Théorème de Cayley-Hamilton Riffaut Antonin 2013-2014 Soit A un anneau unitaire et commutatif. Rappelons l’énoncé du très classique théorème de CayleyHamilton : Théorème 1. Soit U ∈ Mn (A). Alors χU (U ) = 0. La démonstration de ce théorème que nous proposons ici fait appel à une méthode très riche qui permet d’établir de nombreuses relations matricielles (comme par exemple det(U V ) = det(U ) det(V ), ou encore χU V = χV U ). L’idée est de se ramener de A à un anneau de polynômes sur Z, puis à un anneau où l’on connaît le résultat souhaité (ici, le corps C des nombres complexes). Démonstration. • Nous allons commencer par établir le théorème de Cayley-Hamilton lorsque U ∈ Mn (C), par un argument de densité de l’ensemble des matrices diagonalisables. Supposons tout d’abord que U soit une matrice diagonale : U = diag(λ1 , . . . , λn ), avec λi ∈ C. Le polynôme caractéristique de U est alors χU = n Y (X − λi ). i=1 Ainsi, χU (U ) = n Y (U − λi In ). i=1 Or, pour tout i ∈ {1, . . . , n}, U − λi In est une matrice diagonale dont le i-ème terme diagonal est nul. Par multiplication, il s’ensuit que χU (U ) = 0. À présent, si U est diagonalisable, il existe une matrice P ∈ GLn (C) et une matrice diagonale D ∈ Mn (C) telle que U = P DP −1 . Comme U et D sont semblables, elles ont le même polynôme caractéristique, d’où l’on déduit que χU (U ) = P χU (D)P −1 = P χD (D)P −1 = 0. Dans le cas général, par densité de l’ensemble des matrices diagonalisables dans Mn (C), U est limite d’une suite (Un )n∈N de matrices diagonalisables de Mn (C). Pour tout n ∈ N, χUn (Un ) = 0 ; or, l’application M ∈ Mn (C) 7−→ χM (M ) ∈ Mn (C) est continue, car polynomiale en les coefficients de M . Par passage à la limite, on en déduit que χU (U ) = 0. • Revenons au cas U = (ui,j )1≤i,j≤n ∈ Mn (A). Notons B l’anneau des polynômes à n2 indéterminées à coefficients entiers : B = Z[X1,1 , . . . , Xn,n ]. e = (Xi,j )1≤i,j≤n ∈ Mn (B). Soit ϕ : Z −→ A l’unique morphisme Définissons alors la matrice U d’anneaux de Z dans A, défini par ϕ(k) = k.1A , pour tout k ∈ Z. Par la propriété universelle des anneaux de polynômes, ce morphisme s’étend de manière unique en un morphisme ψ : B −→ A tel que ψ(k) = ϕ(k) = k.1A , pour tout k ∈ Z, et ψ(Xi,j ) = ui,j , pour tout i, j ∈ {1, . . . , n}. Comme chacun des coefficients du polynôme caractéristique d’une matrice est un polynôme en les coefficients de cette matrice, on en déduit que e )) = χU (U ). ψ(χUe (U 1 e ) = 0. Notons M = (Mi,j )1≤i,j≤n = χ e (U e ) ∈ Mn (B). Il suffit alors de montrer que χUe (U U Comme B ⊂ C[X1,1 , . . . , Xn,n ], chaque coefficient Mk,l définit une fonction polynomiale g M k,l : 2 Cn −→ C (z1,1 , . . . , zn,n ) 7−→ Mk,l (z1,1 , . . . , zn,n ). 2 g Pour tout (z1,1 , . . . , zn,n ) ∈ Cn , M k,l (z1,1 , . . . , zn,n ) est le coefficient mk,l de la matrice χZ (Z) = (mi,j )1≤i,j≤n , où Z = (zi,j )1≤i,j≤n . Or, par ce qui précède, χZ (Z) = 0, donc la fonction polynog miale M k,l est identiquement nulle, et comme C est un corps infini, on en déduit que Mk,l = 0. e ) = 0, puis χU (U ) = 0, ce qui conclut la démonstration. Par conséquent, χUe (U Références [BMP] Vincent Beck, Jérôme Malick, Gabriel Peyré, Objectif Agrégation, exercice 4.19 page 217. 2