde 0°). Les doubles flèches bleues indiquent la mesure du diamètre de la cavité à l’endroit où est mesuré le flux. Si l’orifice du shunt est relativement circulaire et l’axe Dopler parallèle au flux, il est possible d’en calculer le débit directement, mais cette mesure est relativement peu précise [102]. Pour une CIA, par exemple, le flux du shunt est: QCIA (cm3/s) = SCIA (cm2) • Vmaxshunt (cm/s). Chez les congénitaux, la Vmax de l’insuffisance tricuspidienne (IT) doit être utilisée avec précaution pour mesurer la PAP pour deux raisons. Les sténoses pulmonaires (CCVD, valve pulmonaire ou tronc de l’AP) sont fréquentes; dans ce cas, la PAPsyst n’est pas l’équivalent de la pression systolique du VD. En cas de CIV, la pression systolique du VD est contaminée par celle du VG; le gradient effectivement mesuré par la Vmax de l’IT serait le ΔP entre le VG et l’OD. Dans cette dernière situation, la pressions systolique du VD (PVDs) peut être calculée à partir du gradient de pression du shunt (ΔP = 4 Vmax2) et de la pression artérielle systolique (PAs): PsystVD = PAs - 4 (Vmax2)CIV La PAs n’est équivalente à la pression systolique du VG qu’en l’absence de pathologie au niveau de la CCVG et de la valve aortique. Comme pour les insuffisances valvulaires, le débit et le gradient d’un shunt est fonction des conditions hémodynamiques (pressions droite et gauche, résistances vasculaires systémiques et pulmonaires, volémie, etc). Fonction ventriculaire La fonction ventriculaire des congénitaux est rarement normale, car les ventricules travaillent dans des conditions pathologiques. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 111 Anatomie anormale: ventricule unique, ventricule à double entrée ou double issue, noncompaction; Remodelage important; hypertrophie, hypotrophie, dilatation; Surcharge de pression: sténose, VD systémique; Surcharge de volume: shunt, insuffisance valvulaire; Souffrance chronique: cyanose, hypoxémie. La fonction ventriculaire est difficile à quantifier. La fraction d’éjection (FE) n’est pas un critère fiable à cause du remodelage et des conditions de charge anormales. De plus, les approximations géométriques utilisées dans son calcul ne s’appliquent pas à ces ventricules de formes pathologiques. Les indices myocardiques sont probablement meilleurs: vélocité de l’anneau mitral ou tricuspidien (Doppler tissulaire), accélération de la contraction isovolumétrique (strain rate), dP/dt par la pente ascentionnelle de l’IM ou de l’IT. Dans l’usage courant, l’évaluation globale et le degré de dilatation sont les indices les plus utilisés. L’IRM est la meilleure technique pour évaluer les volumes et la fonction du VD [40a]. Si le rythme reste sinusal, le VD peut supporter une augmentation de postcharge de 50-60% pendant une cinquantaine d’années [175a]. Lorsqu’il s’hypertrophie, le VD ressemble de plus en plus au VG. Il devient ainsi moins sensible à la postcharge mais davantage à la précharge (courbe de Starling redressée) comparé à un VD normal. Mais lorsqu’il fonctionne comme ventricule systémique, le VD commence à défaillir en général à la fin de l’adolescence. Non seulement le VD systémique est grossièrement hypertrophié (voir Figures 27.133 et 134), mais encore sa structure se modifie: le Doppler tissulaire révèle une prédominance de contraction circulaire par rapport à la contraction longitudinale (c’est l’inverse dans un VD normal) et une absence de torsion sur le long-axe [128a]. Il contient également de plus en plus de zones fibrosées [40a]. Chez les congénitaux adultes, il est prudent de suspecter les ventricules de dysfonction jusqu’à preuve du contraire. En effet, leur anatomie et leurs conditions de charge sont trop anormales pour qu’ils puissent conserver une performance systolique inchangée au cours des années. Seules la CIA, la CIV simple et la coarctation opérées avant l’âge de 2 ans jouissant d’une fonction ventriculaire normale au moment de l’intervention conservent en général des ventricules normaux. Toutes les autres pathologies laissent des séquelles plus ou moins importantes. Hypertension pulmonaire L'hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) est définie par une pression moyenne (PAPm) supérieure à 25 mmHg au repos et à 30 mmHg à l'effort, et des RVP > 300 dynes•s•cm-5 (valeur normale : 60-80 dynes•s•cm-5) [154a]. Chez les congénitaux, sa cause la plus fréquente est un shunt gauche - droit non restrictif. Elle survient dans 50% des communications interventriculaires (CIV) et de canal atrioventriculaire, où il y a surcharge de volume et de pression, mais dans seulement 10% des communications interauriculaires (CIA), où il y a surcharge de volume uniquement [30]. Le syndrome d'Eisenmenger est le stade terminal de l’HTAP, caractérisé par une PAPmoy > 50 mmHg et des résistances vasculaires pulmonaires > 800 dynes•cm•s -5. Le flux à travers le shunt gauche - droit est alors bidirectionnel ou renversé. La correction chirurgicale n'est plus possible lorsque la rapport RVP / RVS est supérieur à 0.7 [30]. L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) est caractérisée par plusieurs aspects typiques de l’image 2D et des flux Doppler [118] : Hypertrophie du VD accompagnée d’un degré variable de dilatation ; l’épaisseur de la paroi libre est > 6 mm (mode TM, vue admission-chasse 60° ou admission TG 120°) ; l’apex du cœur est constitué par le VD. Plus l’HTAP se développe tôt, plus le degré d’HVD est sévère. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 112 Aplatissement du septum interventriculaire (le VG en court axe a une forme en "D") ; bombement dans la gauche en diastole en cas de surcharge de volume et en systole en cas de surcharge de pression (voir Figure 25.76). Dyskinésie septale : la durée d’éjection du VD étant allongée à cause de la hausse de postcharge, la systole droite se prolonge pendant le début de la relaxation du VG et fait basculer le septum interventriculaire dans le VG. Dilatation de l’AP ; le rapports de diamètres AP/aorte est > 1. Vmax de l’insuffisance tricuspidienne > 2.5 m/s ; toutefois, elle dépend de la fonction droite et de l’importance de la CIV. Pente d’accélération du flux de l’AP plus importante ; durée d’accélération < 100 ms en cas d’HTAP modérée et ≤ 70 ms en cas d’HTAP sévère (normal : > 120 ms, ou > 35% du temps éjectionnel) (voir Figure 25.53). Le rapport entre la durée d’accélération et celle du flux pulmonaire est < 0.25 lorsque la PAPm est > 40 mmHg ; le flux spectral de l’AP ressemble à celui de l’aorte. Dicrotisme du flux systolique à travers la valve pulmonaire (aspect en "M") dû à une fermeture mi-systolique partielle de celle-ci (RAP élevées). Systématique de l’examen ETO dans les cardiopathies congénitales Vues mi-oesophagiennes rétrocardiaques de 0° à 120° (4-cavités – long-axe) pour s’orienter sur le nombre, la taille, la forme et la position des cavités Segment auriculaire: position de l’OD (chambre qui reçoit VCI et veines sus-hépatiques, définition du situs), connexions veineuses, CIA, oreillette unique Jonction atrio-ventriculaire: état des valves AV, décalage des insertions septales mitrale & tricuspide, surplomb (overriding), discordance auriculo-ventriculaire Segment ventriculaire: ventricule unique (chambre accessoire hypoplasique) ou double, taille et position du VD et du VG (définitions anatomiques), CIV Connexion ventriculo-artérielle: ventricule à double issue ou à issue unique, position des chambres de chasse, sténose CCVD & CCVG, état des valves, discordance ventriculo-artérielle Segment artériel: identification des gros vaisseaux, sténose, dilatation, embranchements Présence de shunt, direction du flux, gradient de pression, dilatation des chambres de réception - shunt en amont des valves AV: surcharge droite - shunt en aval des valves AV: surcharge gauche Retour veineux et oreillettes Retours veineux anormaux Une veine cave supérieure gauche (VCSG) est présente dans 0.1% de la population générale et chez 10% des enfants souffrant de cardiopathie congénitale [162]. La VCSG se draine en général dans le sinus coronaire qui est, de ce fait, très dilaté (taille normale: 1 cm). En vue 4-cavités, la VCSG apparaît en court-axe contre la paroi latérale de l’OG, entre la veine pulmonaire supérieure gauche et l’appendice auriculaire (Figure 27.105). Une injection de microbulles dans une veine du membre supérieur gauche confirme le passage dans l’OD par le sinus coronaire. La veine cave supérieure droite peut être présente ou absente [23]. En l’absence de veine cave inférieure (VCI), le sang sous-diaphragmatique se draine dans la VCS par la veine azygos qui est très dilatée et se voit sur le côté droit de la colonne vertébrale, parallèle à l’aorte descendante. Dans ce cas, les veines sus-hépatiques se drainent ensemble ou séparément directement dans l’OD. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 113 A Figure 27.105 : veine cave supérieure gauche (VCSG). A : dilatation du sinus coronaire (SC) (≥ 1.5 cm). B : vue court-axe de la VCSG qui apparaît entre la veine pulmonaire supérieure gauche (VPSG) et l’appendice auriculaire gauche (AAG). C: injection de microbulles dans une veine du membre supérieur gauche ; elles apparaissent dans le sinus coronaire avant d’arriver dans l’OD. D : vue court-axe de la VCSG (flèche) en vue court-axe de l’aorte ascendante 0° [30]. VPSG B OD OG OG OD SC AAG Ao CCVD VD VG © Chassot 2010 C D CS OG AAG OD VD Le retour veineux pulmonaire anormal total peut prendre plusieurs formes, supra-, intra- ou infracardiaque selon le mode de drainage dans l’OD (Figure 27.106); c’est un shunt G→D total qui cause une surcharge de volume pour le VD. La survie n’est possible que s’il exsite une CIA pour assurer un mélange des deux circulations au niveau auriculaire. Cette forme complète ne se rencontre que chez le nouveau-né; elle est corrigée chirurgicalement dans les premiers jours de vie. Chez l’adulte, on rencontre la forme partielle, dans laquelle une ou deux veines pulmonaires, en général droites, se drainent dans le système veineux cave supérieur ou directement dans l’OD (Figure 27.107); l’association avec une CIA de type sinus venosus est fréquente (voir ci-dessous CIA). Les cavités droites sont dilatées par la surcharge de volume. L’examen ETO doit s’attacher à mettre en évidence les 4 veines pulmonaires (voir Figures 25.48) et leur éventuelle confluence dans un collecteur rétroauriculaire relié à l’OD, dans le sinus coronaire ou dans la veine cave. Après correction chirurgicale et anastomose veineuse, le flux veineux central, qu’il soit systémique ou pulmonaire, doit présenter sa morphologie habituelle: Composante systolique (S); Composante diastolique (D); Eventuel reflux lors de la contraction auriculaire (Ar); Retour du flux à la ligne de base entre les cycles cardiaques; Retour du flux proche de la ligne de base entre les composantes S et D; Vmax 0.3 – 0.8 m/s. La Vmax de la VCI se mesure près de la jonction de celle-ci avec l’OD, en vue bicave 100° profonde; celle de la VCS ne peut se mesurer que dans la vue transgastrique droite à 60-100° (voir Figure ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 114 27.57). Les signes d’une restriction sur l’anastomose imposent une révision chirurgicale. Ce sont [172]: Vmax > 1.5 m/s; ΔP ≥ 10 mmHg; Non-retour à la ligne de base entre les cycles cardiaques (flux continu); Flux peu pulsatile et faibles oscillations S et D. A Figure 27.106 : Schéma du retour veineux pulmonaire anormal total. A : type supracardiaque, drainage dans la veine inominée (VI) par une veine verticale (VV). B : type cardiaque, drainage par le sinus coronaire (SC). C : type infracardiaque, transdiaphragmatique dans la veine porte (VP) par une veine descendante (VD). D: type mixte. Dans les trois premiers cas, un collecteur postérieur (CP) draine le sang veineux des deux poumons dans un système situé en arrière des oreillettes et visible en vue 4cavités en arrière de l’OG (image donnant l’impression de 3 oreillettes). B VCS VCS VI VV CP CP CIA SC C D VCS VCS CP OD VD CIA VP © Chassot 2010 Cor triatriatum Il arrive qu’une membrane fibro-musculaire cloisonne l’OG en deux parties, l’une postérieure recevant les veines pulmonaires et l’autre antérieure communiquant avec la valve mitrale et l’appendice auriculaire (Figure 27.108). La taille de l’orifice laissé par cette membrane détermine la clinique; lorsqu’il est étroit, la symptomatologie est celle d’une sténose mitrale. Le Doppler couleur démontre alors un flux turbulent et le Doppler spectral une image de Vmax élevée suivie d’une décélération lente. L’orifice est souvent excentré. La même pathologie peut exister dans l’OD; la membrane y est fixée entre la valve tricuspide et le sinus coronaire, ce qui engendre une dilatation de ce dernier. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 115 APD OGP OGA VCS VPSD VG Figure 27.107: retour veineux pulmonaire anormal partiel. La veine pulmonaire supérieure droite (VPSD) se jette dans la veine cave supérieure (VCS) juste au dessus de son abouchement dans l’OD. APD: artère pulmonaire droite (vue courtaxe de l’aorte ascendante 0° avec rotation horaire de la sonde). Figure 27.108 : cor triatriatum. Une membrane (flèche) sépare l’OG en deux cavités, l’une postérieure (OGP) qui reçoit les veines pulmonaires, et l’autre antérieure (OGA) connectée à l’appendice auriculaire et à la valve mitrale. L’implantation de cette membrane est au niveau de la membrane de la fosse ovale sur le septum et au niveau de la crête située entre la veine pulmonaire supérieure gauche et l’appendice auriculaire gauche. Communication interauriculaire (CIA) La CIA est la cardiopathie congénitale la plus fréquente après la bicuspidie aortique; elle représente 7% de toutes les lésions congénitales et 30% de celles que l’on rencontre chez l’adulte [21]. Le septum interauriculaire peut présenter 4 types de lésions (Figure 27.109). FOP A B Sinus venosus Ostium secundum Ostium primum Sinus venosus © Chassot 2010 Sinus coronaire Valve tricuspide Figure 27.109 Vue du septum interauriculaire depuis l'OD. A: emplacement des différentes possibilités anatomiques de communications interauriculaires [29]. B : mage ETO tridimensionnelle d’une CIA de type ostium secundum, située au milieu du septum interauriculaire ; la valve tricuspide se trouve à la droite de l’image. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 116 Ostium secundum: défect situé au niveau de la fosse ovale, le plus fréquent (69% des CIA) ; Ostium primum: orifice jouxtant l’anneau tricuspidien; il fait partie du canal atrio-ventriculaire commun (canal AV) (15% des cas); Sinus venosus: orifice situé à la racine de la VCS ou de la VCI, souvent associé à un retour veineux anormal (10% des cas); CIA du sinus coronaire (très rare): défaut du toit du sinus coronaire qui crée une communication OG-OD. Le foramen ovale perméable (FOP, voir ci-dessous) n’est pas à proprement parler une cardiopathie mais une variation anatomique. Figure 27.110 : communications interauriculaires (CIA). A : CIA de type ostium secundum, située au milieu de la fosse ovale. B : CIA de type ostium primum dans le cadre d’un canal AV ; l’aspect ourlé du feuillet septal de la tricuspide indique la fermeture spontanée d’une CIV sousjacente. C : CIA de type sinus venosus supérieur, située à l’abouchement de la veine cave supérieure (VCS). D : dilatation de l’artère pulmonaire, dont le diamètre mesuré en diastole est presque le double de celui de l’aorte ascendante. A B OG OD VG VD C D Ao AP ll est en général facile de voir le défect (diamètre 0.5 – 3.0 cm) dans le septum en imagerie bidimensionnelle (vue 4-cavités 0° et vue bicave 100°), en balayant de haut en bas (Figure 27.110): l’ostium secundum se trouve au milieu du septum et l’ostium secundum au niveau du feuillet septal de la tricuspide; le sinus venosus supérieur se voit en retirant la sonde jusqu’au niveau de l’abouchement de la VCS dans l’OD et le sinus venosus inférieur en l’enfonçant jusqu’au niveau du diaphragme [149]. Les bords de l’orifice sont en général francs sauf dans les fénestrations du septum où il existe une série de petites CIA de type secundum. La surcharge de volume de la CIA occasionne une dilatation des cavités droites proportionnelle à la taille du shunt (Figure 27.102A) [111] : Dilatation de l’OD; Dilatation et hypertrophie du VD; la dilatation de l’anneau tricuspidien provoque une IT; Dilatation de l’AP, dont le diamètre est supérieur à celui de l’aorte ascendante en vue courtaxe de celle-ci (0°). L’analyse du flux Doppler est essentielle pour confirmer la présence du shunt (Figure 27.111). Le Doppler couleur est très sensible (limite de Nyquist 0.3 m/s) et fait la différence entre une CIA et un simple artéfact du à un défaut de résolution spatiale (parallélisme du septum et de l’axe Doppler). Il se peut que le flux cave puisse être confondu avec celui d’une CIA, surtout lorsqu’une membrane ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 117 d’Eustache induit des turbulences dans l’OD. L’enregistrement spectral optimal est réalisé en plaçant la fenêtre du Doppler pulsé juste distalement à la CIA en vue 4-cavités 0° ou bicave 100°, ou dans n’importe quelle vue intermédiaire dans laquelle l’axe des ultrasons est perpendiculaire au septum interauriculaire. La Vmax du flux est de 0.5 à 1.5 m/s (ΔP OG-OD: 2-10 mmHg). Une Vmax > 2 m/s indique un shunt très restrictif et une POG élevée. La surcharge de volume droite accélère le sang à travers la tricuspide, la CCVD et l’AP; le rapport normal entre les vélocités droites et gauches, qui est de 0.6, est plus que doublé (Vmax AP ≥ 1.2 m/s). OG Figure 27.111 : flux Doppler couleur à travers une petite CIA située au milieu de la membrane de la fosse ovale ; le shunt est G→D. L’échelle de couleur est de 0.5 m/s. OD L’allure cyclique du flux spectral est caractéristique de la CIA (Figure 27.112). Elle est liée aux variations de POG et de POD durant le cycle cardiaque et à la variation de la pression intrathoracique avec la respiration [71,86,88]. A Flux G→D télésystolique et protodiastolique, correspondant à l’onde “v”; Flux G→D pendant la contraction auriculaire, correspondant à l’onde “a”; Bref flux D→G en protosystole, correspondant à la descente “x”; Bref flux D→G en mi-diastole, correspondant à la descente “y”; Accentuation des composantes G→D en inspirium spontané; Accentuation des composantes D→G lors de l’inspirium en ventilation en pression positive ou en cas de PEEP. B Figure 27.112 : Représentations spectrales du flux à travers une CIA. A : le shunt est à large prédominance gauche - droit (flux en dessous de la ligne de base, s'éloignant du capteur situé dans l'oesophage), avec deux composantes (flèches rouges); il présente aussi deux petites composantes droite - gauche au-dessus de la ligne de base (flèches bleues). B : représentation des courbes de pression de l'OG (rouge) et de l'OD (jaune) [71, 86, 88]. Les variations de pression sont plus amples à gauche. De ce fait, la POG est plus élevée que la POD lors des pics de pression, mais plus basse lors de nadirs de pression. Le flux sera donc gauche - droit pendant les ondes a et v (flèches rouges), mais droite - gauche pendant les descentes x et y (flèches bleues). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 118 Le flux de la CIA est majoritairement G→D, sauf en cas d’hypertension pulmonaire majeure. La composante D→G la plus marquée a lieu en protosystole, lorsque la descente de l’anneau mitral accroît brusquement le volume de l’OG et y abaisse la pression. L’injection de NaCl sous pression, mais sans microbulles, démontre le léger passage D→G qui existe habituellement à travers la CIA; le risque d’embolisation paradoxale est donc important; l’anesthésiste doit scrupuleusement veiller à l’absence de bulles dans les voies veineuses. Le gradient de pression entre les oreillettes est modifié par la compliance respective des ventricules, par la capacitance veineuse systémique et pulmonaire et par la présence d’insuffisance au niveau des valves atrio-ventriculaires. Le flux D→G augmente lorsque la POD est supérieure à la POG, ce qui arrive dans deux circonstances: Chute brusque de la pression intrathoracique (inspirium spontané, manoeuvre de Mueller); le remplissage de l’OD est augmenté alors que celui de l’OG est diminué (VOD > VOG); Augmentation de la postcharge du VD (manoeuvre de Valsalva, IPPV, PEEP, hypertension pulmonaire); la pression augmente dans l’OD parce qu’elle augmente dans le VD (POD > POG). La PEEP peut occasionnellement provoquer un passage D→G suffisant pour que le patient se cyanose (Figure 27.113). En cas d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) secondaire à la surcharge de volume chronique de la CIA, le shunt peut devenir bidirectionnel et le malade cyanotique. A B C Figure 27.113 : effet de la PEEP sur le flux d’une CIA. A : flux en apnée ; les composantes G - D sont amplement dominantes, le reflux D - G est minime. B : flux en ventilation en pression positive ; la Vmax des composantes G - D diminue avec l’augmentation de la postcharge du VD. C : flux en IPPV avec une PEEP à 10 cm H2O ; non seulement les composantes G - D sont encore plus diminuées, mais les composantes D - G sont considérablement augmentées, particulièrement le flux D - G qui a lieu pendant la protosystole (descente de l’anneau mitral) [30]. Communication interauriculaire (CIA) Quatre types: ostium secundum, ostium primum, sinus venosus, ouverture du sinus coronaire Défaut dans le septum en vues 4-cavités 0° et bicave 100° Dilatation de l’OD, du VD (surcharge de volume) et de l’AP Flux à 2 composantes - shunt G→D dominant, synchrone avec les ondes “a” et “v” (Vmax 0.5 – 1.5 m/s) - shunt D→G mineur, synchrone avec les descentes “x” et “y” - la composante D→G augmente avec la postcharge du VD (Valsalva, PEEP) Insuffisance tricuspidienne fréquente (calcul PAPs) Rechercher canal AV (ostium primum) et retour des veines pulmonaires (sinus venosus) ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 119 L’indication à la fermeture de la CIA est la dilatation du VD et un débit pulmonaire supérieur à 1.5 fois le débit systémique (Qp/Qs ≥ 1.5:1) [10a,22,178]. Une réparation chirurgicale en CEC s’impose dans les très grands ostium secundum et dans les autres formes de CIA, mais les orifices de taille moyenne situés au centre du septum peuvent être obturés par un système d’occlusion percutané moins invasif. La condition pour le succès de cette technique est la présence d’une bordure de septum musculaire assez importante pour assurer l’ancrage de l’appareil sur tout le pourtour de la lésion [10a]. Après une correction chirurgicale de CIA ou de FOP, on peut retrouver un shunt persistant au flux couleur. S’il ne s’agit que de minuscules flammèches situées au niveau des sutures, le shunt résiduel est considéré comme négligeable; il disparaîtra en règle générale avec la protamine, le dépôt de fibrine et l’endothélialisation. Par contre, un shunt présentant un flux couleur de diamètre ≥ 2 mm est prohibitif, et commande une révision chirurgicale immédiate [29]. Si l’analyse de la saturation en O2 dans les veines caves et dans l’AP révèle un enrichissement dans l’OD > 20%, la reprise est formellement indiquée. Foramen ovale perméable (FOP) L’incidence de FOP est de 24-27% lorsque l’orifice est recherché à l’autopsie au moyen d’une aiguille boutonnée, mais de 5-17% à l’examen ETO de routine [78,147]. Elle est de 20-40% chez les patients ayant eu un accident vasculaire cérébral [167]; le FOP est un prédicteur indépendant majeur de l’infarctus cérébral silencieux (OR 34.9) [35]. Normalement, la membrane de la fosse ovale fusionne avec le septum interauricuaire musculaire dans sa partie distale, mais on peut rencontrer deux situations pathologiques. Lorsque la membrane ne fait que s’accoler, seul le jeu des pressions maintien l’orifice fermé; le FOP se rouvre dès que la POD est supérieure à la POG (embolie pulmonaire, BPCO, toux, par exemple); il occasionne alors un shunt D→G cyanogène. Le FOP peut laisser un orifice béant sur la bordure apicale de la fosse ovale; le shunt G→D est alors permanent, et peut se renverser en shunt D→G en cas de surpression dans l’OD (Valsalva, toux, etc). Le FOP est souvent associé à un anévrysme du septum interauriculaire (42% des cas), défini par un débattememnt > 1.5 cm au cours du cycle cardiaque en normovolémie [4]. La découverte d’un anévrysme du septum doit toujours faire rechercher la présence d’un FOP, d’autant plus qu’il y a une nette association entre l’anévrysme et l’embolie paradoxale [44]. La perméabilité du FOP est démontrée par le flux couleur en vue 4-cavités 0° ou bicave 100°. Dans la deuxième vue, on aperçoit le recouvrement partiel entre la membrane de la fosse ovale et la paroi du septum; le flux du shunt courre obliquement dans cet interstice. Pour avoir suffisamment de sensibilité dans la détection, il est recommandé d’abaisser la limite de Nyquist à 0.3 m/s (Figure 27.114). Le test aux microbulles consiste à injecter 10 mL de NaCl 0.9% dans lesquels on a préalablement provoqué une cavitation en faisant faire des allers-retours au liquide entre deux seringues reliées par un robinet 3-voies. L’injection se fait rapidement, si possible par une voie centrale. Le test comprend 2 phases [113,161]. Surpression endothoracique (manoeuvre de Valsalva, PEEP > 15 cm H2 O); le NaCl agité est injecté sous pression; le shunt D→G est forcé par l’augmentation de POD secondaire à l’accroissement de la postcharge du VD. Dépression endothoracique (relâchement du Valsalva, déconnexion du circuit respiratoire); cette manoeuvre suit immédiatement l’apparition des microbulles dans l’OD et éventuellement dans l’OG; le shunt D→G est forcé par l’augmentation du volume de l’OD et la baisse de celui de l’OG puisque la chute de la pression intrathoracique augmente de le retour à l’OD mais freine celui vers l’OG. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 120 Les microbulles apparaissent immédiatement dans l’OG; si elles n’arrivent que 3-5 cycles cardiaques plus tard, elles sont le fruit d’un passage transpulmonaire. Pour bien les voir, il est recommandé de visualiser la partie haute de l’OG ansi que la CCVG ou la racine de l’aorte (pour contrôler leur passage). Le test est positif si > 5 bulles sont visibles rapidement dans l’OG. La présence d’un flux couleur signale l’existence d’un shunt G→D, et celle de microbulles dans l’OD la possibilité d’un shunt D→G. Il se peut parfaitement que le test aux microbulles soit négatif alors que le flux couleur indique la présence d’un FOP si la POG reste largement supérieure à la POD en permanence (insuffisance ventriculaire gauche, par exemple). Membrane du septum Microbulles dans l'OD Passage dans l'OG CCVG A B Figure 27.114 : foramen ovale perméable (FOP). A : passage spontané de flux G - D à travers le FOP ; le flux se faufile entre la membrane de la fosse ovale et la partie fibro-musculaire du septum interauriculaire antérieur ; l’échelle de couleur est de 0.3-0.5 m/s. B : test aux microbulles ; dès leur arrivée dans l’OD, de nombreuses microbulles passent dans l’OG lorsque la postcharge du VD augmente (manoeuvre de Valsalva, PEEP) ou lorsque le volume de l’OD est supérieur à celui de l’OG (manoeuvre de Mueller, déconnexion respiratoire) [29,30]. Foramen ovale perméable (FOP) Prévalence 15 – 25% Exploration systématique (vues 4-cavités 0° et bicave 100°, échelle couleur 0.3 m/s) Association avec l’anévrysme du septum interauriculaire Décollement de la membrane de la fosse ovale (flux tangentiel au septum) Passage G→D (flux couleur) Passage D→G (test aux microbulles) La découverte peropératoire d’un FOP ne signifie pas automatiquement sa fermeture, car celle-ci est associée à un taux de séquelles neurologiques postopératoires plus que doublé (OR 2.47) par rapport à la non-fermeture, sans offrir de bénéfice dans la survie [78]. En général, on ne ferme en passant que le FOP des patients jeunes ayant présenté un accident neurologique ou une embolie systémique dans leur anamnèse [178]. Deux autres circonstances peuvent être une indication à la fermeture du FOP. La présence d’un anévrysme du septum chez les personnes à risque de surpression dans l’OD (BPCO, par exemple) ou d’embolies paradoxales (plongeurs professionnels); Les opérations qui abaissent les conditions de charge du VG et baissent la POG, rendant ainsi possible un passage D-G jusque-là exclus (remplacement valvulaire mitral ou aortique). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 121 Jonction auriculo-ventriculaire Canal AV Un défaut dans la septation centrale du coeur conduit à une malformation complexe, la canal atrioventriculaire ou canal AV (endocardial cushion defect) qui comprend (Figure 27.115) : Une CIA de type ostium primum; Une CIV au niveau de la chambre d’admission, s’étendant antérieurement au septum membraneux; Une valve atrio-ventriculaire commune à 5 feuillets; cette malformation correspond à un orifice central à la base du feuillet septal de la tricuspide et du feuillet antérieur de la mitrale qui y forment une fente (cleft); Une déformation en "col-de-cygne" de la CCVG, due à la position de l’anneau mitral trop apicale par rapport à l’anneau aortique. Figure 27.115. Canal AV complet avec CIA, CIV et fente médiane dans les feuillets septaux de la tricuspide et de la mitrale ; les flèches représentent les différents shunts simultanés [29]. IM par la fente mitrale CIA ostium primum Fente centrale dans les feuillets septaux des valves tricuspide et mitrale CIV membraneuse © Chassot 2010 Cette malformation, dont il existe des formes incomplètes, est fréquente chez les trisomiques 21; elle peut être associée à la tétralogie de Fallot, à une sténose pulmonaire, à un retour veineux pulmonaire anormal ou au ventricule droit à double issue. L’insertion du feuillet septal de la tricuspide et du feuillet antérieur de la mitrale apparaissent au même niveau dans le long axe du coeur en vue 4-cavités, ce qui est pathognomonique de cette pathologie (Figure 27.98 et 27.116A). L’aorte est positionnée plus antérieurement que normalement; la CCVG est allongée et déformée en col de cygne, ce qui la rend sujette à des sténoses. Le flux couleur est complexe et peut prendre différentes configurations selon les gradients de pression en systole et en diastole : Shunt entre l’OG et l’OD ou entre le VG et le VD; Shunt oblique entre le VG et l’OD (défaut de Gerbode); Régurgitation tricuspidienne et/ou mitrale à travers la fente (Figure 27.116C et D); ces fuites sont localisées à coté du septum; cette position juxta-septale les différencie d’une fuite d’IT ou d’IM à la commissure de la valve. Selon les variantes anatomiques, on rencontre une surcharge de volume et/ou de pression qui prédomine sur le VG ou le VD. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 122 Dans le canal AV partiel, où il n’y a pas de CIV, la surcharge de volume prédomine sur le VD; l’OD et l’AP sont dilatées; Une IT ou une IM majeure dilatent l’OD et le VD ou l’OG et le VG, respectivement; Une CIV dominante dilate le VG et l’AP; Lorsqu’elle est large, la CIV provoque une hypertension pulmonaire et secondairement une hypertrophie du VD (surcharge de pression). Figure 27.116 : vues 4-cavités de canal AV. A : les 2 flèches indiquent la présence d’une CIA de type ostium primum et d’une CIV contiguë ; les deux valves mitrale et tricuspide sont sur le même plan. B : CIA ostium primum isolée dans un canal AV partiel. C : régurgitation mitrale par la commissure anatomique (IM) et par une fente (cleft) de canal AV (flèche). D : fuite tricuspidienne (IT) et fuite mitrale par une fente (flèche). Les fuites issues des fentes se reconnaissent à leur position accolée au septum interauriculaire. A B C D IM IM IT La correction chirurgicale du canal AV consiste à fermer la CIA et la CIV avec des patches et à corriger les fuites tricuspidienne et mitrale. Elle a lieu dans les 6 premiers mois de vie pour éviter l’hypertrophie ventriculaire et l’hypertension pulmonaire [178]. L’examen ETO après la CEC doit rechercher particulièrement: Fuite résiduelle au niveau de la CIA et/ou de la CIV; IT et/ou IM résiduelle après plastie des fentes, éventuelle sténose; Nouvelle IT et/ou IM par la commissure physiologique due à une rétraction du feuillet septal de la tricuspide ou antérieur de la mitrale par la correction chirurgicale; Obstruction dynamique de la CCVG. Le matériel prosthétique utilisé pour les patches crée une importante zone d’ombre distale qui masque l’OD et le VD en vues rétrocardiaques. Des vues transgastriques en court-axe et en long-axe sont alors nécessaires pour identifier le flux couleur turbulent dans les cavités droites. La présence d’un PISA sur la face gauche du septum signe une CIV résiduelle importante. Les causes de réopération les plus fréquentes sont l’obstruction musculaire sous-aortique et l’insuffisance mitrale, raison pour laquelle il est important de bien quantifier toute IM résiduelle postopératoire [91]. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 123 Canal AV Défaut de septation centrale du coeur Association partielle ou complète de: CIA (ostium primum) + CIV (chambre d’admission) + fente mitrale + fente tricuspide Insertion des feuillets septal tricuspidien et antérieur mitral au même niveau sur le septum Shunt G→D complexe (CIA + CIV + passages obliques) Surcharge VD: volume (CIA) et/ou pression si hypertension pulmonaire (CIV) Surcharge VG: volume (CIV) Risque de sténose dynamique de la CCVG Maladie d’Ebstein La maladie d’Ebstein est caractérisée par un déplacement apical de l’insertion des feuillets septal et postérieur de la tricuspide (Figure 27.117 et 27.118). La distance entre l’insertion du feuillets antérieur de la valve mitrale et du feuillet septal de la tricuspide est > 1.5 cm (0.8 cm/m2) [10a,44]. Le feuillet antérieur de la tricuspide est très grand, redondant, et flotte librement dans la cavité [152]. Cette bas-insertion de la valve tricuspide s’accompagne d’un raccourcissement et d’une fibrose de l’appareil sous-valvulaire. Alors que la cavité ventriculaire droite est très restrictive, l’OD est très agrandie; la chambre d’admission du VD se retrouve dans l’OD (atrialisation du VD). La tricuspide déformée présente une régurgitation ou une sténose. L’importance de l’IT est facilement sous-estimée parce que sa taille est faible par rapport à l’immense OD et parce que sa Vmax est basse en cas de dysfonction du VD [175a]. Une CIA est présente dans 80% des cas. L’examen ETO s’attache à décrire certains éléments qui modifient la stratégie chirurgicale (plastie versus RVT). Figure 27.117 : maladie d’Ebstein. Les feuillets septal et postérieur de la tricuspide sont bas insérés (> 1.5 cm en dessous de l’insertion de la valve mitrale), alors que le feuillet antérieur (violet) est en position normale ; la chambre d’admission du VD se retrouve dans l’OD (flèches vertes). L’OD est très dilatée, le VD est très restrictif. Le rapport entre la longueur de l’atrialisation du VD (flèches vertes) et celle de la cavité fonctionnelle du VD (flèche bleue) doit être > 0.5 pour permettre une plastie valvulaire. OD OG VG VD © Chassot 2010 Mobilité des feuillets tricuspidiens, particulièrement du feuillet antérieur, car celui-ci devient le principal élément de la valve après la correction chirurgicale (valve monocuspide); Quantification de la fuite ou de la sténose tricuspidienne; Taille de l’OD (dilatation si diamètre > 6 cm); ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 124 Taille et fonction du VD; un rapport entre la longueur atrialisée et celle de la cavité du VD > 0.4 est un prédicteur de mauvaise fonction ventriculaire (Figure 27.117); Présence de shunt (CIA, FOP); Les éléments favorables à la reconstruction sont un feuillet antérieur ample, long et mobile, une absence d’insertions musculaires directes des feuillets, une fonction VD conservée et une seul jet de régurgitation central; Si le VD est trop petit, on peut compléter l’opération par une anastomose cavo-pulmonaire entre la VCS et l’artère pulmonaire droite (shunt de Glenn). A B OG OD VD Figure 27.118 : maladie d’Ebstein (vues 4-cavités basses). A : bas-insertion du feuillet septal (flèche verte) et du feuillet postérieur (flèche rouge) de la valve tricuspide. La double flèche jaune indique la longueur de l’atrialisation du VD. B : flux couleur démontrant une insuffisance tricuspidienne massive [29]. Après la correction chirurgicale, on évalue la fonction droite, la présence d’une IT résiduelle et le gradient antérograde à travers la tricuspide. Le gradient maximal acceptable est 5 mmHg; un ΔPmax > 5 mmHg signe une restriction, mais un ΔPmoyen > 5 mmHg signe une sténose. Lésions congénitales de la valve mitrale La sténose congénitale de la valve mitrale est une hypoplasie des feuillets et de l’appareil sousvalvulaire qui conduit à une valve restrictive et épaissie dont l’orifice fonctionnel est petit et souvent décentré. Dans la valve mitrale en parachute, tous les cordages s’insèrent sur le même pilier, unique et central; la valve est en général sténotique, avec ou sans régurgitation associée. On peut rencontrer des fentes mitrales isolées donnant une fuite située en-dehors de la commissure. Après réparation, il est important d’exclure toute fuite majeure, mais la décision de reprise chirurgicale doit se fonder sur le mécanisme de la régurgitation, sur la faisabilité de la plastie et sur le status hémodynamique du patient; on est en général plus tolérant avec les fuites résiduelles sur les valves malformées que lors des plasties sur des valves anatomiquement normales [13]. Pathologies ventriculaires Communication interventriculaire (CIV) Le septum interventriculaire possède une forme en croissant assez complexe et normalement convexe dans le VD. Il est essentiellement musculaire, sauf une petite portion membraneuse dans sa partie ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 125 supérieure, située sous les cuspides aortiques non-coronaire et coronarienne droite. La CIV peut survenir en 4 endroits différents, par ordre de fréquence (Figure 27.119). Figure 27.119. Schéma représentant les différentes communications interventriculaires (CIV). Les CIV basales (septum membraneux, canal AV et infundibulaire ou supracristale) sont situées près de la chambre de chasse du VD ; leur flux court-circuite la cavité du VG (flèche violette). Cidessous, schéma du septum interventriculaire [29]. Membraneux AP Ao Septum membraneux Infundibulaire Infundibulaire Canal AV Admission Trablculairemusculaire Valve tricuspide Musculaire © Chassot 2010 CIV membraneuse ou périmenbraneuse; la plus fréquente chez l’adulte, elle peut se fermer spontanément par accolement d’une redondance du feuillet septal de la tricuspide, qui donne des images d’irrégularités, voir d’anévrysme (Figure 27.120); sa proximité avec la tricuspide et la valve aortique induit fréquemment des insuffisances de ces deux valves. CIV de la chambre d’admission; elle fait partie du canal AV et apparaît entre les feuillets de la tricuspide et de la mitrale, qui sont sur le même plan (Figure 27.121); elle peut également se fermer par accolement d’une redondance du feuillet septal de la tricuspide. CIV supracristale; elle se situe juste sous la valve pulmonaire et la valve aortique; elle fait communiquer les 2 chambres de chasse; elle est souvent associée à une insuffisance aortique par bascule de la cuspide droite (Figure 27.122); le risque d’aggravation de l’IA est une indication à opérer tôt cette CIV même si elle est de petite taille. CIV musculaire; rarement à l’emporte-pièce, elle est souvent serpentigineuse dans les trabéculations ou multiple (swiss-cheese septum) (Figure 27.123); elle est la plus fréquente chez le petit enfant et n’est pas associée à des lésions valvulaires; le tiers d’entre elles se ferme spontanément. La CIV représente 25% des cardiopathies congénitales de l’enfant, mais 10% de celles de l’adulte parce 40% des CIV se ferment spontanément, essentiellement les CIV membraneuses et musculaires [127]. Chez l’adulte, la CIV se répartit cliniquement en 4 groupes de patients. CIV fermées spontanément ou corrigées dans la petite enfance, sans séquelles; Petites CIV avec un shunt restrictif, sans hypertension pulmonaire; CIV avec shunt et HTAP modérée; CIV importante avec HTAP sévère et syndrome d’Eisenmenger. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 126 B A OG OD VG VD Figure 27.120 : CIV membraneuse en vues 4-cavités 0°. A : orifice bien visible là où devrait se trouver la partie membraneuse du septum interventriculaire. B : CIV en voie de fermeture par un accolement du feuillet septal de la valve tricuspide. OG OG OD CIV CCVG VG Ao VD CCVD Figure 27.121 : CIV de la chambre d’admission (canal AV) située sous la valve tricuspide, dans la partie proximale du septum interventriculaire. L’insertion septale de la mitrale et de la tricuspide est au même niveau. Figure 27.122 : CIV supracristale en vue 5cavités 0°. Le flux Doppler couleur permet de localiser l’orifice qui communique entre les deux chambres de chasse ; il est situé sous la cuspide coronarienne droite de la valve aortique. B A OG OD VG VG VD VD Figure 27.123 : CIV musculaire. A : vue 4-cavités basse d’une CIV située dans le corps du septum interventriculaire. Cette image à l’emporte-pièce est peu fréquente ; souvent les CIV musculaires serpentent dans les trabéculations et ont un parcours difficile à suivre ; de plus, elles peuvent être multiples (swiss-cheese septum). B : flux couleur à travers une CIV musculaire dans une vue transgastrique. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 127 Contrairement aux CIA qui se voient facilement en vues bidimensionnelles mi-oesophagiennes, les CIV ne se présentent souvent pas comme des solutions de continuité bien apparentes, et sont visibles dans des plans différents selon leur type. CIV membraneuse ou périmenbraneuse: située près de la tricuspide, sous la valve aortique; se voit en 4-cavités et 5-cavités 0°, admission-chasse du VD 60°, long-axe 120°; CIV de la chambre d’admission: située sous la tricuspide en vue 4-cavités; l’insertion septale de la mitrale et celle de la tricuspide sont sur le même plan; CIV supracristale: située sous la valve aortique et la valve pulmonaire; bien visible au niveau de la CCVD à 60° ou en vue 5-cavités à 0°; CIV musculaire: pas toujours décelable en 2D, à rechercher en 4-cavités 0-30° et court-axe transgastrique 0°. Il faut donc explorer sous de nombreux angles pour mettre en évidence l’orifice, en se guidant du flux couleur qui présente 3 caractéristiques (Figure 27.124): PISA du côté ventriculaire gauche; sa taille est proportionnelle au volume de sang shunté, mais il est absent en cas de très large CIV non-restrictive et de faible gradient de pression entre les ventricules (HTAP sévère); Flux systolo-diastolique traversant le septum; dans les petites CIV, le flux peut n’être visible qu’en protosystole; Turbulences suspendues dans la cavité du VD, en général mieux visibles en diastole. Vmax PISA VG VD Systole Diastole Figure 27.124 : caractéristiques du flux d’une CIV. Au Doppler couleur, on voit un PISA en amont de l’orifice, du côté ventriculaire gauche, et des tourbillons au sein de la cavité du VD ; on peut suivre le flux à travers la CIV. Au Doppler spectral, l’image est celle d’un flux systolo-diastolique à prédominance systolique. La vélocité du flux est fonction du gradient de pression entre le VD et le VG ; elle va diminuer au fur et à mesure que s’installe une hypertension pulmonaire et une décompensation droite. Le flux diastolique peut s’inverser (D - G) en cas de défaillance droite, la Ptd devenant plus haute à droite qu’à gauche. La trace pointillée est celle d’un flux de CIV musculaire, dont le conduit est obstrué momentanément par la contraction myocardique en systole. Les CIV musculaires sont souvent antéro-apicales et se voient mieux en vues transgastriques profondes (0°, 90° et 120°) qu’en vue mi-oesophagiennes. Souvent, elles serpentent entre les trabéculations et n’apparaissent que rarement comme des orifices à l’emporte-pièce. Le flux couleur y est souvent interrompu en systole par la contraction du myocarde. Les CIV se voient en général mieux en vues longitudinales (admission-chasse du VD 60°, 2-cavités 90°, long-axe 120°) qu’en vue 4-cavités 0°. Les vues longitudinales sont également plus ou moins parallèles à l’axe du flux; elles permettent d’en afficher l’image spectrale et d’en calculer la Vmax. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 128 Celle-ci est fonction du gradient de pression entre les 2 ventricules. En systole, elle est élevée (3-4 m/s) dans les CIV restrictives mais basse (< 2.5 m/s) dans les larges CIV qui égalisent les pressions; elle est faible en cas d’hypertension pulmonaire sévère. En diastole, la Vmax est faible; en cas de surcharge droite, le flux peut s’inverser (shunt D→G) si la pression diastolique du VD est supérieure à celle du VG. Avec l’équation de Bernoulli, il est possible de calculer la pression systolique (Ps) du VD en soustrayant le ΔPCIV calculé (ΔP = 4 Vmax2CIV) de la pression artérielle systémique (PAsyst), qui représente la pression systolique du VG : PsVD = PAsyst - ΔPCIV La chambre de réception commune à toutes les CIV est l’artère pulmonaire, qui est dilatée. Le flux pulmonaire excessif provoque une surcharge de volume pour le VG, qui subit une hypertrophie dilatative (voir Figure 27.102). Comme la majorité des CIV congénitales est située près de la CCVD, le sang shunté est éjecté par le VG directement dans l’AP en court-circuitant la cavité du VD; seules les CIV musculaires augmentent le volume du VD. Celui-ci ne subit une surcharge de pression que lorsque s’installe l’hypertension pulmonaire. La CIV périmembraneuse et le canal AV peuvent donner lieu à un surplomb d’une valve atrio-ventriculaire (overriding) ou à une insertion croisée de cordages (straddling); ces phénomènes ont une importance capitale pour la stratégie chirurgicale. Communication interventriculaire (CIV) Quatre types: - CIV membraneuse (haut du septum, entre valves tricuspide et aortique) - CIV de la chambre d’asmission (canal AV, sous la valve tricuspide) - CIV supracristale (sous la valve aortique, IA) - CIV musculaire (orifice franc ou chenal serpentigineux, multiple) - Fermeture spontanée dans 30-40% des cas Défaut dans le septum à rechercher en vues 4-cavités, 5-cavités, long-axe VD 60° et VG 120°, + vues transgastriques (CIV musculaires) Surcharge de volume pour le VG, dilatation AP, OG et VG Surcharge de pression pour le VD si hypertension pulmonaire Flux systolo-diastolique G→D (Vmax 1-4 m/s selon ΔP entre VG et VD) - PISA côté VG + passage trans-septal + turbulences dans VD - CIV restrictive: volume shunté faible, Vmax élevée - CIV large: volume shunté élevé, Vmax basse, égalisation des pressions VG - VD Calcul PAPs: PsVD = PAsyst - (4 Vmax2CIV) Après correction chirurgicale, il subsiste souvent de petites fuites résiduelles qui disparaissent progressivement avec le dépôt de fibrine et l’endothélialisation du patch. Un orifice de > 2 mm et la présence d’un PISA côté ventriculaire gauche, par contre, traduisent un passage excessif qui doit être fermé lors d’une reprise chirurgicale immédiate. Les turbulences dans la cavité du VD sont souvent mal visibles cause de l’échogénicité du patch, et n’apparaissent qu’en vues transgastriques. Un flux turbulent dans la CCVD peut être du à une surcharge de volume par la CIV résiduelle mais aussi à une obstruction dynamique de la chambre de chasse. Le patch pouvant exercer une traction sur la tricuspide (CIV membraneuse) ou la cuspide aortique droite (CIV supracristale), il est important de rechercher méticuleusement la présence et le mécanisme d’une IT et d’une IA. Il faut également rechercher une petite CIV accessoire, une sténose de la CCVD, une IM ou une IP qui auraient été masquées par la présence de la CIV et qui n’apparaissent qu’après la correction. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 129 Hypoplasie ventriculaire Plusieurs pathologies contribuent à la situation dans laquelle un seul ventricule est fonctionnel (ventricule unique), l’autre étant réduit à une chambre accessoire hypoplasique (Figure 27.125). Si elle est antérieure, la chambre accessoire correspond anatomiquement à un VD ; si elle est postérieure, elle correspond à un VG (Figure 27.126). La valve AV du ventricule hypoplasique est parfois atrétique, mais le ventricule unique (VU) reçoit souvent le sang de deux valves AV fonctionnelles (double-inlet ventricle). Le VU éjecte le volume systolique de sang mêlé dans l’aorte et dans l’AP, directement (double-outlet ventricle) ou par le truchement d’une CIV. L’enfant est évidemment cyanosé. Le syndrome du ventricule unique peut être divisé en trois entités [22,23] : Atrésie tricuspidienne et hypoplasie du VD (Figure 27.126A) ; le flux pulmonaire dépend du degré d’hypoplasie de la valve et de l’artère pulmonaires, et de la présence d’un canal artériel perméable. Hypoplasie du cœur gauche ((Figure 27.126B); quel que soit le degré d’involution des valves mitrale et aortique, le VG et l’aorte ascendante sont toujours hypoplasiques ; le flux systémique dépend du canal artériel, qui déverse dans l’aorte descendante et la crosse du sang en provenance de l’AP. Coexistence de plusieurs lésions (très large CIV, straddling massif) rendant une septation impossible, même s’il existe deux ventricules distincts et fonctionnels. Figure 27.125 : atrésie tricuspidienne. La valve tricuspide est remplacée par une membrane fibro-musculaire (flèche verte), le VD est hypoplasique et communique avec le VG par une petite CIV (flèche bleue). Le VG est l’unique ventricule fonctionnel (VU) ; il reçoit du sang venant de l’OG par la valve mitrale et communique avec l’aorte et l’AP (ventricule à double issue). L’OG collecte le sang oxygéné des veines pulmonaires et le sang systémique désaturé en provenance des veines caves et de l’OD, qui se draine par une large CIA. Ao AP OG OD VD VU © Chassot 2010 Le but de la chirurgie est de rétablir un rapport Qp/Qs voisin de 1:1, d’assurer un débit systémique satisfaisant, et d’établir des conditions qui permettent la baisse des RAP. Selon que le flux pulmonaire est insuffisant ou excessif, on pratique en premier lieu un shunt systémique-pulmonaire (BlalockTaussig) pour l’augmenter ou un rétrécissement de l’artère pulmonaire (banding) pour le diminuer. L’atrésie tricuspidienne avec hypoplasie du VD (Figure 27.125) est la 3ème cardiopathie congénitale cyanogène dans la période néonatale après la tétralogie de Fallot (TdF) et la transposition des gros vaisseaux (TGV). Dans cette pathologie, l’OD, qui est dilatée, ne communique pas avec le VD, qui est hypoplasique ; la tricuspide est remplacée par une bande fibreuse épaisse. Le sang veineux central s’écoule dans l’OG par une CIA (voir Figure 27.129A). Le cœur gauche est surchargé, car il doit ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 130 propulser le volume systolique de la circulation systémique et celui de la circulation pulmonaire (Figure 27.127). Dans un tiers des cas, les gros vaisseaux sont transposés. A B Figure 27.126 : hypoplasies ventriculaires. A : hypoplasie du VD (atrésie tricuspidienne) ; le VD apparaît comme une chambre accessoire antérieure ; le ventricule unique (VU) est anatomiquement le VG. B : hypoplasie du coeur gauche ; le VG est une petite chambre accessoire postérieure, le VU étant anatomiquement le VD, connecté à une valve tricuspide et une OD. L’OD reçoit le sang systémique par les veines caves, et le sang veineux pulmonaire par une CIA [29]. A Figure 27.127. Atrésie tricuspidienne et hypoplasie du VD. A : situation anatomique et flux sanguins. B: correction par anastomose de Glenn entre la veine cave supérieure (VCS) et l’artère pulmonaire droite (APD) et par conduit de Fontan (CF) entre la veine cave inférieure (VCI) et l’APD. Le tronc proximal de l’artère pulmonaire (AP) est ligaturé. B VCS APD AP CF VCI © CCV, CHUV © CCV, CHUV Hypoplasie ventriculaire Malformation comprenant: - ventricule unique (VU) propulsant le sang dans l’AP et l’aorte - chambre accessoire antérieure (VD) ou postérieure (VG) - CIV Hypoplasie du VD: atrésie tricuspidienne et CIA (retour veineux → CIA → OG → VU) Hypoplasie du coeur gauche: hypoplasie VG + mitrale + aorte (flux systémique par canal artériel depuis l’AP, retour veineux pulmonaire → CIA → OD → VU) ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 131 La dénomination d’hypoplasie du cœur gauche recouvre un ensemble de pathologies qui sont plus ou moins l’inverse de la précédente : le VG est petit et non-fonctionnel, un degré variable d’hypoplasie ou une atrésie franche caractérisent la valve mitrale, la valve aortique, l’aorte ascendante et la crosse ; cette dernière peut même être interrompue. Les retours veineux systémique et pulmonaire se mêlent dans l’OD ; le VD alimente la circulation pulmonaire et la circulation systémique par l’intermédiaire du canal artériel (Figure 27.128). Dès que le débit de ce dernier diminue, le flux systémique s’effondre et le bébé décède en 3-5 jours. A © CCV, CHUV B C © CCV, CHUV © CCV, CHUV Figure 27.128. Hypoplasie du cœur gauche. A : situation anatomique. Le VG est petit et non-fonctionnel, les retours veineux se mélangent dans l’OD par une CIA ; tout le flux passe dans le VD, d’où il est propulsé dans l’AP ; un canal artériel assure la perfusion systémique depuis l’AP. B : palliation de Norwood (stade I). Elle consiste en : plastie d’élargissement de l’arc aortique, anastomose entre l’AP proximale et l’aorte, fermeture de l’AP distale, et création d’un shunt de Blalock-Taussig distal (sous-clavière droite - APD). C : Norwwod modifié selon Sano. Un conduit entre le VD et l’AP remplace le shunt de Blalock-Taussig. Comme le nouveau-né dépend du canal artériel (CA) pour la perfusion pulmonaire (atrésie tricuspidienne ou pulmonaire) ou pour la perfusion systémique (hypoplasie du cœur gauche, hypoplasie/interruption de l’arc aortique), l’administration continue de prostaglandine dès la naissance permet de maintenir le CA ouvert jusqu’à une intervention chirurgicale. Le cœur univentriculaire ne pouvant pas être séparé en deux unités fonctionnelles, on est contraint à des interventions palliatives. La procédure de Norwood comprend deux étapes. o La première étape a lieu la première semaine de vie et consiste en : septectomie interauriculaire, plastie d’élargissement de l’arc aortique, anastomose entre l’AP proximale et l’aorte (opération de Damus-Kaye-Stansel), fermeture de l’AP distale et création d’un shunt de Blalock-Taussig distal (voir Figure 27.143). La circulation systémique dépend du ventricule unique, mais non plus du CA ; l’interruption du tronc de l’AP fait dépendre le flux pulmonaire d’un shunt distal dont le faible diamètre est le garant d’une PAP basse (Figure 27.128B et Figure 27.128C). o La deuxième étape a lieu entre 3 et 6 mois ; le shunt de Blalock-Taussig est lié, et remplacé par une anastomose de Glenn bidirectionnelle (VCS→APD) ; le retour veineux qui dépend de la VCS court-circuite alors le VD, ce qui diminue sa surcharge de volume. La procédure de Giessen est une intervention extracardiaque hybride comprenant : 1) rétrécissement (banding) bilatéral de l’AP, puis 2) septectomie interauriculaire (Rashkind) et stenting du canal artériel par cathétérisme percutané. Entre 3 et 6 mois, on reconstruit une néoaorte et on établit une connexion cavo-pulmonaire bidirectionnelle (Glenn). Ce procédé permet d’éviter les effets délétères de la CEC chez le nouveau-né et de pratiquer les 2 étapes du Norwood en un seul temps. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 132 L’opération de Fontan, intervention définitive pour alimenter l’AP avec du sang veineux systémique, a lieu plus tard dans l’enfance. Elle comprend différentes techniques chirurgicales permettant de déverser le retour veineux directement dans l’AP : anastomose termino-latérale de la VCS dans l’AP droite (opération de Glenn), anastomose OD-AP, conduit cavopulmonaire externe ou intra-auriculaire. Circulation de Fontan Comme les enfants souffrant d’hypoplasie ventriculaire ne survivent pas, on ne rencontre chez l’adulte que des patients ayant subi une correction ou une palliation chirurgicale dans l’enfance, mais ces interventions imposent une physiologie particulière. L’exemple le plus frappant est la circulation de Fontan, qui consiste à dérouter le retour veineux systémique directement dans l’AP en court-circuitant le VD, de manière à limiter la cyanose et à décharger le VD. Il existe de nombreuses techniques chirurgicales pour réaliser un Fontan (Figure 27.129). Anastomose termino-latérale de la VCS dans l’AP droite (opération de Glenn, souvent utilisée comme premier temps chez l’enfant dont la moitié du retour veineux provient de la VCS) ; Anastomose OD-AP (abandonnée à cause du risque de stase, de thrombose et d’arythmie) ; Conduit cavo-pulmonaire externe ou intra-auriculaire, accompagné ou non d’une fenestration dans l’OD. A B VCS OG A o A P Ao OD APD AP VD VU O D VU OD VCI © Chassot 2010 © Chassot 2010 Figure 27.129 : atrésie tricuspidienne et sa palliation selon Fontan. A : le sang veineux passe de l’OD dans l’OG par une CIA, puisque le passage par la tricuspide n’existe pas ; le VD est hypoplasique. Dans l’OG, le sang veineux se mélange au sang artérialisé. Ce mélange est expulsé par le ventricule unique (VU, anatomiquement gauche) dans l’AP et dans l’aorte (ventricule à double issue). B : procédure de Fontan. Le shunt de Glenn est une anastomose de la VCS à l'artère pulmonaire droite (APD). Un conduit achemine le sang de la veine cave inférieure (VCI) dans l’artère pulmonaire (AP) ; il est souvent fenestré dans l’OD pour éviter une surcharge. L'hémodynamique est caractérisée par un flux pulmonaire entièrement passif, dont le débit n’est assuré que par la pression veineuse centrale ; celle-ci doit donc rester élevée (≥ 15 mmHg). Les conditions de fonctionnement sont un lit pulmonaire adéquat, des RAP basses (< 2 unités Wood), une valve mitrale compétente, un ventricule systémique ayant une bonne fonction (PtdVG < 12 mmHg) et un rythme sinusal. Le gradient de pression entre la PVC et la POG doit rester > 10 mmHg [10a,47]. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 133 Le flux à travers un Fontan ou une anastomose cavo-pulmonaire présente un aspect biphasique comme un flux veineux central : composante S et composante D (Vmax 0.4 – 0.8 m/s), retour à la ligne de base entre les cycles cardiaques ; le flux dans l’AP a la même allure. Une Vmax élevée (> 1.5 m/s) ou un flux continu ne rejoignant pas la ligne de base cycliquement sont typiques d’une obstruction [163]. Un flux de va-et-vient dans une veine pulmonaire suggère une absence d’apport dans l’artère pulmonaire correspondante. Le flux dans un Fontan est très dépendant de la respiration. Il est accéléré pendant un inspirium spontané, mais freiné ou renversé pendant un inspirium en pression positive (Figure 27.130). Lors de bas débit du Fontan, on voit apparaître du contraste spontané et des thrombus dans le circuit droit, notamment dans l’OD (Figure 27.131) [56]. Figure 27.130 : Enregistrement Doppler spectral du flux dans un circuit de Fontan. A: flux pulmonaire normal dans une circulation de Fontan ; le flux est de type veineux central, avec une composante systolique et une composante diastolique clairement séparées et pulsatiles. La Vmax est normale pour une veine centrale (< 0.8 m/s). B: en IPPV, le flux est interrompu pendant chaque inspirium en pression positive du ventilateur. C: en respiration spontanée, le flux subit au contraire une accélération considérable pendant l'inspirium, lorsque la pression intrathoracique s'abaisse en dessous de la pression atmosphérique. En B et C, le flux est enregistré par voie transgastrique, raison pour laquelle le flux est en dessous de la ligne de base (il s'éloigne du capteur en allant de la VCI vers l'AP) [29,30]. A B C Thrombus Figure 27.131 : Dilatation massive de l'OD en cas de Fontan par anastomose de l'OD à l'AP. Le débit très lent dans la cavité a donné naissance à un très grand thrombus. L’anastomose directe OD –AP est une technique abandonnée à cause du risque thrombogène et arythmique. AP Aorte VG L’ETO est nécessaire à la conduite de l’anesthésie lors de Fontan, aussi bien en chirurgie cardiaque que lors d’opération non-cardiaques. Adaptation de la ventilation pour maintenir le meilleur flux antérograde dans le circuit pulmonaire ; Gestion de la volémie et de la fonction ventriculaire ; ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 134 Après CEC, contrôle du flux dans le Fontan et l’AP ; Recherche de lésions résiduelles (IM, sténose aortique ou subaortique, sténose dynamique de la CCVG) qui sont particulièrement mal tolérées lors de Fontan. Circulation de Fontan Reroutage du retour veineux systémique directement dans l’AP (court-circuit du VD) - Anastomose de Glenn (VCS → APD) - Conduit VCI → AP (± fenestration dans OD) - Anastomose OD → AP (abandonné) Flux AP dépend de PVC (ΔP min OD-OG: 10 mmHg) - Flux systolo-diastolique de type veineux central (Vmax 0.4 – 0.8 m/s) - Flux dépend de Pit (↑ en inspirium spontané, ↓ en inspirium IPPV) - Flux continu + Vmax ≥ 1.5 m/s: sténose significative Tétralogie de Fallot La tétralogie de Fallot (TdF) représente 8% des cardiopathies de l’enfant ; elle est la 3ème par ordre de fréquence chez l’adulte ; elle est la plus fréquente des cardiopathies cyanogènes. Son origine est le sous-développement de l'infundibulum droit; la bande pariétale embryonnaire est mal alignée et déviée, résultant en une obstruction de la chambre de chasse droite (CCVD) et en une large CIV sousaortique [6]. La malformation associe quatre anomalies (Figures 27.132, 27.133 et 27.134). Ao AP Figure 27.132 : Schéma de la tétralogie de Fallot. La valve aortique est à cheval sur une large CIV. Le VD est hypertrophié, même si sa cavité n'est pas visible dans son plus grand diamètre dans ce plan de coupe. La valve et l'artère pulmonaire sont sténosées. Ao OD OG Aorte à cheval CIV VG VD Sténose pulmonaire HVD © Chassot 2010 ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 135 CIV sous-aortique; Aorte à cheval sur les deux ventricules ; la valve aortique est grande ; elle est compétente chez les enfants mais tend à fuir chez les adultes ; Sténose de la CCVD et de la valve pulmonaire, restrictive et hypoplasique, accompagnée d’un sous-développement plus ou moins important de l’artère pulmonaire ; la sténose a une composante dynamique (sténose musculaire de la CCVD) et une composante fixe (hypoplasie de l’anneau et de l’artère pulmonaire) ; Hypertrophie compensatrice du VD à cause de la postcharge élevée. A B OG OD VG VAo VAo VG VD VD Figure 27.133 : images d’une tétralogie de Fallot. A: vue 5-cavités à 0° de l'aorte s'ouvrant à cheval sur les deux ventricules ; la flèche indique la CIV; la valve aortique reçoit du sang du VG et du VD; ce dernier est hypertrophié. B : vue long-axe à 120° de la racine aortique ; la valve surplombe la CIV (flèche) ; la paroi du VD mesure > 1.2 cm d’épaisseur et ses trabéculations sont hypertrophiées [29]. A B OG AP VAo CCVG VD Figure 27.134 : images long-axe 100-120° d’une tétralogie de Fallot. A: sténose musculaire pulmonaire dans la chambre de chasse droite ; diamètre 4.4 mm (flèche) ; la valve et l’artère pulmonaires sont hypoplasique. B : atrésie de la valve pulmonaire, qui ne présente qu’un orifice minuscule (flèche) suivi d’une artère pulmonaire hypoplasique et tubulaire [29]. Il arrive qu'une CIA complète les lésions; on parle alors de pentalogie. L’arc aortique est droit dans 25% des cas. Dans 20% des cas, une malformation coronarienne amène un vaisseau à croiser la face antérieure de la CCVD, ce qui complique la chirurgie [22]. Les indices d’une anomalie coronarienne que l’on recherche à l’ETO sont une très grande coronaire droite, une coronaire visible dans la CCVD, la présence d’un seul ostium coronarien ou une seule coronaire divisée en 3 branches. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 136 Le développement spontané de collatérales aorto-pulmonaires au cours de la croissance permet à certains enfants porteurs de TdF de se développer normalement grâce à un flux pulmonaire fourni par ces shunts G→D. On rencontre des adultes non-opérés qui ont un débit pulmonaire conservé parce que leur sténose pulmonaire est modeste ou parce que leur réseau collatéral aorto-pulmonaire est très développé. D’une manière générale, toutes les pathologies cyanogènes accompagnées d’un bas débit pulmonaire développent des collatérales aorto-pulmonaires compensatrices ; celles-ci fournissent un certain débit pulmonaire mais représentent une fuite systolo-diastolique depuis l’aorte thoracique dans un circuit à basse pression (la PAP est basse puisque le débit pulmonaire est faible). Le débit de ces collatérales est fonction du ΔP entre l’aorte et l’AP : Il augmente si la PA systémique augmente (vasconstriction) ou si la PAP baisse (hyperventilation, alcalose) ; Il baisse en cas de vasodilatation systémique ou d’hypoventilation (acidose respiratoire). Il existe un éventail de lésions voisines de celles de la tétralogie. On rencontre un certain degré de sténose pulmonaire chez 10% de tous les congénitaux [6,22]. Leur anatomie est voisine de celle d'un Fallot, mais sans CIV ni déplacement de l'aorte; ils ne sont pas cyanosés au repos. On parle parfois dans ces cas de Fallot rose. A l’autre bout du spectre, l’atrésie pulmonaire complète induit une cyanose profonde. Dans les vues mi-oesophagiennes, la valve aortique frappe par sa grande dimension et sa position à cheval sur la CIV membraneuse, qui est située entre la cuspide droite et la cuspide non-coronaire (Figure 27.133). Elle est compétente chez l'enfant, mais fuit souvent à partir de l'adolescence. Le sang des deux ventricules passe dans l’aorte sans qu’il y ait de vrai shunt G→D. La CCVD est bien visible en vue admission-chasse du VD 60° et par rotation horaire de la sonde en vue long-axe 120° (Figure 27.134). Le Doppler couleur démontre un flux turbulent et sténosé dans la voie droite à 3 niveaux : Sténose dynamique ou fixe (membrane) dans la CCVD ; Sténose de la valve pulmonaire, parfois bicuspide ou atrétique ; Sténose du tronc pulmonaire (atrésie ou membrane). La Vmax (environ 3-4 m/s, ΔP 35-60 mmHg) présente un pic protosystolique dans les sténoses fixes et télésystolique dans les sténoses dynamiques. Elle s’enregistre dans le tronc de l’AP en vue court-axe de l’aorte ascendante (0°) et dans la CCVD ou la valve pulmonaire en vue transgastrique droite profonde à 40-90°. Les collatérales aorto-pulmonaires apparaissent comme des vaisseaux médiastinaux postérieurs avec un flux turbulent continu systolo-diastolique ; on peut parfois en suivre le trajet entre l’aorte et l’artère pulmonaire. Ces collatérales sont à rechercher systématiquement chez les cyanosés, car elles peuvent opérer un vol important et causer une hypotension réfractaire en cas d’hyperentilation ou une impossibilité de maintenir la PA systémique en cas de CEC. Leur présence justifie une hypoventilation et l’adjonction de CO2 dans le circuit respiratoire pour induire une vasoconstriction pulmonaire. La correction chirurgicale consiste en un patch sur la CIV et en un élargissement par patch ou un remplacement par un conduit de la voie d’éjection droite (Figure 27.135). Le patch d’élargissement est un compromis entre une valve pulmonaire étanche mais avec une sténose résiduelle et une absence de sténose mais une insuffisance pulmonaire. A long terme, on recherche les complications suivantes. CIV résiduelle (10-20% des cas) ; Insuffisance ventriculaire droite par surcharge de volume ou de pression; Sténose résiduelle du conduit pulmonaire ou de la CCVD ; un rapport de pression VD:VG > 0.6 est mal toléré à long terme ; le VD s’hypertrophie puis défaille; Insuffisance de la valve pulmonaire (IP); le degré de l'IP postopératoire est le facteur pronostique le plus important pour la fonction ventriculaire droite ultérieure; ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 137 Dilatation du VD (IP sévère); au-delà de 150 mL/m2, le ventricule ne peut plus récupérer une taille ni une fonction normale, malgré la correction chirurgicale; l’incidence d’arythmies est liée au degré de dilatation du VD [175a]. Figure 27.135 : Correction chirurgicale d’une tétralogie de Fallot. Le patch de la CIV divise les flux en dirigeant le sang veineux systémique vers l’AP et le sang artérialisé vers l’aorte ; un patch d’élargissement lève la sténose pulmonaire et souspulmonaire. La flèche indique la possibilité d’un conduit valvé entre le VD et l’AP lorsque le patch n’est pas réalisable. Ao AP Ao OD OG VG VD Patch d’élargissement Patch sur CIV © Chassot 2010 OG AP CCVD A B Figure 27.136 : insuffisance pulmonaire massive plusieurs années après une correction de tétralogie de Fallot. A : vue long-axe de la chambre de chasse droite (CCVD) et de la racine de l’artère pulmonaire (AP). La valve pulmonaire est inexistante, le reflux diastolique occupe tout le diamètre du conduit et ne présente pas de turbulence car les pressions s’égalisent de suite entre l’AP et le VD en diastole. B : flux dans la racine de l’AP ; le reflux diastolique est massif (flèche). La surface sous la courbe et l’intégrale des vélocités (ITV) de la composante diastolique sont plus grandes que celles de la composante systolique ; toutefois, le volume systolique est le produit de l’ITV et de la surface de section du vaisseau ; comme l’AP est dilatée en systole et diminue de taille en diastole à cause de sa pulsatilité, ce produit reste plus grand en systole qu’en diastole [29]. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 138 La Vmax de la voie pulmonaire ou du conduit est recherchée en vues transgastriques. Normalement, le gradient à travers la voie droite devrait être ≤ 20 mmHg. Lors de correction de TdF, toutefois, l’hypertrophie ventriculaire droite permet de tolérer des gradients de 20-35 mmHg (Vmax 2.5-3.0 m/s), mais une Vmax > 3 m/s et un ΔP > 40 mmHg sont excessifs ; ils correspondent à une sténose résiduelle. Le ΔPmax peut surestimer la sténose réelle en cas d’IP importante (volume systolique élevé) ou de sténose tubulaire de l’artère pulmonaire [10a,176]. Lorsque la sténose est organique et bien identifiée, une révision chirurgicale immédiate s’impose, mais une sténose dynamique de la CCVD est plus difficile à évaluer car elle a de fortes chances de régresser après équilibration des conditions de charge et du tonus sympathique. Un certain degré d’insuffisance pulmonaire est habituel ; il est bénin s’il est de degré ≤ II. Mais à long terme, une IP modérée-à-sévère est le facteur aggravant les plus important pour la dysfonction droite et les arythmies (Figure 27.136). Il se peut qu’une fistule coronarienne avec le VD ne devienne visible qu’après l’opération, lorsque la pression s’abaisse dans le ventricule. Tétralogie de Fallot La TdF comprend quatre malformations - CIV membraneuse - aorte à cheval - sténose pulmonaire (CCVD, valve, artère pulmonaire) - hypertrophie ventriculaire droite (HVD) La sténose de la voie droite peut être dynamique (hypertrophie CCVD) ou statique (valve, membrane, AP). La Vmax y est 3-4 m/s et le ΔP 35-60 mmHg. Collatérales aorto-pulmonaires (conduits avec flux systolo-diastolique dans médiastin postérieur) Recherche de CIA (pentalogie), anomalies coronariennes, malposition aortique Vues long-axe VD 60° et VG 120° : CIV + flux, aorte à cheval (recherche d’IA chez adulte) Vues transgastriques droites 40-90° : flux CCVD + AP Vues long-axe AP (court-axe aorte ascendante 0°, court-axe crosse 90°): flux AP post-sténotique Séquelles de la chirurgie (patch CIV, élargissement CCVD-AP ou conduit valvé VD → AP) - Sténose AP résiduelle: HVD concentrique (surcharge pression) - Insuffisance pulmonaire: dilatation VD (surcharge volume) Ventricule droit à double issue (VDDI) Lors de VDDI, l’AP et l’aorte sont connectées au VD, soit directement, soit parce que l’aorte surplombe une CIV et bascule sur la droite (Figure 27.101B). Habituellement, l’AP et l’aorte sont situées sur le même plan et présentent chacune un cône musculaire sous la valve ; les deux valves sont sur le même plan en vue transverse. L’AP est sténotique dans la moitié des cas ; une grande CIV est presque toujours présente dans le septum trabéculé. Le VDDI est fréquemment associé à d’autres malformations (canal AV, retour veineux pulmonaire anormal, atrésie mitrale). La correction consiste en un patch sur la CIV qui redirige le sang vers l’aorte et en un élargissement de la sténose pulmonaire (ou un conduit VD-AP). L’ETO contrôle l’étanchéité du patch, la fonction des valves AV et des valves ventriculo-artérielles, et l’absence de sténose de la CCVG. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 139 Jonction ventriculo-artérielle Sténose sous-valvulaire aortique Une obstruction de la chambre de chasse est une composante fréquente des cardiopathies congénitales complexes. La sténose de la CCVG peut être de trois types. Sténose mécanique par une membrane fibro-musculaire plus ou moins circulaire qui obstrue la CCVG entre le septum interventriculaire et la base du feuillet antérieur de la valve mitrale (Figure 27.137); Hypoplasie de la CCVG qui est longue, tunnélisée et accompagnée d’une hypertrophie septale ; Sténose dynamique, analogue à celle de la cardiomyopathie obstructive (CMO) ; la chambre de chasse est hypertrophie et rétrécie, la Vmax y est > 2.5 m/s, le pic de vélocité est télésystolique. OG OG VAo VG VAo VG CCVD CCVD Figure 27.137 : Images long-axe d’une sténose sous-aortique. Les flèches indiquent la membrane fibromuscuaire insérée sur la septum et sur la valve mitrale (feuillet antérieur). Dans les deux premiers cas, la sténose est mécanique et le pic de vélocité protosystolique. Dans ces sténoses mécaniques, le gradient moyen est bien corrélé au degré d’obstruction, alors que dans les sténoses dynamiques c’est le gradient maximal qui a la meilleur corrélation avec le degré de sténose [154]. Le gradient de pression est artificiellement diminué en cas de bas débit cardiaque, d’hypovolémie ou de canal artériel ; il sous-estime la sténose dans ces contextes. Le flux tourbillonnaire systolique est situé en dessous la valve aortique; celle-ci est souvent hypoplasique et insuffisante. A noter que la présence de turbulences dans la CCVG peut avoir 3 origines : une insuffisance aortique (jet diastolique), une CMO ou une membrane sous aortique (turbulences systoliques). Après correction chirurgicale de la CCVG (résection de la membrane et/ou myectomie), l’examen ETO différencie 4 complications différentes. La CIV iatrogène due à une résection excessive dans le corps du septum interventriculaire ; L’insuffisance mitrale ou aortique par rétraction ou lésion directe d’un feuillet ; La sténose résiduelle due à une résection insuffisance ; La sténose dynamique liée à la combinaison de baisse de postcharge, d’hypovolémie et de stimulation β. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 140 L’ETO a un impact thérapeutique élevé dans ces circonstances : dans 12 – 20% des cas, une révision chirurgicale immédiate s’impose sur la foi de l’écho post-CEC [139,160]. La précision du gradient de pression dans la CCVG est supérieure à celle de la même mesure faite dans la CCVD (surestimation dans 13% des cas) [139]. Sténose sus-valvulaire aortique Une sténose peut survenir au-delà de la valve, le plus souvent au niveau de la jonction sino-tubulaire, sous la forme d’un diaphragme fibreux, d’un rétrécissement en sablier ou d’une sténose tubulaire diffuse de l’aorte ascendante. Dans les sténoses étagées ou très longues, l’écho Doppler tend à surestimer le gradient réel. Une insuffisance aortique est présente dans 25% des cas [10a]. Sténose aortique non-valvulaire Sténose sous-aortique dynamique (effet cardiomyopathie obstructive), Vmax CCVG > 2.5 m/s - Péjorée par hypovolémie, stimulation β, vasoplégie Sténose sous-aortique statique: - Membrane sous-aortique (± hypoplasie de la valve aortique) - Tunnélisation de la CCVG Flux tourbillonnaire sous-aortique - Systole: sténose dynamique ou membrane - Diastole: insuffisance aortique Sténose sus-aortique - Membrane ou rétrécissement allongé Bicuspidie aortique La bicuspidie aortique est la malformation congénitale la plus fréquente de l'adulte (prévalence 1-2%), mais elle est rarement symptomatique chez l’enfant [178]. Elle est fréquemment associée à la coarctation de l’aorte et à plus rarement à la CIV périmembraneuse Au sens anatomo-pathologique du terme, on distingue deux formes de bicuspidie (voir Figure 26.31) [55]. Bicuspidie vraie : il n’existe que 2 bourgeons embryonnaires de cuspides et 2 sinus de Valsalva ; les deux feuillets de la valve sont de taille et de proportion variables, en général légèrement inégaux ; la fente d’ouverture est ovale et son orientation est variable ; Bicuspidie acquise : comme il existe primitivement 3 bourgeons dont deux fusionnent ultérieurement, on retrouve 3 commissures et 3 sinus de Valsalva dans leur position normale, mais une cuspide est le double de la taille de l’autre ; elle présente en général un raphé fibreux en son milieu, qui marque la position de la commissure fusionnée ; l’ouverture est en forme de banane. Il est possible de rencontrer des cas d’unicuspidie; l’orifice est en général décentré et la valve en forme d’entonnoir; elle souffre de sténose et d’insuffisance. Selon leur position, on parle de cuspide antérieure, postérieure, droite ou gauche. Comme le diamètre n’est pas égal à la moitié de la circonférence, le bord libre des deux cuspides ne peut pas rejoindre sa position normale en systole et reste tendu à mi-chemin entre la position fermée et la paroi des sinus de Valsalva. En long axe, ce phénomène donne un aspect typique en dôme (doming), avec une distance ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 141 entre l’extrémité des feuillets < 1.5 cm (voir Figure 26.32). En systole, le bord libre des cuspides vibre dans le flux, ce qui génère un souffle systolique. Ce stress est à l’origine de la dégénérescence de la valve qui évolue vers la sténose ou l’insuffisance, en général à partir de 30-40 ans. En diastole, le corps d’un feuillet est typiquement plus ballonné que celui de l’autre. Bicuspidie aortique Prévalence: 1-2% Deux formes anatomo-pathologiques - Bicuspidie vraie: 2 feuillets ± égaux, 2 commissures, 2 sinus de Valsalva, ouverture ovale - Bicuspidie acquise: 2 feuillets (tailles 1/3 – 2/3), 3 commissures, 3 sinus de Valsalva, raphé médian entre les feuillets fusionnés, ouverture en banane Association avec coarctation de l’aorte et CIV membraneuse Vue court-axe 40°: 2 feuillets, ouverture oblique Vue long-axe 120°: ouverture partielle en dôme (doming) Evolution vers sténose ou insuffisance Remplacer la valve aortique par une prothèse ne pose aucun problème chez l’adulte, mais les lésions congénitales sont souvent symptomatiques chez l’enfant. Afin d’éviter de réintervenir pour changer de prothèse au fur et à mesure de la croissance, on procède à une plastie (voir Figure 26.71 et 26.73) ou à une opération de Ross (Figure 27.138), qui consiste à substituer la valve aortique du patient par sa propre valve pulmonaire; cette dernière suit la croissance physiologique jusqu’à une taille adulte. La voie droite est remplacée par une hétérogreffe ou une homogreffe que l’on peut surdimensionner et dilater ultérieurement par voie endovasculaire. Plusieurs mesures ETO sont capitales pour la réussite de l’opération. A B C Figure 27.138 : Opération de Ross. Elle consiste à réséquer la valve pulmonaire saine avec un manchon de chambre de chasse et d’AP (A, en bleu), à réséquer la valve aortique malade (B), et à implanter la valve pulmonaire du patient en position aortique. La valve pulmonaire est remplacée par un conduit valvé entre le VD et l'AP (C, en jaune). Les coronaires sont réimplantées dans la néo-aorte. Congruence des anneaux aortique (vue long-axe 120°) et pulmonaire (vue admission – chasse VD 60° et long-axe 90°) ; la différence ne doit pas excéder 15% ; ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 142 Tricuspidie pulmonaire (vue court-axe 140°) (Figure 26.51B) ; une bicuspidie pulmonaire, qui accompagne parfois la bicuspidie aortique, peut donner des résultats désastreux lors de la transposition en position aortique ; Bonne coaptation des cuspides pulmonaires (vue long-axe 90°) (Figure 26.51A) ; absence d’IP ; Gradient de la valve pulmonaire (< 5 mmHg) en vue long-axe de l’AP (0° court-axe de l’aorte ascendante, 90° court-axe de la crosse aortique) ou de la CCVD (30-60° transgastrique) ; Epaisseur du septum interventriculaire au niveau de la CCVD (vue long-axe 90°), indiquant à l’opérateur la profondeur à laquelle il peut exciser le manchon de chambre de chasse qu’il doit prélever avec l’anneau pulmonaire (Figure 26.75B). Il est prudent de répéter toutes ces mesures sur plusieurs cycles cardiaques pour en augmenter la précision. Après une opération de Ross, plusieurs éléments sont à contrôler (Figure 26.75). Néovalve aortique (valve pulmonaire) dans le plan de l’anneau aortique ; un bascule ou un prolapsus dans la CCVG en diastole est de mauvais pronostic ; Hauteur de coaptation des cuspides > 4 mm ; Etanchéité de la néovalve aortique ; seule une IA minime (< degré I) est acceptable ; Gradient de pression dans l’homo- ou l’hétérogreffe pulmonaire < 20 mmHg ; Bonne contractilité de la partie basale du septum interventriculaire ; absence de CIV au niveau des chambres de chasse ; Cinétique segmentaire normale de toute la masse ventriculaire (réimplantation des coronaires). Sténose pulmonaire Un certain degré de sténose pulmonaire est associé à de nombreuses formes de cardiopathies congénitales. Une sténose valvulaire pulmonaire mineure présente un gradient de < 30 mmHg, une sténose modérée un ΔP de 30-60 mmHg (Vmax 2.5 – 3.8 m/s) et une sténose serrée un ΔP > 64 mmHg (Vmax ≥ 4 m/s) [10a]. La valve apparaît épaissie, peu mobile, parfois calcifiée en vue admissionchasse du VD (60°) et en vue long-axe de la valve aortique (120-140°) ; elle peut être tri-, bi- ou mono-cuspide. Elle a une déformation en dôme (doming) en systole et peut prolaber en diastole. Un certain degré d’insuffisance est en général présent. La surcharge de pression occasionne une hypertrophie concentrique du VD, avec un septum interventriculaire rectiligne ou basculé dans le VG en systole. La sténose peut également se localiser au niveau de la chambre de chasse (CCVD), où elle est essentiellement musculaire et dynamique, ou au niveau de l’artère pulmonaire, où le vaisseau est hypoplasique sur une longueur variable. L’écho Doppler tend à surestimer le gradient en cas de sténoses étagées ou lorsque la sténose est tubulaire. La mesure de la pression systolique du VD (Psyst) par la Vmax de l’IT permet de calculer la pression artérielle pulmonaire en systole (PAPs) par soustraction du gradient transpulmonaire (ΔP) : PAPs = PsystVD - ΔP. Transposition des gros vaisseaux (TGV) Dans la TGV, il existe une discordance complète de la jonction ventriculo-artérielle: l'aorte sort du ventricule anatomiquement droit par une chambre de chasse entièrement musculaire, elle est antérieure à l’AP. L'artère pulmonaire est issue de la chambre de chasse morphologiquement gauche ; il existe une continuité fibreuse entre le feuillet mitral antérieur et la valve pulmonaire (Figure 27.101C). Le canal artériel ou une CIA assure un mélange des sangs veineux et artérialisés; une CIV, en général de type supracristal, est présente dans 30-40% des cas. Les anomalies coronariennes sont fréquentes et compliquent la reconstruction chirurgicale. A l’ETO, l’aorte et l’AP apparaissent parallèles en vues longitudinales (90-120°) ; les valves aortiques et pulmonaires sont sur le même plan en vues ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 143 transverses (0-40°), alors que normalement le long-axe de l’une est associé au court-axe de l’autre ; la valve aortique est antérieure et à droite de la valve pulmonaire (D-transposition) (Figure 27.139). AP VG Ao Ao AP VD Ao AP A Figure 27.139 : Illustration schématique d'une transposition des gros vaisseaux (TGV). A : vue long-axe de l’aorte et de l’AP qui apparaissent parallèles au lieu de se croiser à 45°. Le ventricule anatomiquement droit est hypertrophié (ventricule systémique sousaortique). B : position normale de l'aorte et de l'AP. C : position des vaisseaux dans une TGV. VG VG VD VD B C © Chassot 2011 Les enfants porteurs d'une TGV ne survivent pas sans une intervention précoce, dont on retrouvera la morphologie et les séquelles à l’âge adulte. Opération de Rashkind: par cathétérisme, on déchire le septum interauriculaire pour créer ou agrandir la CIA; on procède à cette intervention dans les premières heures après la naissance. Opération de Mustard ou de Senning: un patch complexe positionné entre les deux oreillettes (interatrial baffle) permet de rediriger le sang veineux systémique vers le ventricule souspulmonaire et le sang artérialisé vers le ventricule sous-aortique (Figure 27.140). Malheureusement, le ventricule anatomiquement droit reste le ventricule systémique, ce qui ne permet pas une survie normale; il dysfonctionne vers 20-25 ans. Opération de Jatene (switch artériel): avant que le remodelage des ventricules ne soit significatif (< 2-3 semaines de vie), on croise les gros vaisseaux en reconnectant l'AP sur le VD et l'aorte sur le VG; l’AP est positionnée antérieurement à l’aorte (manœuvre de Lecompte) ; les coronaires sont réimplantées dans l'aorte (Figure 27.141) ; cette reconstrucion présente un risque d’ischémie myocardique. Opération de Rastelli : lorsque la TGV est associée à une CIV et une obstruction de la CCVG, on peut fermer la CIV avec un patch orienté de manière à ce que le sang du VG soit dirigé vers l’aorte ; un conduit valvé est construit entre la VD et l’AP (Figure 27.142). Opération de Damus-Kaye-Stansel : l’AP proximale est anastomosée termino-latéralement à l’aorte ascendante, et sa partie distale est suturée ; un conduit valvé est placé entre le VD et l’AP distale ; la pression qui règne dans l’aorte maintient la valve aortique fermée (elle doit être compétente) (Figure 27.143). Après les opérations de Mustard ou de Senning, l’image est plus complexe. Le patch interauriculaire sépare deux cavités, l’une antérieure (retour veineux systémique détourné vers la valve mitrale) et l’autre postérieure (retour veineux pulmonaire dirigé vers la valve tricuspide) (Figure 27.140). L’injection de microbulles par voie veineuse permet de se repérer facilement. De plus, si le contraste injecté dans un bras entre dans le cœur par la VCI, on peut en conclure que la partie supérieure du patch est obstruée ; à l’inverse, le contraste injecté dans une jambe apparaît par la VCS is la partie inférieure du patch est sténosante. Le flux veineux central est normalement biphasique et suit ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 144 l’évolution de la pression auriculaire. En cas de sténose ou d’obstruction, l’allure biphasique est perdue, le flux devient constant et la Vmax augmente (> 1.5 m/s) ; il apparaît des turbulences au Doppler couleur. Chez l’adulte, la dilatation et la dysfonction du ventricule anatomiquement droit est habituelle ; elle s’accompagne d’une insuffisance tricuspidienne. Le VG est alors comprimé par le VD ; une obstruction dynamique de la CCVG est fréquente, parce que le VG, naturellement musclé, est connecté à un réseau à basse pression. VP VP VCI OVS OVA OVP OVP VD VG VG VD A B Figure 27.140 : Opération de Mustard pour TGV: un patch complexe positionné entre les deux oreillettes (interatrial baffle) permet de rediriger le sang veineux systémique vers le ventricule sous-pulmonaire (VG) et le sang artérialisé vers le ventricule sous-aortique (VD). Le ventricule systémique est le ventricule droit. A : les veines pulmonaires (VP) se drainent dans une oreillette veineuse postérieure (OVP) connectée au VD sousaortique. B : la veine cave inférieure (VCI) se draine dans la partie basse d’une oreillette veineuse antérieure (OVA) connectée au VG sous-pulmonaire. La veine cave supérieure se draine de la même manière dans la partie haute de l’OVA [162]. Figure 27.141 : Opération de Jatene (switch artériel): croisement des gros vaisseaux en reconnectant l'AP sur le VD et l'aorte sur le VG. A : transsection de l’aorte et excision des coronaires. B : l’AP est excisée et les coronaires sont réimplantées dans la partie proximale de l’AP connectée au VG. C : l’AP est positionnée antérieurement à l’aorte (manœuvre de Lecompte) ; l’AP proximale est anastomosée à l’aorte distale. D : les sites de prélèvement des coronaires sont patchés et l’aorte proximale, connectée au VD, est anastomosée à l’AP distale. Cette reconstrucion présente un risque d’ischémie myocardique. A C B D Le switch artériel est actuellement l’intervention de premier choix. La reconstruction étant anatomique, le cœur a une fonction normale, pour autant que l’opération ait eu lieu assez tôt pour empêcher une involution irréversible du VG connecté au système à basse pression de l’AP. A l’échocardiographie, la morphologie cardiaque est voisine de la norme mais les ostia coronariens sont ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 145 en général plus distaux et situés à 2 heures et à 10 heures dans une vue à 0° [105]. Les séquelles possibles sont une obstruction de la CCVD ou de la CCVG, un shunt résiduel, une fuite pulmonaire ou aortique, et une dysfonction du VG. AP AP Ao Ao AP OG OD VG VG VD VD © Chassot 2011 Figure 27.142 : Opération de Rastelli : lorsque la TGV est associée à une CIV et une obstruction de la CCVG, on peut fermer la CIV avec un patch (barre verte) orienté de manière à ce que le sang du VG soit dirigé vers l’aorte. L’AP proximale est ligaturée et un conduit valvé (flèche vert-bleu) est construit entre la VD et l’AP. Le sang veineux (flèche bleue) et le sang artériel (flèches rouges) sont séparés et dirigées respectivement vers le conduit-AP et l’aorte. © Chassot 2011 Figure 27.143 : Opération de Damus-KayeStansel : l’AP proximale est anastomosée termino-latéralement à l’aorte ascendante, et la partie distale est suturée ; un conduit valvé est placé entre le VD et l’AP distale. Le sang veineux (flèche bleue) est séparé du sang artériel (flèches rouges). La pression qui règne dans l’aorte maintient la valve aortique fermée (elle doit être compétente). Transposition naturellement corrigée Si une discordance auriculo-ventriculaire se rajoute à la discordance ventriculo-artérielle, la survie devient possible, car les circulations systémique et pulmonaire sont de nouveau en continuité. C'est le cas de la transposition naturellement corrigée des gros vaisseaux. Dans cette anomalie, l'AP et l'aorte sont transposées comme dans la TGV, mais les ventricules sont également inversés (Figure 27.144). L’aorte se trouve à la gauche de l’AP (L-TGV), le ventricule anatomiquement droit est à gauche et le VG est à droite. La valve mitrale et la valve pulmonaire sont reliées par une continuité fibreuse. Une CIV périmembraneuse est fréquente ; il se peut que la valve tricuspide, souvent insuffisante, soit déplacée vers l’apex comme dans une maladie d’Ebstein [6]. Une obstruction dynamique de la chambre de chasse sous-pulmonaire n’est pas rare à cause de sa position oblique liée au malalignement du septum. De fait, le sang suit une séquence physiologique à travers des cavités croisées: OD → VG → AP → poumons → OG → VD → Ao. Ces malades ne sont pas cyanosés, mais le ventricule anatomiquement droit se retrouve en position sous-aortique, donc fonctionnant comme ventricule systémique. Il se dilate, développe une insuffisance tricuspidienne sévère, et devient insuffisant vers 20-25 ans [37]. C'est souvent à ce moment-là que le diagnostic est posé. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 146 A l’ETO, le diagnostic est posé parce que chaque ventricule se reconnaît à ses caractéristiques anatomiques, non à sa position (Figure 27.145). En vue 4-cavités, l’OD normale (recevant les veines sus-hépatiques et en général la VCI) est connectée à une valve à 2 feuillets insérée plus haut au niveau du septum que l’autre valve AV et à un ventricule finement trabéculé ne présentant que 2 muscles papillaires (ventricule anatomiquement gauche); une sténose de la CCVG est fréquente. L’OG est connectée à une valve à 3 feuillets bas-insérée sur le septum et à un ventricule arrondi et fortement trabéculé qui présente 3 muscles papillaires, dont l’un inséré sur le septum (ventricule anatomiquement droit). Les gros vaisseaux sont parallèles comme dans la TGV. Figure 27.144 : transposition des gros vaisseaux (TGV) naturellement corrigée. A la discordance ventriculoartérielle (TGV) s’ajoute une discordance auriculoventriculaire. L’OD est connectée à une valve mitrale (VM) et à un ventricule anatomiquement gauche (VG), puis à l’AP. Le sang oxygéné revient à l’OG par les veines pulmonaires ; l’OG se draine à travers une valve tricuspide dans un ventricule anatomiquement droit, connecté à l’aorte. Le malade n’est pas cyanosé, mais son ventricule systémique est un ventricule droit, qui défaille après 15-20 ans [29]. OD AP Ao OG AP VM VTr VG VD © Chassot 2011 OG OD VG VD Figure 27.145 : TGV naturellement corrigée. La VCI se draine dans l’OD (situs solitus) connectée au VG, luimême connecté à l’AP ; l’OG est connectée au VD, que l’on reconnaît à la bas-insertion de la tricuspide ; le VD est en position sous-aortique. Le VD est hypertrophié, mais sa haute postcharge (pression systémique) a induit une insuffisance tricuspidienne massive. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 147 Transposition des gros vaisseaux (TGV) Discordance ventriculo-artérielle - VD connecté à l’aorte (antérieure) - VG connecté à l’artère pulmonaire CIA, canal artériel ou CIV pour le mélange des circulations Vue long-axe 90-120°: aorte et AP parallèles Vue court-axe 0-40°: valves aortique et pulmonaire sur le même plan Transposition naturellement corrigée Discordance auriculo-ventriculaire + discordance ventriculo-artérielle Retour veineux systémique → OD → valve mitrale → VG → AP Retour veineux pulmonaire → OG → valve tricuspide → VD → aorte Oxygénation normale mais VD fonctionne comme ventricule systémique Truncus arteriosus Dans le syndrome du truncus arteriosus, un vaisseau commun surplombant une CIV donne naissance à l’aorte et à l’artère pulmonaire. Ce vaisseau possède une grande valve ventriculo-artérielle à 3 ou 4 feuillets, souvent dysplasique et insuffisante. Il existe 4 types de truncus : • • • • Type I : l’AP prend racine sur la face latérale gauche du vaisseau commun ; Type II : les deux artères pulmonaires naissent séparément du truncus ; Type III : il n’existe qu’une seule artère pulmonaire, le poumon controlatéral étant vascularisé par des collatérales ou des artères bronchiques ; Type IV : l’AP est absente, et les poumons sont alimentés par des collatérales aortopulmonaires ; ce cas ressemble à une CIV avec atrésie pulmonaire. La malformation est rapidement symptomatique après la naissance, et se manifeste par une insuffisance ventriculaire congestive et une cyanose modérée. La circulation pulmonaire est surchargée et soumise à une pression systémique ; sans une restriction au flux (banding), des lésions vasculaires irréversibles se développent rapidement. La correction chirurgicale consiste en un patch sur la CIV qui redirige le flux du VG vers l’aorte (en l’occurrence, le truncus) ; la valve néo-aortique est reconstruite ou remplacée si elle est insuffisante ; l’AP est déconnectée du tronc et anastomosée à un conduit valvé VD-AP. Anévrysme du sinus de Valsalva L’anévrysme survient le plus souvent dans le sinus de Valsalva droit (69% des cas), plus rarement dans le sinus non-coronaire (26%) ou gauche (5%) (Figure 27.73). Une fuite aortique peut accompagner la dilatation de la racine aortique. La dilatation du sinus peut se prolonger en doigt de gant et éventuellement fistuliser dans la CCVD (anévrysme droit ou non-coronaire) ou dans la CCVG (anévrysme gauche). Dans le premier cas, elle occasionne un shunt G→D avec surcharge de volume du VD ; dans le deuxième, la surcharge porte sur le VG. Un diagnostic différentiel est à faire avec l’anévrysme du septum membraneux, la fistule coronaire ou la fistule acquise (endocardite). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 148 Segment artériel Coarctation de l’aorte La coarctation de l'aorte survient dans 0.2‰ des naissances [96]; elle consiste en un rétrécissement qui obstrue la lumière de l’aorte au niveau de l’isthme et du canal artériel engendrant un gradient de pression > 20 mmHg. Chez les jeunes enfants, elle est associée dans la moitié des cas à une bicuspidie aortique, à une CIV, à un canal AV et/ou à un canal artériel. La coarctation impose une très forte postcharge au VG, qui s'hypertrophie de manière concentrique comme dans une sténose aortique. Un réseau collatéral très important par les artères périscapulaires, mammaires internes, cervicales et intercostales assure une perfusion en dessous de la lésion; les intercostales dilatées sont à l'origine des entailles qui sont visibles à la radio du thorax sur le bord inférieur des côtes depuis l’âge de 5-8 ans. Si les collatérales sont très développées, le gradient mesuré au niveau de la coarctation sous-estime le degré réel de la sténose. Même corrigée dans l’enfance, une coarctation peut récidiver à l’âge adulte. A l’ETO, la coarctation est visible en vue long-axe de l’aorte descendante 90° au niveau de l’isthme, juste après le départ de l’artère sous-clavière gauche. Elle se présente comme une zone plus ou moins longue où la lumière interne de l’aorte est mal définie ; chez les jeunes, on voit en général une crête fibreuse qui obstrue partiellement la lumière (Figure 27.146). La coarctation est sévère lorsque le rapport entre le diamètre de la zone sténosée et celui de l’aorte descendante est ≤ 0.4. Au-dessus de la lésion, l’aorte est dilatée et très pulsatile, alors qu’en dessous, elle est plus étroite et peu pulsatile; cette perte de pulsatilité est proportionnelle au degré de sténose. Au Doppler couleur, on aperçoit un PISA systolo-diastolique en amont du rétrécissement, un étroit passage au niveau de la coarctation et un flux turbulent en aval. Il n’est pas possible de mesurer le gradient de pression à l’ETO parce que l’oesophage reste parallèle à l’aorte descendante sur toute sa longueur. A B Turbulences PISA Figure 27.146 : coarctation de l’aorte. A : membrane au niveau de l’isthme. B : flux Doppler couleur avec un PISA en amont et des turbulences en aval de la membrane (flèche). Canal artériel Le canal artériel (ductus arteriosus) relie l’isthme aortique à la bifurcation pulmonaire gauche. Il se ferme normalement dans les premières heures après la naissance. Il peut rester perméable à cause de la prématurité ou de l’hypoxémie. Dans certaines malformations, il est la seule source de flux pour l’artère pulmonaire (atrésie pulmonaire) ou l’aorte (arc aortique interrompu). Il est responsable d'un shunt G→D qui surcharge le VG et peut induire sa défaillance. Le canal artériel est situé à la limite de visibilité de l’ETO, mais il est en général possible d’en poser le diagnostic par la présence de 2 éléments. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 149 Un flux couleur systolo-diastolique turbulent entre l’aorte thoracique au niveau de l’isthme (vues long-axe 0° et court-axe 90° de la crosse) et l’artère pulmonaire ; même s’il n’est pas toujours possible de le suivre sur tout son trajet, on aperçoit en général le PISA systolodiastolique à l’intérieur de la lumière aortique. Il faut souvent chercher le canal en vues transoesophagiennes hautes sous différents angles autour du court-axe de la crosse ; Un flux couleur tourbillonnant dans le tronc de l’AP descendant depuis l’artère pulmonaire gauche en vue court-axe de l’aorte ascendante 0° ou en long-axe de l’AP à 60-80°. Ce flux est visible en diastole, car il est entraîné par le courant en systole ; au Doppler pulsé, l’image spectrale est celle d’un reflux diastolique dans l’AP. La non-fermeture du canal artériel entraîne à long terme une hypertension pulmonaire. Le flux G→D ralentit parce que le ΔP diminue. Pour le calcul du shunt (Qp/Qs), le flux transpulmonaire représente le débit systémique alors que le flux transaortique représente le débit pulmonaire puisque le shunt est situé en aval de la valve pulmonaire. Anomalies coronariennes Il existe de multiples variantes anatomiques du branchement des troncs coronaires (Figure 27.147) ; elles peuvent occasionner des soucis lors de reconstruction chirurgicale au niveau des chambres de chasse. Une coronaire peut aussi avoir une origine anormale sur l'aorte, ou être branchée sur l’AP (syndrome ALCAPA : coronaire gauche issue de l’AP). Dans ce dernier cas, une ischémie myocardique apparaît précocement dès que la pression chute dans l’arbre pulmonaire. Si le vaisseau est bien collatéralisé, il peut réaliser un vol dans le réseau en provenance de l’aorte et fonctionner comme un shunt G→D en se déversant dans l’AP. Une coronaire peut aussi se terminer dans le VD, ce qui crée une autre forme de fistule G→D. Dans ce cas, le shunt est de l'ordre de 1.6 :1 [18]. A l’ETO, l’implantation anormale de la coronaire gauche dans l’AP se voit en général en vue mi-œsophage 60120° ; le Doppler couleur démontre un flux turbulent diastolique dans l’AP à la hauteur de l’abouchement de la coronaire. La CD est dilatée et subvient seule aux besoins du VG, dont la fonction est diminuée. Les anomalies coronariennes représentent un risque particulier dans les opérations qui nécessitent une réimplantation des ostia, comme le switch artériel ou l’opération de Ross, et dans celles où leur trajet anormal empêche la reconstruction habituelle, comme l’élargissement de la CCVD dans la TdF lorsqu’une coronaire croise la face antérieure du cône d’éjection droit. Dans ces interventions, l’examen pré-CEC doit activement rechercher quelle est l’anatomie coronarienne du patient. Shunt artériel G→ D Pour augmenter un flux pulmonaire insuffisant, on dérive fréquemment une artère systémique vers une artère pulmonaire. Le shunt de Blalock-Taussig consiste à anastomoser l’artère sous-clavière à l’artère pulmonaire ipsilatérale, soit par un montage termino-latéral soit au moyen d’un conduit prothétique. L’ETO permet de visualiser le flux du shunt. Alors que le flux est strictement systolique dans l’artère avant l’opération, il devient systolo-diastolique une fois le montage réalisé, puisque la diastolique pulmonaire est significativement plus basse que la diastolique sytsémique (Figure 27.148). ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 150 IVA A B IVA CX AP Figure 27.147 : Représentation schématique des anomalies coronariennes les plus fréquentes. A : situation normale, avec la position de la valve pulmonaire (AP). B à H : exemples d’anomalies. En B, C, E, F et H, un vaisseau contourne l’AP par devant et peut poser problème lors de chirurgie de la chambre de chasse droite. G : implantation intramurale [18]. CD CD C D E IVA CD CX CD CX CD IVA IVA CX CX F G H CD IVA IVA IVA CX CD CX CD CX © Chassot 2010 A B Figure 27.148 : shunt de Blalock-Taussig. A : flux dans l’artère sous-clavière avant la construction du shunt ; le flux est exclusivement systolique comme dans toute artère systémique. B : après connexion à l’artère pulmonaire, le flux devient systolo-diastolique comme dans un shunt G→D. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 151 Pathologies artérielles Coarctation de l’aorte - Membrane ou rétrécissement au niveau de l’isthme (long-axe aorte descendante 90°) - Coarctation serrée: Ø sténose < 0.4 Ø aorte descendante - Flux couleur: PISA en amont, turbulences en aval - Pulsatilité de l’aorte augmentée en amont et diminuée en aval - Association à la bicuspidie aortique Canal artériel - Conduit aorto-pulmonaire entre isthme et bifurcation AP gauche - Flux systolo-diastolique de shunt G→D dans médiastin supérieur et postérieur (vues court-axe 0° et long-axe 90° de l’aorte descendante) - PISA dans l’aorte - Flux tourbillonnaire diastolique dans le tronc de l’AP en provenance de l’AP gauche (vue court-axe de l’aorte ascendante 0° + CCVD 60°) L’ETO chez les congénitaux Indications L’ETO est utilisée aussi bien en salle de cathétérisme qu’en salle d’opération ou aux soins intensifs. Elle est un complément à la voie transthoracique pour la définition des lésions postérieures (retour veineux anormaux), septales (CIA, CIV, canal AV) ou mitrales. Elle est indispensable pour guider les interventions endovasculaires (dilatation valvulaire, occlusion de CIA) et les reconstructions complexes. Outre les précisions supplémentaires qu’elle fournit, l’ETO est très utile à l’anesthésiste et à l’intensiviste pour comprendre l’hémodynamique complexe de ces pathologies et pour évaluer la fonction ventriculaire, la volémie ou l’ischémie myocardique [111]; ceci est d’autant plus pertinent que les indices fonctionnels habituels et les pressions de remplissage sont inopérants dans ces situations. Après correction en CEC, elle permet de contrôler immédiatement l’adéquation de l’intervention chirurgicale. Mais dans la chirurgie congénitale encore plus qu’ailleurs, l’apport de l’écho n’est considérable que si l’examen est complet, systématique et méticuleux. En particulier, il est primordial de suivre un plan rigoureux dans l’analyse des images et de bâtir son diagnostic sur l’ensemble des données. Impact de l’ETO L’impact de l’ETO dans la chirurgie cardiaque congénitale a été analysé en pédiatrie essentiellement, mais tout laisse à penser qu’il est de la même importance dans la chirurgie congénitale adulte. Le taux de découvertes fortuites et de modifications de la stratégie chirurgicale est plus élevé chez les congénitaux que chez les patients présentant des lésions acquises. Avant la CEC, il oscille entre 3% et 13% (moyenne: 7%) [16,111,131]. Un retour en CEC sur la base d’une image ETO insatisfaisante survient dans 5 à 16% des cas (moyenne: 8%); ce taux est le plus élevé lors de pathologies complexes, de valvuloplasties et de lésions des chambres de chasse. La décision d’un éventuel retour en pompe après une correction jugée insatisfaisante appelle quelques commentaires. Les lésions résiduelles non diagnostiquées sont une des causes principales de complications postopératoires, de reprise chirurgicale ultérieure et de faible survie à long terme. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 152 Dans 4% des cas, les lésions résiduelles ne peuvent pas être corrigées sans occasionner des dégâts majeurs; elles doivent être tolérées malgré leurs conséquences. L’extrême sensibilité de l’ETO met en évidence beaucoup de lésions sans signification clinique (moyenne: 15% des cas) [16] ; il faut souvent beaucoup d’expérience pour différencier ce qui porte à conséquence à long terme de ce qui est sans importance. Le but de l’opération est d’obtenir un résultat clinique adéquat, non une image échocardiographique parfaite (Treat the patient, not the image!); une deuxième CEC pour corriger un défaut sans conséquence est un mauvais calcul de risque. La décision est le fruit d’une discussion collégiale entre chirurgien, anesthésiste et cardiologue sur ce qui peut être fait et à quel prix. La pertinence des découvertes post-CEC est directement liée aux connaissances échocardiographiques de l’examinateur; le taux de reprise pour correction incomplète tombe de 9.6% à 0% et le taux de lésions non-diagnostiquées augmente de 21% à 74% lorsqu’un échocardiographeur aîné est remplacé par un collègue sans expérience [159]. Le rapport coût/bénéfice de l’ETO de routine est très favorable chez les congénitaux. Il a été calculé en chirurgie cardiaque pédiatrique. En se basant sur un taux de reprise immédiate post-CEC de 5% et sur la complexité des différents cas, l’analyse financière de l’utilisation de l’ETO montre que celle-ci permet de réaliser une économie de 700 à 2’200 € par cas, donc à autofinancer les investissements nécessaires [15]. Complications en pédiatrie La chirurgie cardiaque congénitale est réalisée en grande partie chez les enfants. En pédiatrie, l’ETO ne présente pas de problème technique pour autant que le poids de l’enfant soit supérieur à 5 kg. En dessous de cette valeur, le taux de difficultés d’insertion, de maintien des voies aériennes et de stabilité hémodynamique augmente [8]. Chez le tout petit, la sonde oesophagienne empêche parfois une ventilation correcte et ne peut pas être laissée en place. La limite inférieure de poids acceptable est de 2.5 kg [7]. A partir de 20 kg, on peut utiliser une sonde adulte. L’incidence des complications de l’ETO oscille entre 1% et 3% chez les petits enfants. Il s’agit principalement d’obstruction respiratoire, de déplacement du tube endotrachéal, d’extubation accidentelle, d’instabilité hémodynamique et de lésions oesophagiennes [131,158]. Ces dernières se traduisent par des lésions muqueuses et une dysphagie passagère. Cependant, la crainte de problèmes ventilatoires ou hémodynamiques, peu fréquents et transitoires, ne doit pas restreindre l’utilisation de l’ETO peropératoire chez les petits enfants [7,8]. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 153 Conclusions Pour des praticiens comme les anesthésistes et les intensivistes qui sont confrontés quotidiennement à des problèmes physiopathologiques majeurs, l’échocardiographie apporte une compréhension approfondie des situations hémodynamiques complexes et une vision nouvelle par rapport au monitorage des pressions et des débits. D’autre part, l’évaluation anatomique dynamique des structures cardiaques permet de mieux comprendre les stratégies chirurgicales et de mieux en appréhender les conséquences dans le postopératoire. Ceci est particulièrement évident dans l’ischémie myocardique, la tamponnade et les cardiopathies congénitales. Le développement de la chirurgie minimalement invasive et des endoprothèses vasculaires ou valvulaires a transformé l’ETO en un outil indispensable pour guider l’opérateur. De ce fait, le rôle de l’anesthésiste a changé. Il est devenu un acteur à part entière dans les décisions stratégiques peropératoires et dans le déroulement technique de l’intervention. La disponibilité de l’ETO dans un bloc opératoire et dans des soins intensifs est un atout majeur dans la qualité de prise en charge des malades, pour autant que l’on dispose également d’une équipe formée de médecins pleinement capables d’utiliser toutes les ressources de la technique et d’en tirer des conclusions thérapeutiques immédiates. Cela implique à la fois une formation adéquate des anesthésistes et des intensivistes et une étroite collaboration avec les services de cardiologie. Cette ouverture à la multidisciplinarité est probablement l’avancée la plus importante offerte par l’ETO. Elle permet aux anesthésistes et aux intensivistes de mieux comprendre les problèmes cardiologiques et chirurgicaux et de devenir partie prenante dans les décisions thérapeutiques per- et post-opératoires. Elle devient un point de ralliement pour une prise en charge plus globale des patients. ème Précis d’Anesthésie Cardiaque 2011 – 27 Echocardiographie transoesophagienne 3 partie 154 Bibliographie Lectures conseillées BAUMGARTNER H, BONHOEFFER B, DE GROOT NMS, et al. ESC Guidelines for the management of grown-up congenital heart disease (new version 2010). Eur Heart J 2010; 31:2915-57 CHASSOT PG, BETTEX D. Anesthesia and adult congenital heart disease. J Cardiothorac Vasc Anesth 2006; 20:414-37 EVANGELISTA A; FLASCHKAMPF FA, ERBEL R, ET AL. Echocardiography in aortic diseases: EAE recommendations for clinical practice. Eur J Echocardiogr 2010; 11:645-58 KAPOOR PM, CHOWDHURY U, MANDAL B, et al. Trans-esophageal echocardiography in off-pump coronary artery bypass grafting. 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