DOSSIER Les épilepsies-absences Dossier coordonné par Stéphane Auvin L es absences sont un type de crise épileptique classé parmi les crises généralisées. On observe les crises absences dans plusieurs syndromes épileptiques. C’est le plus souvent dans le cadre de l’épilepsie-absence de l’enfant que ce type de crise est observé. On retrouve bien entendu des absences typiques dans d’autres syndromes épileptiques. Ces dernières années, plusieurs publications sont venues améliorer nos connaissances physiopathologiques, étiologiques et thérapeutiques dans ce domaine. Enfin, les données concernant l’impact neuropsychologique des épilepsiesabsences sont maintenant de plus en plus précises. Elles permettent de cerner les possibles conséquences de ces épilepsies. Ce dossier abordera ces différents aspects. n Stéphane Auvin (Hôpital Robert Debré, Paris) 1 Physiopathologie de l’épilepsie-absence : les avancées récentes ��������������������������������������������������������������������������� p. 234 Mathilde Chipaux et Stéphane Charpier (Paris) 2 Les absences chez l’enfant : le diagnostic étiologique ��������������� p. 240 Mathieu Milh et Nathalie Villeneuve (Marseille) 3 Retentissement neuropsychologique des épilepsies-absences : les troubles neuropsychologiques et comportementaux ��������� p. 244 Christine Bulteau (Paris) 4 Traitement des épilepsies avec crises de type absences : quelle prise en charge chez l’enfant et l’adolescent ? ����������������� p. 248 Stéphane Auvin (Paris) Les épilepsies-absences DOSSIER 1 Physiopathologie de l’épilepsie-absence Les avancées récentes n Les données cliniques et expérimentales récentes, issues de modèles génétiques, montrent que les décharges pointes-ondes associées aux absences prennent naissance dans le cortex, puis sont secondairement propagées dans l’ensemble des circuits cortico-thalamiques. Les mécanismes de déclenchement et de maintien de ces paroxysmes sont en cours d’élucidation. Une avancée majeure a été la caractérisation d’une sous-population de neurones pyramidaux corticaux ayant des propriétés ictogéniques spécifiques, résultant d’un dysfonctionnement des canaux ioniques voltage-dépendants et/ou dans la “balance” entre l’excitation et l’inhibition synaptique. La récente démonstration d’une inhibition tonique des neurones thalamiques chez les animaux épileptiques appuie l’hypothèse que le thalamus n’aurait qu’un rôle dans le maintien des oscillations synchrones lors de la crise. Définition L’épilepsie-absence est un syndrome épileptique débutant dans l’enfance, caractérisé par des crises brèves (souvent inférieures à 30 secondes) et parfois très fréquentes (jusqu’à 200 par jour) (1). D’un point de vue clinique, la crise d’absence s’exprime essentiellement par un arrêt de l’activité psychomotrice volontaire et une altération des perceptions sensorielles, parfois accompagnée d’automatismes moteurs. Ces perturbations comportementales sont associées sur l’EEG de surface à des décharges pointes-ondes (DPO) bilatérales, 1 Centre de Recherche de l’Institut du Cerveau et de la Moelle épinière, UPMC/INSERM UMR-S 975; CNRS UMR 7225, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris 2 Neurochirurgie pédiatrique, Fondation A. de Rothschild, Paris 234 Mathilde Chipaux1,2 et Stéphane Charpier1 synchrones et symétriques, à début et fin brusques, dont la fréquence est d’environ 3 Hz. Le seuil de réaction à des stimulations sensorielles, y compris nociceptives, est accru, mais d’intenses stimulations peuvent parfois interrompre les DPO et arrêter la crise. Association thalamuscortex dans le déclenchement des crises d’absence : historique Le site de déclenchement des crises d’absence au sein du circuit cortico-thalamique a été l’objet d’intenses débats, suggérant une origine “centrencéphalique”, thalamique ou néocorticale (2). La théorie centrencéphalique, émise en 1954 par Penfield, propose que les décharges sont issues d’un pacemaker souscortical, situé dans le thalamus central et le tronc cérébral, ayant des projections néocorticales diffuses. En 1991, la théorie d’une “horloge” thalamique propose que ce pacemaker est en fait le noyau réticulé du thalamus (Fig. 1A), lequel imposerait son propre rythme aux circuits thalamocorticaux. Dans cette revue, nous examinerons les plus récentes données cliniques et expérimentales démontrant une origine corticale des DPO et nous décrirons les mécanismes neuronaux, synaptiques et membranaires, et de circuits pouvant sous-tendre le déclenchement et le maintien des crises. Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 DOSSIER Les épilepsies-absences Figure 1 - Origine corticale des DPO. A. Les DPO sont principalement présentes dans les boucles cortico-thalamo-corticales. Celles-ci sont constituées de neurones cortico-thalamiques (C-T) réciproquement connectés par des synapses excitatrices avec les neurones thalamo-corticaux (T-C). Ces derniers sont inhibés par les neurones du noyau réticulaire du thalamus (nRT), excités à la fois par les neurones C-T et T-C. B. Prédominance frontale des DPO humaines. Gauche. DPO enregistrées chez une patiente de onze ans atteinte d’absence typique. Noter la présence d’oscillations précoces dans les régions frontales, suivies de DPO de grande amplitude. Les cartes temps-fréquence montrées à droite indiquent que les oscillations précoces sont exclusivement présentes dans la région frontale (F4), que les DPO prédominent dans cette région et qu’elles surviennent secondairement dans les aires occipitales (O2). Modifié d’après (3). C. Schéma représentant les dynamiques de déclenchement (à partir d’un foyer cortical) et de propagation des DPO chez les rats WAG/Rij (rats ayant spontanément des absences). Modifié d’après (2). D. Enregistrements EEG corticaux et thalamiques chez le GAERS (autre souche de rats ayant également des absences spontanément), montrant le déclenchement des DPO dans le cortex somato-sensoriel. Modifié d’après (4). Crise généralisée ou focale corticale ? Selon la classification établie par la Ligue Internationale Contre l’Epilepsie (révisée en 2010), les crises généralisées sont définies par un engagement très rapide de réseaux bilatéraux, corticaux et/ou sous-corticaux, mais n’impliquant pas nécessairement l’ensemble du manteau cortical. Les récentes données résumées Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 ci-dessous, concernant à la fois les modèles génétiques d’absence et les patients, convergent vers une nouvelle hypothèse physiopathologique pour l’épilepsie-absence : les DPO associées aux crises d’absence sont initialement déclenchées dans un foyer cortical, frontal ou pariétal selon les espèces, puis sont rapidement généralisées à l’ensemble des boucles cortico-thalamo-corticales (Fig. 1). Chez l’animal : données EEG et pharmacologiques L’utilisation des modèles génétiques a fourni de cruciales données électrophysiologiques et pharmacologiques en faveur de l’existence d’un “foyer” cortical à l’origine des DPO. • Chez les rats WAG/Rij, la survenue spontanée de DPO dans l’EEG est corrélée à une immobilité de l’animal, des myoclonies 235 Les épilepsies-absences DOSSIER faciales et une augmentation du seuil de réactivité à des stimuli sensoriels (5). Dans ce modèle animal, l’analyse des degrés d’association statistique et des délais temporels entre les activités critiques enregistrées simultanément dans différentes régions corticales et thalamiques révèle qu’une région restreinte du cortex (somato-sensoriel) mène les activités paroxystiques dans les premiers instants de la crise (Fig. 1C) (6). Ces activités épileptiques initiées à partir d’un foyer cortical se propagent à la vitesse de 2 m/sec, vitesse compatible avec une propagation des paroxysmes via des circuits synaptiques. Lorsque la crise est pleinement généralisée, les relations d’association varient suivant les crises entre le cortex et le thalamus, les deux structures pouvant indifféremment contrôler les activités paroxystiques (6). • Dans un autre modèle, le Genetic Absence Epilepsy Rats from Strasbourg (GAERS), modèle génétique le mieux décrit et présentant les plus fortes homologies avec la maladie humaine (5), notre équipe a également identifié un foyer néocortical à l’origine des DPO. Ce foyer, localisé dans le cortex somatosensoriel primaire, présente des décharges épileptiques qui précèdent systématiquement celles du cortex moteur et des noyaux thalamiques correspondants (4, 7) (Fig. 1D). L’inactivation pharmacologique de ce foyer cortical prévient la survenue des DPO généralisées (corticales et thalamiques), alors que le blocage fonctionnel des autres aires corticales ou des noyaux thalamo-corticaux est sans effet sur la capacité endogène du foyer cortical à générer des décharges épileptiques (7). De plus, l’injec236 tion d’éthosuximide (médication anti-absence de première intention) à des doses thérapeutiques a pour effet d’arrêter les DPO et de “normaliser” les propriétés ictogéniques (voir plus bas) des neurones initiateurs des crises (8). Chez l’animal : identification des neurones “ictogéniques” Des enregistrements intracellulaires in vivo réalisés chez le GAERS ont permis d’identifier une sous-population de neurones corticaux à l’origine des évènements paroxystiques. Ces neurones “initiateurs” des crises sont des cellules pyramidales excitatrices (glutamatergiques) localisées dans les couches profondes (V et VI) du foyer (4, 7) (Fig. 2A). Ils sont plus dépolarisés et plus actifs durant les périodes critiques et inter-critiques, comparés aux autres neurones corticaux et thalamiques. Lors des pointes sur l’EEG, ces neurones ictogéniques émettent des bouffées de potentiels d’action à haute fréquence (Fig. 2B, C), lesquelles précèdent la décharge, souvent modérée, des autres neurones corticaux et des cellules thalamo-corticales correspondantes (Fig. 2C). L’hyperactivité des neurones des couches profondes du foyer cortical pourrait provenir d’une augmentation de la transmission glutamatergique (de type NMDA), combinée à une réduction de l’activité GABAergique de type A (9), ce qui pourrait également rendre compte de leur potentiel de membrane plus dépolarisé. Cependant, de récents résultats obtenus dans notre laboratoire indiquent que la décharge des neurones ictogéniques est négativement contrôlée par les interneurones locaux (Fig. 2E), démontrant ainsi la fonctionnalité du système GABAer- gique au sein du foyer cortical, et suggérant un effet inhibiteur sur les neurones ictogéniques. Il est également proposé que l’hyperactivité de ces neurones soit due à une modification d’excitabilité intrinsèque résultant d’une expression accrue de canaux sodiques voltage-dépendants (10) et/ou d’une réduction d’un courant cationique activé lors de l’hyperpolarisation (11). De manière cohérente avec leur propriété d’initiation des crises, les neurones des couches profondes du foyer présentent spontanément des oscillations membranaires (Fig. 2D) non signalées sur l’EEG de surface pouvant, par un effet de recrutement local progressif, embraser les circuits neuronaux du foyer (4). La compréhension des mécanismes cellulaires sous-tendant ces oscillations “anticipatrices” des crises permettrait de préciser les processus dynamiques de genèse et de généralisation des DPO à partir du foyer. L’ensemble de ces données fournit une base cellulaire pour l’hypothèse électroclinique, émergeante depuis peu, que les crises d’absence ne seraient pas au sens “classique” strictement généralisées mais “focales néocorticales”, se généralisant rapidement (10-15 ms chez le rat, 40 ms chez l’homme) aux deux hémisphères. Données humaines : implication du lobe frontal De récentes investigations EEG en “haute résolution” chez de jeunes patients atteints d’épilepsie-absence démontrent une implication du lobe frontal dans les processus dynamiques de genèse des DPO (3) (Fig. 1B). Par ailleurs, deux études en magnétoencéphalographie décrivent une origine frontale Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 DOSSIER Les épilepsies-absences Figure 2 - Propriétés morpho-fonctionnelles des neurones ictogéniques du GAERS. A. Microphotographie d’un neurone pyramidal, initiateur des crises, localisé dans les couches profondes du cortex somato-sensoriel du GAERS. B. Enregistrements simultanés des activités EEG (EEG foyer) et intracellulaires d’un neurone ictogénique du foyer cortical (intra-couche 5) lors d’une DPO. C. Alignement temporel (en fonction des pointes EEG du foyer, tracés du haut) des activités intracellulaires d’un neurone ictogénique du foyer, d’un neurone du cortex moteur (Cx Mot) et d’un neurone thalamo-cortical (thalamus). D. Les neurones du foyer peuvent présenter des oscillations intracellulaires (tracé du bas) isolées et non représentées dans l’EEG de surface correspondant (tracé du haut). E. Enregistrements intracellulaires d’un interneurone GABAergique (int. GABA) et d’un neurone pyramidal du foyer, alignés avec les pointes EEG correspondantes (tracés du haut). La décharge des interneurones est corrélée avec des potentiels synaptiques inhibiteurs (astérisques) qui interrompent la décharge dans les neurones pyramidaux (résultats non publiées). Les potentiels d’action ont été tronqués. A et D modifiés d’après (4). centrale des décharges (12) ou de fortes associations entre les cortex frontaux droit et gauche au moment de l’apparition des DPO, suivies d’une activation frontale latérale et pariétale mésiale au cours de la décharge (13). En période pré-critique, une étude en spectroscopie proche de l’infrarouge (Near-infrared spectroscopy : NIRS) a mis en évidence une augmentation de l’oxygénation frontale dans les 10 secondes précédant les crises Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 (14). Enfin, les données en IRM fonctionnelle montrent, soit une diminution du métabolisme en frontal et en temporopariétal (15-17) concomitante aux décharges, soit une activation frontale orbitale/médiale et pariétale, débutant plusieurs secondes avant le début des crises (18, 19). Dans tous les cas, l’activation frontale précède l’activation thalamique, avec une topographie spécifique pour chaque patient (18). Participation des noyaux thalamiques : maintien des oscillations paroxystiques Aucune donnée électro-clinique ou d’imagerie métabolique cérébrale ne démontre un déclenchement initial des DPO au sein des noyaux thalamiques. Ceci est corroboré par les nombreuses expériences électrophysiologiques et pharmacologiques réalisées dans divers modèles animaux de l’épilepsie-absence. 237 Les épilepsies-absences DOSSIER Chez le GAERS, les neurones thalamo-corticaux, notamment ceux se projetant vers le foyer cortical, ont un taux de décharge, durant les périodes critiques et inter-critiques, très inférieur à celui des neurones cortico-thalamiques correspondants (7). De plus, les potentiels d’action émis par ces neurones thalamiques lors de crises sont systématiquement “retardés” (≈ 9 ms) par rapport à ceux des neurones ictogéniques du foyer cortical (Fig. 2C) (7). Ce résultat est concordant avec l’analyse temporelle du flux d’information entre le foyer cortical et les noyaux thalamiques correspondants chez le GAERS démontrant une propagation unidirectionnelle, du cortex vers le thalamus, au moins durant la première seconde de la crise (7). De manière cohérente, une interruption de l’activité électrique dans le foyer cortical supprime les oscillations dans les neurones thalamiques alors que leur propre inactivation est sans effet sur les capacités endogènes du foyer à générer des DPO (7). Ce rôle “secondaire” des projections thalamo-corticales dans l’expression DPO a été également démontré dans un modèle pharmacologique félin dans lequel les neurones thalamiques sont fortement hyperpolarisés lors des paroxysmes corticaux et génèrent peu de potentiel d’action (20). La relative inhibition des neurones thalamo-corticaux lors des crises est vraisemblablement sous-tendue par des phénomènes synergiques, de réseaux et moléculaires, amplifiant l’inhibition synaptique dans les noyaux thalamiques de relais. Les neurones du noyau réticulaire du thalamus, principale source d’inhibition GABAergique des neurones thalamo-corticaux (Fig. 1A), présentent lors des DPO des décharges rythmiques, et en bouffées, de 238 potentiels d’action (21), résultant probablement d’une sur-activation des canaux calciques de type T (22). Cette hyperactivité des afférences GABAergiques produirait un accroissement de l’inhibition “tonique” de type GABA-A dans les neurones thalamiques, laquelle serait de surcroît accrue par un dysfonctionnement dans la recapture synaptique de GABA (23). Ainsi, la relativement faible activité des neurones thalamocorticaux lors des crises, mais néanmoins périodique et synchronisée, participerait, via des excitations rythmiques glutamatergiques des neurones corticothalamiques, à l’ “entraînement” et au maintien des oscillations paroxystiques cortico-thalamocorticales lors des DPO. Conclusions et perspectives L’épilepsie-absence est une épilepsie d’origine génétique multifactorielle, qui engage vraisemblablement des déficits fonctionnels dans le cortex et le thalamus, lesquels sont responsables de la genèse et du maintien d’oscillations synchrones anormales entre ces deux structures. Les données cliniques et fondamentales les plus récentes convergent vers une nouvelle hypothèse physiopathologique dans laquelle les circuits et leurs neurones corticaux constituent le “déclencheur” de la crise alors que les neurones thalamo-corticaux n’auraient pour fonction que de favoriser et de maintenir les processus rythmiques dans la boucle cortico-thalamo-corticale. Au sein de la région corticale initiatrice, considérée maintenant comme un véritable foyer épileptogénique, l’hyperactivité neuronale résulterait d’une synergie pathologique associant un accroissement d’excitabilité intrinsèque et un déséquilibre entre la transmission glutamatergique et GABAergique, cette dernière restant néanmoins fonctionnelle et inhibitrice, contrairement à d’autres formes d’épilepsie (24). La récente démonstration d’une sur-inhibition GABAergique des neurones thalamiques, cohérente avec le faible taux de décharge de ces neurones lors des crises, réfute la possibilité d’une origine thalamique des DPO et renforce l’hypothèse que le thalamus participe essentiellement au maintien de la cohérence temporelle dans les oscillations cortico-sous-corticales. Les processus dynamiques initiant les DPO au sein même du foyer ictogénique restent inconnus. Cependant, les oscillations, isolées ou synchrones, survenant dans le foyer au cours des périodes inter-critiques et précritiques constituent une piste prometteuse pour établir un schéma mécanistique complet des processus de déclenchement des absences. n Correspondance Dr Mathilde Chipaux Institut du Cerveau et de la Moelle épinière - INSERM U975 Faculté de Médecine de l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Porte 419 A 91 boulevard de l’Hôpital 75013 Paris E-mail : [email protected] Mots-clés : Epilepsie-absence, Physiopathologie, Foyer cortical, Décharge pointe-onde, EEG, Excitabilité, Ictogenèse, Cortex, Thalamus, GABA, EEG, Enfant, Modèles animaux Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 Les épilepsies-absences Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 tion in typical absence epilepsy. Nat Med 2009 ; 15 : 1392-8. 24. Huberfeld G, Wittner L, Clemenceau S et al. Perturbed chloride homeostasis and GABAergic signaling in human temporal lobe epilepsy. J Neurosci 2007 ; 27 : 9866-73. Pour en savoir plus - Betting LE, Mory SB, Lopes-Cendes I et al. MRI volumetry shows increased anterior thalamic volumes in patients with absence seizures. Epilepsy Behav 2006 ; 8 : 575-80. - Blumenfeld H. Consciousness and epilepsy: why are patients with absence seizures absent? Prog Brain Res 2005 ; 150 : 271-86. - Caplan R, Siddarth P, Gurbani S et al. Depression and anxiety disorders in pediatric epilepsy. Epilepsia 2005 ; 46 : 720-30. - Caplan R, Siddarth P, Stahl L et al. Childhood absence epilepsy: behavioral, cognitive, and linguistic comorbidities. Epilepsia 2008 ; 49 : 1838-46. - Clemens B, Bessenyei M, Piros P et al. Characteristic distribution of interictal brain electrical activity in idiopathic generalized epilepsy. Epilepsia 2007 ; 48 : 941-9. - Craiu D, Magureanu S, van Emde Boas W. Are absences truly generalized seizures or partial seizures originating from or predominantly involving the pre-motor areas? Some clinical and theoretical observations and their implications for seizure classification. Epilepsy Res 2006 ; 70 (Suppl 1) : S141-55. - Crunelli V, Leresche N. Childhood absence epilepsy: genes, channels, neurons and networks. Nat Rev Neurosci 2002 ; 3 : 371-82. - Fojtiková D, Brázdil M, Horký J et al. Magnetic resonance spectroscopy of the thalamus in patients with typical absence epilepsy. Seizure 2006 ; 15 : 533-40. - Gholipour T, Moeller F, Pittau F et al. Reproducibility of interictal EEG-fMRI results in patients with epilepsy. Epilepsia 2010 Nov 3, doi: 10.1111/j.15281167.2010.02768.x, Epub ahead of print. - Hamandi K, Salek-Haddadi A, Laufs H et al. EEG-fMRI of idiopathic and secondarily generalized epilepsies. Neuroimage 2006 ; 31 : 1700-10. - Holmes MD, Brown M, Tucker DM. Are “generalized” seizures truly generalized? Evidence of localized mesial frontal and frontopolar discharges in absence. Epilepsia 2004 ; 45 : 1568-79. - Hughes SW, Crunelli V. Thalamic mechanisms of EEG alpha rhythms and their pathological implications. Neuroscientist 2005 ; 11 : 357-72. - Hughes JR. Absence seizures: a review of recent reports with new concepts. Epilepsy Behav 2009 ; 15 : 404-12. - Jocić-Jakubi B, Jovanović M, Janković DS et al. Frontal-onset absences in children: associated with worse outcome? A replication study. Seizure 2009 ; 18 : 275-8. - Jones NC, Salzberg MR, Kumar G et al. Elevated anxiety and depressivelike behavior in a rat model of genetic generalized epilepsy suggesting common causation. Exp Neurol 2008 ; 209 : 254-60. - Labate A, Briellmann RS, Abbott DF et al. Typical childhood absence seizures are associated with thalamic activation. Epileptic Disord 2005 ; 7 : 373-7. - Lagae L, Pauwels J, Monté CP et al. Frontal absences in children. Eur J Paediatr Neurol 2001 ; 5 : 243-51. - Moeller F, Siebner HR, Wolff S et al. Simultaneous EEG-fMRI in drug-naive children with newly diagnosed absence epilepsy. Epilepsia 2008 ; 49 : 1510-9. - Stefan H, Rampp S. Current clinical-neurophysiological findings in absence epilepsies. Nervenarzt 2009 ; 80 : 378-85. - Tucker DM, Brown M, Luu P et al. Discharges in ventromedial frontal cortex during absence spells. Epilepsy Behav 2007 ; 11 : 546-57. - Salek-Haddadi A, Lemieux L, Merschhemke M et al. Functional magnetic resonance imaging of human absence seizures. Ann Neurol 2003 ; 53 : 663-7. - Sirén A, Kylliäinen A, Tenhunen M et al. Beneficial effects of antiepileptic medication on absence seizures and cognitive functioning in children. Epilepsy Behav 2007 ; 11 : 85-91. - Ureña-Hornos T, Rubio-Rubio R, Gros-Esteban D et al. Absence epilepsy. A review of our 14 years’ experience. Rev Neurol 2004 ; 39 : 1113-9. 239 DOSSIER Bibliographie 1. Hirsch E, Panayiotopoulos CP. Epilepsie-absences de l’enfance et syndromes apparentés. In : Roger J, Bureau M, Dravet Ch, Genton P, Tassinari CA, Wolf P, eds) Les syndromes épileptiques de l’enfant et de l’adolescent (4th edn). Londres : John Libbey, 2005 : 315-36. 2. Meeren H, van Luijtelaar G, Lopes da Silva F et al. Evolving concepts on the pathophysiology of absence seizures: the cortical focus theory. Arch Neurol 2005 ; 62 : 371-6. 3. Bosnyakova D, Gabova A, Zharikova A et al. Some peculiarities of timefrequency dynamics of spike-wave discharges in humans and rats. Clin Neurophysiol 2007 ; 118 : 1736-43. 4. Polack PO, Guillemain I, Hu E et al. Deep layer somatosensory cortical neurons initiate spike-and-wave discharges in a genetic model of absence seizures. J Neurosci 2007 ; 27 : 6590-9. 5. Depaulis A, Van Luijtelaar EL. In : Pitkänen A, Schwartzkroin PA, Moshé SL, eds. Models of seizures and epilepsy, eds. London : Elsevier Academic press, 2005 : 233-48. 6. Meeren HK, Pijn JP, van Luijtelaar EL et al. Cortical focus drives widespread corticothalamic networks during spontaneous absence seizures in rats. J Neurosci 2002 ; 22 : 1480-95. 7. Polack PO, Mahon S, Chavez M et al. Inactivation of the somatosensory cortex prevents paroxysmal oscillations in cortical and related thalamic neurons in a genetic model of absence epilepsy. Cereb Cortex 2009 ; 19 : 2078-91. 8. Polack PO, Charpier S. Ethosuximide converts ictogenic neurons initiating absence seizures into normal neurons in a genetic model. Epilepsia 2009 ; 50 : 1816-20. 9. D’Antuono M, Inaba Y, Biagini G et al. Synaptic hyperexcitability of deep layer neocortical cells in a genetic model of absence seizures. Genes Brain Behav. 2006 ; 5 : 73-84. 10. Klein JP, Khera DS, Nersesyan H et al. Dysregulation of sodium channel expression in cortical neurons in a rodent model of absence epilepsy. Brain Res 2004 ; 1000 (1-2) : 102-9. 11. Strauss U, Kole MH, Bräuer AU et al. An impaired neocortical Ih is associated with enhanced excitability and absence epilepsy. Eur J Neurosci 2004 ; 19 : 3048-58. 12. Le Van Quyen M, Amor F, Rudrauf D. Exploring the dynamics of collective synchronizations in large ensembles of brain signals. J Physiol (Paris) 2006 ; 100 ; 194-200. 13. Westmijse I, Ossenblok P, Gunning B et al. Onset and propagation of spike and slow wave discharges in human absence epilepsy: a MEG study. Epilepsia 2009 ; 50 : 2538-48. 14. Roche-Labarbe N, Zaaimi B, Berquin P et al. NIRS-measured oxy- and deoxyhemoglobin changes associated with EEG spike-and-wave discharges in children. Epilepsia 2008 ; 49 : 1871-80. 15. Laufs H, Lengler U, Hamandi K et al. Linking generalized spike-andwave discharges and resting state brain activity by using EEG/fMRI in a patient with absence seizures. Epilepsia 2006 ; 47 : 444-8. 16. Hamandi K, Salek-Haddadi A, Laufs H et al. EEG-fMRI of idiopathic and secondarily generalized epilepsies. Neuroimage 2006 ; 31 : 1700-10. 17. Szaflarski JP, DiFrancesco M, Hirschauer T et al. Cortical and subcortical contributions to absence seizure onset examined with EEG/fMRI. Epilepsy Behav 2010 ; 18 : 404-13. 18. Moeller F, LeVan P, Muhle H et al. Absence seizures: individual patterns revealed by EEG-fMRI. Epilepsia 2010 ; 51 : 2000-10. 19. Bai X, Vestal M, Berman R et al. Dynamic time course of typical childhood absence seizures: EEG, behavior, and functional magnetic resonance imaging. J Neurosci 2010 ; 30 : 5884-93. 20. Timofeev I, Steriade M. Neocortical seizures: initiation, development and cessation. Neuroscience 2004 ; 123 : 299-336. 21. Slaght SJ, Leresche N, Deniau JM et al. Activity of thalamic reticular neurons during spontaneous genetically determined spike and wave discharges. J Neurosci 2002 ; 22 : 2323-34. 22. Tsakiridou E, Bertollini L, de Curtis M et al. Selective increase in T-type calcium conductance of reticular thalamic neurons in a rat model of absence epilepsy. J Neurosci 1995 ; 15 : 3110-7. 23. Cope DW, Di Giovanni G, Fyson SJ et al. Enhanced tonic GABAA inhibi- Les épilepsies-absences DOSSIER 2 Les absences chez l’enfant Le diagnostic étiologique n La mise en évidence d’absences chez l’enfant doit être suivie par une démarche syndromique qui tient compte de l’âge de début, de la séméiologie des crises, de l’examen neurologique, du développement psychomoteur et de l’EEG intercritique et critique. Il est donc indispensable de pouvoir enregistrer des absences avant de débuter un traitement et un éventuel bilan étiologique. syndromes épileptiques avec absences L’épilepsie-absence de l’enfant (EAE) Le début se situe généralement entre 4 et 8 ans. Les épisodes de rupture de contact sont isolés ou associés à des clonies des paupières sans valeur pronostique particulière. Les absences sont pluriquotidiennes, favorisées par l’hyperpnée. L’EEG intercritique est généralement normal, il peut tout au plus retrouver quelques rares pointes-ondes généralisées, mais il doit être correctement organisé. Au cours des absences, on retrouve des pointes-ondes généralisées à 3 Hz de début et fin brutaux. La guérison est la règle, la survenue de crises généralisées (dans 40 % des cas environ), est un élément péjoratif (1). L’EAE est une épilepsie généralisée d’origine génétique dans la nouvelle classification des épilepsies proposée par la Ligue internationale contre l’épilepsie. L’origine génétique de ces épi- *Service de Neurologie Pédiatrique, Hôpital de la Timone, Marseille 240 Mathieu Milh et Nathalie Villeneuve* lepsies est attestée par la grande fréquence de cas familiaux ; cependant, les formes monogéniques sont exceptionnelles et, la plupart du temps, il s’agit de formes familiales d’hérédité complexe. Ainsi, au sein d’une même famille, peuvent cohabiter plusieurs types d’épilepsies génétiques : convulsions fébriles plus, épilepsie avec crises généralisées, épilepsie myoclonique juvénile et épilepsie-absence de l’enfant ou de l’adolescent. Plusieurs anomalies génétiques ont été associées à la survenue d’EAE, le plus souvent au sein d’autres crises généralisées, avec une pénétrance incomplète. Une mutation dominante du gène codant pour la sous-unité gamma du récepteur GABA-A (GABRG2) a été identifiée dans une famille de GEFS plus avec plusieurs individus présentant des absences (2). Une anomalie dominante de GABRB3 a été retrouvée dans une famille d’EAE avec myoclonies palpébrales et photosensibilité (3). Des variants alléliques du gène CACNA 1H ont été associés à la survenue d’EAE et sont considérés comme des facteurs de susceptibilité, plus que des facteurs étiologiques (4). L’épilepsie-absence juvénile Les absences débutent après 8 ans. Elles sont souvent moins nombreuses et plus longues que dans l’EAE. La persistance des absences à l’âge adulte est plus fréquente (30 à 50 %), ainsi que la survenue de crises généralisées (1). L’épilepsie myoclonique juvénile (EMJ) Cette épilepsie débute, après 12 ans, par des myoclonies et des crises généralisées tonicocloniques, le plus souvent matinales. Les absences sont rapportées dans 1/3 des cas, mais elles sont rarement au premier plan. Deux gènes ont été associés aux EMJ : GABRA1 en 2002 et EFHC1 en 2004, mais de nombreux autres loci de susceptibilité existent pour cette épilepsie (5, 6). Les absences “myocloniques” L’âge de début est globalement celui de l’EAE, mais les absences sont associées à des secousses myocloniques des membres supérieurs. Il existe un retard mental dans plus de 50 % des cas ; il s’agit probablement dans ce cas d’un trouble du développement neurologique et non d’une épiNeurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 lepsie idiopathique, qu’il faut considérer comme tel sur le plan étiologique (1). clinico-électro-encéphalographique du terme. Le syndrome de De Vivo Le syndrome de Doose : épilepsie myoclonoastatique Elle débute entre 2 et 5 ans par des crises tonico-cloniques, des chutes myoclono-astatiques et parfois des crises toniques. Les absences sont rarement au premier plan. L’EEG intercritique montre une activité de fond lente et des bouffées de pointeondes généralisées à 2Hz. L’enregistrement des crises myoclono-astatiques est indispensable pour porter le diagnostic. L’évolution est en règle favorable en quelques années (1). le syndrome de Lennox-Gastaut L’âge de début se situe entre 2 et 8 ans. Il débute par des crises toniques et des absences atypiques. Les absences atypiques comportent un arrêt de l’activité, une hypotonie plus ou moins marquée, une rupture de contact plus ou moins complète et, sur l’EEG, des pointes-ondes lentes bilatérales, entre 1 et 2,5 Hz, irrégulières en fréquence et en amplitude, dont le début et la fin sont beaucoup moins nets que dans l’EAE. Des états d’absence prolongés sont fréquents. Les causes sont multiples, le plus souvent anoxo-ischémiques ou malformatives, et la réalisation d’une IRM cérébrale est indispensable dans le bilan étiologique initial de ce syndrome (1). Le diagnostic différentiel Certaines épilepsies de l’enfant peuvent comporter des épisodes de rupture de contact qui ne sont pas des absences au sens Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 Ce syndrome épileptique peut à la fois être considéré comme une étiologie d’épilepsie-absence typique ou atypique, mais aussi comme un diagnostic différentiel, avec des aspects EEG de pointes-ondes dégradées survenant en bouffées, sans manifestations cliniques évidentes. Des épisodes de chute de tête, de secousses myocloniques, de ruptures prolongées du contact parfois associés à une modification du tonus ont été observés. En dehors du jeune âge de l’épilepsie, l’association des crises au jeun doit être recherchée et doit faire évoquer le diagnostic. La forme classique débute par une épilepsie de la première année de vie, associée à des mouvements oculaires anormaux, une microcéphalie acquise et, plus tard, un retard mental, une ataxie, une dysarthrie et une spasticité et des dyskinésies paroxystiques. Le type d’épilepsie est variable, mais l’entrée dans la maladie par une épilepsie-absence précoce est souvent décrite. En 2009, Suls et al. ont analysé GLUT1 chez 34 patients ayant débuté des absences avant l’âge de 4 ans, ils ont retrouvé une anomalie chez 4 patients, soit 12 % (7). Les absences débutaient entre 1 et 3 ans, considérées comme typiques, suivies de crises généralisées dans 2 cas. De manière intéressante, ces patients avaient tous un PC normal, aucun n’avait d’autres symptômes neurologiques francs et 2 patients avaient un niveau intellectuel normal en fin de suivi (7 et 28 ans respectivement). La recherche d’un déficit en transporteur du glucose par mu- tation de GLUT1 est donc fortement recommandée si les absences débutent avant l’âge de 4 ans, même en l’absence de microcéphalie et d’autres anomalies de l’examen neurologique. Le diagnostic est fait par l’étude du ratio glycorachie/glycémie qui est abaissé (valeur normale : 0,6). Idéalement, la ponction lombaire doit être faite à jeun pour augmenter sa sensibilité. Dans notre série de 5 patients avec mutation de GLUT1, 2 se sont présentés avec une épilepsie-absence précoce (12 et 18 mois respectivement - Fig. 1 a et b). La reconnaissance de cette pathologie a une incidence sur la prise en charge, en effet, le régime cétogène est le seul traitement ayant prouvé son efficacité sur l’épilepsie (8). La maladie de Lafora Il s’agit d’une épilepsie myoclonique progressive qui peut débuter par des absences isolées, mais qui évolue en quelques années vers une épilepsie plus complexe, avec des crises généralisées, des myoclonies erratiques et des crises occipitales. L’EEG retrouve initialement des anomalies généralisées en bouffées, puis il se ralentit avec des anomalies qui prédominent dans les régions postérieures. La détérioration mentale devient évidente après quelques années d’évolution. Deux gènes expliquent l’immense majorité des cas de Lafora : EPM2A et EPM2B, mais il existe probablement un troisième locus (9, 10). Les épilepsies partielles idiopathiques atypiques L’épilepsie partielle idiopathique est une épilepsie fréquente de l’enfant, qui débute entre 3 et 13 ans. 241 DOSSIER Les épilepsies-absences Les épilepsies-absences DOSSIER Le diagnostic de la forme classique est facile, avec des crises liées au sommeil, intéressant essentiellement la sphère oropharyngée, plus ou moins un membre, avec une rupture partielle du contact et un bavage per et post-critique important. Le diagnostic est confirmé par l’EEG, qui montre des pointes dites fonctionnelles caractéristiques, dans les régions centrotemporales, d’allure bi- ou triphasique, en bouffées, qui ont la particularité d’être activées pendant le sommeil. Le tracé de fond est normal. Les crises sont en règle rares et le traitement doit être évité si possible. A côté des formes classiques, il existe des formes atypiques beaucoup plus rares, mais non exceptionnelles. Ces formes sont caractérisées par la survenue, en plus des crises “classiques”, d’autres types de crises, diurnes, à type de myoclonies péri-orales continues pendant plusieurs minutes, isolées ou associées à une discrète modification du tonus et de la conscience. Ces crises sont volontiers pluriquotidiennes, l’EEG peut montrer de longues séquences de pointesondes prédominant dans les régions centro-temporales, mais pouvant être prises pour des pointes-ondes généralisées, faisant alors porter à tort le diagnostic d’épilepsie myoclonoastatique. La reconnaissance de cette forme d’épilepsie partielle atypique est importante car le traitement est très différent des autres épilepsies avec absence ; en effet la lamotrigine, mais aussi le valproate tendent à aggraver les épilepsies partielles atypiques et doivent être évités. 242 Figure 1 - Epilepsie-absence précoce chez des enfants de 12 (a) et 18 mois respectivement, avec mutation du gène GLUT1 (syndrome de De Vivo). Le syndrome du chromosome 20 en anneau Ce syndrome est caractérisé par une épilepsie pharmacorésistante et un retard mental variable. Les crises débutent entre la naissance et l’âge adulte. Un élément caractéristique de ce syndrome est l’existence d’états de mal épileptiques non convulsifs se traduisant par des ruptures de contact prolongées. L’EEG retrouve alors des longues séquences rythmiques de pointes-ondes à 2/3 Hz de grande amplitude prédominant dans les régions frontales. Ces épisodes sont rares avant 10 ans. Le diagnostic peut être fait sur un caryotype standard, mais, en cas de forte suspicion, il faut demander spécifiquement l’étude de 100 à 200 mitoses, car il s’agit constamment de mosaïques son matiques. Correspondance Dr Mathieu Milh Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille Service de Neurologie Pédiatrique Hôpital de la Timone 264 rue Saint-Pierre 13005 Marseille E-mail : [email protected] Mots-clés : Epilepsie-absence de l’enfant, Epilepsie-absence juvénile, Epilepsie myoclonique juvénile, Absences myocloniques, Syndrome de Doose, Syndrome de LennoxGastaut, Syndrome de De Vivo, Maladie de Lafora, Syndrome du chromosome 20 en anneau, Clinique, Diagnostic, Diagnostic différentiel Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 Les épilepsies-absences Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 6. Cossette P, Liu L, Brisebois K et al. Mutation of GABRA1 in an autosomal dominant form of juvenile myoclonic epilepsy. Nature Genet. 2002 ; 31 : 184-9. 7. Suls A, Mullen SA, Weber YG et al. Early-onset absence epilepsy caused by mutations in the glucose transporter GLUT1. Ann Neurol 2009 ; 66 : 415-9. 8. Wang D, Pascual JM, Yang H et al. Glut-1 deficiency syndrome: clinical, genetic, and therapeutic aspects. Ann Neurol 2005 ; 57 : 111-8. 9. Minassian BA, Lee JR, Herbrick JA et al. Mutations in a gene encoding a novel protein tyrosine phosphatase cause progressive myoclonus epilepsy. Nature Genet 1998 ; 20 : 171-4. 10. Chan EM, Young EJ, Ianzano L et al. Mutations in NHLRC1 cause progressive myoclonus epilepsy. Nature Genet 2003 ; 35 : 125-7. 243 DOSSIER Bibliographie 1. Dulac O, Ploin P, Bulteau C. Epilepsies de l’enfant. Neurologie Pédiatrique. Flammarion, 2010 : 333-35. 2. Marini C, Harkin LA, Wallace RH et al. Childhood absence epilepsy and febrile seizures: a family with a GABA(A) receptor mutation. Brain 2003 ; 126 : 230-40. 3. Tanaka M, Olsen RW, Medina MT et al. Hyperglycosylation and reduced GABA currents of mutated GABRB3 polypeptide in remitting childhood absence epilepsy. Am J Hum Genet 2008 ; 82 : 1249-61. 4. Chen Y, Lu J, Pan H et al. Association between genetic variation of CACNA1H and childhood absence epilepsy. Ann Neurol 2003 ; 54 : 239-43. 5. Suzuki T, Delgado-Escueta AV, Aguan K et al. Mutations in EFHC1 cause juvenile myoclonic epilepsy. Nature Genet 2004 ; 36 : 842-9. Les épilepsies-absences DOSSIER 3 Retentissement neuropsychologique des épilepsies-absences Les troubles neuropsychologiques et comportementaux n Si les crises de l’épilepsie-absence sont habituellement bien contrôlées par le traitement antiépileptique et disparaissent dans l’enfance, des troubles neuropsychologiques sont rapportés. Ils peuvent pénaliser le rendement scolaire des enfants. L e diagnostic d’épilepsieabsence de l’enfant (EAE) ou de l’adolescent (EAA) repose sur des critères électrocliniques bien définis et dont les composantes génétiques et développementales sont maintenant clairement établies (1). Si les crises sont habituellement bien contrôlées par le traitement antiépileptique (TAE) et disparaissent dans l’enfance, des troubles neuropsychologiques sont rapportés. Ils peuvent pénaliser le rendement scolaire de ces patients (2). Il s’agit le plus souvent de difficultés attentionnelles, d’une hyperactivité motrice, d’une lenteur et/ ou de désordres anxieux tout à fait spécifiques. Le dépistage de ces difficultés doit être systématique en consultation et doit conduire à des prises en charge spécifiques sur le plan scolaire et parfois rééducatif. *Fondation Ophtalmologique A. de Rothschild, Unité de Neurochirurgie Pédiatrique, Paris ; Hôpital Robert-Debré, Service de Neurologie Pédiatrique, Paris ; Inserm, U663, Paris ; Université Paris Descartes, Groupe de Neuropsychologie du Développement 244 Fréquence des troubles cognitifs Le caractère de “bénignité” dans l’EAE a depuis longtemps été controversé en raison du retentissement neuropsychologique, comportemental, langagier et scolaire (3, 4). • Echenne et al. (3) retrouvent une atteinte de la mémoire, une lenteur dans le travail scolaire, de moins bonnes habiletés motrices et des troubles d’hyperactivité dans 30 à 50 % des cas. • Récemment, l’étude menée par Glauser et al. (5) chez 453 enfants avec EAE a montré qu’avant tout traitement, 35 % d’entre eux présentaient un déficit attentionnel ; ce déficit persistait malgré l’arrêt des crises sous traitement antiépileptique. • Dans une étude incluant 69 enfants avec EAE appareillés à 103 enfants contrôles, Caplan et al. (6) ont mis en évidence des troubles comportementaux et/ou émo- Christine Bulteau* tionnels chez 61 % d’entre eux (contre 15 % dans la population contrôle), qui étaient principalement un trouble d’hyperactivité et un déficit attentionnel (THADA) et, à un moindre degré, une anxiété ou des plaintes somatiques. Les auteurs rapportaient également des difficultés linguistiques (43 %) ou des déficits cognitifs subtils (25 %). Ces troubles étaient d’autant plus sévères que la maladie était ancienne, les crises fréquentes et le traitement antiépileptique (TAE) lourd. Seulement 23 % des patients bénéficiaient d’une prise en charge adaptée. • Wirell et al. (7) ont étudié le devenir à l’âge adulte de 55 patients avec EAE, comparés à 61 patients avec une arthrite chronique juvénile. La différence était significative entre ces deux groupes (p < 0,001) avec un niveau scolaire plus faible, des difficultés psycho-sociales et émotionnelles plus importantes en cas d’EAE, surtout lors de la persistance des crises. Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 Types de troubles neuro­ psychologiques Contrairement à certains syndromes épileptiques où les troubles neuropsychologiques sont bien caractérisés (syndrome de Landau-Kleffner, épilepsies avec POCS), le profil cognitif des EAE est moins bien décrit. Les déficits cognitifs concernent principalement (4, 6, 8-10) : - les processus attentionnels, - les capacités visuo-spatiales, - et la mémoire non verbale en rappel différé. • Pavone (8) a étudié un groupe de 16 patients avec EAE appareillés à 16 enfants contrôles. Tous les enfants étaient droitiers, avec un âge moyen de 9,3 ans (6 à 16 ans). 13/16 des patients avec EAE étaient libres de crises sous TAE (le plus souvent en monothérapie), confirmé par l’interrogatoire des parents et par un EEG prolongé. Les patients avec EAE présentaient un QI plus faible (90,8 ± 15,4 contre 103,2 ± 6,3) et des troubles de la mémoire non verbale en rappel différé. Par contre, il n’existait pas de différence entre les deux groupes aux épreuves de langage. L’effet du traitement restait difficile à évaluer. Ces déficits cognitifs entraînaient des difficultés d’apprentissages chez la majorité d’entre eux. Il n’y avait pas de corrélation entre la durée de la rémission et l’atteinte cognitive. Les déficits étaient plus marqués lorsque les crises avaient débuté avant l’âge de 4 ans. • Les troubles attentionnels ont été parfois évalués par des questionnaires incluant le déficit attentionnel dans le spectre des Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 troubles psychopathologiques (6, 7). Sont ainsi rapportés un THADA, des désordres anxieux, des problèmes attentionnels, des troubles de la pensée et un comportement retrait. D’autres études retrouvent un déficit attentionnel net lors de tâches cognitives spécifiques, telles que la mesure de l’empan et des épreuves de tapping (4). • Vega et al. (10) ont étudié le rôle des variables médicales dans l’apparition de déficit attentionnel chez 36 patients avec EAE comparés à 46 contrôles, âgés de 6 à 16 ans. Le groupe des enfants avec EAE avaient plus de problèmes d’hyperactivité motrice et d’inattention et nécessitaient plus souvent une supervision par un adulte. Les troubles étaient d’autant plus marqués que la maladie était ancienne et les crises persistantes. • Ce critère de l’effet de l’âge de début des crises sur le pronostic des EAE reste controversé en raison du petit nombre de patients rapportés dans chaque étude (11). Verrotti et al. (12) ont réalisé une étude multicentrique sur le devenir de 40 enfants ayant débuté des absences avant l’âge de 3 ans. L’âge moyen de début des absences était de 26,4 ± 7,1 (12 à 36 mois) avec une prédominance de garçons (23/40) et des antécédents familiaux de convulsions fébriles (CF) ou des crises d’épilepsie dans 41 % des cas ; de plus, 33 % avaient aussi des antécédents personnels de CF. Les crises ont été contrôlées chez 90 % des enfants traités par une monothérapie (N = 31), contre 43 % de ceux traités en bithérapie (N = 7) et 2 n’ont reçu aucun traitement en raison d’une guérison spontanée de l’épilepsie (arrêt des absences et normalisation de l’EEG) quelques mois après le début. Ces patients ont été suivis sur une période de 2,1 à 14,9 ans et 85 % d’entre eux présentaient une efficience intellectuelle normale. Pour les autres (N = 6), il existait un retard mental léger à moyen parmi lesquels, 4 avaient encore des crises. • Les difficultés attentionnelles retrouvées chez les enfants avec EAE diffèrent de celles mises en évidence chez les enfants avec THADA sans épilepsie. En particulier, les enfants avec THADA sans épilepsie obtiennent des scores plus bas aux questions sur l’inattention, sur leur difficulté à terminer une tâche ou à ne pas finir leurs devoirs (9). Mécanismes de ces troubles neuro­ psychologiques Pour certains auteurs, le déficit attentionnel serait présent dans les épilepsies généralisées idiopathiques, conséquence du dysfonctionnement des réseaux neuronaux entre le thalamus et les régions sous-corticales (4). D’autres soutiennent l’idée que ce déficit est un marqueur de l’EAE (15). Des études d’EEG-vidéo couplées à l’imagerie par IRMf pendant le déroulement des absences ont montré une augmentation discrète et précoce des activations dans le cortex frontal orbito-médial et le cortex pariétal médial latéral environ 5 secondes avant le début de la crise et suivie d’une diminution des activations dans les mêmes régions se poursuivant plus de 20 secondes après la fin de la crise (13). Pendant la décharge 245 DOSSIER Les épilepsies-absences Les épilepsies-absences DOSSIER de PO, il existe une augmentation des activations dans le thalamus, le cortex frontal et le cortex primaire moteur somatosensoriel, auditif et visuel et une diminution des activations dans le cortex pariétal médial, le gyrus cingulaire et les ganglions de la base. Ces données suggèrent que la décharge de PO pendant une absence met en jeu un réseau cortical-sous-cortical normalement impliqué dans les mécanismes attentionnels et les processus primaires de traitement de l’information (14). Les décharges de PO viendraient interrompre les relations interhémisphérique antérieures du cortex frontal, le gyrus cingulaire et le thalamus (10). La persistance de troubles neuropsychologiques entre les crises et même lorsqu’elles sont contrôlées pourraient être expliquée par des anomalies cérébrales développementales. Caplan et al. (6) ont mis en évidence une diminution de volume de la substance grise (SG) en IRM dans le gyrus orbitofrontal gauche et les 2 lobes temporaux, dans une population de 26 enfants avec EAE comparés à 37 enfants sans épilepsies. Ces résultats corroborent les études faites chez le rat GAERS qui ont montré que la décharge épileptique était initiée dans la région de la face du cortex somato-sensoriel en faveur d’une hypothèse focale et frontale des EA (16) (Voir article de M. Chipaux et S. Charpier sur la physiopathologie en p. 234). Discussion et prise en charge scolaire et rééducative Les données de la littérature montrent que poser un diagnostic d’EA nécessite de faire un dépistage systématique des troubles neuropsychologiques associés. Il s’agit le plus souvent de difficultés attentionnelles qui persistent même lorsque les crises disparaissent et que l’EEG se normalise sous traitement. Il ne faut donc pas les banaliser. Ces troubles cognitifs surviennent à un moment où l’enfant est en plein apprentissage de la lecture et du calcul et peuvent générer un retard des acquisitions parfois même un échec scolaire. Des aménagements pédagogiques simples suffisent souvent à aider l’enfant et le médecin peut faire un certificat dans ce sens (annexe). Parfois, un bilan neuropsychologique est nécessaire pour poser un diagnostic plus subtil de troubles cognitifs et mettre en place des aides rééducatives. Parfois, une Aide de Vie Scolaire (AVS) peut être utile et nécessite qu’un dossier MDPH soit réalisé afin qu’un Projet Personnel de Scolarisation (PPS) soit mis en place. Grâce à ces aménagements pédagogiques et, éventuellement, à certaines aides rééducatives, on évite la spirale de l’échec scolaire. Dans la mesure où le potentiel intellectuel est préservé, une telle prise en charge globale de l’épilepsie et des troubles associés devrait réduire l’impact des troubles psycho-sociaux à long terme. n Correspondance Dr Christine Bulteau Fondation Ophtalmologique A. de Rothschild Unité de Neurochirurgie Pédiatrique 25 rue Manin - Paris 75019 E-mail : [email protected] Mots-clés : Epilepsie-absence, Enfant, Neuropsychologie, Troubles cognitifs, Déficit attentionnel, Capacités visuospatiales, Mémoire, Hyperactivité, Troubles d’apprentissages scolaires, Scolarité Bibliographie 1. Berg AT, Berkovic SF, Brodie MJ et al. Revised terminology and concepts for organization of seizures and epilepsies: report of the ILAE commission on Classification and terminology, 2005-2010. Epilepsia 2010 : 51 : 676-85. 2. Trinka E, Baumgartner S, Unterberger I et al. Long-term prognosis for childhood and juvenile absence epilepsy. J Neurol 2004 : 251 : 1235-41. 3. Echenne B, Cheminal R, Roubertie A et al. Are idiopathic generalized epilepsies of childhood really benign? Epileptic Disord 2001 : 3 : 67-72. 4. Henkin Y, Sadeh M, Shabtai S et al. Cognitive function in idiopathic generalized epilepsy in childhood. Dev Med Child Neurol 2005 : 47 : 126-32. 5. Glauser TA, Cnaan A, Shinnar S et al. Ethosuximide, valproic acid, and lamotrigine in childhood absence epilepsy. N Engl J Med 2010 : 362 : 790-9. 6. Caplan R, Siddarth P, Stahl L et al. Childhood absence epilepsy: behavioral, cognitive, and linguistic comorbidities. Epilepsia 2008 : 49 : 1838-46. 7. Wirrell EC, Camfield CS, Camfield PR et al. Long-term psychosocial outcome in typical absence epilepsy. Sometimes a wolf in sheeps’ clothing. Arch Pediatr Adolesc Med 1997 : 151 : 152-8. 8. Pavone P, Bianchini R, Trifiletti RR et al. Neuropsychological assessment in children with absence epilepsy. Neurology 2001 : 56 : 1047-51. 9. Williams J, Sharp GB, Delos Reyes E et al. Symptom differences in children 246 with absence seizures versus inattention. Epilepsy Behav 2002 : 3 : 245-8. 10. Véga C, Vestal M, DeSalvo M et al. Differenciation of attention-related problems in childhood absence epilepsy. Epilepsy Behav 2010 : 19 : 82-5. 11. Chaix Y, Daquin G, Monteiro F et al. Absence epilepsy with onset before the age of three years: a heterogeneous and often severe condition. Epilepsia 2003 : 44 : 944-9. 12. Verrotti A, Olivieri C, Agostinelli S et al. Long term outcome in children affected by absence with onset before the age of three years. Epilepsy Behav 2011 : 20 : 366-9. 13. Bai X, Vestal M, Berman R et al. Dynamic time course of typical childhood absence seizures: EEG, behavior, and functional magnetic resonance imaging. J Neurosci 2010 : 30 : 5884-93. 14. Berman R, Negishi M, Vestal M et al. Simultaneous EEG, fMRI, and behavior in typical childhood absence seizures. Epilepsia 2010 : 51 : 2011-22. 15. Caplan R, Levitt J, Siddarth P et al. Frontal and temporal volumes in childhood absence epilepsy. Epilepsia 2009 : 50 : 2466-72. 16. Polack PO, Guillemain I, Hu E et al. Deep layer somatosensory cortical neurons initiate spike-and-wave discharges in a genetic model of absences seizures. J Neurosci 2007 : 27 : 6590-99. Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 Les épilepsies-absences DOSSIER ANNEXE CERTIFICAT MÉDICAL Je, soussigné(e) Docteur .................................................................................................................................. certifie suivre ..................................................................................................................................................... né(e) le ..........................., pour une épilepsie-absence infantile ayant débuté vers l’âge de ................. ans et bien contrôlée par un seul anti-épileptique. Il n’existe plus aucune manifestation depuis ........................... Il est bien connu que cette forme d’épilepsie peut s’associer à des troubles neuropsychologiques spécifiques à type de déficit attentionnel et de concentration, de lenteur et troubles anxieux1,2 . Dans ces cas, il peut exister des troubles d’apprentissages scolaires avec, très souvent, un retard d’acquisition de la lecture. Habituellement, ces troubles vont s’amender au fur et à mesure de l’évolution lorsque l’épilepsie est contrôlée et que l’enfant devient adolescent. Ainsi, certains aménagements pédagogiques doivent être proposés pendant la période aiguë de la maladie pour limiter et prévenir les troubles des acquisitions scolaires : d mettre l’enfant au premier rang ; d s’assurer de sa compréhension en lui demandant de répéter la consigne ; d vérifier qu’il prend le bon cahier et que l’ensemble des devoirs a été noté ; d proposer des évaluations orales autant que faire se peut ; d laisser un temps supplémentaire lors des contrôles écrits ou proposer des exercices à trous. Certificat à l’attention de M. ou Mme .............................................................................................................., Professeur des écoles de l’enfant .................................................................................................................... né(e) le ......................... et scolarisé(e) à l’école ................................................. à ........................................ (Aux bons soins des parents) Fait à .........................................., le .................................... Docteur 1. Caplan R, Siddarth P, Stahl L et al. Childhood absence epilepsy: behavioral, cognitive, and linguistic comorbidities. Epilepsia 2008 : 49 : 1838-46. 2. Pavone P, Bianchini R, Trifiletti RR et al. Neuropsychological assessment in children with absence epilepsy. Neurology 2001 : 56 : 1047-51. Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 247 Les épilepsies-absences DOSSIER 4 Traitement des épilepsies avec crises de type absences Quelle prise en charge chez l’enfant et l’adolescent ? n Nous aborderons ici la stratégie thérapeutique des épilepsies-absences de l’enfant, avec une actualité récente issue d’un essai randomisé américain. Nous discuterons également de la prise en charge des épilepsies-absences de l’adolescent qui est différente du fait de la survenue des crises tonicocloniques généralisées. Enfin, nous aborderons les possibilités thérapeutiques en cas d’épilepsie avec des absences pharmacorésistantes. I l existe plusieurs syndromes épileptiques comportant des crises de type absence. Parmi les traitements disponibles, un certain nombre de molécules sont bien identifiées comme ayant une efficacité particulière sur les crises absences, telles que l’éthosuximide, la lamotrigine et le valproate. D’un autre côté, certains antiépileptiques peuvent être responsables d’une augmentation de la survenue des absences. Il faut savoir que la carbamazépine et l’oxcarbazépine ont un rôle constamment aggravant dans le cas des absences. Les données cliniques et expérimentales sont assez robustes à ce sujet (1). Mais les erreurs thérapeutiques dans ces syndromes sont rares. Prise en charge thérapeutique chez l’enfant Jusqu’à récemment, il n’y avait pas de données comparatives permettant un choix de traite- * Service de Neurologie Pédiatrique, et INSERM U676, Hôpital Robert Debré, Paris 248 ment parmi les molécules ayant une efficacité sur les absences de l’épilepsie-absence de l’enfant. • Le groupe d’experts européens, faisant part de son opinion de traitement en 2007 (2), mettait en premier choix de traitement le valproate pour les épilepsiesabsences de l’enfant, ainsi que l’éthosuximide et la lamotrigine. Il ne s’exprimait pas sur un ordre de priorité sur un traitement par rapport à un autre, mais le valproate obtenait dans cette évaluation le meilleur score pour une utilisation en première intention. • L’essai américain publié en 2010 permet maintenant d’avoir une vision plus claire sur le traitement à utiliser en première intention (3). Il s’agit d’une étude randomisée en double aveugle comparant ces trois molécules (éthosuximide, lamotrigine, valproate). Le critère de jugement principal était la disparition des absences après 16 semaines de traitement et le critère secondaire était la présence d’un trouble attentionnel. 453 enfants Stéphane Auvin* ont été inclus dans cette étude : 148 dans le groupe valproate, 156 dans le groupe éthosuximide et 149 dans le groupe lamotrigine. A l’issue des périodes de 16 semaines, le valproate et l’éthosuximide avaient le même taux de disparition des absences (58 % et 53 % ; NS). Ces taux étaient meilleurs que celui observé avec la lamotrigine (29 %) (qui pouvait cependant être augmentée jusqu’à 12 mg/kg/j). Il n’y avait pas de différence entre ces groupes en ce qui concerne les arrêts de traitement en lien avec des effets secondaires. Lors de l’étude des troubles attentionnels, on retrouvait une dysfonction de ces fonctions chez 49 % des patients sous valproate, alors que cela n’était observé que chez 33 % des enfants recevant de l’éthosuximide (p = 0,03). Au total • Cet essai place donc l’utilisation de l’éthosuximide en première intention dans le cas des épilepsies-absences de l’enfant. • Il ne faut pas oublier d’avertir la famille des effets secondaires digestifs. Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 • En cas d’échec, il semble alors logique d’utiliser le valproate. • En prenant en considération les données de l’essai publié par Glauser, il faut avoir une évaluation précise des fonctions d’attention et de leurs conséquences sur les performances scolaires, ainsi que sur les activités extra­ scolaires. • Des recommandations simples peuvent être rapidement mises en place (voir article de G. Bulteau). • Après deux monothérapies, il est habituel d’utiliser une bithérapie comme cela est la règle générale. Prise en charge thérapeutique de l’adolescent Les épilepsies-absences de l’adolescent se caractérisent par la survenue de crises tonicocloniques généralisées, à côté des crises de type absences. Les absences sont en général moins nombreuses en fréquence quotidienne que dans l’épilepsie-absence de l’enfant. Ces caractéristiques cliniques sont à prendre en compte dans le choix des traitements. Il faut éviter une extrapolation trop rapide de l’essai sur l’épilepsie-absence publié par Glauser et al. (3). En effet, l’éthosuximide a un effet limité sur la survenue des crises tonico-cloniques généralisées. C’est donc le valproate et la lamotrigine qui ont une place importante dans la prise en charge. L’avis des experts sur les traitements des épilepsies pédiatriques en 2007 était d’ailleurs conforme à cela (2). L’absence de données comparatives ne permet pas de proposer un ordre de priorité dans Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 l’utilisation de ces molécules. Même si le nombre de patients avec pharmacodépendance n’atteint pas le niveau de l’épilepsie myoclonique juvénile (4), le risque de récurrence des crises tonicocloniques généralisées n’est pas négligeable (5, 6). On peut alors envisager dans certaines circonstances d’utiliser la lamotrigine en première intention chez les jeunes filles, si l’on pense que le traitement pourrait être maintenu jusqu’à un âge de désir de grossesse. Prise en charge des épilepsies avec absences pharmacorésistantes Bien que les épilepsies comportant des absences, comme l’épilepsie-absence de l’enfant et l’épilepsie-absence de l’adolescent, soient des syndromes “relativement” bénins, tous les patients ne sont pas indemnes d’une implication neurocognitive (voir article de G. Bulteau) et tous les patients ne sont pas répondeurs au traitement. Le taux de rémission après arrêt de traitement reste meilleur dans l’épilepsie-absence de l’enfant que dans l’épilepsie-absence de l’adolescent (7). évoquer un déficit en GLUT1 Au vu des données récentes, il semble que la première chose à faire devant une épilepsie avec des absences résistantes est d’évoquer des diagnostics différentiels. Il faut bien entendu évoquer un déficit en GLUT1. Cela doit être d’autant plus recherché s’il s’agissait d’une épilepsie comportant des absences à début précoce. En l’absence de données complémentaires sur le phénotype des patients avec un déficit en GLUT-1, on peut suggérer d’évoquer ce diagnostic en particulier si les caractéristiques cliniques ne sont pas typiques. Des séries plus larges de patients nous amèneront peut-être à affiner cette pratique dans un futur proche. Etant donnée l’implication sur le plan thérapeutique d’une découverte d’un déficit en GLUT1 (efficacité du régime cétogène) et la simplicité diagnostique (ponction lombaire), une recherche assez large peut se discuter, en particulier s’il s’agit d’une épilepsie avec des absences mais n’ayant pas les caractéristiques syndromiques typiques de l’épilepsie-absence de l’enfant ou de l’adolescent. évoquer une épilepsie focale générant des absences En cas de résistance au traitement, il faut savoir évoquer une épilepsie focale qui génère des absences (8). S’il s’agit d’une épilepsie résistante, cela pourra donner accès à certains médicaments traditionnellement moins utilisés dans ces cas. De plus, une exploration et une prise en charge chirurgicale pourront également se discuter. Quelles stratégie thérapeutique ? Dans le cas d’épilepsies avec des absences, des données cliniques suggèrent que des molécules comme le lévétiracétam et le zonisamide puissent être efficaces. Il semble donc logique de les utiliser en deuxième intention en cas d’épilepsie résistante, après les molécules dont l’efficacité est mieux établie. Le régime cétogène et la stimulation du nerf vague peuvent également avoir un intérêt dans la prise en charge des épilepsies 249 DOSSIER Les épilepsies-absences Les épilepsies-absences DOSSIER avec des absences résistantes. Même si les données sont encore limitées dans ces stratégies de recours, elles semblent très encourageantes. Le ratio bénéfice-risque doit être envisagé pour chaque patient afin de faire des choix parmi les combinaisons antiépileptiques, en ayant une appréciation étroite de la tolérance des polythérapies. ❚❚Les antiépileptiques • Dans une analyse des données de deux premiers essais réalisés avec le lévétiracétam en add-on dans les épilepsies généralisées idiopathiques, on retrouvait un total de 15 patients avec épilepsie-absence de l’adolescent ayant reçu du lévétiracétam et 12 ayant reçu du placebo. Chez ces patients, le taux de répondeurs (> 50 %) était de 53 % dans le groupe lévétiracétam contre 25 % dans le groupe placebo (p = 0,004) (9). Dans une étude prospective en ouvert, 21 patients avec épilepsie-absence ont été traités en première intention par le lévétiracétam. A 6 mois, 11 patients sur 21 étaient libres de crise et 1 avait une réduction des absences > 50 % (10). Dans un essai randomisé plus récent évaluant le lévétiracétam versus placebo, seule une tendance était notée. 9 patients sur 38 étaient répondeurs dans le groupe lévétiracétam alors que 1 des 21 patients du groupe placebo était répondeur (p = 0,08) (11). Que ce soient les résultats de cet essai randomisé ou les autres données disponibles, il semble que le lévétiracétam ait un effet possible sur les absences. Il peut donc être essayé, en particulier pour les formes résistantes dans lesquelles les traitements classiques ont échoué. 250 • Peu de données sont disponibles sur le zonisamide dans le traitement des absences. Dans les données de l’essai de Kim et al. (12), les auteurs suggèrent que le zonisamide a un effet sur un large type de crises comprenant les absences. Dans une étude rétrospective incluant des patients avec absences, sans que l’on puisse bien évaluer les différents types de syndromes, 45 dossiers ont été évalués. L’utilisation du zonisamide a permis de rendre libre de crise 51 % des patients. Le taux d’arrêt du médicament était de 4 %, suggérant une bonne tolérance. Les deux effets secondaires les plus fréquents étaient le manque d’appétit et la somnolence (13). ❚❚Le régime cétogène Le régime cétogène ainsi que le régime d’Atkins sont une solution thérapeutique tout à fait acceptable en cas de pharmacorésistance avérée. Une série existe dans la littérature : il s’agit d’un travail de l’équipe de Baltimore (14). Dans cette publication, les auteurs reprennent les données publiées et font part de leur propre expérience. Dans le travail de review, ils ont identifié 113 enfants avec absence. Parmi ceux-ci, 69 % avaient une réduction de la fréquence des absences > 50 %, et 34 % devenaient libres de crises. Pour son expérience, l’équipe de Baltimore rapporte 21 patients dont l’analyse a été réalisée rétrospectivement. Huit patients avaient reçu un régime cétogène classique et 13 avaient eu un régime modifié d’Atkins (forme de régime cétogène dans lequel les proportions des différents aliments sont plus souples, y compris les sucres). Dix huit patients (82 %) ont eu une réduction de la fréquence de leurs crises > 50 %, parmi lesquels 10 avaient une réduction de la fréquence des crises de plus de 90 %, et 4 étaient libres de crise. Dans une analyse complémentaire, les auteurs n’ont pas pu mettre en évidence de critères cliniques permettant de prédire le succès de ce type de prise en charge. ❚❚La stimulation du nerf vague Il semble que le stimulateur du nerf vague puisse faire partie des stratégies de traitement dans les absences résistantes. Peu de données sont disponibles. On retrouve un travail réalisé chez 16 patients avec une épilepsie-absence de l’enfant pharmacorésistante (15). Chez ces patients, le nombre d’absences était diminué de 31 % à 6 mois, de 67 % à 12 mois et de 76 % à 18 mois. Trois patients sont devenus libres de crise, alors que le nombre de patients avec une réduction de plus de 50 % de la fréquence des crises était de 38 % à 6 mois, 92 % à 12 mois et 88 % à 18 mois. L’utilisation du stimulateur du nerf vague semble donc se discuter en ayant évalué pour chaque patient le ratio bénéfice-risque. Conclusion La prise en charge des épilepsies avec absences dépasse la prise en charge médicamenteuse. Sur le plan des choix de traitement, de récentes données sont venues clarifier la prise en charge initiale de l’épilepsie-absence de l’enfant. Chez les patients ayant des épilepsies avec des absences pharmacorésistantes, une évaluation du ratio bénéfices-risques doit être réalisée à chaque modification thérapeuNeurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 Les épilepsies-absences Correspondance Dr Stéphane Auvin Hôpital Robert Debré Service de Neurologie Pédiatrique 48 Bd Sérurier 75935 Paris Cedex 19 E-mail : [email protected] Mots-clés : Epilepsie, Absences, Enfant, Adolescent, Antiépileptiques, Valproate, Ethosuximide, Lamotrigine, Zonisamide, GLUT1, Régime cétogène, Régime Atkins, Stimulation du nerf vague, Pharmacorésistance Bibliographie 1. Genton P. When antiepileptic drugs aggravate epilepsy. Brain Dev 2000 ; 22 : 75-80. 2. Wheless JW, Clarke DF, Arzimanoglou A, Carpenter D. Treatment of pediatric epilepsy: European expert opinion, 2007. Epileptic Disord 2007 ; 9 : 353-412. 3. Glauser TA, Cnaan A, Shinnar S et al. Ethosuximide, valproic acid, and lamotrigine in childhood absence epilepsy. N Engl J Med 2010 ; 362 : 790-9. 4. Auvin S. Treatment of juvenile myoclonic epilepsy. CNS Neurosci Ther 2008 ; 14 : 227-33. 5. Trinka E, Baumgartner S, Unterberger I et al. Long-term prognosis for childhood and juvenile absence epilepsy. J Neurol 2004 ; 251 : 1235-41. 6. Wirrell EC, Camfield CS, Camfield PR et al. Long-term prognosis of typical childhood absence epilepsy: remission or progression to juvenile myoclonic epilepsy. Neurology 1996 ; 47 : 912-8. 7. Camfield C, Camfield P. Management guidelines for children with idiopathic generalized epilepsy. Epilepsia 2005 ; 46 (Suppl 9) : 112-6. 8. Kubota F, Shibata N, Shiihara Y et al. Frontal lobe epilepsy with secondarily generalized 3 Hz spike-waves: a case report. Clin Electroencephalogr 1997 ; 28 : 166-71. 9. Rosenfeld WE, Benbadis S, Edrich P et al. Levetiracetam as add-on therapy for idiopathic generalized epilepsy syndromes with onset during adolescence: analysis of two randomized, double-blind, placebo-controlled studies. Epilepsy Res 2009 ; 85 : 72-80. 10. Verrotti A, Cerminara C, Domizio S et al. Levetiracetam in absence epilepsy. Dev Med Child Neurol 2008 ; 50 : 850-3. 11. Fattore C, Boniver C, Capovilla G et al. A multicenter, randomized, placebo-controlled trial of levetiracetam in children and adolescents with newly diagnosed absence epilepsy. Epilepsia 2011 ; 52 : 802-9. 12. Kim HL, Aldridge J, Rho JM. Clinical experience with zonisamide monotherapy and adjunctive therapy in children with epilepsy at a tertiary care referral center. J Child Neurol 2005 ; 20 : 212-9. 13. Wilfong A, Schultz R. Zonisamide for absence seizures. Epilepsy Res 2005 ; 64 : 31-4. 14. Groomes LB, Pyzik PL, Turner Z et al. Do patients with absence epilepsy respond to ketogenic diets? J Child Neurol 2011 ; 26 : 160-5. 15. Parain D, Demarquay G, Peudenier S et al. Vagus nerve stimulation (VNS) therapy for the treatment of medically refractory childhood absence epilepsy. Epilepsia 2006 ; 47 (Suppl 4) : 146. Petites annonces Le centre hospitalier de Mont-de-Marsan recrute UN NEUROLOGUE • Équipe actuelle de 3 praticiens temps plein • 30 lits d’hospitalisation complète • Dont 4 de soins intensifs (U.N.V) • Plateau technique complet (E.E.G, électromyographie), à l’exception de la neurochirurgie • Scanner et I.R.M sur place (2 I.R.M en 2012) Le centre hospitalier de Mont-de-Marsan, c’est également : • 1 195 lits et places • 2 352 salariés, médicaux et non médicaux • 6 pôles d’activité clinique Avenue Pierre de Coubertin 40024 Mont-de-Marsan cedex La ville de Mont-de-Marsan, c’est aussi : • La proximité de la côte atlantique et des stations des Pyrénées • 130 kilomètres de Bordeaux par l’autoroute (A65) • Paris à 3 heures de Bordeaux en train (T.G.V) • L’Espagne à environ deux heures de route en voiture. Convivialité, hospitalité et esprit de fête complètent ce portrait d’un département en tout point accueillant. Pour tout renseignement, vous pouvez joindre : • Docteur ONDZE, chef de service, 05 58 05 17 92 ou 06 60 95 64 43, [email protected] • Madame CASTEILLAN, Directrice du personnel médical, 05 58 05 10 70, [email protected] • Madame BOUQUEREL, Directeur des affaires générales, 05 58 05 10 20, [email protected] Neurologies • Avril 2011 • vol. 14 • numéro 137 251 DOSSIER tique. Outre les antiépileptiques, des procédures de recours comme le régime cétogène ou le régime modifié d’Atkins, ainsi que l’utilisation d’un stimulateur du nerf vague, doivent s’envisager à l’échelle individuelle. n