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UNE HISTOIRE PARMI TANT D’AUTRES
Madame M s’est sentie un peu déprimée. Elle avait plus de mal à trouver les mots pour s’exprimer et devenait
irritable. Sans vraiment l’avoir décidé, elle a progressivement réduit ses activités, voyages etc, en évitant les
situations stressantes qui lui demandaient tout à coup un effort. Puis elle a commencé à oublier certaines choses :
où elle avait rangé ses affaires, les rendez-vous chez son médecin, l’anniversaire de ses enfants… Il lui est arrivé de
racheter plusieurs fois les mêmes aliments, se retrouvant ainsi avec des stocks de riz ou de lait… Elle oubliait de
plus en plus souvent ce qu’on lui avait dit. Elle ne s’inquiétait pas pour sa mémoire, car elle arrivait encore bien à se
souvenir de son passé : les chansons de son enfance, les copains d’école…
Elle avait du mal à comprendre pourquoi son entourage se faisait du souci pour elle. On l’a amenée un jour chez
un neuropsychologue qui a mis en évidence des troubles de la mémoire plus importants que chez la plupart des
personnes de son âge. Inquiète dans un premier temps, elle ne s’en est plus guère soucié. Puis elle a commencé à
ne plus reconnaître les gens, ne savait plus comment se servir de certains objets, avait de plus en plus de mal à
écrire sans faute, s’exprimait avec plus de peine.
Elle a rapidement oublié le deuxième examen neuropsychologique qui confirmait l’aggravation des troubles et
laissait suspecter une maladie d’Alzheimer.
Malgré l’insistance de ses proches et de ses médecins, elle avait du mal à accepter les aides à domicile qu’on voulait
lui « imposer » (repas à domicile, aide au ménage, passage infirmier) alors qu’elle estimait pouvoir le faire ellemême et tenait à sa liberté.
Comme elle commençait à errer la nuit de plus en plus fréquemment et qu’il lui arrivait de « fuguer » hors de chez
elle, sa famille a eu peur qu’elle se mette en danger et a proposé de la placer dans une structure adaptée. Madame
M n’en a pas bien compris les raisons et s’est fâchée, puis elle s’est progressivement habituée. Elle a maintenant
l’impression d’être chez elle, dans un autre temps, mais manifeste par moments des crises d’anxiété, ayant perdu
ses repères spatio-temporels et pensant qu’elle est en retard pour aller chercher ses enfants à l’école. Lors de ces
épisodes, elle peut se montrer agressive et impossible à raisonner.
Elle ne reconnaît pas toutes les visites qui viennent la voir, a besoin d’aide pour les repas et sa toilette. On ne sait
pas trop si elle est heureuse, triste ou indifférente. Elle a des moments de lucidité, et parfois, surtout en fin de
journée, elle est complètement désorientée. Elle chante encore parfois des airs de son enfance en attendant son
mari, qui est décédé il y a 10 ans. Son langage est devenu très pauvre et stéréotypé, le plus souvent inintelligible,
rendant la communication très difficile.
QUE SE PASSE-T-IL DANS LE CERVEAU D’UNE PERSONNE ATTEINTE DE LA MALADIE D’ALZHEIMER ?
La maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative, c’est à dire qui entraîne un déclin irréversible des
fonctions cognitives en s’attaquant au cerveau. Des plaques béta-amyloïdes se forment en trop grand nombre
entre les neurones et des agrégats de protéines tau forment des dégénérescences neurofibrillaires à l’intérieur des
neurones. Tout cela aboutit à une atrophie corticale progressive. Les lobes temporaux internes, où se situent les
hippocampes, sont les structures touchées en premier. Leur atrophie entraîne une perte de la mémoire récente
avec des oublis. Dans un deuxième temps, les cortex associatifs frontaux, temporaux et pariétaux sont atteints,
donnant lieu à une perte progressive des fonctions instrumentales (langage, praxies, gnosies).
QUE PEUT-ON FAIRE ?
L’examen neuropsychologique est avant tout une aide au diagnostic précoce, puis à l’évaluation de la progression
de la maladie. Il teste les différentes sortes de mémoire (mémoire antérograde, rétrograde, immédiate, de travail,
sémantique), les capacités de raisonnement, ainsi que les fonctions exécutives et attentionnelles. En outre,
l’anamnèse auprès de la personne concernée et de ses proches permet de se rendre compte de son
fonctionnement au quotidien. Après un examen complet, il est en général possible de confirmer ou d’exclure le
diagnosic de maladie d’Alzheimer probable. Un deuxième examen environ 9 mois plus tard permettra d’objectiver
l’évolution des troubles afin de pouvoir établir un diagnostic avec plus de certitude.
Certains médecins font un mini-examen cognitif au moyen d’un MMS (Mini Mental State). Les résultats qu’ils
obtiennent les aident à décider s’il faut compléter les investigations par un examen neuropsychologique ou s’il n’y a
pas lieu de s’inquiéter.
L’examen neuropsychologique est également utile lorsque le diagnostic peut être exclut, car il permet de
rechercher une autre cause aux troubles constatés. Par exemple, le vieillissement normal, une dépression, un
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déséquilibre métabolique. Selon l’étiologie suspectée, un bilan neurologique complet accompagné d’un bilan
métabolique ou d’une IRM peut être indiqué.
Lorsque la maladie est plus ou moins certaine (seule un examen histologique post-mortem peut le confirmer à
100%), le médecin traitant ou le neurologue peut proposer un traitement à base d’inhibiteur de
l’acéthylcholinestérase ou de mémantine selon la phase de la maladie. Ce traitement a pour but de freiner le déclin
et de retarder l’institutionnalisation, mais ne permet malheureusement pas de guérir la maladie et les troubles.
En outre, savoir de quelle maladie on est atteint permet de prendre ses dispositions à temps, de déterminer une
incapacité de travail et de protéger le patient en cas de fautes professionnelles. Il lui permet de mettre ses
dernières volontés par écrit et d’indiquer des précisions quant à son héritage, avant d’être privé de sa capacité de
discernement et d’être mis sous tutelle.
Le neuropsychologue peut fournir de précieux conseils aux proches, en particulier concernant l’attitude à adopter
avec la personne malade et l’aménagement du quotidien.
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