JANÉ Loïc & MERCIER Simon 2°C La révolution des États allemands 1848 Révolutionnaires triomphant sur les barricades le18 mars 1848 à Berlin. 1 La plupart des soulèvements de 1830 n'aboutissent pas et sont réprimés. Cependant, les mouvements libéraux et nationaux ne disparaissent pas. En 1848, une nouvelle vague de révolutions touche l'Europe tout entière. Quels sont les résultats de ce « printemps des peuples » ? I) Causes Pour les Allemands, la question allemande a toujours eu deux aspects : c’était à la fois une question territoriale et une question constitutionnelle. Ou, pour être plus précis, la question du rapport entre l’unité et la liberté. Le problème de la « petite Allemagne » ou de la « grande Allemagne » était au cœur de la question territoriale. Si l’on parvenait à instituer un Etat national allemand en lieu et place du Saint Empire romain germanique, celui-ci devait-il inclure l’Autriche germanophone ; ou bien pouvait-on envisager une solution sans ces territoires ? La question constitutionnelle concernait surtout les rapports entre le peuple et le trône. Qui devait détenir le pouvoir dans une Allemagne unifiée : les représentants élus par le peuple ou les princes, c’est-à-dire le plus puissant d’entre eux ? L’unité et la liberté furent pour la première fois à l’ordre du jour lors des guerres de libération contre Napoléon. L’empereur des Français fut vaincu mais la victoire sur la domination étrangère ne donna aux Allemands ni un pays uni ni un régime libéral dans les Etats composant la Confédération germanique, créée en 1815 pour remplacer l’ancien Empire. Mais la volonté d’unité et de liberté ne pouvait plus être étouffée. Elle s’exprimait à nouveau au début des années 1830, après que les Français aient obtenu de haute lutte une monarchie libérale lors de la révolution de juillet 1830. Et même si le pouvoir traditionnel parvint à se maintenir en Allemagne, les libéraux et les démocrates ne renoncèrent pas pour autant à leur combat. Inspirée par l’exemple français de février 1848, la révolution éclata également en Allemagne en mars de la même année : les forces qui se savaient aller dans le sens du progrès historique réclamaient une fois de plus l’unité et la liberté. Selon les vœux de l’Assemblée nationale de Francfort, l’Etat allemand, à la tête duquel devait régner Frédéric Guillaume IV de Prusse, aurait été un Etat constitutionnel libéral, avec un Parlement fort contrôlant le gouvernement. En tant qu’empereur allemand, Frédéric Guillaume IV devait renoncer à être roi de grâce divine et se concevoir comme un exécutant de la volonté du peuple souverain. Des exigences que le descendant des Hohenzollern rejeta définitivement le 28 avril 1849. La révolution avait échoué, elle n’avait apporté aux Allemands ni l’unité, ni la liberté. • La principale cause des révolutions de 1848 tient à la volonté des peuples de former un État national. En Italie et en Allemagne, les peuples sont divisés. Dans l'Empire autrichien, les Hongrois et les Slaves sont dominés. Partout se développent des mouvements nationalistes qui adoptent généralement des idées libérales. • Les mutations économiques jouent aussi leur rôle. La révolution industrielle renforce le pouvoir économique de la bourgeoisie. Celle-ci souhaite participer plus activement à la vie politique des États qu'elle fait prospérer. Les milieux ouvriers réclament aussi plus de 2 démocratie et de protection sociale. Enfin, une crise économique due aux mauvaises récoltes et à la surproduction industrielle génère d'importants mécontentements. • Après l'élection du pape Pie IX (1792-1878) considéré à tort comme libéral, des émeutes en faveur de l'unité éclatent en Italie dès janvier 1848. En France, la crise économique et l'agitation républicaine aboutissent à la révolution de février 1848 : Louis-Philippe est chassé, la IIe République est proclamée. Ces troubles se propagent à l'Europe entière. II. Le « printemps des peuples » • En mars 1848, des manifestations libérales sont organisées à Prague ; c'est ensuite au tour de Vienne de se couvrir de barricades. L'empereur Ferdinand est contraint d'accorder la liberté de la presse et de promettre une constitution. Après cette première victoire, les différentes nationalités (Tchèques, Hongrois, Croates) qui composent l'Empire d'Autriche demandent davantage d'autonomie. On envisage de transformer l'Empire en un État fédéral. • Les révoltes gagnent bientôt les États allemands. De nombreux souverains, dont le roi de Prusse, promettent des constitutions libérales. Une assemblée constituante représentant tous ces États allemands est élue : le parlement de Francfort siège à partir de mai 1848. Quelle forme donner à la future Allemagne unifiée ? Les discussions sont vives. En janvier 1849, il est décidé d'en exclure l'Autriche. Enfin, en mars 1849, une constitution est adoptée. Le roi de Prusse Frédéric-Guillaume IV est élu « empereur des Allemands ». • Les troubles en Autriche encouragent les partisans de l'unité italienne. Le roi de Piémont décide de chasser définitivement les Autrichiens : il est battu en juillet 1848. L'agitation se renforce ; les Républiques de Venise, de Florence et de Rome sont proclamées entre août 1848 et janvier 1849. III. L'échec des révolutions et le retour à l'ordre • En Autriche, cependant, l'armée restaure le pouvoir monarchique. L'empereur Ferdinand est contraint d'abdiquer, au profit de son neveu François-Joseph qui organise la réaction. Les différents mouvements nationalistes et libéraux sont brisés. Les Hongrois résistent avec acharnement mais sont vaincus à l'été 1849. Les Autrichiens ont en effet reçu l'aide des Russes qui craignent une extension des troubles en Pologne. • En Allemagne, le roi de Prusse refuse la couronne qui lui est offerte et le parlement de Francfort est dispersé en avril 1849. Les différentes républiques qui tentent de se constituer sont écrasées. La volonté d'unification reste pourtant intacte. Frédéric-Guillaume IV est tenté d'accepter le titre d'empereur d'Allemagne si toutefois celui-ci lui est donné par les princes allemands (et non plus par les « barricades »). L'Autriche exige un strict retour à la situation d'avant 1848. • En 1849, les républicains italiens sont écrasés par le roi de Naples et par le pape. Les troupes autrichiennes reprennent position à Venise et en Italie centrale. Les patriotes italiens se réfugient dans le royaume de Piémont, qui seul conserve une Constitution libérale. • L'échec général est dû à l'absence de coordination entre les différents mouvements, au ralliement de la bourgeoisie au pouvoir (par peur des idéaux socialistes) et à la passivité de la paysannerie. Enfin, la jeune République française est gouvernée par des conservateurs qui refusent d'aider les révolutions et aident militairement le pape à reconquérir ses territoires. 3 II) Déroulement Or faire simultanément de l’Allemagne un Etat national et un Etat constitutionnel représentait un objectif plus ambitieux que celui des révolutionnaires français en 1789. Car ces derniers avaient affaire à un Etat national – même s’il n’était encore que « prémoderne » – auquel ils voulaient donner des fondements nouveaux. Quiconque souhaitait l’unité et la liberté pour les Allemands devait d’abord déterminer ce qui relevait de l’Allemagne. Le premier Parlement librement élu, l’Assemblée nationale qui se tint dans la Paulskirche à Francfort, considérait qu’un Etat national allemand devait englober la partie germanophone de la monarchie des Habsbourg. Ce n’est qu’à partir de l’automne 1848 que la majorité des députés admit qu’il n’était pas en leur pouvoir de faire éclater cet empire réunissant des peuples divers. On ne pouvait imposer un Etat national regroupant la « grande Allemagne » (et donc englobant l’Autriche), seul un Etat national constitué de la « petite Allemagne », sans l’Autriche, était possible – à savoir, dans l’état des choses, un empire dirigé par un empereur héréditaire prussien. Dans les États allemands, la vieille Confédération germanique et son organe suprême, la Diète, instrument de la domination autrichienne, semblent disparaître sans coup férir. Partout s'installent les « ministères de mars ». Dans certains États, la révolution consiste en une simple passation des pouvoirs, en un remaniement ministériel opéré en douceur au profit des dirigeants de l'opposition bourgeoise et modérée. C'est le cas de la Saxe, de la Hesse, du Wurtemberg. Ailleurs, il faut forcer la décision, comme en Bavière, où le roi Louis Ier abdique. L'aile marchante du parti révolutionnaire est assez composite. Artisans, étudiants et petit-bourgeois des villes, groupées dans des associations démocratiques, constituent le gros de la troupe. Les Turner, sociétés de gymnastique paramilitaires et d'esprit pangermaniste, se chargent des opérations de rue et des assauts contre les palais et les bâtiments administratifs. À vrai dire, le déferlement des jacqueries, de ces soulèvements paysans contre les redevances seigneuriales qui éclatent entre Main et Necker dès janvier 1848 a été pour beaucoup dans la rapide capitulation des princes les plus intransigeants. Berlin, le dernier bastion de l'absolutisme, cède après la sanglante insurrection du 18 mars. FrédéricGuillaume IV entérine le vote, par le Landtag prussien, des libertés fondamentales. Qui plus est, le Landtag vote un projet d'Assemblée nationale élue au suffrage universel, consacrant par là le triomphe apparent d'un mouvement national et unitaire, aux antipodes de la politique traditionnelle d'intérêts dynastiques des Hohenzollern. Ce mouvement, héritier des grandes batailles patriotiques de 1813 et de 1817, revigoré par la crise franco-allemande de 1840, avait pris naissance en Bade dès février 1848. À Mannheim d'abord, à Heidelberg ensuite, des réunions enthousiastes de bourgeois libéraux et radicaux avaient débouché sur un projet de réforme des institutions fédérales. Un Pré parlement (Vorparlament) est élu, destiné à mettre sur pied une Chambre panallemande, à abroger le statut de la Confédération et, par là, à rayer de l'histoire le particularisme germanique. La révolution prit la double forme d'un mouvement national unitaire et d'une révolution démocratique. L'appel national partit d'Heidelberg d'une cinquantaine de patriotes. La convocation d'un Parlement constituant fut décidée, le gouvernement alors affolé laissa faire 4 et la Diète se sépara. Les princes, pris de peur devant les mouvements populaires, se pressèrent d'accorder les libertés réclamées par leurs sujets. C'est le 18 mars, suite à des affrontements sanglants entre manifestants et la troupe, que la révolution éclata. La lutte se poursuivit toute la nuit et était encore indécise quand Frédéric-Guillaume IV (1840-1861) promit à ses "chers Berlinois" de retirer ses troupes. La révolution prit la double forme d'un mouvement national unitaire et d'une révolution démocratique. L'appel national partit d'Heidelberg d'une cinquantaine de patriotes. La convocation d'un Parlement constituant fut décidé, le gouvernement alors affolé laissa faire et la Diète se sépara. Les princes, pris de peur devant les mouvements populaires, se pressèrent d'accorder les libertés réclamées par leurs sujets. C'est le 18 mars, suite à des affrontements sanglants entre manifestants et la troupe, que la révolution éclata. La lutte se poursuivit toute la nuit et était encore indécise quand Frédéric-Guillaume IV (1840-1861) promit à ses "chers Berlinois" de retirer ses troupes. III) Conséquence Ce n’est pas un hasard si le terme de Realpolitik devint, quelques années après la révolution de 1848, un véritable slogan politique. La carrière internationale de cette expression commença avec un essai de l’auteur libéral Ludwig August von Rochau, publié en 1853 sous le titre Grundsätze der Realpolitik. Angewendet auf die staatlichen Zustände Deutschlands (Les principes de la Realpolitik appliqués au contexte étatique de l’Allemagne). En fait, l’Assemblée de la Paulskirche avait déjà fait de la Realpolitik en ignorant le droit à l’autodétermination d’autres peuples (les Polonais du grand-duché prussien de Posnanie, les Danois du Schleswig du Nord, les Italiens du « Tyrol romand »), décidant de tracer les frontières du futur Empire allemand là où cela servait le soi-disant intérêt national de l’Allemagne. Se faisant, elle accordait pour la première fois plus d’importance à l’unité qu’à la liberté. La liberté des autres nations devait encore s’incliner devant l’objectif de l’unité allemande. Dans l'Allemagne occidentale la révolution détermina la structure démocratique des Etats qui avaient déjà une constitution, elle amena en quelques points une agitation paysanne et ouvrière et surtout elle amorça le mouvement national pour l'unité allemande. Les Etats de la Confédération germanique instaurent un parlement allemand. Frédéric-Guillaume IV commença par convoquer une Assemblée nationale, mais il ne tarda pas à entrer en conflit avec et, devant l'exemple de l'Autriche qui avait écrasé la révolution de Vienne, il dissout l'Assemblée et met Berlin en état de siège. Mais l'absolutisme ne fut pas réintroduit comme il le fut en Autriche, une Constitution octroyée par le roi fut promulguée en janvier 1850, la Constitution de 1850 qui resta en vigueur jusqu'en 1918. Un Landtag (=Parlement) est établit, composé de 2 chambres (Chambre des Seigneurs et Chambre des députés). Mais en réalité ce furent les riches qui élirent les 5 députés et le bas peuple n'eut rien à dire. Le roi choisissait ses ministres comme il lui plaisait, le principe de la souveraineté monarchique était sauf, le pouvoir royal restait prépondérant. Le Parlement allemand élu au suffrage universel se réunit à Francfort en mai 1848. En janvier 1849 on se décida pour donner à l'état la forme d'unEtat fédéral à forme impériale. Deux camps s'affrontaient au sujet des frontières de l'Etat fédéral, d'un côté les partisans d'une Grande Allemagne englobant l'Autriche, de l'autre les partisans de la Petite Allemagne qui ne voulait en Allemagne que des allemands et donc exclure l'Autriche et avoir comme Empereur non pas celui d'Autriche mais celui de Prusse. C'est ce dernier parti qui l'emporta et en mars 1849 Frédéric-Guillaume fut élu empereur. Immédiatement Schwarzenberg rappela de Francfort les députés autrichiens. FrédéricGuillaume désirait la couronne mais il souhaitait la recevoir avec l'accord de l'Autriche et des mains des princes, quand les délégués vinrent la lui offrir il la repoussa avec mépris (avril 1849). C'était la fin du parlement, des républicains se soulevèrent mais ils furent vite écrasés. Frédéric-Guillaume essaya de se faire reconnaître par l'Autriche et recevoir la couronne des mains des princes. Il proposa la création d'une Union allemande formée d'un côté par l'Autriche et de l'autre par un empire allemand dont il serait à la tête. Les Etats allemands étaient divisés mais pour finir il ne resta que les moins importants d'entre eux pour soutenir le projet de Frédéric-Guillaume, c'était l'Union restreinte. La Constitution préparée par le roi de Prusse fut alors votée par le Parlement. Mais l'opposition de l'Autriche ce fit vive, Schwarzenberg prit une attitude provocante et entendait reconstituer l'Allemagne d'avant 1848. L'ultimatum autrichien, soutenu par les Russes, ne tarda pas à arriver. Frédéric-Guillaume céda, à l'entrevue d'Olmutzentre Schwarzenberg et le ministre prussien Manteuffel toutes les conditions autrichiennes furent acceptées (novembre 1850). Tout recommençait comme autrefois. Dès la fin de 1849 il ne restait donc quasi-rien des révolutions de 1848. Le grand vainqueur était le gouvernement autrichien. Pourtant le mouvement de 1848 avait réalisé une œuvre d'importance : la destruction du régime féodal. Mais les vaincus ne pensaient qu'à la revanche, et l'avenir la leur réservait. Cette élection universelle aurait dû donner à l'Assemblée une légitimité totale. Ce fut, on le sait, le grand argument des Etats généraux du royaume de France qui se proclamèrent Assemblée Nationale et jurèrent le serment du jeu de paume. A Francfort, l’Assemblée commence par laisser en place la Diète impériale.[1] Cette diète de la Confédération germanique, mise en place par les traités de 1815, traités élaborés par/pour les princes contre les peuples, est 1’institution de l'Ancien régime, il fallait immédiatement la dissoudre. Ce ne fut pas. Au contraire, les premières décisions de l’Assemblée nationale de Francfort furent promulguées par la Diète elle-même. L’Assemblée nationale de Francfort avait-elle ses souverainetés interne et externe ? Au plan extérieur, si la Russie tsariste ne voulait pas en entendre parler, elle fut reconnue par de petits Etats Européens et les États-Unis d'Amérique, et par !a France jusqu'aux Journées de Juin après lesquelles la République de Cavaignac ne reconnut plus que les gouvernements de Berlin et de Vienne. Et cela en dit long sur les limites de la souveraineté - interne cette-fois de l'Assemblée nationale de Francfort. L’Assemblée, en effet, laisse en place toute l'autorité des "gouvernements" c'est-à-dire les pouvoirs exécutifs des 39 Etats allemands dont celui de la Prusse dont on a parlé en 1ère partie ! De plus, elle ne se dote pas d’une force armée capable de faire appliquer ses décisions. C'eût été possible : au printemps 1848, toute 6 l'Allemagne est en ébullition, des masses populaires ont été armées, des gardes nationales ont été constituées, des régiments entiers ont rallié le camp de la Révolution. II fallait créer une armée régulière, allemande, mise à la disposition de l'Assemblée nationale de Francfort. Rien de tout cela ne fut fait. "L’Allemagne n’a jamais connu ce que la France a vécu le 14 juillet 1790, c’est-à-dire une nouvelle fondation de l’Etat national sur l’expression de la volonté populaire". Quelques décisions ou absences de décisions montrent assez vite l'impéritie des députés nationaux. Deux problèmes concrets révèlent ainsi l'absence de réflexion sur les principes fondamentaux. - Mayence, sur le Rhin, appartenait à l’État de Hesse-Darmstadt mais était aussi forteresse impériale. A ce titre elle avait une garnison prussienne. La Révolution de Mars se traduit par la création d'une Garde Nationale qui entre vite en conflit avec cette garnison. Le vicegouverneur prussien de Mayence exige le désarmement de la Garde nationale et menace la ville de bombardements si l'ordre n'est pas respecté. Cas concret : qui commande ? La Garde révolutionnaire ou L'armée prussienne ? L’Assemblée de Francfort n'a-t-elle pas son mot à dire ? Elle en est saisie. Elle décide que c'est là un problème local, et soucieuse de parler surtout des affaires d'intérêt général, elle décide de passer à l'ordre du jour, laissant le général prussien désarmer les gardes nationaux mayençais. L’Assemblée nationale de Francfort sans le savoir a démissionné. - Autre cas concret : la nationalité allemande. La police de Francfort décide d'expulser de la ville-Etat trois révolutionnaires allemands, accusés d'agitation politique et de troubles à l'ordre public. Outre le fait que cette décision est prise sans intervention de la justice, le problème suivant est posé : y-a-t-il une nationalité allemande ? Car les trois hommes n'avaient pas la nationalité francfortoise, ils étaient donc étrangers et expulsables de la ville. C'est alors que l'Assemblée nationale de Francfort eût dû proclamer la nationalité allemande, proclamer la libre circulation des citoyens allemands à l'intérieur du nouvel État en train de se construire. Rien. Une décision fut enfin prise : l'Assemblée nationale de Francfort intervient dans le conflit austro-italien. Avant 1848, l'Autriche faisait régner la terreur en Italie, elle y possédait de plus la Lombardie et la Vénétie. Mais, comme partout, la révolution gagna la péninsule (23 mars 48 à Milan) et les patriotes italiens virent, enfin, la possibilité de créer l'unité de leur pays. Les armées autrichiennes fidèles à l'Ancien régime malgré ce qui se passe à Vienne, attaquent les patriotes italiens. Que fait l'Assemblée nationale de Francfort, fruit elle-même de 1a Révolution de Mars ? "Et comment est-elle intervenue ? A-t-elle proclamé l'indépendance de l'Italie ? A-t-elle expédié, un courrier à Vienne avec l'ordre pour Radetzky et Welden -les deux généraux autrichiens présents en Italie - de se retirer immédiatement ? A-t-elle envoyé une adresse de félicitations au gouvernement provisoire de Milan ? Pas du tout ! Elle a déclaré qu'elle considérait toute attaque contre Trieste (par les soldats italiens, JPR) comme un casus belli". 7 Et c'est ainsi que l'Assemblée nationale de Francfort, loin de se proclamer solidaire des révolutionnaires nationaux italiens, soutient l'impérialisme autrichien (donc allemand) en Italie ! On aura compris qu'il ne fallait rien attendre de bon de cette Assemblée de Francfort. La proclamation des "droits fondamentaux du peuple allemand" L'Assemblée nationale de Francfort travailla à la rédaction de la déclaration des droits fondamentaux du peuple allemand. On voit tout de suite que cela n'a rien d'universel. Cela évoque bien davantage les «droits des Anglais » de John Burke. On mesure la distance avec la révolution française qui offrit au monde "la déclaration des droits de l'homme et du citoyen" dont d'autres peuples s'emparèrent. L'Allemagne divisée n'échappe pas à la contagion. Le 5 mars 1848, des libéraux se réunissent à Heidelberg et organisent la réunion d'une Assemblée nationale constituante. Celle-ci se réunit à Francfort dès le 18 mai en vue d'instituer un gouvernement fédéral avec un «régent d'Empire». À Berlin, du 18 au 21 mars 1848, une révolution oblige le roi de Prusse Frédéric-Guillaume IV à accorder une Constitution à ses sujets ainsi qu'à adopter le nouveau drapeau national de l'Allemagne unifiée (noir, rouge et or). À Munich, le roi de Bavière Louis 1er est obligé d'abdiquer le 20 mars. La reprise en main Le 29 avril, première dissonance : le pape Pie IX refuse de rejoindre le roi de Piémont dans sa guerre contre l'Autriche. Les autres alliés italiens hésitent, d'autant que le roi de Piémont profite de la guerre pour annexer en juin 1848 Parme, Plaisance et Modène. Le 15 mai, Ferdinand II écrase la révolution à Naples et rappelle ses troupes. C'est le début de la fin. Charles-Albert 1er pèche par arrogance et refuse l'aide de la République française dans sa guerre contre l'Autriche. «L'Italia farà da sè», lance-t-il («L'Italie se fera toute seule»). Radetzki en profite pour relancer l'offensive. Il bat les Italiens une première fois à Custozza les 23-25 juillet 1848. Charles-Albert abandonne Milan cependant que Venise résiste seule aux Autrichiens jusqu'en août 1849. Reprenant le combat dans des conditions brouillonnes, le roi de Piémont est de nouveau battu piteusement à Novare le 23 mars 1849 et abdique le soir même en faveur de son fils, Victor-Emmanuel II. En Bohème, la répression est menée par le prince de Windischgrätz, dont la femme a été massacrée par les émeutiers. Prague est bombardée et se soumet le 17 juin 1848. En Hongrie, les Autrichiens confient la répression... aux Croates ! 8 Reste Vienne. La capitale de l'empire autrichien est touchée le 6 octobre 1848 par une troisième révolution encore plus radicale que les précédentes. Le comte Theodor Latour, ministre de la Guerre, est pendu à un réverbère. Trois armées font le siège de la capitale, qui est prise d'assaut le 31 octobre 1848. Les chefs révolutionnaires sont exécutés sans jugement et l'assemblée constituante dissoute. L'autorité impériale est restaurée avec énergie par le prince Félix de Schwarzenberg. Nommé chancelier le 22 novembre 1848, il obtient dès le 2 décembre que l'empereur Ferdinand 1er, qui avait dû s'enfuir devant les émeutiers, abdique au profit de son jeune neveu FrançoisJoseph 1er (20 ans). À Paris, pendant ce temps, la République n'a pas craint de massacrer les manifestants ouvriers pendant les «Journées de Juin», se coupant ainsi de sa base populaire. Au bout de quelques mois, la réaction aura partout raison du romantisme révolutionnaire. L'irruption de révolutionnaires ouvriers aux côtés des libéraux bourgeois et la brutalité de la répression donnent un avant-goût de la Commune de Paris, deux décennies plus tard. 9 Lexique : Libéralisme : Doctrine fondée sur la liberté individuelle. L’état doit garantir à l’individu les libertés fondamentales et intervenir le moins possible dans l’économie, réglée par la loi du marché. Libéraux : ce sont les personnes qui défendent les idées du libéralisme ( courant politique s’opposant à l’absolutisme monarchique. Puis il vise à limité les pouvoirs de l’état pour protéger les libertés individuelles. Mouvement libéraux : Courants politiques porteur de l’idéologie du libéralisme Nationalisme : Le terme a deux sens. Il désigne la volonté d’indépendance d’une nationalité ou d’un peuple conquis. Mais, dans une nation indépendante c’est la priorité absolue donnée au sentiment national sur toutes autres considérations. Nation : Communauté d’Hommes possédant une certaine unité (langue et culture, etc.…) et souhaitant vivre ensemble. Mouvement nationaux : Porteurs des idées de nationalités Sentiment national : Au XIXème siècle les états sont parfois des enchevêtrements et de nationalités différentes développant chacune leur langue, leur histoire, leur religion, et construisant un sentiment d’appartenance commune. État nation : un Etat qui coïncide avec une nation établie sur un territoire délimité et définie en fonction d'une identité commune de la population qui lui confère sa légitimité. C'est un concept politique qui est la rencontre d'une notion d'ordre politique et juridique (l'Etat) et d'une notion d'ordre identitaire (la nation). Il se caractérise par une autorité fondée sur une souveraineté émanant de citoyens qui forment une communauté à la fois politique et culturelle (ou ethnique). État multinational : A la différence d’un état nation comme la France, c’est un état comprenant plusieurs nations dont l’histoire, la culture et la langue différent. Les minorités qui y vivent prennent conscience de leur identité et au nom du droit du peuple à disposer d’eux même réclament leur autonomie. 10 Droit des peuples à disposer d’eux-mêmes : Principe selon lequel un peuple a le droit de se doter d’un état et du régime politique de son choix. Printemps des peuples : Ensemble des soulèvements révolutionnaires en Europe occidentale, au cours du premier semestre de 1848. S’y mêlent des revendications nationales, libérales, démocratiques et sociales. 11 Lien utile : http://www.tatsachen-ueber-deutschland.de/fr/lhistoire/main-content-03/1830-1848-levormaerz.html http://www.larousse.fr/archives/grande-encyclopedie/page/11800 http://www.assistancescolaire.com/eleve/4e/histoire/reviser-une-notion/les-revolutionsde-1848-4hmn02 http://www.yrub.com/histoire/1848all.htm http://www.jprissoan-histoirepolitique.com/articles/histoire-d-ailleurs/allemagne/18481849enallemagne2emepartielassembleenatonaledefrancfort http://frenchinfluence.over-blog.fr/article-1848-1849-le-printemps-des-peuples68213590.html http://www.toupie.org/Dictionnaire/Etat-nation.htm Manuel d’histoire 2nd nouvelle édition 2014 Nathan. Manuel d’histoire 2nd hachette éducation. Manuel d’histoire 2nd Belin. 12