Polycopi du Cours Echocardiographie Doppler

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~ Échocardiographie - Doppler ~
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Échocardiographie - Doppler
S. Lafitte, M. Lafitte, P. Réant, R. Roudaut
C.H.U. de Bordeaux ~ Hôpital Cardiologique du Haut Lévêque Pessac ~ France
Complications de l’Infarctus du Myocarde
En raison de sa disponibilité et de sa rapidité de mise en œuvre, l'échocardiographie-Doppler a une
place de choix dans le diagnostic des complications précoces ou tardives de l'infarctus du myocarde,
quelle que soit la présentation clinique : douleur thoracique, insuffisance ventriculaire gauche, choc
cardiogénique.
Dans ce chapitre, nous envisagerons successivement :
-
les épanchements péricardiques,
les thromboses intracardiaques,
les complications mécaniques, telles que la rupture de la paroi libre, le faux anévrisme, la
rupture septale, l'insuffisance mitrale,
et, enfin, nous étudierons l'expansion et l'anévrisme VG.
Épanchement péricardique
Deux types d’épanchement péricardique compliquent l’infarctus du myocarde :
- L'épanchement péricardique à la phase aiguë
L'épanchement péricardique à la phase aiguë de l'IDM était retrouvé anatomiquement dans 30 à 50%
des cas, avant l’ère de la revascularisation précoce. Des données plus récentes identifient un
frottement clinique dans 0.5% des cas, alors que l’échographie retrouve cet épanchement dans 8%
des cas. Dans 72% des épanchements à la phase aigue, la topographie est inférieure et 28% sont
circonférentiels. Dans un registre national, 6 cas de tamponnade mortelle par fissuration pariétale ont
été recensés. Les facteurs favorisants étaient l'étendue de l'IDM (FE : 44+13 vs 51+12%) et sa
topographie : ainsi 2 / 3 des épanchements surviennent après un IDM antérieur contre 1/3 après IDM
inférieur.
L'échocardiographie au lit du patient recherche un épanchement liquidien, dont l'absence n'élimine pas
le diagnostic. Il s'agit le plus souvent d'un décollement épicardo-péricardique postérieur. L’échographie
évalue son abondance et sa tolérance. La tamponnade est exceptionnelle.
Cet épanchement péricardique régresse généralement sous traitement anti-inflammatoire en quelques
semaines.
- Le Syndrome de Dressler
Le syndrome de Dressler survient plus tardivement à partir de la 2ème ou 3ème semaine (voire
plusieurs mois) et complique 2 à 3% des IDM.
Le diagnostic est évoqué devant un tableau de pleuro-péricardite évoluant dans un contexte
inflammatoire.
L'échocardiogramme confirme l'épanchement péricardique.
Celui-ci est rarement volumineux.
Il régresse habituellement en quelques semaines sous anti-inflammatoires.
~ © 2010 DCAM ~ Université Victor Segalen Bordeaux 2 ~ France
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Des évolutions tardives vers la constriction ont été décrites.
Thromboses intracardiaques
Classiquement un thrombus VG était présent dans 20% des infarctus du myocarde avec une nette
prédominance pour les infarctus antérieurs. Leur fréquence est actuellement moins grande (2.4%) du
fait de la prise en charge précoce de l’infarctus.
Ils sont favorisés par la stase et donc l'étendue de la nécrose. Leur apparition est parfois très précoce,
dans les 48-72 premières heures.
En échocardiographie, le thrombus apparaît comme une masse bien circonscrite d'échogénicité
différente du myocarde adjacent, toujours localisé au niveau d'une zone akinétique ou dyskinétique.
3 aspects échocardiographiques peuvent être observés :
· thrombus mural, plan, tapissant une zone akinétique, d'épaisseur variable, de diagnostic difficile
quand il est fin.
· thrombus en "grelot" inséré par une large base et prolabant dans le ventricule.
· thrombus pédiculé mobile, plus rare, mais à haut risque emboligène
La sensibilité de l'ETT dans le diagnostic de thrombus VG est de 77% ; les faux négatifs sont liés à la
petite taille du caillot, à son échogénicité qui peut être faible en cas de thrombus frais, à la dilatation du
ventricule (anévrisme). Leur recherche doit être méticuleuse. Elle est facilitée de nos jours par
l'utilisation de hautes fréquences (> 5Mhz) pour explorer l'apex.
En cas de doute, à distance de la phase aigue, l’injection de contraste traversant la barrière
pulmonaire pourra faciliter le diagnostic de thrombus.
La spécificité de l'ETT dans le diagnostic de thrombus est de 89%, la valeur prédictive positive de
85%. Les principales causes de faux positifs sont : les artéfacts de champ proximal, les pièges
anatomiques (trabéculation de pointe sur VG dilaté, muscle papillaire hypertrophique), ou encore une
masse d'autre nature (tumeur).
Dans ce contexte de stase il est parfois possible de mettre en évidence un contraste spontané au
niveau d'une large zone akinétique du VG.
L'évolution se fait le plus souvent vers la disparition progressive du caillot ou vers la diminution sous
traitement anticoagulant. Un petit thrombus organisé hyperéchogène peut persister à titre de séquelle.
Une embolie systémique peut compliquer un thrombus mobile.
Complications mécaniques de l'IDM
Les complications mécaniques émaillent l'évolution de 15% environ des IDM et ceci le plus souvent
précocement dans les 3 à 6 premiers jours.
Rupture de la paroi libre
L’infarctus se complique d’une rupture en paroi libre dans 0.8% des cas ; elle intéresse le VG dans la
majorité des situations et se traduit soit par un tableau d'arrêt circulatoire rapidement mortel, soit par
un collapsus; il s'agit alors d'une urgence chirurgicale.
L'échocardiographie montre un épanchement péricardique circonférentiel, ou enkysté, d'aspect granité
du fait de l'hématome.
Le Doppler couleur peut aider à confirmer la fissuration au niveau de la paroi du VG infarcie.
En cas de doute, l'ETO peut être utile, mais elle ne doit pas retarder une chirurgie salvatrice.
L’échographie de contraste est probablement la meilleure technique pour ce diagnostic mais limitée
par les contre-indications des agents actuellement disponibles (cf CI des agents de contraste).
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Faux anévrisme VG
Le faux-anévrisme du VG correspond à une rupture du cœur en péricarde cloisonné. Il s'agit d'une
complication rare (4%), dont le diagnostic peut être retardé.
L'échocardiographie découvre un anévrisme sacciforme en relation avec la cavité VG par un collet
étroit. L'anévrisme est souvent partiellement obturé par un thrombus plus ou moins organisé.
En Doppler couleur, il existe un flux en aliasing au niveau du collet.
78% des faux-anévrismes se rencontrent après un infarctus antérieur, et 22% après un infarctus
inférieur.
En pratique, l'important est de différencier l'anévrisme du VG, du faux-anévrisme, dont le risque de
rupture et la mortalité imposent une cure chirurgicale.
Communication interventriculaire
La communication interventriculaire représente 10 à 15% des complications mécaniques. Elle
complique 0.55% des IDM, le plus souvent de localisation antérieure (60% des cas). Le diagnostic est
évoqué devant une détérioration clinique (douleurs, insuffisance cardiaque droite, souffle), voire un
choc cardiogénique.
L'échocardiographie au lit du malade joue un rôle essentiel :
- Mise en évidence au sein d'une zone nécrosée d'une perte de substance au niveau du septum
musculaire. La localisation de la CIV dépend du type d'infarctus :
o dans l'infarctus antéro-septal : on peut retrouver une CIV de la partie antérieure du
septum mieux explorée en incidence apicale
o dans l'infarctus inférieur : on retrouve une CIV de la paroi inféro-septale, mieux vue en
incidence sous costale.
- Le Doppler couleur confirme le shunt VG-VD voire bidirectionnel. Le Doppler continu permet de
calculer le gradient des pressions VG - VD et donc de déduire le niveau des pressions
pulmonaires.
- Enfin, le Doppler pulsé permet d'évaluer le rapport des débits (QP/QS).
La gravité du tableau impose dans la majorité des cas une réparation chirurgicale sans retard, sauf en
cas de petite CIV.
Insuffisance mitrale
L'insuffisance mitrale aiguë représente 5% des complications de l'IDM. Elle complique électivement les
IDM inférieurs, par atteinte du muscle papillaire postéro-médian classiquement irrigué par la seule
coronaire droite.
- Le tableau clinique dépend du mécanisme : OAP ou choc cardiogénique en cas de rupture de pilier,
détérioration clinique avec apparition d'un souffle en cas de dysfonction de pilier.
- 2 mécanismes sont rencontrés à ce stade :
. Rupture de pilier, rare, complète ou partielle, responsable d'une IM de type II de la classification
de Carpentier
. Remodelage ventriculaire avec dilatation de l'anneau mitral et restriction par traction des
cordages sur l’appareil valvulaire.
Étude échocardiographique
La rupture d'un chef papillaire se traduit par un écho anormal qui va et vient entre OG et VG, à type de
rupture de cordages.
Elle peut être accompagnée de signes de surcharge ventriculaire gauche, d’une hyperkinésie ou d’une
expansion systolique de l'OG ; cependant, la dilatation ventriculaire est exceptionnelle dans l'IM aiguë.
L'étude Doppler confirme l'IM en visualisant une régurgitation massive et centrale, et précise le niveau
des pressions pulmonaires.
Dans les formes aigues mal tolérées, le traitement est avant tout chirurgical.
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L’IM ischémique de type restrictif est facilement reconnue par la modification de la morphologie de la
valve et de sa déformation en tente.
En Doppler couleur, le flux de régurgitation est souvent orienté vers la paroi postérieure de l'OG en
arrière de la valve mitrale postérieure. La régurgitation est en général modérée.
La valve est anatomiquement normale. L’anomalie est principalement fonctionnelle liée au remodelage
ventriculaire gauche. La coaptation des feuillets mitraux est défectueuse, l'extrémité libre de la valve
antérieure semble aller au delà de la valve postérieure car cette dernière ne joue plus son rôle de
butoir.
Sa quantification par la méthode de la PISA est fondamentale en raison de son caractère pronostique
péjoratif dès que la SOR devient supérieure à 20 mm² (RX).
Expansion et anévrisme du VG
L'anévrisme VG est en réalité une complication plus tardive de l'IDM. Il complique 5 à 10% des IDM.
Cependant, cette fréquence a nettement diminué du fait de la prise en charge précoce de l'IDM avec
réouverture de l'artère et la prescription large des IEC. Un anévrisme précoce correspond en fait à
l'expansion-dilatation de la zone infarcie avec perte du parallélisme des bords et déformation de la
cavité en systole et en diastole.
.
L'échocardiographie confirme la poche dyskinétique.
Il convient donc de différencier l'anévrisme d'une plaque dyskinétique non anévrismale.
La topographie la plus fréquente de l'anévrisme est antéro-septo-apicale. Il est souvent volumineux.
L'anévrisme inféro-basal est plus rare, plus petit, plus difficile à diagnostiquer. Il sera recherché en cas
d’infarctus de la coronaire droite en incidence apicale 2 cavités antéro-inférieure.
L'échocardiographie peut mettre en évidence un contraste spontané au sein de l'anévrisme, voire un
mural thrombus qu'il faudra rechercher avec attention en utilisant des sondes de haute fréquence.
Enfin, l'échocardiographie précise l'importance de la zone contractile restante.
Le traitement de l'anévrisme est médical (IEC, anticoagulants). Par contre, s'il est compliqué
d’insuffisance cardiaque ou de troubles du rythme rebelles, une chirurgie peut être envisagée.
Conclusion
Au total, l'échocardiographie a une place de choix dans le diagnostic en urgence, au lit du malade,
d'une complication mécanique de l'IDM.
L'ETT est le plus souvent suffisante.
Cependant, dans certains cas (choc cardiogénique, doute, patients intubés-ventilés), l'ETO peut
s’avérer nécessaire.
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