Plateforme biopuces à ADN Roche/ Affymetrix en routine

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AMPLICHIPS
Plateforme biopuces
à ADN Roche/ Affymetrix
en routine
Apport de l’AmpliChip CYP 450,
première biopuce marquée CE IVD,
dans l’ajustement des traitements
INNOVATION
I
De gauche à droite :
Dr Michaëla Rebsamen,
Dr Michel Rossier, Mme Adeline Diemand,
Pr Hochstrasser et M. A. Chiappe
Reportage aux Hôpitaux
Universitaires de Genève (HUG)
Aujourd’hui utilisées en pharmacogénétique, les applications potentielles des biopuces sont multiples et la technologie mise
en œuvre s’appliquera dans de nombreux
domaines. En janvier 2006, une réunion a
été organisée aux HUG, entre des spéciaR O C H E D I A G N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N° 74 - MAI 2 0 0 6 listes de pharmacogénétique ou de médecine de laboratoire, français (Pr Beaune,
Dr Loriot, Dr Méary) et suisses (Pr Dayer,
Pr Hochstrasser, Dr Rossier). À l’occasion de cette visite, 10 000 BIO a souhaité interroger le Dr Michel Rossier
nstallée depuis
près de 9 mois
au laboratoire central
de chimie clinique
des HUG, service du
Pr Denis Hochstrasser,
la plateforme AmpliChip
réalise en routine
et dans le cadre
d’études cliniques,
le test AmpliChip CYP450.
Ce test de génotypage
permet de prédire la
susceptibilité individuelle
au traitement de patients
souffrants de certaines
affections.
sur son expérience pionnière et le
Pr Philippe Beaune chez qui la première
plateforme française AmpliChip CYP P450 a
été installée en mars.
AMPLICHIPS
Le laboratoire équipé de la plateforme biopuces à ADN Roche/Affymetrix
nous est présentée par A. Chiappe
• Une section Toxicologie et suivi thérapeutique, assurant le dépistage de toxiques ou le dosage des médicaments.
• Une section R&D, spécialisée dans
les approches protéomiques et la découverte de nouveaux bio-marqueurs et enfin,
sous ma responsabilité (Le Dr Rossier est
privat-docent, équivalent d’un MCU-PH
dans le système français – NDRL), une
section un peu hybride, avec des intérêts
aussi bien dans le domaine de l'endocrinologie (hormones stéroïdes) que de la
pharmacogénétique. Nous sommes également en charge de la surveillance des
analyses de proximité (effectuées au lit du
patient) pour toute l'institution. Une partie
des activités de ma section concerne
donc la mise en place des technologies
de biologie moléculaire appliquées à la
chimie clinique. Les disciplines ciblées
sont la pharmacologie et l’oncologie, ceci
en rapport avec les nombreux dosages de
marqueurs tumoraux ou de médicaments
déjà réalisés dans les autres sections du
service, et nous avons maintenant un recul
d'environ 6 ans dans ce domaine. »
En quelques chiffres, quelle est
l’activité des HUG ?
L’activité des HUG est répartie sur plusieurs sites avec un total de 2 200 lits.
Le site principal où nous nous trouvons
représente plus de 1 000 lits et comprend
les soins aigus, y compris pédiatrie et
maternité. Le laboratoire couvre l’ensemble des analyses de ce site et les analyses
spécialisées des autres sites. L’activité
des différents laboratoires est d’environ
3 millions d’analyses/an, la majorité étant
effectuée en chimie clinique. »
Quelle est la place de la pharmacologie et de la pharmacogénétique dans ce contexte ?
« Les prestations de la section Toxicologie
dans le domaine du suivi thérapeutique a
depuis longtemps créé une forte interaction entre le laboratoire et le service de
pharmacologie clinique du Pr. P. Dayer.
À la demande des cliniciens, les pharmacologues sont régulièrement consultés
en cas d’inefficacité de traitement, ou, à
l’inverse, d’effets indésirables qui peuvent
être très graves pour le patient et très
coûteux pour la société.
Dans ce contexte, l’idée d’introduire au
laboratoire la pharmacogénétique est
venue tout naturellement pour compléter
nos techniques de toxicologie analytique.
Nous avons bien entendu développé en
parallèle des méthodes conventionnelles
de phénotypage (analyse de la cinétique
d'apparition des métabolites du médicament ou d'une substance analogue ayant
R O C H E D IAG N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N ° 74 - M A I 200 6
INNOVATION
Pouvez-vous nous décrire l’organisation de votre laboratoire ?
« Le Laboratoire Central de Chimie Clinique
(LCCC) des Hôpitaux Universitaires de
Genève (HUG) dépend du département
de pathologie clinique dirigé par le Pr Denis
Hochstrasser. Ce laboratoire est accrédité
depuis un peu plus de 5 ans, accréditation
qui vient d’être confirmée en 2005.
L’activité du service de Chimie Clinique
nécessite des techniques très variées,
allant des gros automates de routine
pour les analyses en urgence, capables
de rendre des résultats avec un temps
médian inférieur à 35 minutes, jusqu’à
des méthodes beaucoup plus manuelles (chromatographie, électrophorèse,
biologie moléculaire, examens microscopiques). De nombreuses analyses
spécialisées sont également mises au
point au sein du service, par exemple en
toxicologie (spectrométrie de masse) ou
dans le domaine de la protéomique. Le
LCCC (qui comprend une centaine de
collaborateurs) est organisé en plusieurs
sections :
• Une section Urgence qui fonctionne
24 h/24 h autour de gros automates à
haut débit.
• Une section Routine & Qualité pour des
examens plus spécialisés (métabolites,
activités enzymatiques, marqueurs particuliers) exécutés en série, notamment
par électrophorèse ou par chromatographie. Le responsable de cette section a
aussi en charge la gestion de la qualité
pour l’ensemble du service de chimie
clinique.
• Une section d'analyses courantes,
située sur un autre site des HUG (hôpitaux de gériatrie et de psychiatrie).
• Une section Examens Biologiques :
analyses d'urines, de lavages bronchoalvéolaires et autres liquides biologiques,
y compris par microscopie (analyse des
sédiments). Certains paramètres endocriniens non pratiqués au laboratoire
d’urgences y sont également analysés
par immuno-dosage.
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Cas clinique
Intoxication à la codéine lié au polymorphisme
du cytochrome P450 2D6
Nous avons récemment rapporté(1) le cas d'un patient de 62 ans hospitalisé après plusieurs
jours de fatigue, dyspnée, fièvre et toux persistante. Il a subi trois mois plus tôt une chimiothérapie pour une leucémie chronique et il prend quotidiennement de l'acide valproïque
(1 500 mg/jour) depuis plusieurs années suite à une crise épileptique généralisée.
À son arrivée, le patient est parfaitement conscient et orienté, bien que clairement hypoxémique (pO2 = 7.5 kPa (56 mmHg)). L'investigation clinique et radiologique suggère alors
une pneumonie bilatérale et un lavage broncho-alvéolaire révèle la présence de levures. Un
traitement adéquat est alors initié (ceftriaxone, clarithromycine et voriconazole) et 25 mg de
codéine sont administrés 3 fois par jour pour apaiser sa toux persistante.
Au 4e jour d'hospitalisation, alors que sa dernière prise de codéine remonte à 12 heures,
l'état du patient se détériore, celui-ci perd conscience et devient rapidement comateux. Il
est alors transféré aux soins intensifs où il est ventilé artificiellement (sa pO2 est toujours
à 7.5 kPa). L'examen neurologique révèle un coma à 6 sur l'échelle de Glasgow. Aucune
amélioration de l'état neurologique n'est observée après 90 min de ventilation (malgré
une pO2 remontée à 9.1 kPa (68 mmHg)). L'administration intraveineuse de naloxone
(2 fois 0.4 mg), un antagoniste des récepteurs aux opioïdes, résulte alors en une amélioration drastique de l'état du patient qui peut alors être maintenu conscient et qui retrouve
une fonction respiratoire normale.
(1) Gasche Y. et al. 2004, N Engl J Med, 351:2827
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Explication pharmacologique et physiopathologique
La codéine est un "pro-médicament" qui doit être activé en morphine par le CYP 2D6 pour exercer son effet antitussif. L'analyse
génétique, réalisée après cet épisode, a révélé la présence de copies supplémentaires du gène codant pour le CYP 2D6 chez ce
patient, lui conférant ainsi un phénotype de "métaboliseur ultra-rapide" (comme chez environ 2-8 % de la population caucasienne).
Ce résultat a été corroboré par les dosages plasmatiques (effectués pendant l'épisode du coma) de la codéine et de la morphine,
cette dernière étant mesurée à 20 fois la concentration attendue. Le phénotype de métaboliseur ultra-rapide pour le CYP 2D6 a
également été confirmé en mesurant la cinétique du métabolisme du dextrometorphane chez ce patient.
La cause du coma a donc pu être clairement attribuée à une intoxication aux opioïdes (morphine et dérivés), due à une transformation trop rapide de la codéine. Cette surdose de morphine, due principalement à un polymorphisme du gène CYP 2D6, a encore été
exacerbée chez ce patient par le fait qu'une voie secondaire du métabolisme de la codéine, le CYP 3A4, qui inactive normalement
une partie de la codéine en norcodéine, était clairement inhibée par les autres médicaments administrés simultanément (ceci a
été confirmé par un phénotypage du CYP 3A4), et par une insuffisance rénale aiguë qui a également contribué à maintenir des
concentrations plasmatiques d'opioïdes élevées.
Ce cas démontre l'intérêt clinique à déterminer à la fois le génotype et le phénotype de certaines voies métaboliques pouvant
intervenir dans les effets indésirables de certains médicaments et d'ajuster au mieux de la situation et de façon individualisée le
dosage de ces médicaments.
la même pharmacocinétique).
Naturellement, nous nous sommes intéressés très tôt aux différents cytochromes P450 (CYP450) très impliqués dans
le métabolisme de très nombreux médicaments. Ainsi, à partir de trousses commerciales de PCR en temps réel sur Light
Cycler (FRET) ou en Taqman, nous avons
introduit des techniques pour le génotypage des principaux polymorphismes
des CYP 2D6, 2C9, 2C19, entre autres.
R O C H E D I A G N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N° 74 - MAI 2 0 0 6 Ces analyses sont effectuées à partir de
quelques millilitres de sang complet du
patient (en fait ses cellules sanguines),
le matériel biologique de loin le plus couramment utilisé en chimie clinique. »
Comment choisissez-vous les nouveaux tests de pharmacogénétique
à développer ?
« Le processus de développement de
nouvelles techniques est un peu différent
en pharmacogénétique comparativement
aux autres secteurs de la biologie clinique. Généralement, c’est le laboratoire
qui met en place de nouveaux dosages
et qui les propose aux services cliniques. Jusqu'à présent, dans le cas de
la pharmacogénétique, ce sont plutôt
les pharmacologues qui nous ont sollicité pour développer de nouveaux tests
répondant à un besoin précis en fonction
de l’évolution des traitements dans tel
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Comment concevez-vous la
place de la technique AmpliChip
CYP450 dans votre laboratoire ?
« Nous avions déjà des techniques (commerciales ou développées au laboratoire)
pour rechercher les génotypes (allèles)
les plus fréquents des CYP450 2D6
et 2C19. Notre expérience acquise en
9 mois avec l'AmpliChip nous permet
maintenant d’évaluer comparativement
les performances des différents tests.
Globalement, il existe une très bonne
corrélation analytique entre nos techniques "classiques" et l'AmpliChip, mais la
biopuce permet en un seul test de combiner l’étude des allèles 2D6 et 2C19.
Surtout, un des avantages majeurs permis par le format biopuce est la capacité
d’explorer en même temps un nombre
beaucoup plus important d’allèles (pour
le CYP 2D6, du moins), en particulier
des allèles fréquemment rencontrés chez
les patients d’ethnies non caucasiennes
que nous ne pouvons pas rechercher de
façon systématique simplement en multipliant le nombre de tests.
Pour une ville internationale et cosmopolite comme Genève, et face à l’accélération des échanges inter-culturels et
des migrations de population, pouvoir
rechercher des polymorphismes a priori
rares, mais néanmoins répandus dans
d'autres ethnies, répond presque à une
exigence éthique.
Enfin, un autre intérêt de la biopuce est
de pouvoir définir, en cas d'allèle multidupliqué détecté simultanément avec un
allèle déficient, l'identité de l'allèle impliqué afin de mieux prédire le phénotype
résultant (seule la duplication d'un allèle
normal donnera un phénotype de métaboliseur ultrarapide). Cette distinction ne
peut pas être faite avec une méthode de
génotypage classique. »
Quels développements
espérez-vous sur AmpliChips ?
« Ils sont nombreux. En effet, les potentialités de cette technologie sont énormes. Actuellement, nous déterminons
les polymorphismes de deux gènes, mais
nous pourrions tout aussi bien analyser plusieurs milliers de gènes simultanément sur le même genre de
puce. La limitation n'est plus
d'ordre technologique, mais
la question consiste maintenant à déterminer quels sont
les gènes pertinents dont l'analyse permettra d'améliorer la prise
en charge du patient. Par exemple, aujourd’hui le test AmpliChip
CYP450 donne des informations sur la
pharmacocinétique des médicaments à
voie métabolique hépatique CYP 2D6 et
2C19-dépendants, mais nous espérons
pouvoir un jour rechercher des polymorphismes dans les gènes-clés intervenant
également dans la pharmacodynamie
des médicaments.
En outre, les développements en cours
dans le domaine de l'oncologie sont
aussi immenses, et notre laboratoire, qui
travaille également sur les phénomènes
de régulation épigénétique par hyperméthylation, attend beaucoup de la technologie des puces à ADN.
Nous ne doutons pas que ce type de
plateforme s’ouvrira à un grand nombre
d’applications. »
Vos plateformes de biologie moléculaire, qu’il s’agisse du Light
Cycler ou de l’AmpliChip, sontelles exclusivement utilisées par le
service de Chimie clinique. Quelle
est votre philosophie en terme de
mise en commun de moyen ?
« Vous avez raison de m’interroger sur
ce point. En effet, la politique du service
est très en faveur de l’ouverture de ces
plateformes à d’autres services, pour
d’autres applications. C’est déjà le cas
pour la PCR en temps réel (Light Cycler)
utilisée par d’autres services, par exemple pour le génotypage en routine des
Apolipoprotéines E ou dans des domaines plus expérimentaux comme la transplantation d'îlots pancréatiques (étude
du relargage des cellules Bêta dans la
circulation sanguine après transplantation, par analyse des ARN messagers
circulants de l’insuline).
Si ce n’est pas encore le cas pour la
plateforme AmpliChip, les développements de nouveaux tests nous
imposeront forcément d’aller dans
cette voie d’une communauté de
moyens. Cette mise en commun
de plate-formes techniques est
d'ailleurs un des points centraux du
projet de regroupement des laboratoires
actuellement en cours aux HUG. »
Cette plateforme est à la pointe en
matière d'innovation biologique.
Cette image novatrice est-elle
importante pour votre laboratoire ?
« Oui. On est toujours sensible à l’image de son laboratoire ! Physiologiste
et endocrinologue de formation initiale R O C H E D IAG N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N ° 74 - M A I 200 6
INNOVATION
ou tel secteur thérapeutique, en particulier celui de la douleur pour lequel
nous avons une expertise mondialement
reconnue à Genève. Cette interaction est
extrêmement motivante et nous entretenons des liens privilégiés avec le service
de Pharmacologie Clinique (Pr. P. Dayer
et Dr J. Desmeules).
La première phase d’introduction d'une
nouvelle analyse est en règle générale
initiée au travers d’études cliniques, dont
certaines viennent d’être récemment
publiées.
Outre les objectifs spécifiques des études, bien définis en amont par l’investigateur, il s’agit aussi pour nous de
valider la pertinence clinique d’un test,
c'est-à-dire de bien définir dans quelle
situation il présentera vraiment une aide
pour la prise en charge et/ou le suivi thérapeutique (choix de la molécule et de la
posologie initiale). Ainsi que mesurer et
démontrer l’impact médico-économique
favorable de l’introduction de la pharmacogénétique en routine. »
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AMPLICHIPS
Question à…
Donc, pour résumer, 3 intérêts majeurs :
dans ce domaine, et l’idée du réseau est
• donner de la puissance à nos études de
de valider la démarche de pharmacogéné-
validation et réaliser nos travaux de recherche
tique. Pour cela nous étudierons comment
dans de très bonnes conditions,
mieux utiliser ces médicaments ; adaptation
• introduire cette technologie que nous pen-
de la dose ou de la molécule en fonction des
sons d’avenir à de multiples développements
données de la pharmacogénétique. Dans ce
possibles en biologie ; en mesurer toutes les
cadre, nous envisageons bien sur que soient
possibilités et la praticabilité,
développées d’autres enzymes du métabo-
• développer la pharmacogénétique à
lisme aussi impliquées dans d’autres classes
l’hôpital. »
thérapeutiques. Je pense qu’une très vaste
Pr Philippe Beaune, responsable
du pôle Biologie Hôpital Européen
Quelles sont pour vous les limites
le "défrichage" sont d’ores et déjà acquis.
G. Pompidou (HEGP), Paris
de la pharmacogénétique ?
Maintenant il nous faut modéliser et valider
« Elles sont dictées par l’évolution de la
l’utilisation de ces tests en routine. »
En tant que spécialiste du cytochrome P450, quel est pour vous l'intérêt
d’intégrer la plateforme DNA Roche/
Affymetrix dans votre laboratoire ?
« Nous travaillons depuis longtemps dans
INNOVATION
connaissance théorique sur le sujet et que
le domaine de la pharmacogénétique et
nous constatons aujourd’hui que son intérêt commence à s’imposer dans les esprits.
Cependant, il est encore difficile de développer
cette discipline en routine dans un laboratoire
de chimie clinique. Certaines applications sont
bien définies mais des études de validation
doivent encore être faites. Sous l’égide de
l’INSERM, nous mettons en place plusieurs
réseaux de pharmacogénétique pour définir
les études et méthodologies qui permettraient
de valider le concept de pharmacogénétique
en pratique clinique de routine.
D’autre part, nous pensons que les biopuces
sont promises à un grand développement et
il nous semble qu’introduire cette technologie
dans notre laboratoire, sur un sujet que nous
recherche pharmaceutique. Les R&D des
laboratoires connaissent de mieux en mieux,
Pour d’autres applications ?
et de plus en plus tôt, les enzymes impliquées
« Bien entendu. Ce n’est pas une pensée
dans le métabolisme des nouvelles molécules
révolutionnaire, nous souhaitons que se déve-
en développement. Dans la mesure du possi-
loppent sur le standard Roche Affymetrix
ble, tout est fait pour de modifier une molécule
d’autres applications et nous avons des idées
pour la rendre moins dépendante d’un cyto-
déjà bien avancées sur les classes thérapeu-
chrome. Mais cela n’est pas toujours possible,
tiques : par exemple, les anti-cancéreux, les
car l’activité de ces molécules est souvent liée
immunosuppresseurs, et les anticoagulants.
à leur structure tri-dimensionnelle et donc à
Je pense effectivement qu’une plateforme
leur métabolisme cytochrome-dépendant.
unique permettant de développer différentes
De plus toutes les enzymes impliquées dans
applications semble préférable à une multipli-
le métabolisme des médicaments présentent
cation de systèmes pour chaque application.
de nombreux polymorphismes génétiques.
Il doit y avoir une logique similaire aux autres
Au total, il y aura donc toujours des compro-
domaines de la biologie (immuno-analyse,
mis pour le design de ces molécules entre
biologie moléculaire…).
performance et confort (métabolisme hépati-
Par ailleurs chaque biopuce devra, dans ce
que, effets secondaires, pharmacodynamie…).
cadre, évoluer aux rythmes des connais-
Dans ce contexte, l’exclusion totale de l’inte-
sances cliniques. À l’issue de cette visite
raction du 2D6 et 2C19 dans le métabolisme
très intéressante au service de biochimie du
des médicaments me semble peu probable. »
Pr Hochstrasser, et aux conversations fruc-
connaissons bien nous permettra d’en avoir la
Votre service travaille beaucoup sur
meilleure approche possible. Dans beaucoup
les psychotropes, qu’envisagez-vous
de domaines thérapeutiques, les cliniciens
dans ce cadre ?
ne sont pas demandeurs, mais dans le cadre
« Vous
d’essais cliniques nous aurons la possibi-
Pharmacogénétique
lité par une technique simple de donner des
coordonné par le Pr Marion Leboyer (service
réponses pertinentes, permettant d’élargir le
de psychiatrie, Créteil). En effet, les psycho-
champ de la pharmacogénétique actuelle.
tropes sont une bonne cible d’application
R O C H E D I A G N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N° 74 - MAI 2 0 0 6 faites
référence
des
au
"Réseau
tueuses avec le Dr Michel Rossier et Mr A.
Chiappe, j’accueille avec grand plaisir l’idée
d’évaluer dans mon laboratoire la biopuce
Roche P450. »
Psychotropes"
NB : La plateforme a été installée au laboratoire
du Pr Baune en mars 2006. Son fonctionnement
est sous la responsabilité du Dr Marianne Loriot,
pharmacogénéticienne.
mon intérêt pour la biologie moléculaire
est venu plus tardivement, lorsque les
applications possibles dans ce domaine
sont devenues plus concrètes. Ce qui
a vraiment été un tournant novateur
pour le laboratoire, c’est l’explosion de
la biologie moléculaire hors de la génétique médicale classique. Cette discipline
amène cependant des questions auxquelles nous n'étions pas habitués dans
d’autres domaines analytiques.
Autour de cette thématique, nous
avons créé, sous l’impulsion du Pr D.
Hochstrasser, un groupe de génétique
clinique, sorte de laboratoire central virtuel de génétique. Il nous semble en effet
fondamental d’approfondir la réflexion
pour bien comprendre la différence
entre l’analyse génétique et les autres
types d’analyses : l’information génétique
révélée ne concerne pas seulement le
patient isolé, mais peut retentir sur ses
ascendants et descendants, qu’on pense
par exemple au problème de filiation…
Dans ce cadre, la loi suisse sur les analyses génétiques humaines nous impose
un cadre légal et éthique très strict, tel
l’obtention obligatoire d’un consentement
éclairé du patient pour la pratique de ces
tests. Au total, la mise en place de cette
plateforme nous amène à repenser nos
approches en biologie médicale. C’est
une démarche par essence très novatrice
et valorisante pour notre profession. »
Quelle est la prescription
pour ces tests ?
« La demande en génotypage CYP 2D6/
2C19 en 2005 était encore relativement
modeste (une cinquantaine de patients) et
limitée aux pharmacologues sollicités par
les cliniciens se trouvant devant des
difficultés d’ajustement de traitement.
Le résultat du laboratoire est systématiquement communiqué au pharmacologue qui complète le rapport d'analyse
par une interprétation clinique circonstanciée. Celle-ci est essentielle pour
qu’un résultat de génotypage ou de
phénotypage soit directement compréhensible par le clinicien. Cette collaboration étroite avec le Centre d'informations
thérapeutiques et de Pharmacovigilance
(Dr J. Desmeules) est sans aucun doute
une valeur ajoutée à notre prestation
analytique et, même, une condition pour
la réalisation de ces tests. »
Phénotypage, génotypage ?
« C’est une question que l’on s’est posée
très tôt : faut-il faire les deux, et si oui,
lequel avant l’autre ? Très clairement, les
deux informations se sont rapidement
avérées parfaitement complémentaires
et elles peuvent être demandées et réalisées indépendamment l’une de l’autre.
La différence essentielle, c’est que le
génotypage est réalisé une seule fois
dans la vie du patient et détermine le
"fonds génétique" alors que le phénotypage n’est pas définitif, pouvant changer
au gré du temps en fonction de l’âge et
de l’état physio-pathologique du rein et
du foie. »
En pratique, que vous apporte
l’AmpliChip ?
« En pratique, cette technologie nous fait
gagner du temps car nous obtenons en
une seule étape l’information nécessaire
à l’étude du polymorphisme très vaste
2D6 et 2C19, contrairement à nos techniques précédentes pour lesquelles nous
utilisions un algorithme de réactions en
chaîne pour avancer dans la détermination du génotype, commençant par l'analyse des allèles les plus fréquents.
Sur le sang ou un bon matériel biologique,
cette technique est remarquablement
fiable. Grâce à la redondance des informations obtenues par cette technologie, c'est un peu comme si nous répétions six fois l'analyse de chaque allèle.
Reste la question du coût encore élevé
aujourd’hui, comme pour toute nouvelle
technologie de pointe (les réactifs et
la puce coûtent par échantillon environ
450 e). »
À quelles conclusions, en terme
d’application clinique, votre
expérience de l’AmpliChip
vous amène-t'elle ?
« Notre phase de mise en place n’est
pas encore terminée, mais il est clair que
ce test aura des indications précises et
cliniquement validées. Je vois des applications évidentes pour des médicaments
où l’ajustement doit se faire très rapidement et dans une fenêtre thérapeutique
étroite, en fonction de chaque individu,
particulièrement dans des domaines
comme l'oncologie ou la psychiatrie.
Nous souhaiterions déterminer pour
quels médicaments un génotypage avant
mise en route de traitement serait particulièrement bénéfique. Cette approche
nous permettra ainsi, à terme, de ne plus
traiter simplement des ensembles de
patients mais des patients personnalisés.
C’est un des éléments majeurs de la
médecine individualisée. »
Contact Roche Diagnostics :
[email protected]
BIBLIOGRAPHIE
- Pirmohamed M. and Park B.K. (2001) "Genetic susceptibility to adverse drug reactions" Trends Pharmacol Sci 22:298.
- Phillips K., et al. (2001) "Potential role of pharmacogenomics
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- Samer C.F. et al (2004) "Le polymorphisme génétique du
cytochrome P450 2D6: le bon, l'ultrarapide, l'intermédiaire
et le lent" Med Hyg 62:697.
Informations
sur le web
Amplichip CYP450 et autre AmpliChip :
http://www.rochediagnostics.com/products_
services/amplichip_cyp450.html#links
Technologie des puces à ADN :
http://www.affymetrix.com/technology/index.affx
Polymorphisme des cytochromes P450 :
http://www.imm.ki.se/CYPalleles/
Service de Pharmacologie
et Toxicologie cliniques des HUG :
http://www.pharmacoclin.ch/QuickPlace/
pharmacoclin/Main.nsf/
R O C H E D IAG N O STI C S - 10 0 0 0 B I O N ° 74 - M A I 200 6
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