Une analyse critique de la Capabilité

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Une lecture épistémologique de la capabilité
François Régis MAHIEU
CEMOTEV (Université de Versailles/ St Quentin en Yvelines)
UMI « Résiliences » / IRD
Fonds pour la Recherche en Ethique Economique
Séminaire du CREM, Université de Caen, 5 Octobre 2015
24/09/2015
Résumé : Sen fait de la capabilité un concept unificateur, réunissant les deux
composantes de sa recherche : la théorie du choix social et l’analyse du sous développement.
Or, ce concept, défini dans les années 1980, pose de sérieux problèmes dans sa formulation
initiale et dans ses prolongements.
Mots clefs : Capabilité, Liberté, Norme, Dualisme, Choix, Epistémologie.
Introduction
La recherche d’Amartya Sen est dualiste, alliant la théorie du choix social à
l’économie du développement. Le concept apte à fusionner ces deux problématiques est, selon
lui, la capabilité, ou liberté de choix, qui devient un procédé récurrent d'unification de son
œuvre. La théorie des capabilités d’Amartya Sen apparaît au début des années 1980, au
moment où sa recherche sur les famines est universellement reconnue et culmine avec Hunger
and Public Action en 1989. En 1985 dans l’article « Rights and Capabilities » la capabilité
reflète « la liberté de mener différents types de vie ». Sen édifie cette théorie comme le socle
commun de ses réflexions sur le choix social (le paradoxe du libéral parétien) et de ses propos
sur l’éthique économique (la nécessité de la liberté positive qui fait de la capabilité la liberté
de choix). Il procède ensuite à une extension de son concept à une théorie générale du
développement1 où il effectue, selon Ricoeur (2004), une révolution conceptuelle2. Puis la
capabilité l’amène à une théorie « réaliste » de la justice, sans compter des fresques plus
générales sur les politiques économiques, la démocratie, les identités et la violence, les élites
au pouvoir. Dans tous les cas, la capabilité est d'ordre épistémologique, elle apporte une
cohérence à l'oeuvre de Sen. Cette théorie des capabilités est rappelée dans une première
partie. Son incomplétude normative est abordée en deuxième partie. Une troisième partie
traite des rapports de Sen avec la théorie de la justice.
L’article « From Social Choice to Development » repris dans la Revue Tiers Monde en 2009 (2009, a) est très
illustratif.
2
Ricoeur évoque une application des capabilités sur le cas de la famine, en fait il s’agit des entitlements.
1
1
1. L’importance de la capabilité dans l'oeuvre de Sen
De la carte d'échange des droits à la capabilité, Sen propose une anthropologie sans
prendre en compte la personne ni sa responsabilité dans l'exercice de sa liberté. La capabilité
est fonctionnelle et surtout elle a un rôle épistémologique, relier le choix social et le
développement.
1.1. Historique
Amartya Sen s'est fait connaître dans la recherche sur le développement en montrant le
paradoxe de la famine associée à des greniers pleins (Sen, 1981). La démonstration est
effectuée par la carte d'échange des droits (entitlements). La personne (ou le ménage) peut
établir sa maîtrise sur n'importe quel groupe de marchandises en utilisant ses dotations
(endowments) et la carte des droits à l'échange, qui reflètent à la fois les possibilités et les
conditions d'échange et de production. Cette approche est une première rupture avec l'analyse
de la famine centrée sur l'offre et le marché (Ravallion, 1987). Cependant la carte d'échange
est dans la droite ligne de l'hypothèse théorique de non survie du consommateur (Debreu,
1960), théorie qu'il critique par ailleurs. La carte d’échange des droits a connu immédiatement
de nombreux prolongements ; en admettant qu’insérée dans un environnement social, la
personne intègre d’autres personnes3 dans ses préférences, et donc puisse bénéficier de droits
sur cet environnement ; droits qu’elle peut activer afin d'obtenir des transferts.
Au même moment, Sen effectue, à la surprise générale, une coupure épistémologique :
il passe de cette recherche standard, sans l'abandonner4, à une refondation du développement
par la liberté positive dont il tire les capabilités et les modes de fonctionnement (functionings).
La capabilité est conçue comme une potentialité mesurable à obtenir des modes de
fonctionnement ou encore comme une transformation objective d'un vecteur de dotations en
biens, en vecteur de disponibilités alternatives. A partir de ce moment, la théorie des
capabilités inspire largement la réflexion sur le développement au point d’être dénaturée sous
la forme générale de la liberté de choix. Par exemple, selon un effet de mode, le rapport 2014
du PNUD assimile les capabilités à des facteurs de résilience ; ou encore les inégalités sont
estimées à partir des capabilités au lieu des revenus et conduisent à une théorie de la justice.
Très vite, le concept s'avère glissant et n'appartient plus au seul sous-développement,
mais à l'humanité universelle. Il tend à devenir une théorie de la liberté de choix basée sur la
conception de la liberté positive. Cette dispersion amène Ingrid Robeyns (2015) à proposer un
« common core of the capability approach ».
Sen n'accepte pas l’analyse de la « liberté négative » effectuée par Rousseau5 et Kant6
pour qui la liberté n'existe que par son contraire, à savoir l’autocontrainte. La personne
autonome édicte ses propres lois, contrairement à l'individu hétéronome qui les subit. Cette
dimension déontologique est refusée par Amartya Sen. Il développe une liberté de choix
téléologique à partir de sa théorie du choix social. Ainsi popularisée, la théorie des capabilités
a évolué vers la liberté de choix, à savoir de choisir la vie que l’on a envie d’assumer.
3
Selon Pettit (2004), les préférences dépendent de la faveur des autres.
Voir les travaux de Jarret, M.F, et alii en 1987 sur le Sahel, et la publication de Hunger and Public Action en
1989.
5
« L’obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté ».
6
« C'est en vérité une chose remarquable qu'on puisse être d'autant plus libre qu'on est contraint moralement »,
4
2
Mais, de ce fait, elle perd en originalité ; la capabilité était déjà présente dans les
travaux de Margaret Mead (1928) qui évoque la liberté de choisir entre plusieurs modes de vie
et les coûts associés à ces changements. Le coût de la capabilité n’est pas abordé par Sen, qui
ne précise pas son sujet, à savoir la personne, individuelle ou collective, égoïste ou altruiste,
bienveillante ou malveillante et donc la possibilité de capabilités négatives7 (le travailleur
libre est libéré selon Marx pour mieux se faire exploiter). La capabilité en tant que liberté de
choix n’est qu’un aspect des capacités de la personne, aussi vieux que la philosophie. Ricoeur
(2004) énonce ces capacités dans la phénoménologie de l’homme capable : dire, faire,
s’imputer, narrer. La capabilité de la liberté est une capacité partielle visant le bien-être qui ne
saurait être prioritaire par rapport à la diminution de la souffrance. Ainsi, si je crie famine, je
mettrai en avant ma capacité à trouver de la nourriture. C’est bien une obligation (ici de
survie), composante d’un système de droits et obligations, que je retrouve ; le droit à choisir
un type de vie est assorti d’obligations, par exemple le droit à des transferts venant de ma
famille dépend de ma satisfaction des obligations communautaires.
Faire de la liberté de choix le concept central de son œuvre permet à Amartya Sen de
boucler avec élégance sa conception de l’économie par son concept de liberté, extirpé de la
théorie du choix social. Ainsi le dualisme caractéristique de la démarche de Sen (un pied dans
le choix social, l’autre dans l’économie du développement) devient une démarche unique.
Sen s'appuie sur deux paradoxes, celui de la famine associée à des greniers pleins et
celui de l’impossibilité d'être un libéral parétien.
Dès lors Sen surestime la capabilité comme le meilleur concept pour étudier les
inégalités, bien meilleur, selon lui, que la « philosophie transcendantale ». Mais, cette
démarche est-elle rigoureuse ? Au-delà de l’opérationnalité de la « liberté de choix », le
concept de liberté sous sa forme logique pose de sérieux problèmes. D’abord en tant que
norme paradoxale (il « faut » la liberté), automatiquement réalisée, contrairement aux règles
de la déontique. Enfin l’écriture de la liberté est incorrecte8, compte tenu des règles de
l’implication, et le libéralisme équivaut par corruption à une dictature. Sen (1970) reconnaît
le risque d’une cohérence formelle entre le libéralisme et la dictature ; le libéralisme selon Sen
est tel qu’il existe au moins un individu dont la préférence implique la préférence collective.
Mais l’expression logique est la même pour la dictature : il existe au moins un individu dont
la préférence implique la préférence collective. La même implication, est interprétée comme
une détermination qui associe deux états de fait sans relation de cause ou de conséquence.
1.2. Usage de la liberté
La liberté réside dans cette capacité à s’imputer une responsabilité. La responsabilité
détermine la liberté, contrairement à l’idée du radicalisme philosophique traité par Halévy
(1995). En particulier Sen (1993) fait dépendre la responsabilité de la liberté comme
comptabilité de son usage.
Responsabilité  Liberté (Phénoménologie)
Liberté  Responsabilité (Radicalisme)
7
Stirner (1844) évoque la banalité (tous sont libéraux) de la liberté qui concerne aussi le non humain qui est
ancré au fond de nous.
8
Parmi les erreurs, on note qu’un foncteur, tel la préférence, peut avoir simultanément deux et trois places ;
enfin l’implication porte sur des variables existentialisées, ce qui est un truisme selon Quine. Voir Mahieu, 1991.
3
La phénoménologie conçoit l’éthique, par exemple de la responsabilité, a priori,
contrairement à l’accountability, pour qui la responsabilité est ex post9. Elle dépend de l’usage
que l’individu fait de sa liberté. Les positions de Levinas (1972) et Jonas (1979) sur cette
priorité sont très fortes. Chaque personne a une responsabilité infinie dans le temps et dans
l’espace. On voit, avec Ricoeur10, l’importance des capacités de la personne, en particulier de
s’imputer une responsabilité. Cette éthique est positive, elle décrit des comportements sinon
les déconstruit (Derrida 1967, Bataille, 1980). Elle constate le comportement de la personne
responsable, contrairement au personnalisme (Mounier, 1971) qui est normatif. La
personne est sociale et responsable, elle a une priorité éthique et est capable d’auto
contrainte11 (Rousseau, 1755 ; Kant, 1775-1780).
La capabilité/liberté, sous la forme d’une permission, peut être facultative, obligatoire,
interdite, etc. et devient paradoxale. Elle est fonctionnelle et se prête difficilement à la
méthode comparative. Comment comparer deux permissions ? Peut-on comparer des droits et
des capabilités afin de fonder une théorie de la justice ? Sen (2009 b) oppose la méthode
comparative des économistes à la recherche transcendantale par les philosophes d’une société
juste. Il semble confondre l’éthique du juste (par exemple, Levinas, Jonas) et la théorie de la
justice (Rawls), laquelle se situe dans une éthique du bien. L’éthique du juste réclame un
principe lexicographique entre les règles de la Loi et ne pose pas de problème en fondant la
liberté sur le respect de cette autocontrainte. L’opposition principale n’est pas entre
économistes calculateurs et philosophes transcendantaux, mais, comme le souligne Derrida
(1967), entre une philosophie calculatrice dite « grecque » et une conception lexicographique
dite « talmudique ».
La liberté ne se confond pas avec la liberté de choix. Sen (2009 b) énonce que
«personne ne peut nier que l’absence de choix soit une négation de la liberté », mais
l’existence de choix n’est pas a contrario une preuve de liberté. Qui autorise le choix, qui a le
choix et comment s’effectue-t-il ? Autant de modalités qui font que la liberté de choix peut se
faire dans la pire des dépendances. Ainsi, l'élargissement des choix possibles n'améliore pas
fatalement le bien-être.
On retrouve ici le paradoxe de la redistribution optimale qui, pour assumer la liberté
de choix des donateurs, implique une société totalitaire (Bhukuth, Mahieu, 2010). Enfin
l’agrégation des libertés pose de sérieux problèmes inhérents à l’agrégation du choix social,
notamment l’hétérogénéité des groupes sociaux : l’impossibilité du choix social qui
caractérise l’école correspondante s’applique fatalement à des capabilités confondues en
libres choix.
La théorie de la justice post rawlsienne s’est fait connaître par la théorie de la
compensation optimale (Roemer, 1996) : afin de mieux connaître les types des personnes à
secourir et de pouvoir obtenir l’assentiment unanime des donateurs, ceux-ci ont droit à toute
l’information. Compte tenu des risques de manipulation, un fichier central au Ministère de
l’Equality of Opportunities Program (EOP) détiendrait les fiches de renseignement sur
chaque individu. On voit ainsi comment un libéralisme exigeant mène à une ingérence
orwellienne (Bukuth, Mahieu, 2010).
9 Sur cette conception de la responsabilité ex post issue de l'usage de la liberté, les positions de John Roemer et
Amartya Sen sont proches, selon Enrica Chiappero-Martinetti (2015).
10
« Entre la fuite devant la responsabilité et ses conséquences, et l’inflation d’une responsabilité infinie »,
Ricoeur (2004).
11
Selon Christine Korsgarard (1996), la liberté n'est concevable qu'au sens d'une obligation morale vis à vis de
tous les autres sujets humains.
4
Amartya Sen fait apparaître les limites de sa conception de la liberté, en voulant la
fonder dans le jeu du choix social. Comment dès lors passer à l’idée d’une « liberté
collective » ou encore d’une « capabilité collective » ? Il transforme la liberté en liberté de
choix et devient son propre précurseur dans ses jeux sur les choix. On s’étonne de l’idée de
ses disciples de faire de la capabilité (soit la liberté positive) une notion normative, à
introduire dans la planification du développement. Imposer la liberté au nom de quoi ? Cette
contradiction pèse sur le libéralisme depuis Bentham et ne peut éviter le fait que nos droits ne
sauraient être dissociés de nos obligations. Enfin, la capabilité reste dans une problématique
du bien-être. Elle doit être « transformée » à son tour en bien-être et donc en utilité ; elle ne
saurait être une obligation parfaite, laquelle correspond, par exemple, à la diminution de la
souffrance.
Si la mesure des dotations et de leur échange est possible, l'évaluation des capabilités,
c'est à dire de la liberté de mener différents types de vie, est particulièrement difficile. La
capabilité a surtout une dimension épistémologique pour Amartya Sen : recentrer sa recherche
sur la liberté de choix.
2. La capabilité, un énoncé normatif incomplet
La capabilité est une norme dont le traitement est problématique et nécessite des outils
adaptés (logique modale, sémantique des mondes possibles par exemple). La capabilité a trait
au bien-être sinon au bonheur. Or elle est présentée, paradoxalement, comme une obligation
imparfaite à pouvoir librement choisir différents types de vie. Le statut de la personne dans la
capabilité est esquivé ; de ce fait la responsabilité personnelle dans son projet de vie n'est pas
abordée. La capabilité est incomplète en n'envisageant que son côté positif.
2.1. La capabilité, une obligation imparfaite
Comment mesurer une capabilité, en tant que potentialité ? Toute la complexité de
cette mesure vient de ce qu’elle a trait à un possible, un probable, un plausible. Ce problème
reste entier, par exemple dans le domaine de l’éducation des enfants ; nombre de tests ont
voulu figer la capabilité d’un enfant ou l’enfermer dans une vulnérabilité fatale, contrairement
à toutes les résiliences possibles, par exemple issues d’un contexte affectif. En ce sens la
résilience est un obstacle à la mesure des capabilités.
Mais s’agit-il d’augmenter le bien-être ou de diminuer la souffrance ? Sen privilégie le
bien-être. La capabilité peut se définir comme liberté de bien-être et liberté d’action.
Cependant, dans une perspective philosophique, diminuer la souffrance humaine est une
obligation parfaite, au contraire de l’augmentation du bien-être qui est une obligation
imparfaite. Il existe donc, dans une perspective sociale, une priorité de la diminution de la
souffrance humaine par rapport à l’augmentation du bien-être. Le bien-être peut créer de la
souffrance. Il existe une soutenabilité faible ou forte du développement humain et social. Quel
type de priorité ? Si la souffrance est première et non négociable, il existe une priorité
lexicographique telle que la diminution de la souffrance doit être totalement réalisée avant de
procéder au bien-être. Un aménagement de cette exigence peut être envisagé en appliquant ce
type de priorité sous la forme d’un leximin, en commençant par les plus vulnérables. On peut
poser aussi un principe de non augmentation de la souffrance pour toute la population
considérée. Cette priorité est-elle trop forte ? L’économiste envisagera les combinaisons
5
possibles, entre minimiser/maximiser le bien-être et la diminution de la souffrance humaine.
On peut ainsi voir apparaître une maximisation du bien-être accompagnée d’une minimisation
de la diminution de la souffrance.
La liberté est nulle et non avenue dans ce cadre de la souffrance. On ne peut que pâtir
de la souffrance et constater la diminution de sa puissance d’agir. La souffrance pose le
problème des capabilités négatives que rappelle Olivier Abel (1997) : « Le mal c’est cette
incapacité à sentir que l’on peut faire souffrir ». Selon le poète John Keats : "I mean Negative
Capability, that is when man is capable of being in uncertainties, mysteries, doubts, without
any irritable reaching after fact and reason."(Lettre écrite à ses frères George et Thomas, le
21 Décembre 1817).
2.2. Quelle normativité ?
La capabilité de Sen est normative ; elle exige une liberté de choix entre modes de vie.
Comment traduire cette expression normative ? La potentialité peut être traduite par une
permission : il m'est permis d'accomplir sinon d'accéder à la vie que j'ai envie de mener. La
capabilité peut être traitée comme une procédure de choix social ; mais elle dépend d’une
logique de la permission et d'une sémantique des mondes possibles.
La capabilité suscite de nombreuses questions : notamment sur ses valeurs et sa
dimension. Elle peut prendre toutes les valeurs. Ainsi une capabilité peut être négative et
malveillante, par exemple un projet de vie peut être destructeur dans certains contextes,
constructif dans d'autres. La capabilité hétérogène dans sa composition et ses valeurs implique
un spectre de la capabilité. Cette capabilité peut cumuler des modalités normatives,
épistémiques, aléthiques, etc. Il faut admettre un spectre de la capabilité au-delà d’un
personnalisme militant, c’est à dire décrétant la nécessité de libérer les choix et l'accès à des
futurs. La capabilité peut être alternativement efficace et bienveillante, inefficace et
malveillante, bref concerner des mondes négatifs.
La capabilité implique des personnes ayant des projets différents et s'adaptant aux
autres. C’est une fonction ayant trait au comportement individuel, mais difficile à intégrer
dans le cadre d'une fonction collective. Une agrégation des libertés individuelles en liberté
collective donne un résultat connu : un système de choix qui est illogique ou immoral. La
capabilité implique une réflexion sur le sujet de l'économie, un passage de l'individu à la
personne ; soit une réflexion anthropologique absente dans l'analyse d'Amartya Sen.
L'accessibilité à des destins possibles peut être traitée en permission faible (il est permis A ou
B) et en permission forte (il est permis A et B). La capabilité peut être assimilée à une
accessibilité à partir du monde présent, vers des mondes possibles.
Les normes passent par des personnes d'où l'importance de la variable nominale, i, le
sujet des énoncés normatifs, qui doit être ajouté à tout foncteur. Or, dans la théorie des
capabilités, la capabilité est une fonction sans sujet et sans aucune référence à la
phénoménologie. Dans cette philosophie, le sujet ou first person est primordial. On voit
l’importance du « je », du projet personnel (Sartre, L’Etre et le Néant), ou encore du ressenti
(Watsuji, 1966). Le vécu est prioritaire. Du fait de cet ego, la pensée est orientée vis-à-vis de
l’objet visé, il y a intentionnalité. L’humanisme est explicite : l’homme est au centre de
l’économie, comme sujet, marquant la prééminence du « je » et de son ressenti ; il est
6
intentionné et donc non déterminé structurellement12. L’intentionnalité a trait au fait, selon
Sartre, que la conscience d’un objet peut se faire dans la crainte, la haine, et l’amour. Cette
approche privilégie les expériences vécues par les sujets et les analyse sans préjugé. Ces
phénomènes sont relatifs aux caractéristiques des personnes concernées : rang dans la
communauté familiale, statut social, sexe, etc. L’analyse de terrain est indispensable et les
méthodes d’analyse fondées sur l’analyse de données sont prioritaires avant toute causalité
déduite d’une fonction prédéterminée. L’économie analyse des phénomènes, des expériences
sans prétention à une réalité objective.
Toute action ou norme sociale passe par la personne. La phénoménologie admet
l’intentionnalité de l’action, au contraire d’une vision purement naturaliste. La capacité
d'action désigne de nombreuses actions, pratiques ou intellectuelles (se projeter). Ainsi, on
pourrait dire que pour comprendre le sujet anthropologique, il faut tenir compte à la fois de la
structure dans laquelle il s'insère et de son agencéité qui lui permet de s'insérer de façon
spécifique au sein de cette structure.
L’enjeu formel est mis en valeur par une réduction à la logique des énoncés normatifs
dite logique déontique. Le traitement de la variable nominale, i, peut être illustré par la
différence entre deux prédicats, exprimant l’obligation : soit il est obligatoire pour la personne
i que α, soit Oiα, soit il est obligatoire que α, et donc Oα (Kalinowski, 1979, a, b).
L’obligation, l’interdiction ou la permission sont des énoncés normatifs qui passent par la
personne. Il n’est pas acceptable de nier la personne ni de faire en sorte que les normes soient
automatiquement réalisées. Cette exigence logique, en relation avec le sujet, caractérise la
pensée de Husserl. Ce fondateur de la phénoménologie, est au départ mathématicien, étudiant
le fondement commun des mathématiques et de la logique. Frege (1971), le père de la logique
moderne n’est pas loin13 ! Husserl (1970) dans ses Logical Investigations rentre dans la
logique de l’identité, la variété des expressions ayant trait à un même objet. Cette identité est
non seulement, au sens de Ricoeur, une « mêmeté » (continuité de l'individu), mais une
« ipséité » par le respect de la parole, de soi vis-à-vis de l'autre.
3. Sen et la théorie de la justice
Tout en admirant la théorie de la justice, Sen en sera critique très tôt et la généralisera
en opposant le ranking des économistes à la transcendance des philosophes. Dans cet
exercice, la capabilité perd pied par rapport à l’éthique de la discussion.
3.1. Capabilité, responsabilité, raisonnabilité
La capabilité implique une responsabilité, compte tenu de son spectre de valeurs;
négative, elle peut être nuisible vis à vis de soi même et des autres.
La personne est de toutes façons responsable. La responsabilité caractérise, selon
Jonas, la personne au-delà de l’individu. Anthropologiquement, la personne est différenciée
de l’individu, « c’est le seul être connu de nous qui puisse avoir une responsabilité » (Jonas,
1998). Cette capacité à se désigner et à parler, différencie prioritairement la personne des
êtres, et donc prioritairement les personnes entre elles. La responsabilité pourrait être infinie
12
Selon Dubois, M. (2013) : «La détermination est ce qui décrit la relation de cause à effet alors que nos actions
intentionnelles tendent vers un but ou sont construites selon un projet »
13
Il effectue un compte-rendu de l’ouvrage de Husserl, Philosophie de l’Arithmétique, en 1894.
7
dans le temps (Jonas, 1979) et dans l’espace (Levinas, 1979) ; elle est cependant limitée par
chaque personne, en fonction de ses moyens et de ses sentiments. La capabilité établit les
limites de la responsabilité.
A l'inverse la responsabilité limite les capabilités ; mes possibilités de vie sont limitées
par le devoir moral que j'assume vis à vis de mon environnement, à savoir les communautés
(famille, travail, religion, politique).
La responsabilité est conçue de manière totalement différente, a posteriori, en société
de nature avec des individus opportunistes, et a priori en société de droit avec des personnes.
L'éthique de la responsabilité affirme, selon Max Weber (1919), que «Nous devons répondre
des conséquences prévisibles de nos actes ». Mais devant qui ?
La responsabilité est une motivation qui possède des contenus très différents, de
nombreuses formes (garantie, obligation, culpabilité, etc.). Elle peut être une vertu ou un vice
selon les contextes. Il existe actuellement une forte opposition entre la phénoménologie de la
responsabilité et la responsabilité conçue comme relation de cause à effet dans le cadre de la
théorie de l’action. Ainsi, on distingue la responsabilité morale attachée à la personne par
rapport à d’autres pour une action donnée, et la responsabilité liée à l’action plus
impersonnelle pour des individus donnés. La responsabilité morale de la personne est
immense dans les conceptions d’un devoir par rapport à toute autre personne ou toutes les
générations futures. Il s’agit d’une responsabilité potentielle et prospective. Cette
« ascription » a priori attribue à une personne des droits et des obligations en fonction de son
identité et de son histoire ; par exemple, son rang familial (aîné ou cadet) et son statut
professionnel détermineront l’étendue de sa responsabilité.
La, responsabilité ne peut être illimitée, il faut établir rationnellement des priorités
dans son environnement personnel, social et naturel, sans mettre en cause sa coopération
(raisonnabilité) avec la communauté. Ainsi chaque personne dispose d’une carte de droits et
obligations qui indique ses priorités.14 La personne responsable se substitue à l’individu
opportuniste ; elle assume une séquence : responsabilité  rationalité  raisonnabilité.
Chaque personne peut réagir rationnellement en jouant sur les composantes de cette
responsabilité, jouer aussi sur l’information correspondante, aller jusqu’à refuser des
promotions pour ne pas surenchérir la pression communautaire. Mais il faut rester raisonnable
vis-à-vis de la communauté pour ne pas être exclu, subir une névrose paranoïaque et devenir
un orphelin social. Cette raisonnabilité vis-à-vis de la communauté fait partie de l’autocritique
de Rawls, mais n’est pas retenue par Amartya Sen. La pensée de Sen s’enferme dans la
philosophie dite « radicale » en refusant aussi bien la responsabilité imputée personnellement
que la justice dite transcendantale ou encore l’institutionnalisme transcendantal ; catégorie
dans laquelle il place Kant et Rawls. Cette opposition entre les capabilités et la philosophie
transcendantale ne tient pas ; l’une est une mesure « passive » des inégalités l’autre signifie un
dépassement « actif » de soi pour plus de justice.
3.2. L'idée de la justice, une contre-révolution ?
Une argumentation fortement réaliste se manifeste dans L'idée de Justice (Sen, 2009
b). La charge de Sen contre la philosophie sur la base du ranking des économistes est
surprenante, elle procède d'un réalisme qui apparaît à de multiples reprises. Plus surprenant
encore, Sen regrette l'abstraction et les dégâts occasionnés par le théorème d'impossibilité de
14
Ce point est largement traité dans Ethique économique, Mahieu, 2001.
8
Arrow et se range derrière l'éthique de la discussion élaborée par Jürgen Habermas (1987,
1992).
L’éthique de la discussion s’en prend à l’éthique kantienne et ses hypothèses dites par
Habermas « déontologiques, cognitivistes, formalistes et universalistes fondamentales ». Elle
défend le primat d’une éthique du juste (plus exactement de l’agir juste) sur celle du bien ; ce
dernier primat étant défendu par la philosophie communitarienne, par exemple Ch. Taylor et
A. McIntyre. Cette éthique s’éloigne de la philosophie pour emprunter à la sociologie et à
l’histoire, mais aussi à la psychologie. Par exemple, la solidarité est liée à une « disposition
protectrice » concernant la socialisation vulnérable. La sociologie prend une importance
majeure avec l’intersubjectivité socialisante et l’inévitable « enchâssement » (Polanyi, 1983).
L’«universalisme abstrait » de Kant et surtout l’autonomie sont mis en cause. Certes l’Autre
reste une fin, mais l’intervention du social dans l’édification de l’éthique de la discussion rend
cet édifice «hétéronome», soumis au social et à l’histoire. L’éthique de la discussion critique
la philosophie morale de Kant au moyen des « objections essentielles » (Habermas, 1987) de
Hegel ; à savoir le «formalisme», l’«universalisme abstrait», l’«impuissance du pur vouloir»,
le «terrorisme de la pure conviction». De ce point de vue le choix philosophique est net,
l’évolutionnisme hégélien se substitue à l’universalisme kantien. Pour la morale du
développement, le choix n’est pas sans conséquence !
Comment un théoricien ayant autant apporté à l'impossibilité du choix social peut-il
tout à coup prôner l'éthique de la discussion ? Comme si cette technique pouvait échapper non
seulement à la malédiction du choix social, mais aussi aux paradoxes de la théorie du public
choice, élaborée par ses adversaires (Buchanan, Tullock) ; notamment ceux qui ont dénoncé le
paradoxe du libéral parétien ? A plusieurs reprises, Sen évoque « l'applicabilité limitée »,
« l'immense abîme » entre la nature mathématique de la théorie du choix social et la raison
pratique (Sen, 2009 b). Mais que deviennent les capabilités qui étaient fondées sur le
paradoxe du libéral parétien ? Selon Sen (ibid, p. 357), « la capabilité, en fait, n'est rien de
plus qu'une perspective par laquelle il est possible d'évaluer raisonnablement les avantages et
les désavantages d'une personne ». L'essentiel devient de rester concret en privilégiant le
ranking pour la mesure et le débat pour la démocratie, à tous les niveaux, de la région
jusqu'au monde. Issue de paradoxes, la démarche devient elle même paradoxale.
9
Conclusion : un nouveau pandit15 ?
Du point de vue épistémologique, la capabilité est le noyau d'un Programme de
Recherche Scientifique (Lakatos, 1978)16, noyau entouré de propos très divers, sur les
femmes, l'identité, l'écologie, S'il effectue une coupure épistémologique avec la capabilité,
Sen n'effectue pas d'auto critique, contrairement à Ricardo, Marx ou Rawls. Au contraire, il
célèbre ses brahmanes et ignore les critiques. Pour appuyer sa découverte de la capabilité, il
pratique une lecture récurrente, faisant appel aux fondateurs de l'analyse économique, tel
William Petty (1679)17. Cette lecture récurrente porte sur sa conception de la liberté issue du
paradoxe du libéral parétien. Il montre ainsi que le passé converge vers sa recherche présente
à savoir la capabilité. Cette capabilité est d'autant plus difficile à critiquer qu'elle est un
concept glissant, très lié au développement (les functionings), avant devenir une liberté de
choix à vocation universelle.
Sen montre comment le concept de liberté de choix unifie les deux domaines de sa
pensée : le sous-développement et le choix social. Sen a pu jouer de cette division ; division
marquée par deux sociétés, Human Development and Capability Approach (HDCA) et la
société du Social Choice sans recherche d'unité. Cette division favorise le système des
remarques croisées entre le développement et le choix social.
Sen n’a jamais tenu compte de la phénoménologie, malgré les compliments de Paul
Ricoeur (2004) et les multiples suggestions de ses lecteurs. Il oppose aux philosophes, une
« comparaison réaliste des situations réelles » par le ranking des économistes. Le principe de
réalité et des possibilités concrètes est répété ad nauseam pour montrer la supériorité des
capabilités par rapport aux institutions justes dans sa théorie de la justice.
Mais peut-on imaginer des choix sans contrainte, une « pure » liberté ? Le juste pour
Aristote18 observe la loi et ses obligations, respecte l’égalité et ne prend pas plus que son dû.
Sen reste obstinément arc-bouté sur les droits, négligeant les obligations et les souffrances qui
établissent la personne. La personne totale peut craindre la liberté et désirer la dictature sinon
un dictateur particulier. Kenneth Arrow (1951)19 reprend la théorie d’Erich Fromm (1941) du
« désir de dictature » qui, s’il est satisfait, solutionne le problème du choix social devenu
unanimiste. Dans ce cas, la liberté consiste à refuser la liberté et à choisir la dictature. La
capabilité comme liberté de choix est remise en cause dans un tel contexte où le libre choix
équivaut à une dictature unanimiste. La capabilité qui est désormais au centre de la théorie de
Sen est particulièrement fragile ; aussi fragile que son fondement, le paradoxe du libéral
parétien. Tellement fragile qu'elle devient marginale dans sa réflexion sur la justice. Il
propose in fine, des méthodes, ranking et éthique de la discussion, pour un débat public, mais
non une théorie de la justice, apanage des philosophes.
15
Amartya Sen a publié un article humoristique sur « On debates in Capital Theory » dans Economica en 1974.
Il met en scène le pandit Sraffa et les brahmanes tels les vénérables Dobb ou Robinson. Il récidive dans son Idée
de Justice, se moquant des relations entre Sraffa et Wittgenstein.
16
Il existe des grappes de théories interdépendantes qui connaissent des « noyaux » résistants et des parties
flexibles et enfin une heuristique positive (en tant que capacité de s'adapter à la réalité). Le développement
scientifique modifie cette structure, en dégénérant certaines parties, recomposant d'autres; certains PRS peuvent
être progressifs, d'autres dégénérants. Lakatos souligne que cette recomposition peut s'effectuer par
particularisation et généralisation; ce qui intéresse la science économique.
17
Sen fait une relecture de l'histoire de la pensée économique pour en faire une téléologie axée sur sa capabilité ;
il cite ainsi Petty (1985). Petty est censé s'occuper des conditions de vie et du bonheur; précurseur ainsi du
« standard de vie » et donc des types de vie. Toutefois, Petty était plus soucieux de s’approprier les meilleurs
terres, révélées par son survey, que du bonheur des citoyens, en particulier des Irlandais.
18
Aristote, Ethique à Nicomaque, V, 2.
19
Arrow (1951) surprend en faisant référence aux écrits de Fromm, psychanalyste marxiste ...
10
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