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Chapitre
9
Diagnostic nutritionnel
A. Pradignac
PLAN DU CHAPITRE
Éléments du diagnostic nutritionnel
en pratique clinique . . . . . . . . . . . . . . .
Autres moyens d’évaluation de la
composition corporelle . . . . . . . . . . . . .
91
Diagnostic des pathologies
nutritionnelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
102
100
Le diagnostic nutritionnel est encore trop souvent le
parent pauvre des procédures diagnostiques dans la pratique clinique courante du fait d'un manque de temps ou
d'une méconnaissance des problèmes nutritionnels et de
leur retentissement sur la santé des patients de la part des
équipes soignantes, les pathologies nutritionnelles étant
souvent perçues comme secondaires par rapport à la
maladie à l'origine de l'hospitalisation [1]. Il est également
dû à l'absence de gold standard en matière de diagnostic
nutritionnel. Néanmoins, le recueil d'éléments cliniques et
biologiques facilement accessibles et l'usage d'indices composites simples permettent d'obtenir un diagnostic nutritionnel satisfaisant pour envisager l'étape thérapeutique [2].
L'introduction d'un soutien nutritionnel précoce et adapté
est en effet le gage d'une diminution des comorbidités, de la
durée des séjours à l'hôpital et des coûts d'hospitalisation liés
à la dénutrition [3]. Enfin, à l'heure de la rémunération des
établissements de santé en fonction de la tarification à l'activité, seul un diagnostic nutritionnel correct permettra un
codage adéquat des pathologies nutritionnelles, à l'origine
d'une bien meilleure valorisation des séjours hospitaliers.
Éléments du diagnostic
nutritionnel en pratique clinique
Le diagnostic nutritionnel est établi au terme du recueil d'un
ensemble de paramètres cliniques facilement accessibles,
d'éléments biologiques couramment disponibles et de l'utilisation d'indices composites validés. Aucun appareil de mesure
élaboré n'est nécessaire pour porter un diagnostic nutritionnel
adéquat. Le coût du diagnostic nutritionnel est lié aux dosages
biologiques réalisés dont certains sont nécessaires au calcul
d'indices nutritionnels composites. Plus rarement, on peut
recourir à des méthodes de mesure de l'état nutritionnel plus
sophistiquées et donc plus coûteuses dans le cadre d'études de
recherche réservées à un nombre restreint de sujets.
Paramètres anthropométriques
Leur recueil représente le principal temps du diagnostic
nutritionnel dans la pratique clinique courante [4].
Poids
La mesure du poids constitue un des temps forts du diagnostic nutritionnel, car il s'avère indispensable pour estimer
correctement la corpulence du patient et pour quantifier une
éventuelle variation pondérale. La pesée est réalisée le matin
à jeun, la vessie vide, le patient étant en sous-vêtements.
Pour les malades alités ou difficilement mobilisables, la
détermination du poids peut nécessiter de recourir à un
matériel plus élaboré, tel qu'une chaise-balance, un soulèvemalade équipé d'un système de pesée ou un lit-balance. Il
faut toujours rechercher la présence d'œdèmes qui, s'ils sont
présents, perturbent l'évaluation du « poids sec » du patient,
indicateur plus fiable de son état nutritionnel réel.
Taille
Elle constitue le deuxième paramètre de base indispensable.
Elle doit être mesurée directement à l'aide d'une toise, le
patient ayant enlevé ses chaussures ou à défaut être recueillie
par l'interrogatoire avec dans ce cas un risque de surestimation de sa valeur réelle. Elle peut également être calculée à
partir de la mesure de la hauteur talon–genou (TG) pour
les malades qui ne peuvent soutenir l'orthostatisme ou qui
sont grabataires. Le patient étant allongé sur le dos, le genou
fléchi à 90°, on mesure à l'aide d'une toise pédiatrique ou
d'un mètre ruban la distance séparant la partie supérieure
des condyles fémoraux de la face inférieure du calcanéum.
La valeur mesurée est alors reportée dans l'équation de
Chumlea [5] qui permet de calculer la taille du patient :
Chez l'homme : taille (cm )
= 64,19 − 0, 04 × âge (ans ) + 2,03 × hauteur TG (cm )
Nutrition clinique pratique
© 2014, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
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Partie I. Nutrition générale et appliquée
Chez la femme : taille (cm )
= 84,88 − 0,24 × âge (ans ) + 1,83 × hauteur TG (cm )
Indice de masse corporelle (IMC)
L'indice de masse corporelle le plus couramment utilisé est
l'indice de Quételet. Il correspond à la formule suivante :
(
)
( )
IMC kg / m2 = poids ( kg ) / taille2 m2
C'est un indice de corpulence qui permet d'évaluer couramment aussi bien l'état nutritionnel des patients dénutris
que celui des sujets obèses (tableau 9.1).
L'OMS définit sa normalité comme étant comprise
entre 18,5 et 25 kg/m2, l'obésité étant définie par un IMC
supérieur ou égal à 30 kg/m2. Le diagnostic de dénutrition
devient probable dès que l'IMC est inférieur à 17 g/m2 pour
un patient de moins de 70 ans ou 21 kg/m2 pour une personne âgée de plus de 70 ans. La dénutrition est à distinguer
de la maigreur constitutionnelle qui se caractérise aussi par
un IMC abaissé mais stable, chez une personne en bonne
santé, les valeurs de l'IMC étant le plus souvent comprises
entre 18,5 et 16 kg/m2, sans altération de la masse maigre ni
risque accru de comorbidité.
Poids habituel
Il est aussi appelé poids de référence ou poids de croisière. Il
correspond au poids qu'avait le patient avant qu'il ne commence à maigrir ou à prendre du poids. C'est une donnée
d'interrogatoire à rechercher auprès du patient lui-même ou
de son entourage. Bien que son recueil ne constitue pas une
réelle difficulté, ce paramètre est souvent absent des dossiers
des patients, obérant l'évaluation de leur état nutritionnel
car sa méconnaissance empêche de chiffrer correctement
une éventuelle variation pondérale.
Calcul de la perte de poids et de la vitesse
de perte de poids
La perte de poids est calculée en retranchant au poids habituel le poids actuel du patient, la présence d'œdèmes pouvant
minorer la perte de poids réellement survenue. Elle est expriTableau 9.1 État nutritionnel en fonction de
l'index de masse corporelle (IMC) édité par l'OMS
IMC
État nutritionnel
< 10,0
Dénutrition grade V
10,0 à 12,9
Dénutrition grade IV
13,0 à 15,9
Dénutrition grade III
16,0 à 16,9
Dénutrition grade II
17,0 à 18,4
Dénutrition grade I
18,5 à 24,9
Normal
25,0 à 29,9
Surpoids
30,0 à 34,9
Obésité grade I
35,0 à 39,9
Obésité grade II
≥ 40,0
Obésité grade III
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mée en kilogrammes ou en pourcentage du poids initial.
À l'instar du poids habituel, elle est souvent peu retrouvée
dans les dossiers des patients, ce qui est d'autant plus dommageable qu'elle s'avère être un élément d'alerte de premier
ordre en faveur d'une dénutrition. En effet, toute perte de
poids involontaire, en dehors d'une perte hydrosodée, peut
être le témoin d'une dénutrition sous-jacente qui sera d'autant plus grave que la perte de poids est importante ou d'installation rapide. On estime qu'au-delà d'une perte de 10 % du
poids initial, il existe une incidence accrue des comorbidités
liées à la perte de masse maigre qui en découle. Des pertes
pondérales de moindre importance mais d'installation plus
rapide ont la même valeur pronostique péjorative. Ainsi une
perte de poids de 2 % en 1 semaine ou de 5 % en 1 mois a la
même signification d'alarme qu'une perte de poids de 10 %
en 6 mois, ces différentes valeurs ayant été retenues par les
experts de l'Anaes comme seuils d'alerte nutritionnelle [4].
Mesure des plis cutanés
Relativement simple à mettre en œuvre au lit du malade et peu
coûteuse, elle nécessite de disposer d'un compas et d'un bon
entraînement de l'examinateur. Les mesures sont exprimées en
millimètres et les plis couramment mesurés sont le pli tricipital, le pli bicipital, le pli sous-scapulaire et le pli supra-iliaque.
Ils permettent d'évaluer la masse grasse de l'organisme à partir
de la somme de ces quatre plis cutanés, du poids, de l'âge et
du sexe du sujet [6]. Outre les problèmes de reproductibilité
interopérateurs des mesures, l'évaluation des plis cutanés n'est
actuellement plus recommandée en pratique clinique courante
en raison d'une trop faible sensibilité en cas de dénutrition
débutante, une baisse significative de leur épaisseur n'étant
observée qu'en présence d'une dénutrition déjà évoluée [4].
Mesures du périmètre brachial, de la circonférence
du mollet et calcul de la circonférence musculaire
brachiale (CMB)
La CMB est un indicateur de la masse maigre de l'organisme.
Elle est calculée à partir de la mesure du périmètre brachial,
réalisée à l'aide d'un mètre-ruban, placé à mi-distance entre
l'olécrane et l'acromion, le coude étant fléchi à 90°, et de la
valeur de l'épaisseur du pli cutané tricipital, à partir de la
formule suivante :
CMB (cm ) = périmètre brachial (cm )
(
)
− π × pli cutané tricipital [ cm ]
La circonférence du mollet est un marqueur de la masse
musculaire, mesurée sur un sujet allongé, le genou fléchi à
90°, au niveau du plus grand diamètre du mollet sans exercer de compression avec le mètre-ruban.
Une baisse du périmètre brachial en dessous de 22 cm
et/ou de la circonférence du mollet en dessous de 31 cm
est en faveur d'une dénutrition avérée. Néanmoins, comme
pour les plis cutanés, la détermination de la CMB ou des
différents périmètres n'est plus recommandée en pratique
clinique courante en raison d'un défaut de sensibilité en cas
de dénutrition débutante [4]. Cependant, leurs déterminations demeurent utiles dans les états pathologiques s'accompagnant d'une expansion du secteur extracellulaire comme
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Chapitre 9. Diagnostic nutritionnel
les cirrhoses décompensées ou les insuffisances cardiaques
où les autres méthodes d'évaluation de l'état nutritionnel
(pesée, calcul de l'IMC, de la perte de poids, voire impédancemétrie) peuvent être prises en défaut.
Mesures du tour de taille et du tour de hanches
Elles sont réalisées à l'aide d'un mètre-ruban, le patient étant
en décubitus dorsal, le ruban passant, selon les recommandations de l'OMS, à mi-chemin entre le rebord costal inférieur et
les crêtes iliaques pour la mesure du tour de taille et au niveau
des grands trochanters pour la mesure du tour de hanches.
Ces deux paramètres sont utilisés pour évaluer la répartition
du tissu adipeux chez les patients en surcharge pondérale ou
obèses. Le tour de taille est un marqueur du tissu adipeux
abdominal périviscéral et son augmentation définit l'obésité
abdominale ou androïde, volontiers accompagnée de complications métaboliques (syndrome métabolique, diabète de
type 2, dyslipidémie, hypertension artérielle) ou de maladies
cardiovasculaires. Les valeurs normales du tour de taille
varient avec l'origine ethnique des populations étudiées. Ainsi,
selon l'International Diabetes Federation (IDF), le tour de taille
est augmenté lorsqu'il dépasse 94 cm chez un Européen de
sexe masculin ou 80 cm chez une femme européenne, ces
seuils étant encore plus stricts pour les populations asiatiques
(90 cm pour les hommes et 80 cm pour les femmes) [7]. Le
tour de hanches représente quant à lui un reflet du tissu adipeux sous-cutané et son augmentation caractérise une répartition gynoïde de la masse graisseuse, c'est-à-dire prédominant
au niveau de la partie inférieure du corps et plus volontiers
associée à des complications de type mécanique (arthrose).
Le quotient entre le tour de taille et le tour de hanches
correspond au rapport taille sur hanches, rapport également préconisé par l'OMS pour définir l'obésité abdominale
lorsqu'il dépasse 0,90 chez l'homme et 0,85 chez la femme
[8]. Cependant, ce rapport tend à être supplanté à l'heure
actuelle par la seule mesure du tour de taille plus simple à
mettre en œuvre et tout aussi informative sur le plan clinique.
Paramètres biologiques
Les protéines nutritionnelles sériques utilisées en pratique
clinique ont pour principale mission d'aider à mieux évaluer
l'état nutritionnel et en particulier le statut des protéines viscérales mal appréhendé par les mesures anthropométriques.
Aucun des marqueurs biologiques pris isolément n'est suffisant pour porter un diagnostic nutritionnel correct par
manque de sensibilité et de spécificité. La connaissance de leur
taux sérique permet d'améliorer le diagnostic nutritionnel
notamment par la possibilité de les inclure dans des indices
composites validés. Le coût de ces marqueurs doit cependant
rester raisonnable dans la pratique clinique courante.
Albumine [9]
C'est le marqueur nutritionnel le plus couramment utilisé
pour évaluer l'état nutritionnel. Synthétisée par le foie, catabolisée par le tractus digestif et l'endothélium vasculaire
avec une demi-vie de l'ordre de 21 jours, l'albuminémie
varie normalement entre 35 et 50 g/l, la moitié du stock de
l'albumine de l'organisme résidant dans le secteur vasculaire,
l'autre moitié étant située dans les espaces extracellulaires.
0002072765.INDD 93
93
En dehors d'une dénutrition, il existe plusieurs causes
de baisse de l'albuminémie au premier rang desquelles
arrive le syndrome inflammatoire. Il peut être responsable
d'une baisse de l'albumine sérique pouvant aller jusqu'à
40 % en raison d'un défaut de synthèse hépatique de l'albumine au profit des protéines inflammatoires sous l'influence des cytokines pro-inflammatoires. La fréquence
élevée de cette éventualité en pratique clinique nécessite
d'interpréter l'albuminémie en fonction du taux sérique
d'une protéine inflammatoire dosée simultanément,
comme par exemple la CRP. L'insuffisance hépatocellulaire par diminution de synthèse, le syndrome néphrotique, les maladies inflammatoires et/ou exsudatives du
tube digestif, les brûlures responsables d'une augmentation des pertes d'albumine respectivement au niveau des
reins, du tube digestif ou de la peau sont d'autres causes
d'hypoalbuminémie. Une augmentation de la perméabilité vasculaire peut également s'accompagner d'une
hypoalbuminémie par fuite d'albumine dans le secteur
extracellulaire. Enfin, l'hémodilution peut être une cause
d'hypoalbuminémie.
Bien que manquant de sensibilité, de spécificité et de
représentativité du stock des protéines viscérales, l'albumine
demeure un marqueur nutritionnel très largement employé,
à la fois pour son faible coût et pour sa valeur pronostique.
Il existe en effet une bonne corrélation entre la baisse de l'albuminémie et l'augmentation de la mortalité ou de la morbidité dès que sa valeur diminue en dessous de 35 g/l. Le rôle
pronostique de l'albuminémie est souligné par son inclusion
dans le calcul de l'indice de Buzby ou nutritional risk index,
indice permettant d'évaluer à la fois l'état nutritionnel des
patients et le risque de comorbidités qui en découle. Par
contre, en raison de sa demi-vie longue, l'albuminémie n'est
pas un bon marqueur du suivi de l'efficacité du soutien
nutritionnel mis en œuvre.
Préalbumine ou transthyrétine [9]
C'est une des protéines vectrices des hormones thyroïdiennes. Son principal intérêt nutritionnel réside dans le
fait qu'elle est rapidement réactive aux apports protéinoénergétiques alimentaires en raison notamment d'une
demi-vie beaucoup plus courte (de l'ordre de 2 jours) que
celle de l'albumine. Elle est synthétisée par le foie et ses
taux sériques varient normalement entre 250 et 350 mg/l.
Comme pour l'albumine, la préalbumine est corrélée à la
morbidité induite par la dénutrition.
Le jeûne ou la dénutrition entraînent une baisse rapide de
la préalbuminémie, une valeur inférieure à 110 mg/l signant
une dénutrition modérée et un taux inférieur à 50 mg/l une
dénutrition sévère. D'autres circonstances pathologiques
peuvent induire une baisse de la transthyrétine par des
mécanismes similaires à ceux évoqués pour l'albumine :
insuffisance hépatocellulaire, syndrome néphrotique ou
hémodilution. Le syndrome inflammatoire constitue une
cause fréquente d'hypotransthyrétinémie nécessitant le
dosage concomitant d'une protéine inflammatoire (CRP)
pour pouvoir interpréter correctement son taux sérique
(tableau 9.2). L'hyperthyroïdie est une cause plus spécifique
de baisse de la préalbumine en rapport avec sa fonction de
transport des hormones thyroïdiennes.
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Partie I. Nutrition générale et appliquée
Tableau 9.2 Interprétation du taux de
préalbuminémie en fonction de l'état inflammatoire
CRP
Préalbumine Interprétation
–
↓
Dénutrition
–
↑
Amélioration du statut
nutritionnel
↑
↓
Réaction inflammatoire
↓
↑
Décroissance de la réponse
inflammatoire ± amélioration du
statut nutritionnel
D'après Cynober L. [10].
En raison d'une demi-vie courte et d'une bonne sensibilité à l'apport protéique alimentaire, la préalbumine est
un marqueur de choix pour le suivi de l'efficacité du soutien nutritionnel, un dosage hebdomadaire semblant être
la fréquence optimale pour assurer la surveillance nutritionnelle. L'hypothyroïdie, l'insuffisance rénale ou la déshydratation peuvent être à l'origine d'une élévation de la
transthyrétine.
Autres marqueurs biologiques
de l'état nutritionnel [4, 9]
De nombreux autres marqueurs biologiques de l'état nutritionnel ont également été proposés. Cependant leur dosage
n'est pas recommandé en pratique clinique courante en
raison, soit d'un manque de spécificité avec le statut nutritionnel des patients, soit de l'existence d'interférences avec
d'autres métabolismes perturbant leur signification nutritionnelle. Enfin leur coût de détermination est souvent trop
élevé pour en préconiser une large utilisation en routine
clinique.
Transferrine
Cette protéine de fixation et de transport du fer dans l'organisme est synthétisée par le foie. Sa demi-vie est de 8 à
10 jours et son taux sérique varie normalement entre 2 et
4 g/l. Son taux sanguin augmente dans les situations de
carences martiales ou lors du 3e trimestre de la grossesse,
période où les besoins en fer sont importants.
Sur le plan nutritionnel, la transferrine diminue suite à
une baisse des ingesta en protéines mais semble moins sensible à un défaut d'apport énergétique. D'autres pathologies
peuvent engendrer une baisse de la transferrine telle une
insuffisance hépatocellulaire, un syndrome néphrotique,
une anémie hémolytique ou l'administration de certains
antibiotiques (tétracyclines, céphalosporines, aminosides).
A contrario, une hépatite aiguë ou l'utilisation d'œstrogènes
peuvent être associées à une élévation des taux sériques de
transferrine.
Ces nombreuses causes de variation non nutritionnelle
de la transferrine, et notamment les anomalies du métabolisme du fer, particulièrement fréquentes, n'incitent pas
à préconiser son dosage en routine pour évaluer le statut
nutritionnel.
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Retinol binding protein (RBP)
C'est la protéine vectrice du rétinol dont la fonction est de
transporter le rétinol du foie vers les tissus cibles. Elle est
synthétisée par le foie, a une demi-vie très courte de l'ordre
de 12 heures et son taux sérique varie entre 45 et 70 mg/l.
La dénutrition entraîne une baisse rapide de la RBP au
même titre qu'une carence en rétinol, zinc, tryptophane ou
azote. Il en est de même de l'insuffisance hépatocellulaire ou de
l'hyperthyroïdie. À l'inverse, l'insuffisance rénale et l'alcoolisme
sont associés à une hausse du taux sanguin de RBP. Sa demi-vie
courte en ferait un marqueur précoce de l'efficacité d'un soutien nutritionnel mais la difficulté technique et le coût de son
dosage ne font pas recommander son utilisation en routine.
Insulin-like growth factor-1 (IGF-1) ou
somatomédine C
L'IGF-1 est le médiateur de l'hormone de croissance. Il est
synthétisé par le foie, possède une demi-vie de 2 à 4 heures et
circule, pour une grande partie, lié à des protéines vectrices,
les IGF binding proteins. Les valeurs normales de l'IGF-1
dépendent beaucoup de l'âge et du sexe. La dénutrition est
responsable de la diminution de son taux sérique par un
mécanisme encore inconnu au même titre que la carence en
hormone de croissance, l'hypothyroïdie, le syndrome inflammatoire ou l'utilisation d'œstrogènes alors que la renutrition
induit une rapide augmentation de son taux sérique. Malgré
ces propriétés intéressantes sur le plan nutritionnel, le dosage
d'IGF-1 ne peut être utilisé en routine en raison d'un manque
de spécificité, d'un dosage difficile et coûteux et de l'absence
de données cliniques permettant de fixer un seuil d'IGF-1 en
dessous duquel le patient peut être considéré comme dénutri.
Créatininurie des 24 heures
La créatinine résulte de la transformation non enzymatique
de la créatine contenue dans les muscles. Elle est éliminée
dans les urines proportionnellement à la masse musculaire
du patient et à son degré de filtration glomérulaire. Ainsi, si
la fonction rénale est normale, la créatininurie des 24 heures
est un bon reflet de la masse musculaire du patient, 1 g de
créatininurie correspondant à une masse de 17 à 20 kg de
muscles squelettiques et les valeurs usuelles de créatininurie
pour un adulte de 20 ans étant de 9 à 18 mmol/24 h (1500
à 2000 mg/24 h) pour un homme et 8 à 16 mmol/24 h (900
à 1800 mg/24 h) pour une femme. Afin d'éviter des erreurs
de mesure, il est nécessaire de répéter le recueil des urines
des 24 heures pendant 2 à 3 jours, de s'assurer d'un apport
protéique alimentaire stable et de l'absence d'une insuffisance rénale qui rendrait ce paramètre inopérant pour le diagnostic nutritionnel. Enfin, en rapportant la créatininurie à
la taille du patient (index créatininurie/taille), on s'affranchit
des variations physiologiques de la masse musculaire liées
à la taille et on augmente la spécificité nutritionnelle de cet
index. Cependant, malgré son apparente simplicité, ce marqueur biochimique est sujet à de nombreuses variations non
nutritionnelles fréquemment rencontrées en clinique (insuffisance rénale aiguë, recueil urinaire incomplet, stress, fièvre,
inflammation, effort physique) qui perturbent à la fois la réalisation de son dosage et l'interprétation des résultats obtenus
limitant ainsi son utilisation en pratique clinique courante.
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Chapitre 9. Diagnostic nutritionnel
3-méthylhistidine urinaire (3-MH)
La 3-MH est un catabolite des fibres musculaires qui ne peut
être ni métabolisé ni réutilisé par l'organisme et se retrouve
ainsi excrété à près de 95 % dans les urines. Théoriquement, la
mesure de la 3-MH urinaire représente un bon reflet du catabolisme musculaire, surtout si l'excrétion de la 3-MH urinaire
est rapportée à la créatininurie des 24 heures ce qui permet de
s'affranchir de la masse musculaire des sujets, principal facteur
de variation non nutritionnel de la 3-MH urinaire. Les résultats des études montrent que ce rapport augmente à la phase
hypercatabolique de la dénutrition alors qu'il diminue dans
la phase adaptative d'épargne musculaire observée dans les
dénutritions chroniques. Malgré ces propriétés intéressantes
sur le plan nutritionnel, le dosage de la 3-MH urinaire ne peut
faire partie d'un bilan nutritionnel standard en raison d'un
dosage difficile (chromatographie) et coûteux, d'un recueil
urinaire exhaustif devant être répété sur 2 ou 3 jours pour
tenir compte des variations physiologiques d'excrétion et de
l'apport en 3-MH contenue dans les viandes de l'alimentation.
95
Lymphocytes sanguins
C'est un paramètre facilement accessible en routine clinique. La dénutrition diminue la maturation des lymphocytes et peut être à l'origine d'une véritable lymphopénie.
La difficulté est de rattacher la baisse des lymphocytes à
la seule dénutrition, les interférences pathologiques étant
potentielle ment nombreuses dont les infections, ellesmêmes favorisées par la dénutrition. Ce manque de spécificité ne permet donc pas d'utiliser la lymphopénie comme un
marqueur nutritionnel à part entière.
Tests cutanés
Ils sont basés sur l'apparition d'une anergie cutanée à divers
antigènes induite par l'altération de l'immunité cellulaire
provoquée par la dénutrition. Leur utilisation pose de
nombreux problèmes d'interprétation notamment en raison d'interférences avec d'autres causes non nutritionnelles
d'anergie cutanée.
Indices nutritionnels composites
Bilan azoté [9]
Il correspond à la différence entre les ingesta ou apports
en protéines (1 g de protéine contenant 0,16 g d'azote) et
les pertes azotées comprenant les pertes urinaires (90 %
des pertes azotées incluant l'urée et l'ammoniac urinaires),
les pertes fécales (9 %) et les autres pertes habituellement
beaucoup plus modestes (pertes cutanées et respiratoires
de l'ordre de 300 mg d'azote/24 h et pertes insensibles voisines de 20 mg d'azote/kg/24 h). Le bilan azoté est exprimé
en grammes d'azote/24 heures et nécessite, pour un résultat
rigoureux, le dosage de l'azote total qui requiert un appareillage coûteux pas toujours disponible. Pour contourner cet
écueil, on estime habituellement les pertes azotées à partir
du seul dosage de l'urée urinaire qui permet de calculer les
pertes azotées par la formule de Lee Hartley :
⎛ uréeurinaire (g / l ) × 0,06 × 1,2 ⎞
⎟
2,14
⎝
⎠
Pertes azotées (g N /24 h ) = F ⎜
Bien qu'apparaissant simple, cette méthode est confrontée à plusieurs interférences potentiellement perturbatrices,
comme la difficulté à effectuer un recueil complet des urines
des 24 heures, des situations où les pertes extrarénales
d'azote ne sont plus minimes (diarrhées importantes, brûlure étendue, fistule digestive…) et des fortes augmentations
de production d'ammoniac aux dépens de l'urée observées dans les situations d'acidose. Toutes ces circonstances
pathologiques, loin d'être rares en clinique, amènent à
minorer l'évaluation des pertes urinaires d'azote et font ainsi
délaisser la détermination du bilan azoté au profit d'autres
marqueurs protéiques beaucoup plus simples à manier.
Marqueurs immunitaires
Leur utilisation repose sur l'existence d'une altération des
fonctions immunitaires (cellulaires et humorales) induite
par la dénutrition et proportionnelle à sa sévérité. Cette
dépression immunitaire explique à la fois la prévalence
accrue des infections observée chez les patients dénutris et
l'altération des tests évaluant leurs fonctions immunitaires.
0002072765.INDD 95
Divers indices associant des marqueurs biologiques à des
paramètres cliniques ou anthropométriques ont été mis au
point dans le but d'augmenter la spécificité et la sensibilité
des différents marqueurs pris isolément.
Nutritional risk index (NRI) ou index de Buzby
[11, 12]
Il a été défini chez des patients devant bénéficier d'une
chirurgie programmée. Son but était de mieux évaluer
l'état nutritionnel de ces patients et de discriminer ceux qui
étaient particulièrement à risque de développer des comorbidités liées à leur mauvais état nutritionnel. Son calcul
comprend l'albuminémie (g/l) et le rapport entre le poids
actuel et le poids habituel du patient :
NRI = 1,519 × albuminémie (g / l )
(
)
+ ⎡⎣0,417 × poids actuel [ kg ] / poids habituel [ kg ] × 100 ⎤⎦
Le NRI est d'autant plus bas que l'albuminémie est basse
et/ou que le pourcentage de perte de poids intervenu est
important. Comme pour le calcul de la perte de poids, il
est perturbé par la présence d'œdèmes. Le statut et le risque
nutritionnels sont classés en fonction des valeurs du NRI :
■ NRI supérieur à 100 : le patient n'est pas dénutri et son
risque nutritionnel est nul ;
■ NRI compris entre 100 et 97,5 : le patient est faiblement
dénutri et son risque nutritionnel n'est pas important ;
■ NRI est compris entre 83,5 et 97,5 : le patient est modérément dénutri et le risque de développer des comorbidités
liées à la dénutrition est modéré ;
■ NRI est inférieur à 83,5 : le patient est alors considéré
comme sévèrement dénutri et son risque nutritionnel
est élevé justifiant une attention particulière sur le plan
nutritionnel.
Bien qu'ayant été peu validé dans des situations non
chirurgicales, son utilisation en routine a été préconisée par
les experts du Programme national nutrition santé (PNNS)
[2] en raison de sa relative simplicité de calcul et de sa capacité
à prédire à la fois le statut et le risque nutritionnels du patient.
1/27/2014 8:07:12 AM
96
Partie I. Nutrition générale et appliquée
Geriatric nutritional risk index (GNRI) [13]
C'est une variante du NRI spécialement adaptée aux personnes âgées qui tient compte de la difficulté à connaître
leur poids habituel en raison du déclin cognitif. Le poids
habituel est remplacé par le poids idéal, calculé selon la formule de Lorentz, où la taille peut également être calculée à
partir de la mesure de la hauteur talon–genou. La formule
du GNRI s'établit donc de la manière la suivante :
GNRI = 1,489 × albuminémie (g / l )
(
)
+ ⎡⎣0,417 × poids actuel [ kg ] / poids idéal [ kg ] × 100 ⎤⎦
Le poids idéal se calculant comme suit :
poids idéal homme =
(
⎡ taille [ cm ] − 150
taille [ cm ] − 100 ⎢
4
⎢⎣
) ⎥⎤
et poids idéal femme =
(
⎡ taille [ cm ] − 150
taille [ cm ] − 100 − ⎢
2,5
⎢⎣
⎥⎦
) ⎥⎤
⎥⎦
En dessous de 82, le patient affiche un risque nutritionnel
élevé, le risque nutritionnel étant modéré lorsque le GNRI
est compris entre 82 et 92, faible lorsqu'il s'inscrit entre 92 et
98, avec une absence de risque nutritionnel lorsque le GNRI
est supérieur à 98. In fine, cet indice possède une bonne prédictivité de la morbi-mortalité liée à la dénutrition chez les
personnes âgées hospitalisées.
Mini nutritional assessment (MNA) [14]
Ce score a été développé et validé pour évaluer spécifiquement le risque nutritionnel chez les personnes âgées issues
de groupes de patients d'origines très diverses. Il est correctement corrélé à différents marqueurs cliniques ou biologiques de l'état nutritionnel et s'avère être prédictif de la
mortalité survenue dans les populations de personnes âgées
étudiées. Il existe sous une forme simplifiée de six items servant au dépistage et réalisée en 3 à 5 minutes (fig. 9.1) [15]
ainsi que sous une forme complète de dix-huit items nécessitant une dizaine de minutes pour son exécution.
Le score est obtenu à partir du recueil de paramètres
anthropométriques simples, de données d'interrogatoire sur
l'autonomie, les pathologies associées ou sur les habitudes
alimentaires. Il permet de quantifier le risque nutritionnel
de la personne âgée. S'il est inférieur à 17 sur un maximum de 30, le patient a un mauvais état nutritionnel ainsi
qu'un risque nutritionnel élevé. Au-dessus de 23,5, le statut
nutritionnel de la personne âgée est bon et son risque nutritionnel nul. Entre ces deux valeurs, l'état nutritionnel est
modérément altéré tout comme le risque nutritionnel. Ce
score, simple à réaliser par le personnel soignant, est actuellement recommandé par les experts du PNNS pour évaluer
l'état et le risque nutritionnels des personnes âgées de plus
de 75 ans hospitalisées ou en institution [2, 16].
Subjective global assessment (SGA) [17]
C'est un index subjectif d'évaluation de l'état nutritionnel
qui fait appel au recueil d'éléments d'anamnèse (variation
0002072765.INDD 96
du poids, modification des ingesta, existence de troubles
digestifs, capacités fonctionnelles, pathologie intercurrente)
et à un examen physique sommaire centré sur la recherche
d'œdèmes et sur la perte musculaire. Il permet au clinicien
de classer subjectivement l'état nutritionnel du patient selon
trois catégories : dénutrition absente, modérée ou sévère.
Malgré sa subjectivité et l'absence de consignes précises
pour sa mise en œuvre, le SGA possède une bonne reproductibilité interobservateur et est corrélé de façon satisfaisante à d'autres paramètres nutritionnels objectifs cliniques,
paracliniques ou biologiques. En outre, cet indice est corrélé
à la morbi-mortalité, les patients classés sévèrement dénutris par le SGA présentant une mortalité plus élevée et des
durées de séjour plus longues.
Prognostic inflammatory and nutritionnal
index (PINI) [18]
C'est un indice composé uniquement de marqueurs biochimiques qui est basé sur le fait que la synthèse des protéines
nutritionnelles est inversement proportionnelle à l'état
inflammatoire du patient. Cet indice nécessite le dosage de
deux protéines nutritionnelles (albumine et préalbumine) et
de deux protéines inflammatoires (CRP et orosomucoïde).
Il correspond au rapport entre le produit des concentrations
des protéines inflammatoires et celui des protéines nutritionnelles selon la formule suivante :
(
)
(
(
)
)
⎡CRP mg / l × orosomucoïde mg / l ⎤
⎦
PINI = ⎣
⎡albumine g / l × préalbumine mg / l ⎤
⎣
⎦
( )
Cet indice permet d'isoler cinq classes de risque nutritionnel en fonction de la valeur de ce rapport : inférieur à
1 (pas de risque nutritionnel), compris entre 1 et 10 (risque
faible), compris entre 11 et 20 (risque modéré), compris
entre 21 et 30 (risque élevé), supérieur à 30 (risque vital).
Cet indice n'a été évalué que dans peu d'études cliniques
mais semble corrélé à la morbi-mortalité des patients.
Autres index
D'autres index plus ou moins sophistiqués ont été proposés
pour tenter d'améliorer l'évaluation de l'état nutritionnel tels
le pronostic nutritional index (PNI), la risk assessment scale
(RAS) ou l'index de Maastricht (IM). Ils sont délaissés en
pratique clinique en raison d'un calcul parfois compliqué
combinant des dosages biologiques, des paramètres anthropométriques voire des tests d'hypersensibilité retardée ou
d'une validation clinique insuffisante.
Outils du dépistage nutritionnel
Par rapport aux précédents index dont la finalité première
résidait dans le diagnostic et l'évaluation du risque nutritionnel, l'objectif principal de ces outils de dépistage est de
repérer les malades potentiellement dénutris en pratique clinique courante. Ces outils ont été conçus pour aider à repérer
les patients à risque d'être dénutris, pas toujours facilement
repérables, et devant bénéficier d'une évaluation nutritionnelle complète et permettre une meilleure adéquation des
ressources, notamment humaines (diététiciens, médecins
nutritionnistes).
1/27/2014 8:07:12 AM
Chapitre 9. Diagnostic nutritionnel
Nom :
97
Prénom :
Sexe :
Poids, kg :
Âge:
Taille, cm :
Date :
Répondez au questionnaire en indiquant le score approprié pour chaque question. Additionnez les points pour obtenir le
score de dépistage.
Dépistage
A Le patient a-t-il moins mangé ces 3 derniers mois par manque d’appétit, problèmes digestifs, difficultés de
mastication ou de déglutition?
0 = sévère baisse de l’alimentation
1 = légère baisse de l’alimentation
2 = pas de baisse de l’alimentation
B Perte récente de poids (< 3 mois)
0 = perte de poids > 3 kg
1 = ne sait pas
2 = perte de poids entre 1 et 3 kg
3 = pas de perte de poids
C Motricité
0 = du lit au fauteuil
1 = autonome à l'intérieur
2 = sort du domicile
D Maladie aiguë ou stress psychologique lors des 3 derniers mois?
0 = oui
2 = non
E Problèmes neuropsychologiques
0 = démence ou dépression sévère
1 = démence modérée
2 = pas de problème psychologique
F1 Indice de masse corporelle (IMC = poids/(taille2) en kg/m2)
0 = IMC < 19
1 = 19 < IMC < 21
2 = 21 < IMC < 23
3 = IMC > 23
SI L’IMC N’EST PAS DISPONIBLE, REMPLACER LA QUESTION F1 PAR LA QUESTION F2.
MERCI DE NE PAS RÉPONDRE À LA QUESTION F2 SI LA QUESTION F1 A ÉTÉ COMPLÉTÉE.
F2 Circonférence du mollet (CM) en cm
0 = CM < 31
3 = CM > 31
Score de dépistage
(max.14 points)
12 - 14 points :
8 - 11 points :
0 - 7 points :
état nutritionnel normal
risque de malnutrition
malnutrition avérée
Fig. 9.1 Mini nutritional assessment – short form. D'après Rubenstein LZ et al. [15].
0002072765.INDD 97
1/27/2014 8:07:12 AM
98
Partie I. Nutrition générale et appliquée
Nutrition screening tool (NST) [19]
Cet indice est basé sur le recueil systématique et précoce
du poids, de la taille, de la recherche d'une perte de poids
involontaire et d'une perte d'appétit les semaines précédant
l'hospitalisation. Un score est établi à partir de ces quatre
paramètres et permet un bon dépistage des patients présentant un risque élevé de dénutrition (score ≥ 4) ou un risque
nutritionnel faible (score < 2). Le NST semble moins performant pour les patients dont le risque nutritionnel est modéré
(score ≥ 2 et < 4) avec une tendance à la surestimation.
Short nutritional assessment questionnaire
(SNAQ) [20]
Il est basé sur la recherche systématique, à l'admission par
les soignants, de la survenue d'une perte de poids involontaire (plus de 3 kg, plus de 6 kg), d'une perte d'appétit ainsi
que de l'utilisation de compléments nutritifs oraux ou de
nutrition entérale les semaines précédant l'admission. Un
score supérieur à 2 permet de suspecter un risque modéré
de dénutrition qui devient élevé si le score est égal à 3 avec
une sensibilité et une spécificité de l'ordre de 75 % chacune.
Malnutrition screening tool (MST) [21]
Il est calculé à partir d'éléments d'anamnèse simples comme
l'existence d'une perte de poids secondairement quantifiée
lorsqu'elle est présente et d'une perte d'appétit. Un score
supérieur ou égal à 2 signe un patient à risque de dénutrition avec une sensibilité et une spécificité de 93 %.
Nutritional risk screening-2002 (NRS-2002) [22]
Proposé en 2002 par un groupe de travail de l'ESPEN
(European Society for clinical nutrition and metabolism) à
partir des études d'intervention nutritionnelle publiées, cet
indice plus complexe à calculer prend en compte l'importance et la rapidité d'installation d'une perte de poids et/ou
l'existence d'un IMC abaissé et/ou des ingesta réduits ainsi
que la sévérité des pathologies intercurrentes. Un score
supérieur ou égal à 3 définit un patient à risque de dénutrition chez qui l'intervention nutritionnelle sera très probablement efficace sur le plan clinique.
Nursing nutritional screening form (NNSF) [23]
Tout spécialement conçu pour les soignants, cet indice
recherche l'existence d'une perte de poids, d'une perte
d'appétit, d'une réduction des ingesta et de maladies intercurrentes, notamment digestives. Chaque item est coté selon
trois niveaux (A, B ou C), un seul des items coté B ou C suffisant à classer le patient comme étant à risque d'être dénutri
avec une sensibilité supérieure à 80 %.
Malnutrition universal screening tool
(MUST) [24]
Il est basé sur la valeur de l'IMC, l'existence d'une perte de
poids et la présence éventuelle d'une maladie intercurrente,
chaque item bénéficiant d'un score variant de 0 à 2 en fonction de sa sévérité. Lorsque le total est égal à 2, le risque
nutritionnel est élevé alors qu'un total égal à 1 équivaut à un
risque nutritionnel modéré.
0002072765.INDD 98
Mini nutritionnal assessment – short form
(MNA-SF) [15]
La forme simplifiée du MNA (voir fig. 9.1) peut être utilisée comme un outil de dépistage de la dénutrition chez la
personne âgée de plus de 75 ans. Un score inférieur à 12 sur
un total maximum de 14 indique que le patient est à risque
d'être dénutri et implique la réalisation d'un MNA complet.
En raison d'une prévalence élevée et d'un caractère clinique polymorphe, la dénutrition à l'hôpital devrait être systématiquement recherchée chez tout patient nouvellement
hospitalisé, que l'on utilise ou non des outils de dépistage
nutritionnel. Cette démarche est d'autant plus nécessaire
que le patient est à risque d'être dénutri : personnes âgées,
démences, cancers, autres maladies graves intercurrentes,
escarres… L'existence d'une perte de poids et/ou celle d'une
perte d'appétit, items largement repris par la plupart de ces
outils, devraient être deux éléments d'anamnèse à rechercher systématiquement à l'admission de chaque patient, la
présence de l'un ou de l'autre rendant nécessaire d'effectuer
une évaluation nutritionnelle complète avec intervention
des professionnels qualifiés, notamment pour l'étape thérapeutique si elle s'avère nécessaire.
Bilan calorique
C'est la partie de l'évaluation nutritionnelle qui va permettre
de quantifier à la fois les ingesta et les besoins caloriques
du patient. C'est en comparant ces deux entités que l'on
pourra au mieux décider des modalités pratiques du soutien
nutritionnel à mettre en œuvre en fonction de l'ampleur du
déficit calorique constaté chez un patient dénutri ou des restrictions énergétiques à opérer chez un patient obèse ou en
surcharge pondérale.
Évaluation des besoins caloriques
Le principe de la conservation de l'énergie stipule qu'à poids
constant et en l'absence de variation des réserves énergétiques, les dépenses énergétiques d'un patient sont égales à
ses apports caloriques. Dans ces conditions, la mesure ou le
calcul de la dépense énergétique d'un patient à un instant t
permet d'évaluer les besoins caloriques nécessaires à maintenir son homéostasie énergétique. Idéalement, la dépense
énergétique devrait être mesurée mais le manque de disponibilité ou la complexité des méthodes de mesure font qu'elle
est plus volontiers calculée dans la pratique clinique courante.
Mesure de la dépense énergétique
Plusieurs méthodes sont disponibles au premier rang desquelles se situe la calorimétrie directe qui est certainement
l'une des plus précises mais aussi l'une des plus sophistiquées. Elle consiste à mesurer à l'aide d'une chambre calorimétrique la dépense énergétique d'un sujet à partir de la
production de chaleur générée par ses métabolismes. La
complexité, la lourdeur et la rareté des équipements nécessaires à ce type de mesure ont fait développer une autre
approche plus indirecte, appelée calorimétrie indirecte,
permettant d'évaluer la dépense énergétique d'un patient à
partir de la mesure de ses échanges gazeux (consommation
d'oxygène et production de CO2). Cette méthode, actuellement considérée comme la méthode de référence de la
1/27/2014 8:07:12 AM
Chapitre 9. Diagnostic nutritionnel
mesure de la dépense énergétique, nécessite un appareillage
plus simple et donc plus facilement accessible mais dont
le coût, loin d'être négligeable, et les nombreux problèmes
d'étalonnage la font néanmoins réserver à des équipes
entraînées. D'autres techniques existent encore comme
l'utilisation de l'eau doublement marquée qui possède
l'avantage de permettre d'évaluer les dépenses énergétiques
d'un patient dans ses conditions de vie réelle et de pouvoir
évaluer, en combinaison avec l'utilisation de la calorimétrie
indirecte, la dépense énergétique liée à son activité physique.
Calcul des besoins caloriques
Il est habituellement réalisé à l'aide d'équations de prédiction de la dépense énergétique dont les plus couramment
utilisées sont celles de Harris et Benedict. Elles permettent
de calculer la dépense énergétique de repos (DER) à partir
du sexe, de l'âge, du poids et de la taille du patient selon les
formules suivantes :
DER (homme ) = 66,47 + 13,75 poids ( kg )
+ 5 taille (m ) − 6,76 âge (ans )
DER ( femme ) = 655,1 + 9,56 poids ( kg )
+ 1,85 taille (m ) − 4,68 âge (ans )
Il faut ensuite appliquer à la DER un coefficient de correction tenant compte de l'activité physique du patient ou
des pathologies intercurrentes (tableau 9.3) pour calculer
ses besoins énergétiques réels et tenir compte du surcoût
énergétique lié à l'agression quelle qu'en soit la nature :
besoins énergétiques = DER × coefficient de correction
(activité physique/ pathologie)
Évaluation de l'activité physique
L'activité physique est la partie la plus variable de la dépense
énergétique quotidienne. Son évaluation en clinique n'est
pas toujours aisée. Elle peut faire appel à des questionnaires
auto- ou hétéro-administrés visant à rapporter sur un support papier la fréquence, la durée et le type d'activité physique pratiquée par le patient (sport, loisirs, travail) sur une
période de temps donnée. À partir de la connaissance du coût
Tableau 9.3 Coefficients de correction de la DER
liés à la pathologie
Pathologie
Coefficient de correction
Fièvre par degré > 37 °C
1,1
Chirurgie mineure
1,2
Traumatisme
1,35
Dénutrition chronique
1,2 à 1,5
Patient agressé
hypermétabolique
1,2 à 1,5
Sepsis
1,6
Brûlure
2,0
0002072765.INDD 99
99
métabolique lié à chaque type d'activité physique exprimé
en MET (metabolic equivalent task) disponible dans la littérature, on peut calculer le coût métabolique de l'activité
physique totale que le patient aura réalisée sur la période de
temps étudiée (habituellement une semaine), coût que l'on
exprime habituellement en MET · min · semaine−1. D'autres
techniques plus directes sont disponibles faisant appel à des
podomètres qui comptent un nombre de pas parcourus, des
accéléromètres qui transcrivent les accélérations subies par
le corps lors de l'activité physique ou des cardiofréquencemètres qui vont enregistrer la fréquence cardiaque du sujet
pendant son effort. Outre l'acquisition des appareils, il est
également nécessaire de disposer d'équations de prédiction
de la dépense énergétique engendrée par l'activité physique
en fonction du nombre de pas parcourus, de coups enregistrés ou de la fréquence cardiaque recueillie.
Évaluation des ingesta
C'est l'étape qui va permettre de quantifier aussi précisément
que possible les apports alimentaires du patient, c'est-à-dire
transformer en kilocalories et en grammes de protéines les
aliments consommés. Plusieurs méthodes peuvent être utilisées en fonction du contexte pathologique et de l'endroit
où se trouve le patient. Nous nous limiterons aux méthodes
d'évaluation des apports ayant une stricte application clinique pour ne pas évoquer celles réservées à la recherche.
Enquêtes alimentaires [25]
On distingue plusieurs types d'enquêtes alimentaires en
fonction des modalités pratiques de leur réalisation faisant
appel soit à l'interview du patient, soit au remplissage prospectif d'un journal alimentaire. Quelle que soit la méthode
utilisée, elle nécessite le recours à un(e) diététicien(ne) d'une
part pour valider les données alimentaires recueillies auprès
du patient qui demeurent souvent imprécises et d'autre part
pour calculer les kilocalories et les nutriments ingérés à partir du recueil d'aliments réalisé moyennant l'utilisation d'un
logiciel spécifique de calcul.
Enquêtes par interview ou rétrospectives
Elles nécessitent d'interroger le patient. La méthode la plus
simple consiste en un rappel des 24 heures des aliments
et boissons ingérés. C'est une méthode simple à mettre en
œuvre, peu coûteuse, rapide (une trentaine de minutes) et
généralement bien acceptée par les patients. Ses principaux
inconvénients résident dans les troubles de la mémoire que
peuvent rencontrer les patients qui vont venir fausser le recueil
alimentaire ainsi que dans la représentativité de la journée
enquêtée par rapport aux habitudes alimentaires du patient.
L'histoire alimentaire est une variante du rappel des
24 heures. Elle vise à évaluer les habitudes alimentaires
réelles du patient en l'interrogeant sur ses fréquences de
consommation des différents groupes d'aliments. Par rapport à la méthode précédente, elle nécessite une formation spécifique du(de la) diététicien(ne) enquêteur(trice)
mais permet d'obtenir des renseignements moins biaisés
sur les consommations réelles du patient. Généralement
bien acceptée, ses principaux inconvénients demeurent les
éventuels troubles mnésiques des sujets ainsi qu'une durée
d'enquête plus longue (1 heure environ).
1/27/2014 8:07:13 AM
100
Partie I. Nutrition générale et appliquée
Méthodes prospectives
Elles sont plus adaptées au malade ambulatoire qu'il soit dénutri ou en surcharge pondérale. La principale méthode, appelée semainier ou journal alimentaire sur 7 jours, consiste
pour le patient à consigner de manière prospective sur un
support papier tous ses ingesta et ses boissons aux différents
moments de la journée. Cette méthode est généralement
bien acceptée par les patients et nécessite la présence d'un(e)
diététicien(ne) pour faire préciser les unités ménagères utilisées qui peuvent être sous-estimées (surcharge pondérale)
ou surestimées (patients dénutris). Le semainier permet de
s'exonérer des troubles mnésiques puisque les prises alimentaires sont consignées « au fil de l'eau » et les biais alimentaires
sont théoriquement moindres puisque les prises alimentaires
en dehors du domicile peuvent être prises en compte.
Une variante simplifiée du semainier consiste en la réalisation du 3 days record ou enquête des 3 jours où il est
demandé au patient de consigner ses consommations
alimentaires sur 2 jours de semaine et 1 jour de repos ou
de week-end. Les avantages et les inconvénients de cette
méthode demeurent les mêmes que ceux du semainier.
Feuille de surveillance alimentaire (FSA)
C'est une méthode semi-quantitative réservée le plus souvent
aux patients hospitalisés ou en institution. Elle consiste à faire
remplir pendant 2 à 3 jours par l'équipe soignante, voire par
le patient lui-même, cette FSA en mettant une croix dans la
case correspondant à la consommation effective des aliments
proposés selon la méthodologie des quarts (fig. 9.2). À partir de la connaissance précise des repas servis à chaque date,
le(la) diététicien(ne) pourra aisément calculer les ingestions
effectives en calories et en macronutriments. La contrainte
de cette méthode est liée à l'astreinte de remplissage de la
FSA au décours de chaque repas, un repas raté amputant le
recueil d'un jour complet et prolongeant d'autant la poursuite de l'évaluation nutritionnelle par les soignants.
Comparaison entre les besoins nutritionnels
et les apports
Au terme de ces procédures d'évaluation des apports et des
besoins, il est nécessaire de confronter ces deux paramètres
car c'est la différence observée qui va permettre de décider des
modalités de la prise en charge nutritionnelle. Ainsi, pour un
patient obèse ou en surcharge pondérale, la différence calorique permet de déterminer le niveau de restriction énergétique
à apporter ainsi que les corrections plus qualitatives à opérer.
Pour un patient dénutri, elle permettra de choisir le meilleur
type de soutien nutritionnel à mettre en œuvre variant d'un
simple enrichissement de l'alimentation, en passant par la prescription de compléments nutritifs oraux ou la mise en place
d'une nutrition artificielle qu'elle soit entérale ou parentérale.
Autres moyens d'évaluation
de la composition corporelle
Ces méthodes, bien que performantes et généralement peu
invasives, ne s'appliquent pas à la routine clinique, sauf
peut-être l'impédancemétrie, en raison d'un coût la plupart
du temps élevé et d'une disponibilité des appareils plutôt
0002072765.INDD 100
réduite. C'est pourquoi, leur utilisation est plutôt réservée
aux protocoles de recherche clinique.
Impédancemétrie [26]
Parmi les méthodes non anthropométriques c'est certainement celle qui est la plus utilisée car la plus facilement
accessible. Il existe plusieurs types d'appareillage allant des
dispositifs grand public et peu onéreux d'analyse de la masse
grasse sur un sujet en position debout, aux dispositifs plus
sophistiqués, comportant plusieurs électrodes, utilisés sur
un patient en décubitus et qui permettent des analyses segmentaires de la composition corporelle. C'est une technique
non invasive basée sur la résistance au passage d'un courant
électrique de faible intensité à travers l'organisme. À partir
d'équations de prédiction fondées le plus souvent sur le poids,
la taille, l'âge et le sexe, elle permet d'évaluer facilement et de
manière répétée la masse maigre, la masse grasse, les volumes
extracellulaire et intracellulaire. La reproductibilité de l'impédancemétrie est bonne et les mesures de la composition
corporelle obtenues sont concordantes avec celles acquises
avec d'autres méthodes de mesure. L'impédancemétrie a tendance à surévaluer la masse maigre des patients obèses ou
œdémateux et à minorer celles des malades déshydratés. Elle
est enfin intéressante chez l'hémodialysé où elle permet de
déterminer plus précisément le poids sec du patient.
Absorptiométrie biphotonique ou dualenergy X-ray absorptiometry (DEXA) [27]
Elle est considérée à l'heure actuelle comme la méthode de
référence pour évaluer la composition corporelle. Elle nécessite un appareil fixe non déplaçable émettant un faisceau de
rayons X de faible intensité balayant l'ensemble du corps,
l'atténuation des rayons étant fonction de la composition
des tissus traversés. Contrairement à l'impédancemétrie,
les analyses de la composition corporelle obtenues avec la
DEXA sont peu modifiées par l'état d'hydratation (œdèmes
ou déshydratation). La DEXA permet ainsi de mesurer la
masse minérale osseuse, la masse grasse et la masse maigre
des patients et elle permet une analyse segmentaire de la
composition corporelle. La précision des mesures de la
masse grasse est bonne (de l'ordre de ± 3 %), de même que
leur reproductibilité permettant ainsi des suivis longitudinaux de la composition corporelle. La principale limitation
de la DEXA réside en fait dans le manque de disponibilité
des appareils dont l'utilisation clinique courante est accaparée par l'évaluation de la densité minérale osseuse laissant
peu de plages libres pour d'autres usages.
Tomodensitométrie (TDM)/imagerie
par résonance magnétique (IRM) [28]
La TDM et l'IRM peuvent être utilisées pour évaluer la
composition corporelle, et pour localiser et quantifier le
tissu adipeux qu'il soit abdominal périviscéral, en position
sous-cutanée ou à l'intérieur d'organes comme le foie ou
le muscle. Ces méthodes d'évaluation permettent l'une et
l'autre des mesures précises fiables et reproductibles des différents types de tissus adipeux quelle que soit leur localisation. La principale limitation d'utilisation de ces techniques
1/27/2014 8:07:13 AM
Chapitre 9. Diagnostic nutritionnel
101
Fiche de suivi alimentaire
Étiquette patient
Évaluation énergétique :
Aport protidique :
Évaluation besoins/apports :
Réalisée par/le :
Date :
Petit-déjeuner
Café − Tisane
Quantité ingérée
0
1/4 1/2 3/4
1
Quantité ingérée
Déjeuner
Potage
0
1/4 1/2 3/4
1
Quantité ingérée
Dîner
Potage
Lait
Sucre
Hors-d'œuvre
Viande ou équiv.
Hors-d'œuvre
Viande ou équiv.
Bouillie
Petit pain
Biscottes
Légumes
Légumes
Féculents
Fromage
Féculents
Fromage
Beurre
Confiture
Dessert lacté
Dessert/fruit
Petit pain
Dessert lacté
Dessert/fruit
Petit pain
SNO
Boissons
SNO
Boissons
Collation
Collation
Madeleine
SNO
Boissons
Collation
Date :
Petit-déjeuner
Café − Tisane
Quantité ingérée
0 1/4 1/2 3/4
1
Lait
Sucre
Bouillie
Petit pain
Biscottes
Beurre
Confiture
Madeleine
SNO
Boissons
Collation
Date :
Petit-déjeuner
Café − Tisane
Quantité ingérée
Déjeuner
Potage
1
1/4 1/2 3/4
1
Hors-d'œuvre
Viande ou équiv.
Légumes
Féculents
Fromage
Dessert lacté
Féculents
Fromage
Dessert lacté
Dessert/fruit
Petit pain
Dessert/fruit
Petit pain
SNO
Boissons
SNO
Boissons
Collation
Collation
Quantité ingérée
Déjeuner
Potage
0
1/4 1/2 3/4
1
Hors-d'œuvre
Viande ou équiv.
Légumes
Hors-d'œuvre
Viande ou équiv.
Légumes
Petit pain
Biscottes
Féculents
Fromage
Féculents
Fromage
Beurre
Confiture
Dessert lacté
Dessert/fruit
Petit pain
Dessert lacté
Dessert/fruit
Petit pain
SNO
Boissons
SNO
Boissons
Collation
Collation
Boissons
Collation
1
0
1/4 1/2 3/4
1
Quantité ingérée
Dîner
Potage
Lait
Sucre
Bouillie
Madeleine
SNO
1/4 1/2 3/4
Quantité ingérée
Dîner
Potage
Hors-d'œuvre
Viande ou équiv.
Légumes
Quantité ingérée
0 1/4 1/2 3/4
0
0
0
1/4 1/2 3/4
1
Fig. 9.2 Exemple de feuille de suivi alimentaire (FSA) remplie selon la méthode des quarts.
0002072765.INDD 101
1/27/2014 8:07:13 AM
102
Partie I. Nutrition générale et appliquée
en routine clinique réside dans leur manque de disponibilité
pour ce type de mesures ainsi que dans la délivrance d'une
dose de rayons X non négligeable pour la TDM et des temps
d'acquisition des données assez longs pour l'IRM.
Méthodes de dilution isotopique
Ces méthodes utilisent des traceurs stables ou radioactifs
limitant ainsi leur utilisation clinique. Elles peuvent néanmoins être utilisées en recherche.
Potassium corporel 40K
C'est un isotope radioactif naturel du potassium. Dans la
mesure où le potassium est contenu en quasi-totalité dans le
secteur intracellulaire, la détermination de la concentration
plasmatique du 40K permet de calculer secondairement la
masse cellulaire active puis la masse maigre.
Mesure de l'eau corporelle
Cette méthode consiste à mesurer l'eau corporelle totale à
partir de la dilution d'un traceur stable (18O, deutérium) qui
permet de calculer la masse maigre et d'en déduire secondairement la masse grasse.
Diagnostic des pathologies
nutritionnelles
Au terme de l'enquête diagnostique, tous les éléments nécessaires et suffisants pour porter le diagnostic d'une pathologie nutritionnelle sont réunis.
Diagnostic d'obésité
Il est relativement facile à porter puisqu'il dépend avant
tout d'un seul paramètre de corpulence qui est l'IMC (voir
tableau 9.1). L'obésité est en effet définie par un IMC supérieur ou égal à 30 kg/m2 et elle est qualifiée de morbide
lorsque l'IMC est supérieur ou égal à 40 kg/m2. Le diagnostic
clinique d'obésité doit être ensuite affiné en évaluant la répar-
tition de la masse grasse par la mesure du tour de taille, voire
du calcul du rapport taille sur hanches. Un tour de taille élevé
(supérieur à 94 cm chez l'homme et 80 cm chez la femme)
et/ou un rapport taille sur hanches accru (supérieur à 0,90
chez l'homme et 0,85 chez la femme) définissent une obésité
abdominale ou obésité androïde plus volontiers associée à
des complications métaboliques ou cardiovasculaires. Ainsi,
la mesure du poids, de la taille, du tour de taille, du tour de
hanches et les calculs de l'IMC ± du rapport taille sur hanches
suffisent pour évaluer correctement sur le plan clinique
l'importance de la surcharge pondérale ainsi que la répartition topographique de la masse grasse d'un patient obèse. Son
niveau d'apport calorique, l'analyse qualitative de ses ingesta
et l'importance de son activité physique spontanée vont
conditionner quant à eux l'ampleur de la restriction calorique
à opérer et la nature des conseils diététiques plus spécifiques
à mettre en œuvre tout comme le niveau d'activité physique à
recommander.
Diagnostic de dénutrition
Contrairement à l'obésité, le diagnostic de dénutrition est
moins évident à établir. Il n'existe pas de gold standard
permettant d'affirmer une dénutrition à partir de la valeur
d'un seul paramètre nutritionnel. Le diagnostic repose sur
un faisceau d'arguments concordants cliniques (poids, taille,
IMC, poids habituel, perte de poids), biologiques (albumine,
± préalbumine, CRP) ou paracliniques avec le calcul d'indices composites simples (NRI ou MNA et GNRI pour les
personnes âgées). C'est à ce stade de la démarche diagnostique que les outils de dépistage de la dénutrition peuvent
présenter un intérêt pour aider à sélectionner les patients
potentiellement dénutris devant alors bénéficier d'une évaluation nutritionnelle complète. Les critères de dénutrition
sont rappelés dans les tableaux 9.4 et 9.5 ; il suffit d'un seul
critère présent parmi l'ensemble de ceux qui sont présentés
pour classer l'état nutritionnel du patient. La comparaison
entre le niveau des ingesta et le calcul des besoins permet de
déterminer les modalités pratiques du soutien nutritionnel à
mettre en œuvre.
Tableau 9.4 Critères diagnostiques de dénutrition chez l'adulte de moins de 70 ans
Avant 70 ans
IMC (kg/m2)
Perte poids à
1 mois (%)
Perte poids à
6 mois (%)
Albumine (g/l)
Préalbumine
(mg/l)
NRI
Dénutrition
modérée
16 à 18,5
5 à 10
10 à 15
< 30
< 110
83,5 à 97,5
Dénutrition
sévère
< 16
≥ 10
≥ 15
< 20
< 50
< 83,5
D'après Anaes [4].
Tableau 9.5 Critères diagnostiques de dénutrition chez la personne âgée de plus de 70 ans
Après 70 ans
IMC (kg/m2)
Perte poids à
1 mois (%)
Perte poids à
6 mois (%)
Albumine (g/l)
MNA
GNRI
Dénutrition
modérée
18 à 21
5 à 10
10 à 15
< 35
< 17
82 à 92
Dénutrition
sévère
< 18
≥ 10
≥ 15
< 30
< 17
< 82
D'après HAS [16].
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Chapitre 9. Diagnostic nutritionnel
Conclusion
Contrairement à certaines idées reçues, le diagnostic nutritionnel demeure une procédure relativement simple à réaliser dans la pratique clinique courante. Il est basé sur le
recueil d'éléments cliniques, biologiques et paracliniques
simples accessibles pour la plupart à l'ensemble des acteurs
de soins. Son importance est capitale pour pouvoir identifier au plus vite le trouble nutritionnel présent, la difficulté
au quotidien concernant surtout le diagnostic de dénutrition dont l'évidence est souvent loin d'être flagrante. Ce
n'est qu'après un diagnostic nutritionnel précoce et adéquat
qu'un soutien nutritionnel adapté pourra être débuté dans le
but de réduire, voire de prévenir, les comorbidités associées
à la dénutrition. Ainsi, le diagnostic nutritionnel demeure
l'étape initiale indispensable de toute prise en charge nutritionnelle conditionnant à la fois la thérapeutique et le
pronostic ultérieur de la pathologie nutritionnelle.
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1/27/2014 8:07:13 AM
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