ÉPIDURALE LES FAITS L’épidurale est une forme d’anesthésie régionale ou l’on insensibilise les nerfs menant à l’utérus. Il est très important que la femme en travail reste parfaitement immobile pendant l’introduction de l’aiguille. On injecte le médicament près de la colonne vertébrale, dans la région lombaire, généralement entre la 3e et la 4e vertèbre. Une fois l’aiguille à la bonne place, on insère un cathéter qu’on colle à la peau et qui servira à l’administration du ou des médicaments. La douleur disparaît ou s’atténue considérablement 20 à 30 minutes après l’injection initiale du médicament. Au Québec, le taux d’épidurale pour l’accouchement a plus que doublé en 15 ans, passant de 21% en 1982-1983 à 52% en 2001. Dans les grands centres (Montréal, Québec, Sherbrooke), plus de la moitié des femmes ayant mis au monde un enfant ont une épidurale. Dans certains hôpitaux québécois, près des trois quarts des femmes accouchent sous épidurale. Il s’agit souvent d’hôpitaux universitaires ou l’on forme les médecins anesthésistes. Une femme sous épidurale doit demeurer reliée à un moniteur de surveillance électronique du rythme cardiaque du bébé et à un soluté. Ceci implique généralement de rester au lit. Bien qu’il existe depuis peu une épidurale qui permet de demeurer mobile, les femmes n’ont tout de même pas tendance à marcher pendant le travail. L’information transmise aux femmes On ne parle aux femmes que des complications les plus fréquentes et ce, dans des conditions qui sont loin d’être idéales, alors que les femmes sont en plein travail et pressées d’en finir avec la douleur. On enseigne aux médecins qu’à ne parler que des complications susceptibles de survenir à au moins 1% des femmes. Raisons qui mènent à son utilisation (planifiée ou non) Plus une technique est disponible, plus on l’utilise. L’épidurale est proposée par des intervenants inconfortables devant la douleur des femmes, pressés, débordés, oeuvrant dans un environnement affecté par des compressions budgétaires. Deux études ont indiqué que les infirmières en obstétrique consacraient seulement 6 à 9% de leur temps au soutien des femmes en travail. L’entourage de la femme en travail, le personnel, le médecin ou le conjoint jouent fréquemment un rôle dans la décision d’avoir une épidurale. Les femmes ont peur de la douleur. Elles manquent de soutien, sont épuisées et ne supportent plus la douleur. RISQUES ET CONSÉQUENCES Pour la mère: L’épidurale provoque fréquemment une chute de tension artérielle (souvent associée à des nausées et vomissements). Les femmes sous épidurale ont plus de fièvre que les autres femmes. Elle peut entraîner des maux de dos ainsi que des maux de tête incapacitants (1 femme sur cent) pouvant durer jusqu’à 15 jours. La pose d’une sonde urinaire est aussi nécessaire et ne peut être enlevée que plusieurs heures après l’accouchement. Les complications graves sont beaucoup plus rares et sont liées à une technique déficiente: injection de l’agent anesthésiant directement dans une veine (possibilité d’un arrêt cardiaque ou d’intoxication cérébrale), réactions allergiques analphylactiques à l’un des médicaments ou complications neurologiques (insuffisance respiratoire ou paralysie), détresse respiratoire due aux narcotiques, graves convulsions, dommages permanents aux nerfs. Pour les bébés: Les accouchements sous épidurale se terminent quatre fois plus souvent par l’utilisation de forceps ou de ventouse pour sortir le bébé, surtout lorsqu’on continue de l’administrer durant la poussée ou lorsqu’on effectue un bloc moteur total (gel des fibres nerveuses servant à la motricité des jambes). Les bébés nés de mères sous épidurales ont souvent un score Apgar de 7 et moins et on ne connaît pas les effets à long terme sur les bébés. Les médicaments administrés à la mère pendant l’accouchement traversent le placenta. Bien que rare, il peut y avoir un effet persistant sur son rythme cardiaque, un ralentissement appelé bradycardie. La motricité des bébés, leur orientation dans l’espace et leur degré de nervosité sont affectés pendant quelques semaines après leur naissance. Médicalisation accrue Augmentation du niveau d’intervention pendant le travail et à la naissance. Augmentation de l’utilisation de l’oxytocin pour accélérer le travail. Augmentation du temps du travail. L’épidurale diminue la capacité des femmes de pousser le bébé vers la sortie. La rotation de la tête du bébé se fait souvent mal. Les césariennes sont plus fréquentes, surtout lorsqu’on les administre trop tôt, c’est-à-dire avant 3 à 5 cm de dilatation du col en raison de l’arrêt de progression du travail, mauvaise présentation du bébé, détresse fœtale. ENJEUX SOCIAUX ET ÉTHIQUES On manque de temps pour accompagner les femmes dans ce qu’elles vivent. Lorsqu’on ne sent plus rien physiquement, il se produit aussi un détachement de l’expérience sur le plan émotif. L’épidurale peut avoir l’effet pervers de constituer un moyen de contrôler la femme en travail, rendue vulnérable à diverses interventions. Elle peut donner lieu à des examens vaginaux répétés ou à la pose de forceps faite avec moins de soin puisque la femme ne ressent rien. Les infirmières sont entrain de perdre leurs compétences dans l’accompagnement à la naissance. L’augmentation de la médicalisation liée à l’épidurale entraîne une augmentation des coûts du système de santé. NON APPLICATION DU PRINCIPE DE PRÉCAUTION On ne connaît pas les effets à long terme de l’épidurale sur la mère et le bébé. PISTES DE RÉFLEXION Est-ce que la femme choisirait l’épidurale si: elle connaissait l’ampleur des interventions nécessaires pendant le travail liées à l’épidurale? elle connaissait les risques et les conséquences pour elle et le bébé? elle avait une accompagnatrice ou une infirmière qui leur offre le soutien nécessaire de façon continue pendant le travail et l’accouchement? Fait important: L’accompagnement a pour principal effet de réduire la durée du travail, de diminuer les taux d’interventions (incluant la césarienne) et de réduire le nombre de bébés ayant un Apgar inférieur à 7. L’épidurale peut-elle affecter le lien mère-enfant? Quel est le rôle de la douleur dans l’attachement de la mère et de l’enfant? QUESTIONNEMENTS 1. Est-ce que l’épidurale accroît l’autonomie des femmes en matière de santé reproductive? 2. Comment répond-on quand on nous dit que l’épidurale est une question de choix? 3. Qu’est-ce qui nous préoccupe le plus par rapport à l’épidurale? RÉFÉRENCES INFORMEDCHOICE, «The use of epidural analgesia for women in labour», www.infochoice.org. VADEBONCOEUR, Hélène, «Informe-t-on les femmes des risques?», projet d’article, juillet 1998. VADEBONCOEUR, Hélène, l’ABC de la péridurale, projet d’article, juillet 1998.