SYNDROMES MANIAQUES, MALADIE MANIACO

publicité
SYNDROMES MANIAQUES,
MALADIE MANIACO-DEPRESSIVE ET TROUBLES BIPOLAIRES
Les troubles de l'humeur comptent parmi les troubles les plus fréquents, tant en population
générale que dans la pratique psychiatrique et en médecine générale.
Ils se présentent sous 2 aspects cliniques très contrastés :
- les syndromes dépressifs, de loin les plus fréquents, sont caractérisés par une humeur triste,
abaissée, déprimée ;
- plus rarement observés, les syndromes maniaques s'accompagnent à l'inverse d'une
humeur euphorique et expansive.
Sur le plan classificatoire, on distingue :
- le trouble bipolaire, qui représente l'élément central de la maladie maniaco-dépressive,
- les troubles dépressifs : épisodes dépressifs isolés ou récurrents, dysthymie, dépressions
brèves récurrentes, etc.
LES SYNDROMES D'EXCITATION – SYNDROMES MANIAQUES
L’état maniaque est une pathologie de l’humeur caractérisée par un état d’excitation et
d’exaltation euphorique.
Il survient :
- le plus souvent dans le cadre d’un trouble bipolaire ;
- parfois dans le cadre d'un trouble de l'humeur organique : ces manies organiques ont une
origine lésionnelle ou toxique qu’il faut systématiquement rechercher et éliminer avant de faire
le diagnostic de trouble bipolaire.
1 % des sujets de la population générale présenteront au moins un épisode maniaque au cours de
leur vie. Il s’agit donc d’une pathologie moins fréquente que les troubles dépressifs. Elle touche
autant les hommes que les femmes.
1
I- SEMIOLOGIE
La présentation même d’un patient maniaque est d’emblée souvent évocatrice avec typiquement,
tenue négligée, familiarités, euphorie, associations d’idées accélérées plus ou moins difficiles à
suivre.
Euphorie pathologique :
Le patient maniaque est euphorique, ludique, hypersyntone mais versatile.
• Euphorique, le patient maniaque est content de lui et du monde extérieur. Son estime de soi
est augmentée, il éprouve une sensation d’aisance et de super-forme inépuisable, il est
optimiste, généreux, jovial, de contact facile ; il manque parfois de pudeur. Sa tenue
vestimentaire peut être remarquable par son caractère exubérant (originalités, couleurs vives).
• Ludique, le patient maniaque joue avec les mots, fait des rimes et des associations par
assonances (exemples : «air de rien» appelle «rien du tout» ou «Belle de Jour» «Jour de fête,
fête à Neu-neu, Neuleptil (un neuroleptique)».
• Hypersyntone, le patient maniaque éprouve des réactions affectives immédiates et intenses
au moindre stimulus, donnant l’impression d’un accord affectif étroit avec le monde
environnant.
• Cependant, son humeur est fluctuante. Il peut passer rapidement du rire aux larmes, de la
joie à la tristesse ou à l’angoisse. Incapable de tolérer une contrariété, il peut rapidement
devenir ironique, caustique, coléreux, agressif ou violent.
Excitation psychique
• Le symptôme caractéristique en est la tachypsychie, c’est-à-dire l’accélération de la pensée.
• Cette tachypsychie a pour conséquence une fuite des idées et des passages du coq-à-l’âne.
• Elle s’accompagne d’une logorrhée, flux de paroles au contenu labile, et parfois d’une
graphorrhée.
• Une hypermnésie, une hyperesthésie et des troubles du jugement y sont associés.
• Mais cette hyperactivité reste stérile, car désordonnée et sans but précis. De même, la
distractibilité est importante témoignant d’une labilité de l’attention et de troubles de
concentration.
Excitation motrice
• Elle accompagne l’accélération des processus psychiques.
• Elle se traduit par une hyper expressivité, notamment une hypermimie, une hyperactivité
avec hyper mobilité (déambulation excessive notamment) mais aussi, souvent, une agressivité
et parfois une agitation.
Troubles du comportement
• L’excitation et le relâchement des censures morales et sociales sont parfois à l’origine de
propos excessifs, familiers, parfois grossiers voire orduriers, d’une gloutonnerie, de dépenses
inconsidérées, de démarches intempestives et d’actes délictueux (vols, fraudes, altercations
sur la voie publique, attentats à la pudeur..).
• Ex : Tel patient, saisi d’une idée géniale, téléphone en pleine nuit à ses relations. Tel autre,
enthousiasmé par un projet, signe des engagements déraisonnables. Tel autre, encore, se
précipite dans des conduites sexuelles «à risques».
2
Signes somatiques :
• Les troubles du sommeil constituent un signe essentiel qui a valeur de symptôme d’alarme :
l’insomnie, typiquement à type de réveil matinal précoce, est précoce et constante. Dans
certains cas, l’insomnie est totale.
• Les troubles du comportement alimentaire consistent le plus souvent en une diminution de
l’appétit, un amaigrissement et une déshydratation associée.
II- FORMES CLINIQUES
L’hypomanie, forme atténuée de manie, est caractérisée par une hyperactivité physique et psychique
parfois féconde et par une insomnie.
La manie délirante est caractérisée par la présence d’idées délirantes congruentes ou non à l’humeur.
Parmi les idées délirantes congruentes à l’humeur, les thèmes mégalomaniaques (mystiques, prophétiques,
de filiation, de richesse) et les mécanismes imaginatifs sont les plus fréquents. Parmi les idées délirantes
non congruentes à l’humeur, des idées de persécution et des idées hypocondriaques semblent les plus
fréquemment associées aux états d’excitation.
La manie confuse est caractérisée par une note confusionnelle parfois au premier plan qui peut égarer le
diagnostic. Cette forme survient plus volontiers chez le sujet âgé.
La manie furieuse est caractérisée par une agitation extrême avec dangerosité pour le patient et pour
autrui. Elle s’accompagne d’un retentissement somatique souvent important. Elle est rare aujourd’hui.
La manie atypique est un état d’excitation dans le cadre d’une schizophrénie. Elle est caractérisée par la
présence associée de signes de la série schizophrénique.
Les états mixtes sont caractérisés par la coexistence, à des degrés divers, de symptômes dépressifs et de
symptômes maniaques. Ils doivent être distingués des fluctuations rapides de l’humeur habituelles dans
l’accès maniaque.
CRITERES DIAGNOSTIQUES D’UN EPISODE MANIAQUE SELON LE DSM-IV
A. Période nettement délimitée durant laquelle l’humeur est élevée de façon anormale et
persistante, pendant au moins une semaine (ou toute autre durée si une hospitalisation est
nécessaire).
B. Au cours de cette période de perturbation de l’humeur, au moins 3 des symptômes suivants (4
si l’humeur est seulement irritable) ont persisté avec une intensité suffisante :
1) Augmentation de l’estime de soi ou idées de grandeur
2) Réduction du besoin de sommeil (p. ex. le sujet se sent reposé après seulement 3 heures de
sommeil)
3) Plus grande communicabilité que d’habitude ou désir de parler constamment
4) Fuite des idées ou sensations subjectives que les pensées défilent
5) Distractibilité (p. ex. l’attention est trop facilement attirée par des stimulus extérieurs sans
importance ou insignifiants)
3
6) Augmentation de l’activité orientée vers un but (social, professionnel, scolaire ou sexuel) ou
agitation psychomotrice
7) Engagement excessif dans des activités agréables mais à potentiel élevé de conséquences
dommageables (p. ex. la personne se lance sans retenue dans des achats inconsidérés, des conduites
sexuelles inconséquentes ou des investissements commerciaux déraisonnables).
C. Cette perturbation ne répond pas aux critères d’un Episode mixte.
D. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération marquée
du fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations interpersonnelles, ou pour
nécessiter l’hospitalisation afin de prévenir des conséquences dommageables pour le sujet ou pour
autrui, ou bien il existe des caractéristiques psychotiques.
E. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex.
substance donnant lieu à abus, médicament ou autre traitement) ou d’une affection médicale générale
(p. ex. hyperthyroïdie).
CRITERES DIAGNOSTIQUES D’UN EPISODE MIXTE SELON LE DSM-IV
A. Les critères sont réunis à la fois pour un Episode maniaque et pour un Episode dépressif majeur (à
l'exception du critère de durée), et cela presque tous les jours durant au moins une semaine.
B. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération marquée du
fonctionnement professionnel, des activités sociales ou des relations interpersonnelles, ou pour
nécessiter l’hospitalisation afin de prévenir des conséquences dommageables pour le sujet ou pour
autrui, ou bien il existe des caractéristiques psychotiques.
C. Les symptômes ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex. substance
donnant lieu à abus, médicament ou autre traitement) ou d’une affection médicale générale (p. ex.
hyperthyroïdie).
CLASSIFICATION DES ETATS D’EXCITATION ET TROUBLES BIPOLAIRES
On distingue deux grandes catégories diagnostiques pour les états d'excitation (épisode maniaque) :
- Manies symptomatiques d’une affection organique ou psychiatrique, d'une part,
- Manies survenant dans le cadre d'un trouble bipolaire.
Ces derniers sont les plus fréquents.
Néanmoins, un bilan étiologique à la recherche d’un état d’excitation symptomatique est
systématiquement réalisé, notamment lors d’un premier épisode.
I- LES MANIES SYMPTOMATIQUES
• Les causes organiques :
- Les causes lésionnelles : lésions cérébrales organiques
- Les causes endocriniennes : hyperthyroïdie, hypercorticisme
- Les causes toxiques : psychostimulants (cocaïne, amphétamine), haschich, hallucinogènes,
médicaments au premier rang desquels les corticoïdes mais aussi cyclosporine, bromocriptine, LDopa, opiacés, isoniazide, cimétidine et intoxication au CO.
- Les causes médicamenteuses : certains états (hypo)maniaques surviennent durant un traitement
antidépresseur. On parle alors de (hypo)manies pharmacologiquement induites (cf infra).
4
• Les causes psychiatriques :
- phases maniaques des schizophrénies dysthymiques ;
- états d’excitation des bouffées délirantes aiguës.
II. LES TROUBLES BIPOLAIRES (DSM-IV et CIM-10)
La majorité des épisodes maniaques ou hypomaniaques entrent dans ce cadre.
Le diagnostic de trouble bipolaire peut être porté devant un épisode dépressif, (hypo)maniaque ou mixte,
ou durant un intervalle libre.
Les différents types de trouble bipolaire (TB) :
Le TB de type I :
 Il est défini par la survenue d'au moins un épisode maniaque ou mixte franc (nécessitant une
hospitalisation), non symptomatique : l'existence d'antécédent dépressifs est habituelle mais non
obligatoire pour le diagnostic (il existe d'exceptionnel TB purement maniaques).
Le TB de type II :
 Il est défini par la survenue d'au moins un épisode hypomaniaque, non pharmacologiquemnt induit et
non symptomatique, associé à un épisode dépressif : contrairement au TB de type I, l'existence d'au
moins un épisode dépressif dans les antécédents est nécessaire au diagnostic.
 L'hypomanie est caractérisée par les mêmes symptômes que la manie (en dehors des caractéristiques
psychotiques, qui sont spécifiques de la manie), mais la sévérité de l’épisode n’est pas suffisante pour
entraîner une altération marquée du fonctionnement professionnel ou social ou pour nécessiter une
hospitalisation et il n’existe pas de caractéristiques psychotiques.
Le TB de type III :
Il s'agit d'un diagnostic non encore reconnu par les classifications officielles. Ce diagnostic est porté
en cas de dépression récurrente :
o associée à une cyclothymie (trouble de la personnalité caractérisé par des fluctuations de
l'humeur, oscillant entre humeur dépressive et hyperthymie),
o ou dont la guérison s'accompagne d'un virage hypomaniaque spontané ou
pharmacologiquement induit,
o ou survenant dans les familles de bipolaires.
Lorsque, au cours d’une année, il a existé au moins 4 épisodes de trouble de l’humeur, soit dépressifs, soit
maniaques, soit mixtes ou hypomaniaques, on parle de Trouble bipolaire à cycles rapides.
Le DSM-IV spécifie certaines caractéristiques du trouble bipolaire et des épisodes :
 épisodes isolés ou récurrents,
 sévérité,
 caractéristiques psychotiques congruentes ou non congruentes à l’humeur,
 caractéristiques catatoniques,
 début dans le post-partum,
 retour à l’état de base entre les épisodes,
 cycles rapides (au moins 4 épisodes par an).
5
La maladie bipolaire (TB de type I et de type II) affecte 1% des sujets de la population générale.
Son âge moyen de début est de 30 ans.
Elle a un caractère familial.
Les antécédents familiaux de troubles de l’humeur sont plus fréquents dans les formes bipolaires
que dans les formes unipolaires.
La distinction des troubles de l’humeur de type dépressif entre troubles unipolaires et troubles bipolaires
est solidement établie depuis une trentaine d’années. Dans les troubles bipolaires en effet :
 L’âge du début des troubles est plus précoce (18 à 25 ans).
 Le nombre d’épisodes est plus élevé que dans les troubles dépressifs unipolaires et le risque de
suicide est plus important.
 La charge génétique est aussi plus importante.
La prescription de thymorégulateurs permet de réduire la fréquence et l’intensité des accès et a
transformé le pronostic des troubles bipolaires.
EVOLUTION ET PRONOSTIC DES EPISODES MANIAQUES
Le début, brutal ou progressif, marque une rupture par rapport à l’état antérieur du sujet. Il est marqué
par une insomnie et des manifestations pathologique, variables d’un sujet à l’autre mais relativement
identiques chez un patient d’un accès à l’autre.
Non traité, l’épisode maniaque évolue pendant environ 4 mois.
Traité, il évolue le plus souvent favorablement en 1 mois. Après un premier épisode maniaque, un
patient sur deux rechute dans les deux ans. Dans moins de 10% seulement, l’épisode restera isolé.
Sont de bon pronostic : une courte durée de l’épisode maniaque, un âge de début tardif, l’absence d’idées
suicidaires et de pathologies médicales ou psychiatriques associées. Sont de mauvais pronostic :
l’appartenance au sexe masculin, une désinsertion sociale prémorbide, des caractéristiques psychotiques,
une alcoolo-dépendance, des symptômes dépressifs intercritiques.
Les risques évolutifs des états maniaques ne doivent pas être négligés : accidents de la voie publique,
décisions intempestives ou dépenses inconsidérées avec endettement, complications somatiques
(déshydratation, pneumopathies infectieuses notamment) et risques de virage de l’humeur, certains
épisodes maniaques précédant des états mélancoliques francs.
Le pronostic des états maniaques et plus généralement celui des troubles bipolaires a été révolutionné par
les traitements thymorégulateurs. On estime en effet aujourd’hui que le lithium est significativement
efficace chez environ 60% des patients bipolaires.
6
THERAPEUTIQUE
I- TRAITEMENT DE L’ACCES MANIAQUE
Il s’agit d’une urgence thérapeutique.
L’hospitalisation en milieu spécialisé doit être décidée voire imposée, notamment en cas de
symptomatologie délirante et de troubles du comportement (agitation, agressivité, vols, exhibitionnisme,
achats pathologiques, démarches intempestives, alcoolisation sévère notamment). Si le malade n’est pas
coopérant, il peut être nécessaire de recourir à une hospitalisation à la demande d’un tiers voire à une
hospitalisation d’office en cas de dangerosité, selon les termes de la Loi du 27 juin 1990.
Antipsychotiques :
Ils ont un effet sédatif sur la symptomatologie maniaque, associé à un effet antidélirant parfois utile.
Différentes molécules peuvent être utilisées :
®
- neuroleptiques sédatifs : Tercian , à la dose de 100 à 300mg/j
®
- neuroleptique incisif : Haldol à la dose de 10 à 30 mg/j
®
- antipsychotique de nouvelle génération : Zyprexa à la dose de 10 à 20 mg/j.
Voie d’administration : soit per os d’emblée, soit intra-musculaire en début de traitement si la
symptomatologie est sévère, avec relais per os.
Surveillance du traitement : efficacité et tolérance.
Durée de traitement : 3 à 6 mois, avec diminution progressive des posologies sous stricte surveillance de
l’état clinique.
Thymorégulateurs :
Les sels de lithium et les anticomitiaux thymorégulateurs (carbamazépine - Tégrétol® à la dose de 400 à
®
800 mg/j et divalproate de sodium - Depakot à la dose de 1500 à 2500 mg/j) ont une activité
antimaniaque.
En l’absence de contre-indications, il peuvent être associé au traitement neuroleptique.
Autres traitements :
- Les benzodiazépines peuvent être utilisées pour potentialiser l’effet des neuroleptiques dans des manies
particulièrement sévères ou lorsque le patient tolère mal les neuroleptiques.
- L'électroconvulsivothérapie (ECT, ou sismothérapie) constitue un traitement efficace des accès
maniaques. Elles sont aujourd’hui utilisées dans deux indications : soit, rarement, d’emblée en cas de
manie extrêmement violente (manie furieuse) soit, plus souvent, secondairement si on estime que le
résultat du traitement médicamenteux, tant en termes d’efficacité que de tolérance, n’est pas satisfaisant
(persistance de l’agitation, altération de l’état général par exemple).
Mesures de protection des biens :
7
Une mise sous sauvegarde de Justice est le plus souvent suffisante. Dans certains cas néanmoins, une
curatelle, voire une tutelle, doivent être envisagées à distance de l’épisode.
II- TRAITEMENT DU TROUBLE BIPOLAIRE
Il correspond au traitement préventif des récurrences maniaques et dépressives.
II.1.- Principes généraux du traitement :
Traitement thymorégulateur :
Plusieurs thymorégulateurs sont aujourd’hui disponibles :
- les sels de lithium (Téralithe®)
- la carbamazépine (Tégrétol®)
- le valproate de Sodium (Dépamide®)
L’action psychologique :
Menée conjointement à la chimiothérapie est importante à considérer. Elle doit aider le patient à
reconnaître le caractère pathologique de l’épisode d’excitation et à accepter les soins. C’est souvent à
distance d’un premier épisode, lorsque l’état d’amélioration du patient le permet, qu’il est possible de
revenir sur ce thème et d’aider le patient à savoir identifier chez lui les signes d’alarme annonciateurs
d’un épisode d’excitation.
II.2. Le lithium :
Sels utilisés :
- Carbonate de Lithium : Téralithe®
- Gluconate de Lithium : Neurolithium®
Bilan pré-thérapeutique :
- Béta-HCG,
- bilan rénal (clairance, créatinine, ionogramme) et bilan thyroïdien
- ECG, EEG
Posologie adaptée à la lithiémie :
 L’index thérapeutique (marge entre lithiémie efficace et lithiémie toxique) du lithium est faible.
� avec le Téralithe 250® et le Neurolithium® :
○ lithiémie efficace entre 0,6 et 0,8 mEq/l
○ risque de toxicité dès 1 à 1,2 mEq/l
� avec la forme à libération prolongée en prise vespérale (Téralithe 400 LP®) : lithiémie matinale
entre 0,8 et 1,2 mEq/l.
 Dans tous les cas, la lithiémie doit être pratiquée 12h après la dernière prise de Lithium.
ème

ème
Augmenter progressivement la posologie en contrôlant la lithiémie au 4 et au 7 jours. Une fois
celle-ci stabilisée, espacer cet examen tous les 8 jours pendant 1 mois puis tous les mois pendant le
premier trimestre, enfin, tous les deux mois. Un arrêt de 24h du traitement fait diminuer la lithiémie
d’environ 50%.
-On peut ainsi obtenir l’efficacité pour une sécurité optimale en adaptant les posologies en fonction du
malade.
8
Effets secondaires :
Ils sont relativement fréquents. On les divise en deux catégories :
Effets secondaires précoces :
- Digestifs : soif, nausées, vomissements, diarrhées (obligeant à l’arrêt du traitement)
- Psychiques : sédation
- Neurologiques : tremblement fin des mains, vertiges
- Musculaires : hypotonie musculaire.
Effets secondaires tardifs :
- Prise de poids
- Goître eythyroïdien ou hypothyroïdie avec ou sans goître
- Polyurie et polydipsie : possibilité de diabète insipide
- Hyperleucocytose
- Cardiomyopathies.
Toxicité :
Etroitement liée aux taux sériques. Elle peut être provoquée par une ingestion d’une dose massive et
unique dans une intention suicidaire, une réduction de la clairance rénale du Lithium, une affection rénale,
un régime pauvre en Sodium, un régime amaigrissant, la prise de diurétiques ou d’AINS…
Il est important de diagnostiquer une intoxication au Lithium le plus tôt possible. Il existe des signes
précoces d’une intoxication :
- Contractions musculaires et difficultés à écrire,
- Faiblesse musculaire avec démarche instable, vertiges (syndrome cérébelleux)
- Apathie,
- Dysarthrie.
Dès que l’on soupçonne une intoxication, arrêter le traitement.
En cas d’intoxication grave, les principaux signes sont :
- Cardiaques : perturbations ECG, troubles du rythme,
- Neurologiques : apparition d’un syndrome pseudo-cérébelleux accompagné de somnolence,
vertiges, hyper-réflexie puis coma vigile, crises épileptiques,
- Accentuation des effets secondaires déjà décrits,
- Bien au delà des doses thérapeutiques : toxicité rénale.
Contre-Indications :
- Insuffisance rénale
- Cardiopathies décompensées et antécédents de troubles du rythme. Faire pratiquer un ECG et
solliciter un avis cardiologique.
- Le Lithium est contre-indiqué chez la femme enceinte pendant les trois premiers mois de la
grossesse.
Il existe en effet un risque tératogène portant sur le coeur et les gros vaisseaux.
Pendant la dernière moitié de la grossesse et à l’accouchement, il est recommandé de faire
pratiquer des lithiémies à des intervalles plus fréquents.
- Dysthyroïdies : contre-indication relative.
- Risque de malobservance thérapeutique : contre-indication relative.
- Diurétiques, AINS, IEC, régime hyposodé.
Associations médicamenteuses :
- Avec les A.I.N.S. et avec la clométacine (Duperan®), élévation de la lithiémie ; avec les
diurétiques, élévation de la lithiémie.
9
- Avec anti-hypertenseurs I.E.C. : augmentation de la lithiémie.
- Avec la méthyl DOPA : augmentation de la lithiémie.
- Potentialisation des effets centraux des neuroleptiques et de la carbamazépine (confusion
mentale, Tr. Cérébelleux).
- Avec les antidépresseurs imipraminiques, majoration des tremblements.
- Avec les antidépresseurs sérotoninergiques : risques de syndrome sérotoninergique (agitation,
confusion , myoclonies, hyperthermie, diarrhée).
10
Observation clinique
Mlle X., 35 ans, est conduite aux urgences du SAU par la police pour trouble de l'ordre public. Appelée
vers 4 heures du matin pour tapage nocturne par ses voisins, la police a découvert dans son appartement
une jeune femme déchaînée, dansant et chantant en compagnie de deux hommes sur une musique poussée
au maximum. Interrogée sur les motifs d'un tel tapage, Mlle X. a répondu aux policiers qu'elle fêtait sa
nouvelle vie qui allait enfin lui permettre de révéler ses dons divins, avant de gifler l'un d'eux qui lui
demandait vertement de se calmer.
La soeur de Mlle X. se présente au même instant aux urgences. Elle indique que, trois semaines
auparavant, au cours des obsèques de leur père, Mlle X. a basculé dans une nouvelle phase d'excitation,
semblable aux trois précédentes, survenues alors qu'elle avait 18 ans, 23 ans et 27 ans. Au cours des huit
dernières années, Mlle X. n'avait connu aucun autre épisode semblable, mais trois ou quatre phases de
dépression. Suivie de façon très irrégulière, Mlle X. répétait souvent qu'elle refuserait toujours de se
"soumettre" aux traitements et que "jamais elle ne serait comme son père". Lors des obsèques, au moment
des condoléances, elle est brusquement partie d'un fou rire qui a choqué toute l'assistance, puis s'en est
allée. La famille n'a depuis lors reçu que des nouvelles fragmentaires et inquiétantes, notamment par
l'intermédiaire du banquier de la famille : Mlle X. avait soldé tous ses comptes pour fonder "la nouvelle
entreprise" qui allait assurer la fortune de la famille et passait ses nuits (selon les voisins) à faire la fête
avec des inconnus. La soeur de Mlle X. apporte quelques informations biographiques. Mlle X. est la
seconde d'une fratrie de deux enfants. Peu après sa naissance, son père, maniaco-dépressif depuis l'âge de
28 ans (comme sa propre soeur), a été hospitalisé pendant 6 mois pour un épisode maniaque : à sa sortie, il
a dû redoubler d'effort pour restaurer l'entreprise familiale mise en péril par son absence. Mlle X. devait
par la suite se plaindre amèrement du manque d'attention de son père et de son manque de reconnaissance
des efforts qu'elle réalisait pour le satisfaire. Elève douée, elle choisit par défi et contre l'avis de ses
parents la voie littéraire : après avoir brusquement quitté à 18 ans le domicile parental, elle était devenue à
23 ans un des écrivains les plus réputés de sa génération. Depuis un an, elle souffrait de rhumatismes
inflammatoires qui, huit jours avant le décès de son père, avait pour la première fois conduit à la
prescription de corticoïdes.
Mlle X. accepte votre proposition d'entretien avec un clin d'oeil séducteur. Debout, déambulant sans cesse
du bureau à la porte du couloir, elle vous confie d'emblée son "secret" dans un flot de paroles ininterrompu
: il y a un mois, elle a trouvé à la Bibliothèque Nationale un vieux manuscrit dont elle n'a compris le sens
que le lendemain des obsèques de son père : ce soir là, une voix intérieure lui a confié que ce manuscrit
contenait le secret des alchimistes permettant la transmutation du plomb en or. A l'évocation de la mort de
son père, Mlle X. s'effondre en larmes, avouant dans un sanglot que jamais elle ne pourra lui survivre et
qu'elle ne cessait depuis lors de penser à le rejoindre dans le caveau familial. Attentive à un bruit de pas
dans le couloir, Mlle X. ouvre brusquement la porte et se jette avec violence sur le policier en faction
qu'elle accuse de l'avoir violée dans le car, avant d'être maîtrisée avec beaucoup de difficultés.
L'examen somatique, réalisé avec difficultés est normal. Le bilan biologique ne retrouve qu'une
alcoolémie à 1 g/l.
11
Téléchargement