revue générale abc Ann Biol Clin 2004, 62 : 15-24 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Polymorphismes des glutathion S-transférases et pathologies humaines : bilan des études épidémiologiques M. G. B. M. S. Habdous Siest Herbeth Vincent-Viry Visvikis Inserm U 525, Centre de médecine préventive, 2, avenue du Doyen Jacques Parisot, 54501 Vandœuvre-Lès-Nancy [email protected] Résumé. Les glutathion S-transférases (GST), enzymes polymorphes, métabolisent des xénobiotiques impliqués dans la survenue de pathologies comme les cancers, les maladies cardiovasculaires et respiratoires. Les variants alléliques des classes GSTM1, T1 et P1 pourraient moduler la susceptibilité individuelle à ces pathologies. Les méta-analyses montrent que l’allèle nul GSTM1*0 est associé à une faible augmentation des cancers du poumon (OR (95 % IC) = 1,17 (1,07-1,27)), de la vessie (OR = 1,44 (1,23-1,68) et du larynx (OR = 1,42 (1,10-1,84)). Seul l’allèle nul GSTT1*0 semble être associé à une augmentation du risque de tumeurs du cerveau (astrocytomes (OR = 2,36 (1,413,94) et méningiomes (OR = 3,57 (1,82-6,92)). Certains variants alléliques de la GSTP1 sont associés à une augmentation de risque de cancer de la vessie chez les fumeurs (OR = 2,40 (1,12-4,95)) et de l’asthme (OR = 3,5 (2,7-4,6)). Enfin, le risque coronarien est augmenté chez les fumeurs porteurs de l’allèle nul GSTM1*0 (OR = 2,30 (1,40-9,00)) et de l’allèle fonctionnel GSTT1*1 (OR = 2,5 (1,30-4,80)). Ce dernier est également associé à une augmentation du risque d’artériopathie des membres inférieurs (OR = 3,60 (1,40-9,00)). Ces données montrent que les polymorphismes des GST sont des facteurs de risque pour ces pathologies. Contrairement aux maladies cardiovasculaires, ces facteurs de risque paraissent indépendants de la consommation de tabac dans le cas du cancer du poumon alors qu’ils n’ont pas été examinés dans les autres cancers. Par conséquent, d’autres travaux sont nécessaires pour étudier les interactions potentielles entre les génotypes GST et des carcinogènes chimiques, notamment ceux présents dans la fumée de tabac. Mots clés : glutathion S-transférase, cancer, maladie cardiovasculaire, épidémiologie Article reçu le 17 mars 2003, accepté le 26 juin 2003 Ann Biol Clin, vol. 62, n° 1, janvier-février 2004 Summary. Glutathione S-transferases (GST), xenobiotic-metabolising enzymes, are involved in the metabolic detoxification of various environmental carcinogens. Particular genetic polymorphisms of these enzymes have been shown to influence individual susceptibility against various pathologies including cancer, cardiovascular and respiratory diseases. The results from the metaanalysis indicate that GSTM1*0 null allele was associated with enhanced risk for lung (OR (95% IC) = 1,17 (1,07-1,27)), bladder (OR = 1,44 (1,23-1,68) and larynx cancer (OR = 1,42 (1,10-1,84)). GSTT1 null genotype was associated with increased astrocytomas (OR = 2,36 (1,41-3,94)) and meningiomas (OR = 3,57 (1,82-6,92)) cancer risk. GSTP1 allelic polymorphism influence the development of bladder cancer in smokers (OR = 2,40 (1,12-4,95)) and occupational asthma (OR = 3,5 (2,7-4,6)). Finally, GSTM1*0 null allele and GSTT1*1 functional allele were associated with increased risk for coronary heart diseases in smokers (OR = 2,30 (1,40-9,00)) and OR = 2,5 (1,30-4,80), respectively). The GSTT1*1 functional allele was also significantly associated with increased risk of lower extremity arterial disease (OR = 3,60 (1,40-9,00). These epidemiological data suggest that genetic GST polymorphisms influence 15 revue générale the individual susceptibility to these diseases. Contrary to cardiovascular disease, no evidence of interaction between GST genotype and smoking status was found in lung cancer but it has not been studied in other cancers. Consequently, other works are necessary to study the potential interaction between GST genotype and environmental carcinogens including tobacco smoke extract. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Key words: glutathione S-transferase, cancer, cardiovascular disease, epidemiology L’organisme vivant est constamment exposé aux composés exogènes carcinogènes tels que la dioxine, les nitrosoamines et les hydrocarbures aromatiques polycycliques. Pour neutraliser leurs effets toxiques, l’organisme possède un système multi-enzymatique complexe permettant l’élimination de ces substances hydrophobes par les urines ou la bile. Le foie est, de loin, l’organe le plus impliqué dans ces biotransformations mais d’autres organes ou tissus comme l’intestin, le rein, le poumon et la peau contribuent également de façon importante au métabolisme et à l’élimination de ces composés. Le métabolisme des xénobiotiques est orchestré en trois phases : I (réactions d’oxydation), II (réactions de conjugaison) et III (systèmes de transport impliquant les protéines ABC) (tableau I). Toute variation dans l’activité de ces enzymes pourra potentiellement avoir des répercussions significatives sur le devenir des composés médicamenteux et carcinogènes et sur les quantités des métabolites produits. Actuellement, il est clairement établi que les polymorphismes génétiques des enzymes du métabolisme des médicaments (EMX) influencent la susceptibilité individuelle vis-à-vis de certaines pathologies comme les cancers, les maladies cardiovasculaires et inflammatoires. Parmi ces enzymes, les glutathion S-transférases (GST), enzymes polymorphes impliquées dans la conjugaison du glutathion réduit à des composés électrophiles nocifs et dans la chimiorésistance aux agents anticancéreux, occupent une place très importante dans le système de défense cellulaire. Comme les GST détoxiquent les composés carcinogènes, plusieurs études épidémiologiques ont examiné l’incidence de leurs polymorphismes génétiques sur le risque de survenue et/ou l’aggravation de nombreuses pathologies comme les cancers et les maladies cardiovasculaires. Nous allons présenter et discuter ces données après un bref rappel des traits importants relatifs à ces enzymes. Tirés à part : G. Siest 16 Abréviations ABC GST HAP MDR MOAT MRP OR VADS : ATP-binding cassette : glutathion S-transférases : hydrocarbures aromatiques polycycliques : multidrug resistance : multispecific organic anion transport : multidrug resistance-associated protein : odds ratio : voies aéro-digestives supérieures Les glutathion S-transférases Généralités Les glutathion S-transférases cytosoliques (GST, E.C 2.5.1.18) représentent une importante familles d’isoenzymes polymorphes réparties en huit classes : mu (GSTM), alpha (GSTA), pi (GSTP), thêta (GSTT), zêta (GSTZ), sigma (GSTS), kappa (GSTK) et omega (GSTO) [1-3]. Les GST sont des enzymes solubles avec une masse moléculaire d’environ 25 kDa, dimériques et largement répandues dans la faune et la flore. Chaque sous-unité GST porte deux sites de fixation : le premier est spécifique du glutathion réduit (GSH), site « G », alors que le second l’est pour le substrat proprement dit, site « H ». De plus, certaines GST (au moins les GSTA et P) possèdent un troisième site non spécifique qui serait soit impliqué dans le transport des molécules hydrophobes comme la bilirubine, soit serait comme un site régulateur qui supprimerait parfois l’activité de l’enzyme allostérique [4]. La localisation chromosomique, tissulaire et les caractéristiques physico-chimiques des GST sont indiquées dans les tableaux II et III. Si leur structure est généralement similaire, leur point isoélectrique est en revanche différent et permet de les classer en trois groupes : basique (GSTA), neutre (GSTM) et acide (GSTT et GSTP) [1, 2]. Les fonctions biologiques remplies par les GST sont diverses. Les plus importantes sont la détoxication des xénobiotiques, le transport, le métabolisme des éicosanoïdes et l’activation de certains substrats (figure 1). En effet, les GST catalysent la conjugaison du GSH à différents substrats électrophiles, issus de la phase I, nocifs pour la celAnn Biol Clin, vol. 62, n° 1, janvier-février 2004 Glutathion S-transférases Tableau I. Exemples de réactions de transformation des médicaments et des substances étrangères au sein de l’organisme. Réactions Enzymes Substrats connus Phase I Oxydation Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Réduction Hydroxylation, oxydation Cytochromes P450 Phénobarbital, aniline, phénothiazine, HAP Décarboxylation, désamination Cytochromes P450 Codéine, amphétamine, histamine Déshydrogénation Alcool déshydrogénase Alcool Déshydrogénation des amines Monoamine oxydase Catécholamine Déhalogénation Cytochromes P450 Hydrocarbures dihalogénés Oxydation des radicaux Superoxyde dismutase Oxygène singulet, radical hydroxyle Peroxydation Glutathion peroxydase Lipoperoxydes NAD(P)H-quinone oxydoréductase Quinones Phénol, alcool, amines, sulfamide, morphine Phase II Conjugaison Glucuronoconjugaison UDP-glucuronosyltransférases Sulfoconjugaison Sulfotransférases Phénol, amines aromatiques, sulfamides Acétylation O-, N-acétyltransférases Sulfamides, procaïne Méthylation O-, N-méthyltransférases Nicotinamides Conjugaison au GSH Glutathion-S-transférases Époxydes, lipoperoxydes, quinones, carbonyles α,β-insaturés, anticancéreux Phase III Protéines ABC MRP Transport Médicaments, conjugués au GSH et à l’acide glucuronique MDR Transport Médicaments, conjugués au GSH et à l’acide glucuronique MOAT Transport Médicaments, conjugués au GSH et à l’acide glucuronique Tableau II. Nomenclature, localisation chromosomique et caractéristiques physico-chimiques des GST humaines les plus étudiées [1-3, 5, 6]. Classes Enzymes Autres nomenclatures AA PM PI Gènes Localisation chromosomique Alpha hGSTA1 hGSTA1-1 GST2-type 1 ou GSTe 222 26,9 8,9 hGSTA1 6p12.1 hGSTA2 hGSTA2-2 GST2-type 2 ou GSTγ 222 26,9 8,4 hGSTA2 6p12.1 hGSTA3 hGSTA3-3 nd nd nd hGSTA3 6p12.1 hGSTA4 hGSTA4-4 222 25,7 5,8 hGSTA4 6p12.1 hGSTA5 hGSTA5-5 nd nd nd hGSTA5 6p12.1 Mu hGSTM1 hGSTM1a-1a GST1-type 2 ou GSTµ 218 26,7 6,1 hGSTM1 1p13.3 hGSTM1b-1b GST1-type 1 ou GST ψ 218 26,6 5,5 hGSTM1 1p13.3 hGSTM1a-1b GSTµ/ ψ 218 26,6 5,8 hGSTM1 1p13.3 hGSTM2 hGSTM2-2 GST4 218 26,3 5,4 hGSTM2 1p13.3 hGSTM3 hGSTM3-3 GST5 225 26,5 5,2 hGSTM3 1p13.3 hGSTM4 hGSTM4-4 218 26,4 5,2 hGSTM4 1p13.3 hGSTM5 hGSTM5-5 218 26,0 nd hGSTM5 1p13.3 210 23,0 4,8 hGSTP1 11q13.3 Pi hGSTP1 hGSTP1-1 GST3 ou GSTπ Thêta hGSTT1 hGSTT1-1 GST θ 240 26,7 4,6 hGSTT1 22q11.2 hGSTT2 hGSTT2-2 GSTT2 244 25,1 nd hGSTT2 22q11.2 AA = nombre d’acide aminé par sous-unité ; MM : masse moléculaire d’une sous-unité exprimée en kilodalton (kDa) ; PI : point isoélectrique ; nd = non déterminé. Ann Biol Clin, vol. 62, n° 1, janvier-février 2004 17 revue générale Tableau III. Localisation tissulaire des GST les plus étudiées [1, 2, 5, 6]. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Enzymes GST Érythrocyte Cerveau Vessie Peau Cœur Testicule Foie Poumon Lymphocytes Estomac/intestin Muscle Rein Ovaire Pancréas Placenta Prostate Utérus Alpha Mu Pi A1/2 M1-1 M2-2 M3-3 M4-4 M5-5 – ± + ++ ± ++ ++ + – + + ± + + + + + ± + + – + – ++ + + – (+) + (+) (+) – (+) ++ (±) (+) (+) ++ + (+) (+) + – + ++ (+) – – – – (+) – – – + + + + + + – + + + – + + + – – Thêta P1-1 T1-1 ± ++ ++ ++ ++ + (+) ++ + – + ++ + + + ++ ++ + T2-2 – – + – + – – – + + : expression forte ; + : expression moyenne ; (+) : expression faible ; – : pas d’expression. lule. Par conséquent, elles constituent une importante ligne de défense protégeant les composants cellulaires (ADN, lipides et protéines) des effets délétères induits par ces composés. La réaction de conjugaison aboutit à la formation de l’acide mercapturique qui sera ensuite excrété via la bile ou le rein [1]. Les GST jouent aussi un rôle important dans le transport de composés endogènes (les hormones, les stéroïdes, l’acide urique et la bilirubine) et dans le métabolisme des éicosanoïdes (synthèse des prostaglandines E2, F2a, D2 et des leucotriènes C4, E4) [1, 2]. Récemment, plusieurs études suggèrent que les GST jouent aussi un rôle antioxydant important protégeant les cellules des dommages occasionnés par les radicaux libres et leurs adduits (hydroxylipoperoxydes, quinones et les carbonyles a,b-insaturés) [3]. Bien que la grande majorité des xénobiotiques soit neutralisée par les GST, il existe plusieurs cas pour lesquels la catalyse impliquant ces enzymes ne conduit pas à une détoxication complète [4]. Ainsi, certains conjugués GS néoformés sont instables et peuvent être clivés donnant des métabolites souvent très toxiques. Ce processus de thiolyse rend la détoxication du conjugé GS incomplète et expose la cellule à la menace chimique du métabolite. Ainsi, la conjugaison GST-dépendante semble être réversible permettant sous certaines conditions la régénération du composé « parental » cytotoxique. Ce cas de figure est rencontré lors de la catalyse GST-dépendante des isothiocyanates [4]. La réversibilité de la réaction de conjugaison signifie que les conjugués GS constituent des formes temporaires de stockage et de transport plutôt qu’une détoxication proprement dite. Dans le cas des hydrocarbures mono- ou di-halogénés tels que le dibromo18 méthane et le dichlorométhane, la conjugaison GSTdépendante conduit directement à l’activation du substrat impliquant surtout l’isoenzyme GSTT1. Cette conjugaison conduit à l’activation du substrat via la formation d’un composé électrophile très réactif, l’ion épisulfonium. Ce dernier est hautement mutagène et est responsable de la néphrotoxicité et de la carcinogenèse de ces composés [1, 4]. Enfin, l’activation du métabolite néoformé fait intervenir une autre enzyme comme la b-lyase [4]. C’est le cas de l’hexachlorobutadiène et le tétrachloroéthane qui sont transportés du foie vers le rein après leur inactivation via le système GST/GSH. Dans le rein, le conjugué GS subit des modifications en vue de sa transformation en acide mercapturique grâce à l’action concertée de trois enzymes : la c-glutamyltransférase, la dipeptidase et la b-lyase. Le conjugué GS perd ainsi deux acides aminés (le glutamate et la glycine) mais dans certains cas il donne un métabolite (cystéine-S-X) néphrotoxique [4]. Polymorphismes génétiques des GST Cinq classes de GST exhibent des polymorphismes génétiques : GSTA, GSTM, GSTP, GSTT et GSTZ. Les polymorphismes les plus étudiés et documentés sont ceux relatifs aux sous-classes GSTM1, T1 et P1 (tableau IV). Pour la sous-classe GSTM1, la variation nucléotidique (G2619C) et une délétion complète du gène gstm1 sont responsables de la présence de trois allèles nommés : GSTM1*A, GSTM1*B et GSTM1*0. Les deux premiers diffèrent par une seule base au niveau de l’exon 7 qui ne semble pas affecter l’activité de l’enzyme. En revanche, la présence de l’allèle nul GSTM1*0 se traduit par l’absence Ann Biol Clin, vol. 62, n° 1, janvier-février 2004 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Glutathion S-transférases de l’enzyme GSTM1. Les sujets porteurs de la délétion du gène gstm1 semblent incapables de métaboliser des époxydes ou des quinones [1, 2]. Chez les Caucasiens, la fréquence de l’allèle nul GSTM1*0 est de 50 % et de 27 % dans la population asiatique. Plusieurs études ont confirmé la présence du phénotype nul GSTT1 suite à la délétion du gène gstt1 [1]. Récemment, une variation nucléotidique a été trouvée au niveau du gène gstt1 (A310C) qui transforme le résidu thréonine 104 en proline [5]. Ainsi, trois allèles sont décrits pour cette classe : GSTT1*A, GSTT1*B et GSTT1*0. Ces auteurs confirment la distribution trimodale de l’activité GST décrite par d’autres études. En effet, en fonction du génotype GSTT1, les sujets sont classés en trois catégories : métaboliseurs nuls, lents et rapides. La fréquence de l’allèle nul GSTT1*0 est de 20 % dans la population caucasienne et de 61 % dans la population asiatique. La GSTP1 présente quatre variants alléliques nommés GSTP1*A, GSTP1*B, GSTP1*C et GSTP1*D [6]. Ces variants résultent de la présence de deux variations nucléotidiques au niveau de la séquence codante (A313G et C341T). Ces transitions nucléotidiques transforment le codon ATC (isoleucine) en position 105 dans les GSTP1*A et 1*D en GTC (valine) dans les GSTP1*B et 1*C. Quant au codon GCG (alanine) en position 114, initialement présent dans les GSTP1*A et 1*B, il est transformé en GTG (valine) dans les GSTP1*C et 1*D. Ces changements ont une incidence sur la structure tridimensionnelle de l’enzyme et sur la stéréospécificité du site catalytique [7]. In vitro, l’activité enzymatique de la GSTP1 est quatre fois plus faible pour les variants alléliques GSTP1*B et GSTP1*C comparés à l’allèle de référence GSTP1*A [6, 7]. Oxygène moléculaire Endobiotes Exemple : éicosanoïdes, stéroïdes, quinone, etc. Xénobiotiques Exemple : tabac, médicaments, carcinogènes chimiques, etc. Phase I Réactions de fonctionnalisation (cytochromes P-450) Phase II GST/GSH Voie conjugative Phase III Régulation métabolique Inflammation Activation des métabolites ADN Pathologies Protéines Détoxication Effets géno/cytotoxiques Excrétion Carcinogenèse Figure 1. Métabolisme des xénobiotiques et endobiotes par les enzymes du métabolisme des médicaments et leurs conséquences. Ann Biol Clin, vol. 62, n° 1, janvier-février 2004 Tableau IV. Principaux polymorphismes caractérisés pour les classes GST les plus étudiées [2, 5, 6, 8, 10, 11]. Classe GST Gène Variants alléliques Mu hGSTM1 Pi hGSTP1 Thêta hGSTT1 hGSTM1*A hGSTM1*B hGSTM1*0 hGSTP1*A hGSTP1*B hGSTP1*C hGSTP1*D hGSTT1*A hGSTT1*B hGSTT1*0 Conséquence Lys173 Lys173Asn Absence de l’enzyme Ile105/Ala114 Ile105Val/Ala114 Ile105Val/Ala114Val Ile105/Ala114Val Wt Thr104Pro Absence de l’enzyme Wt, type sauvage. Cancer et GST De plus en plus de preuves indiquent que les sujets fumeurs ne sont pas tous égaux devant le cancer. À consommation égale, certains sujets développeront des cancers et d’autres n’en seront jamais atteints. La susceptibilité individuelle aux cancers induits par des carcinogènes chimiques pourrait être en partie expliquée par des différences génétiques dans la détoxication et/ou l’activation des procarcinogènes. Ainsi, de nombreuses études épidémiologiques se sont intéressées à l’incidence des polymorphismes GST sur le risque de développement de cancers liés au tabac tels que celui du poumon, des voies aéro-digestives supérieures (VADS) ou de la vessie. Ce risque a été apprécié par l’odds ratio (OR) dans le cas d’une seule étude cas/témoin ou un méta-OR pour des méta-analyses. Les tableaux V et VI résument les principaux résultats des études épidémiologiques relatives à l’incidence des polymorphismes de la GSTM1 et GSTT1 sur le risque de survenue de ces pathologies. Cancer du poumon Une récente méta-analyse [8] a conclu à une faible augmentation du risque de cancer du poumon chez les sujets ayant l’allèle nul GSTM1*0 [43 études, méta-OR = 1,17 (1,07-1,27)] (tableau V). Ce risque est différent selon l’origine ethnique des patients. Ainsi, chez les Caucasiens, le risque de cancer de poumon associé à l’absence de la GSTM1 est faible [20 études, méta-OR = 1,10 (1,01-1,19) comparé aux Asiatiques [12, méta-OR = 1,33 (1,06-1,67)] et aux Latino-Américains [1 étude, OR = 1,88 (1,003,29)]. La consommation de tabac est un important facteur de risque de cancer du poumon. Comparé aux non fumeurs, le risque de cancer du poumon est respectivement de 5, 22 et 35 fois plus élevé chez les fumeurs avec une consommation inférieure à 20 paquets-années [OR = 5,50 (4,17-7,26)], chez les fumeurs moyens (20-39 paquets19 revue générale Tableau V. Récapitulatif des études épidémiologiques relatives à l’incidence des polymorphismes de la sous-classe GSTM1 sur le risque de survenue de différentes pathologies. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Pathologies Cancer du poumon Caucasiens Asiatiques Latino-Américains Afro-Américains Cancer de la vessie Caucasiens Asiatiques Cancer de larynx Caucasiens Coronaropathies a OR : odds ratio ; b Polymorphisme incriminé Type d’étude Nombre d’études a OR (b95 % IC) Référence GSTM1*0 GSTM1*0 GSTM1*0 GSTM1*0 GSTM1*0 GSTM1*0 GSTM1*0 GSTM1*0 GSTM1*0 GSTM1*0 GSTM1*0 Méta-analyse Méta-analyse Méta-analyse Cas-témoins Méta-analyse Méta-analyse Méta-analyse Méta-analyse Méta-analyse Méta-analyse 43 (7463/10789)c 20 (4039/6000) 12 (1841/2787) 1 (60/146) 3 (383/503) 17 (2149/3646) 14 (1751/3165) 3 (389/479) 4 2 1 (400/890) 1,17 (1,07-1,27) 1,10 (1,01-1,19) 1,33 (1,06-1,67) 1,88 (1,00-3,29) 1,19 (1,01-1,19) 1,44 (1,23-1,68) 1,38 (1,15-1,65) 1,73 (1,66-1,81)) 1,42 (1,10-1,84) 1,41 (1,03-1,93) 2,30 (1,30-4,10) [8] [8] [8] [8] [8] [10] 95 % IC : intervalle de confiance à 95 % ; c nombre des études (nombre des cas/nombre des témoins). années) [OR = 22,29 (17,00-29,22) et chez les grands fumeurs (supérieur à 40 paquets-années) [8]. Qu’en est-il chez les fumeurs porteurs de l’allèle nul GSTM1*0 ? Les auteurs de cette méta-analyse ont recensé 21 études castémoins tenant compte de « la dose et la durée » de l’exposition au tabac. Après ajustement sur l’âge, le sexe et le centre de l’étude, le risque de cancer de poumon associé à la délétion du gène gstm1 chez les fumeurs est très faible [méta-OR = 1,08 (0,98-1,18)]. De plus, ces auteurs n’ont pas trouvé d’interaction significative entre la présence de l’allèle nul GSTM1*0 et la consommation de tabac. En conclusion, chez les Caucasiens, la délétion du gène gstm1 n’a qu’une faible mais significative influence sur le risque de cancer de poumon contrairement aux Asiatiques et aux Latino-Américains. De plus, l’effet inhérent à la présence de l’allèle nul GSTM1*0 est indépendant de celui relatif à la consommation de tabac. Seules deux études ont examiné les effets de la présence de l’allèle nul GSTT1*0 sur le risque de cancer du poumon. D’après une récente méta-analyse [9], l’absence de la GSTT1 n’a aucune incidence sur le risque de survenue de cancer de poumon [2 études, méta-OR = 1,34 (0,742,43)]. Cancer de la vessie Récemment, une méta-analyse [10] a recensé 23 études cas-témoins ayant examiné l’incidence de la présence de l’allèle nul GSTM1*0 sur le risque de survenue de cancer de la vessie. Les auteurs ont exclu 6 études dans lesquelles la prévalence de cancer de la vessie était très élevée à cause des expositions professionnelles (amine aromatique et HAP, 3 études) et des infections schistosomiales (3 études). Ils ont ainsi restreint leur étude à celles incluant le tabac comme facteur de risque de cancer de la vessie (17 études). Les informations recueillies sont celles relatives à l’âge, le sexe, la race, le centre d’étude, la consom20 [10] [9] [9] [22] mation d’alcool et de tabac, le grade et le stade tumoral. Globalement, la présence de l’allèle nul GSTM1*0 est associée à une augmentation du risque de cancer de la vessie [17 études, méta-OR = 1,44 (1,23-1,68)]. Les métaOR, calculés sur des études homogènes tenant compte de l’ethnie ou de données anatomo-pathologiques, étaient égaux à 1,73 (1,66-1,81) chez les Asiatiques (3 études), 1,38 (1,15-1,65) chez les Caucasiens (14 études) et 1,57 (1,23-2,01) pour les carcinomes transitionnels (10 études). Après ajustement sur le sexe, l’âge, l’ethnie et le centre de recrutement, le risque global de cancer de la vessie associé à la présence de l’allèle nul GSTM1*0 reste relativement élevé [méta-OR = 1,40 (1,20-1,64)]. De la même manière, les méta-OR calculés sur des études homogènes, étaient 1,70 (1,19-2,42) chez les Asiatiques, 1,33 (1,12-1,58) chez les Caucasiens et 1,41 (1,17-1,70) chez les sujets ayant des carcinomes transitionnels. Neuf études seulement ont indiqué une répartition des génotypes GSTM1 chez les cas et les témoins suivant l’exposition au tabac. Dans ces études, l’hétérogénéité des données sur la consommation tabagique (la dose et durée d’exposition) n’a pas permis de calculer le risque lié à l’absence de la GSTM1 dans les différentes classes de fumeurs (petit, moyen et gros fumeurs). Néanmoins, les auteurs ont pu estimer le risque lié à la consommation de tabac en tenant compte des études homogènes (ethnie, cas incident seulement ou carcinome transitionnel). Ainsi, le risque de cancer de la vessie associé au tabac est de 2,04 (1,65-2,53) chez les Caucasiens, de 5,19 (3,27-8,26) pour les études incluant que les cas incidents et de 1,70 (1,332,10) pour les cas des carcinomes transitionnels. En stratifiant par le génotype GSTM1, le risque de cancer de la vessie lié à l’absence de la GSTM1 était plus élevé chez les fumeurs comparé au non fumeurs [2,37 (1,80-3,12) versus 1,20 (0,86-1,66)]. Le modèle d’interaction entre le Ann Biol Clin, vol. 62, n° 1, janvier-février 2004 Glutathion S-transférases tabac et le génotype GSTM1 pour le cancer de la vessie était additif. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Par ailleurs, peu d’études épidémiologiques ont examiné l’incidence de l’absence de la GSTT1 (8 études) ou les polymorphismes de la GSTP1 (6 études) sur le risque de survenue de cancer de la vessie. Globalement, les résultats des études relatives à l’incidence du polymorphisme GSTT1 sur le cancer de la vessie concluent à une augmentation du risque allant de 1,87 (1,03-3,42) [11] à 4,93 (1,39-18,42) [12] (tableau VI). Deux études [13, 14] n’ont pas trouvé d’influence significative de l’allèle nul GSTT1*0 sur le risque de cancer de la vessie. En revanche, la présence concomitante des deux allèles nuls GSTM1*0 et GSTT1*0 augmente considérablement le risque de cancer de la vessie [OR = 9,92 (1,8446,90)] [12]. Cependant, les résultats de cette étude sont à prendre avec beaucoup de précaution compte tenu du faible effectif inclus (37 cas/34 témoins) et que plus de 50 % des sujets malades souffraient d’infections schistosomiales, un autre facteur de risque du cancer de la vessie. De plus, aucune information relative à d’éventuelles expositions professionnelles ou à la consommation de tabac n’a été recueillie. Quant aux polymorphismes de la GSTP1, le risque de cancer de la vessie serait augmenté chez les sujets ayant les allèles GSTP1*B et 1*C [1,96 (0,954,32) < OR < 3,91 (1,88-8,13)] [14, 15]. Le risque de développement de cancer de la vessie était plus élevé chez les sujets fumeurs porteurs des allèles GSTP1*B ou 1*C comparés aux sujets non fumeurs [OR = 2,40 (1,12-4,95) versus 1,75 (1,03-2,99)]. Le risque de cancer de la vessie était considérablement augmenté chez les sujets porteurs des allèles GSTM1*0 et GSTP1*B ou 1*C [3,91 (1,888,13)] [14]. En résumé, la présence de l’allèle nul GSTM1*0 est associée à une augmentation du risque de cancer de la vessie surtout chez les sujets fumeurs. La présence concomitante des allèles GSTM1*0 et GSTP1*B ou 1*C augmente significativement le risque de cancer de la vessie. En revanche, la présence de l’allèle nul GSTT1*0 est faiblement associée au risque de cancer de la vessie. Hormis l’étude de Abdel-Rahman et al. [12], la présence concomitante des allèles nul GSTT1*0 et GSTM1*0 ne semble pas modifier le risque de cancer de la vessie. Cancer du larynx L’influence de l’allèle nul GSTM1*0 sur le risque de développer un cancer du larynx a été évalué dans 4 études seulement [9]. Une seule étude avait une puissance statistique supérieure à 80 % pour détecter un risque de cancer du larynx associé à la présence de l’allèle nul GSTM1*0 supérieur ou égale à 2 (a = 0,05). Globalement, une augmentation du risque de cancer du larynx pourrait être associée à la délétion du gène codant pour la GSTM1 [métaOR = 1,42 (1,10-1,84)]. Chez les Caucasiens, le risque de cancer associé à ce polymorphisme est plus élevé dans deux études qui portaient sur les carcinomes épidermoïdes [2 études, méta-OR = 1,41 (1,03-1,93)]. Chez les fumeurs, le risque de cancer de larynx associé à l’absence de la GSTM1 est légèrement élevé [2 études, méta-OR = 1,50 (1,00-2,30)]. Tableau VI. Récapitulatif des études épidémiologiques relatives à l’incidence des polymorphismes de la sous-classe GSTT1 sur le risque de survenue de différentes pathologies. Pathologies Cancer de la vessie Caucasiens Caucasiens Caucasiens Caucasiens Caucasiens Caucasiens Asiatiques Égyptiens Astrocytomes Méningiomes Syndrome myélodysplasique Coronaropathies Artériopathies des membres inférieurs a OR : odds ratio ; b Polymorphisme incriminé Type d’étude Nombre d’études GSTT1*0 GSTT1*0 GSTT1*0 GSTT1*0 GSTT1*0 GSTT1*0 GSTT1*0 GSTT1*0 GSTT1*0, GSTM1*0 GSTT1*0 GSTT1*0 GSTT1*0 GSTT1*1 GSTT1*1 Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins Cas-témoins 1 (113/170) c 1 (374/373) 1 (67/248) 1 (76/248) 1 (135/127) 1 (121/121) 1 (232/165) 1 (37/34) intervalle de confiance à 95 % ; Ann Biol Clin, vol. 62, n° 1, janvier-février 2004 c 1 (112/577) 1 (50/577) 1 (96/201) 1 (400/890) 1 (212/1277) a OR (b95 %,IC) 3,80 (1,21-12,30) 2,60 (1,10-6,00) 2,54 (1,20-5,50) 1,87 (1,03-3,42) 2,31 (1,17-4,59) 3,90 (1,88-8,13) 2,20 (1,20-4,30) 4,93 (1,39-18,42) 9,92 (1,84-46,90) 2,36 (1,41-3,94) 3,57 (1,82-6,92) 4,31 (2,50-7,40) 2,50 (1,30-4,80) 3,60 (1,40-9,00) Référence [27] [28] [11] [29] [30] [14] [13] [12] [12] [19] [19] [20] [22] [23] Nombre d’études (nombre des cas/nombre des témoins). 21 revue générale Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Cancer du sein Trois études cas-témoins ont examiné l’effet de la présence de l’allèle nul GSTM1*0 sur le risque de survenue de cancer du sein [9]. En effet, la présence de l’allèle nul GSTM1*0 ne semble pas influencer le risque de cancer du sein [méta-OR = 1,19 (0,92-1,54). Cancer du côlon Strange et al. [16] ont examiné l’effet du polymorphisme GSTM1 et le risque de survenue d’adénocarcinomes de l’estomac et du côlon. En stratifiant par le génotype GSTM1 et malgré le faible nombre de sujets, ces auteurs ont trouvé une différence significative entre les cas et les témoins (p < 0,05). Zhong et al. [17] ont également montré une corrélation significative entre le phénotype nul GSTM1 et le cancer du côlon. Cependant, Deakin et al. [18] n’ont trouvé aucun effet lié au phénotype nul GSTM1. En revanche, une augmentation du risque de cancer colorectal a été trouvée chez les sujets ayant l’allèle nul GSTT1*0 [OR = 2,0 (1,28-2,77)]. Astrocytomes, méningiomes et syndrome myélodysplasique Les astrocytomes et les méningiomes ont été les premiers cas de tumeurs du cerveau pour lesquels une susceptibilité liée à l’absence de la GSTT1 a été démontrée. En effet, le risque de survenue d’astrocytomes et de méningiomes chez les sujets porteurs de l’allèle nul GSTT1*0 est relativement élevé [OR = 2,36 (1,41-3,94) et 3,57 (1,82-6,92), respectivement] [19]. L’allèle nul GSTT1*0 est également associé à l’augmentation du risque de syndrome myéloplasique [20]. Cette association est forte comme l’indique l’odds ratio [OR = 4,5 (2,5-7,4)] et reste significative quelles que soient les classes cliniques. Cependant, ces résultats ne sont pas confirmés par deux autres études qui n’ont pas trouvé d’association significative entre l’allèle nul GSTT1*0 et le syndrome myélodysplasique [21]. Maladies cardiovasculaires et GST Li et al. [22, 23] ont observé une augmentation du risque cardiovasculaire chez les sujets fumeurs porteurs des allèles GSTM1*0 et GSTT1*1. En effet, le risque coronarien est deux fois plus élevé chez les sujets fumeurs ayant l’allèle nul GSTM1*0 par rapport aux sujets fumeurs exprimant la protéine GSTM1 [OR = 2,3 (1,3-4,1) versus 1,1 (0,6-2,1)] [22]. Inversement, le risque coronarien augmente chez les sujets fumeurs porteurs de l’allèle fonctionnel GSTT1*1 par rapport à ceux ayant l’allèle nul GSTT1*0. En effet, Li et al. [22] ont observé que les sujets fumeurs ayant l’allèle GSTT1*1 avaient un risque coronarien 3 fois plus élevé comparé aux sujets fumeurs 22 ayant l’allèle nul GSTT1*0 [OR = 2,5 (1,3-4,8) versus 0,9 (0,4-2,3)]. L’implication de la présence de l’allèle fonctionnel GSTT1*1 dans l’augmentation du risque cardiovasculaire a été confirmée par une seconde étude [23]. La présence de cet allèle était associée à une augmentation de 3 à 4 fois du risque d’artériopathies des membres inférieurs chez les fumeurs [OR = 3,6 (1,4-9,0) et 5,0 (1,913,0) contre 0,8 (0,2-2,8) et 0,6 (0,1-2,1), respectivement). L’interaction entre la présence des allèles GSTM1*0, GSTT1*1 et le tabac était significative et suivait un mode additif ou multiplicatif [27, 28]. De plus, chez les fumeurs, De Waart et al. [24] ont trouvé une association positive entre la progression de l’épaisseur de l’intima média et la présence de l’allèle fonctionnel GSTT1*1. Maladies respiratoires et GST Les maladies respiratoires comme l’asthme et ses phénotypes intermédiaires associés, hyper-réactivité bronchique et atopie, résultent vraisemblablement des interactions de multiples facteurs génétiques et environnementaux. Jusqu’à présent, les études génétiques ont principalement concerné les gènes impliqués dans la réponse immunitaire et les processus inflammatoires, alors que les gènes des EMX dont les GST n’ont fait l’objet que de peu d’études. En effet, la déficience de la GSTM1 est significativement associée à la sévérité de la bronchite chronique chez les fumeurs [OR = 2,8 (1,5-4,5)] [25]. En revanche, les sujets porteurs de l’allèle homozygote GSTP1*A ont un risque élevé de développer une bronchite chronique obstructive comparés aux témoins [OR = 3,5 (2,7-4,6)] [26]. L’allèle GSTP1*B semble conférer une protection vis-à-vis de l’asthme induit par les isocyanates et l’hypersensibilité immédiate. Les sujets ayant l’allèle GSTP1*B ont 9 fois moins de risque de développer un asthme comparés aux sujets ayant l’allèle GSTP1*A [27]. Les données apportées par ces études sont encore trop limitées pour tirer des conclusions objectives. L’existence d’un lien entre certains variants alléliques GSTP1 et l’asthme reste à démontrer et à clarifier. Mais, l’implication potentielle des GST dans la modulation du stress oxydant, dans l’activation de certains substrats et dans la production de médiateurs lipidiques de l’acide arachidonique offre des bases intéressantes pour expliquer comment ces enzymes pourraient contribuer aux processus pro- et anti-inflammatoires. Conclusion L’étude des EMX en l’occurrence les GST, constitue un axe de recherche très prometteur pour comprendre la notion de la susceptibilité génétique individuelle vis-à-vis Ann Biol Clin, vol. 62, n° 1, janvier-février 2004 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Glutathion S-transférases des pathologies multifactorielles comme l’asthme, le cancer ou les maladies cardiovasculaires. Comme l’expression et l’activité des GST sont modulées par des facteurs génétiques (polymorphismes) et environnementaux (xénobiotiques), ces enzymes constituent un modèle d’étude des interactions gène-environnement. La détoxication des xénobiotiques est de loin la fonction la plus connue des GST. Cependant, certaines propriétés de ces enzymes, énoncées dans cet article, montrent qu’elles pourraient jouer un rôle dans d’autres processus biologiques comme l’activation ou l’inhibition de cascades métaboliques dont les conséquences en physiopathologie restent à explorer. La contribution des enzymes du métabolisme des médicaments notamment les GST à la carcinogenèse chimique est controversée et n’a pas fini de susciter un grand intérêt. Récemment, certains polymorphismes des GST ont été clairement incriminés dans la modulation du risque de survenue des pathologies ayant une composante inflammatoire. Les données apportées par ces études supportent l’idée de l’implication des polymorphismes GST dans la modulation du risque de ces pathologies. Mais, les mécanismes moléculaires impliquant les GST dans la survenue de ces pathologies sont loin d’être élucidés et de nombreuses hypothèses restent à vérifier. Références 1. Hayes JD, Pulford DJ. The glutathione S-transferase supergene family : regulation of GST and the contribution of the isoenzymes to cancer chemoprotection and drug resistance. Crit Rev Biochem Mol Biol 1995 ; 30 : 445-600. 2. Hayes JD, Strange RC. Glutathione S-transferase polymorphisms and their biological consequences. Pharmacology 2000 ; 61 : 154-66. 3. Hayes JD, McLellan LI. Glutathione and glutathione-dependent enzymes represent a co-ordinately regulated defence against oxidative stress. Free Radic Res 1999 ; 31 : 273-300. 10. Engel LS, Taioli E, Pfeiffer R, et al. Pooled analysis and metaanalysis of glutathione S-transferase M1 and bladder cancer : a HuGE review. 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