Sensibilité et résistance aux antibiotiques

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ANTIBIOTIQUES
sensibilité et résistance
Dr Oana DUMITRESCU
MCU-PH
Faculté de Médecine Lyon-Sud Charles Mérieux
[email protected]
Objectifs du cours
Critères de choix microbiologiques
d’un antibiotique (ATB)
Antibiogramme et
concentration minimale inhibitrice
Mécanismes d’action, mécanismes de résistance
Notions d’antibiothérapie
En 1897,
à Lyon,
France…
Ernest
Duchesne
1928 : Alexander Fleming
L’ère des antibiotiques : 1944
L’ère des antibiotiques : 2014
Les enjeux
• Guérir les infections bactériennes
• Utilisation antibiotique = Résistance
– DANS (nosocomial) et HORS (communautaire)
établissements de soins
– Bactéries multi- et hautement-résistantes :
BMR et BHR
• Innovation pharmaceutique
• Impasse thérapeutique
Objectifs du cours
Critères de choix microbiologiques
d’un antibiotique (ATB)
Antibiogramme et
concentration minimale inhibitrice
Mécanismes d’action, mécanismes de résistance
Notions d’antibiothérapie
Critères de choix d’un antibiotique
• Critère bactériologique (pharmacodynamique)
• Critère pharmacocinétique (biodisponibilité)
• Critère de tolérance (versus toxicité)
• Critère écologique (pression de sélection)
• Critère de confort d’administration (po > iv)
• Critère économique (T2A, déficit SS)
Conditions d’activité d’un ATB
• Posséder une cible bactérienne spécifique
– Accéder à la cible
• …les bactéries peuvent devenir imperméables
– Fixer et modifier/inactiver la cible
• …la cible peut muter et perdre son affinité pour l’ATB
• ….la cible peut disparaître (voie métabolique alternative)
• Rester actif
– …les bactéries peuvent dégrader l’ATB
Résistance naturelle/acquise
Résistance naturelle
Résistance acquise
• TOUTE L’ESPECE est résistante
• CERTAINES SOUCHES de l’espèce
sont résistantes
• Pas de cible
– Mycoplasmes / pénicillines
• Bactéries imperméables
– Gram négatifs/glycopeptides
• Enzyme dégradant l’ATB
– Klebsiella/pénicillines
• Cible sans affinité
– Staphylococcus/aztréonam
• La cible est remplacée
– Sta. aureus résistants à la méticilline
SARM
• La bactérie devient imperméable
• La bactérie acquiert une enzyme
dégradant l’ATB
• La cible mute
– Strep. pneumoniae de sensibilité
diminuée aux pénicillines PSDP
Résistances
croisées / associées
• Résistance croisée
– Résistance à un ATB donné responsable de résistance à
d’autres ATB de la même famille, mécanisme commun
– SARM : résistance méticilline  résistance toutes βlactamines
• Résistance associée
– Résistance à un ATB donné fréquemment associée à un
autre mécanisme de résistance (ATB d’une autre famille,
par un autre mécanisme de résistance)
– SARM : résistance associée aux aminosides
Bactéricidie / bactériostatisme
• Un ATB bactéricide tue
les bactéries
• Un ATB bactériostatique
bloque la croissance des
bactéries
• Les bactéries traitées ne • Les bactéries traitées
peuvent cultiver
peuvent plus cultiver
• Baisse de l’inoculum
≥3xlog10 UFC/mL
• Baisse de l’inoculum
<3xlog10 UFC/mL
Notion de spectre d’activité
• Estimation de la sensibilité d’une bactérie avant
d’obtenir l’antibiogramme
• VIDAL : précise le % de résistance acquise
• Amoxicilline (extraits)
– Espèces sensibles : Corynebacterium diphteriae *…+
Streptococcus pyogenes
– Espèces modérément sensibles : Enterococcus
faecium (40-80%)
– Espèces résistantes : Staphylococcus *…+
Objectifs du cours
Critères de choix microbiologiques
d’un antibiotique (ATB)
Antibiogramme et
concentration minimale inhibitrice
Mécanismes d’action, mécanismes de résistance
Notions d’antibiothérapie
Est-il suffisant de connaître les
spectres ?
• Patient A : angine streptococcique, espèce sensible à
l’amoxicilline selon le VIDAL
• Patient B : méningite à pneumocoque, espèce pour
laquelle une résistance acquise peut poser problème
selon le VIDAL
• Peut-on se fier uniquement aux spectres chez ces deux
patients ?
– Patient A : OUI
– Patient B : NON => ANTIBIOGRAMME NECESSAIRE
Antibiogramme : objectifs
• Estimer la probabilité de réussite d’une
antibiothérapie sur un isolat bactérien spécifique
• Paramètres pris en compte
– Concentration minimale inhibitrice (CMI)
– Concentrations sériques et tissulaires obtenues aux
posologies recommandées
– Confrontations des résultats in vitro et des résultats
cliniques
Concentration minimale inhibitrice
(CMI)
• plus faible concentration d’antibiotique capable
d’inhiber la croissance bactérienne visible
CMI = 2 mg/L
Concentrations d’ATB atteintes in vivo aux
posologies recommandées
• Les concentrations d’ATB
chez le patient doivent
être supérieures à la CMI
CMI = 2 mg/L
– Souche A : échec
thérapeutique
Concentration critique
– Souche B : succès
CMI = 0,25 mg/L
• La concentration critique dépend de l’antibiotique, voie
d’administration, de l’espèce bactérienne, du type d’infection
Confrontation résultats
in vitro / résultats cliniques
• Niveau de preuve maximal
• Comparaison des taux de succès thérapeutiques
– Par types de patients
– En fonction de la CMI pour une espèce donnée, un
ATB donné et un type d’infection donné
• Etudes lourdes et coûteuses : pas toujours
disponibles, permettent de fixer la concentration
critique
Interprétation des paramètres
précédents…
• Principe général : utiliser les données disponibles
pour fixer des seuils ou concentrations critiques
• Puis comparer la CMI d’un isolat à ces seuils pour
établir une recommandation thérapeutique
(catégorie cliniques)
– Sensible
– Intermédiaire
– Résistant
Antibiogramme :
Catégories cliniques
• SENSIBLE (S) :
probabilité de succès thérapeutique
acceptable en cas de traitement à
dose habituelle par voie générale.
• INTERMEDIAIRE (I) :
succès thérapeutique imprévisible
ensemble hétérogène pour lequel la
seule valeur de la CMI n'est pas
prédictive
• RESISTANT (R) :
forte probabilité d'échec thérapeutique
quel que soit le traitement.
mg/l
mm
S
c
D
I
I
S
C
d
R
L’antibiogramme en pratique :
diffusion en gélose
1 mg/l
64 mg/l
OXA
OXA
L’antibiogramme en pratique :
diffusion en gélose
18 mm
Corrélation diamètre/CMI
CMI = 8 mg/l
L’antibiogramme en pratique :
plusieurs ATB par antibiogramme
Automatisation
Antibiogramme en milieu liquide
(micro-dilution)
Plaque 96 puits, dilution
manuelle
Automatisation par
utilisation de galeries
(cartes)miniaturisées
Automatisation et validation
• Comparaison informatisée des CMI ou diamètres
aux concentrations critiques puis expertise par le
bactériologiste (cohérence)
Objectifs du cours
Critères de choix microbiologiques
d’un antibiotique (ATB)
Antibiogramme et
concentration minimale inhibitrice
Mécanismes d’action, mécanismes de résistance
Notions d’antibiothérapie
Quinolones
Sulfamides
Rifampicine
Nitrofuranes
Imidazolés
b-lactamines
Glycopeptides
Fosfomycine
Parois et
membranes
Aminosides
Synthèse protéique
Macrolides
Acide fusidique, tétracyclines
Phénicolés
ADN
Principales classes d’ATB
Classe
Cible
Exemple
β-lactamines
paroi
amoxicilline
glycopeptides
paroi
vancomycine
aminosides
ribosome
gentamicine
macrolides
ribosome
erythromycine
ADN gyrase
ofloxacine
fluoroquinolones
Les β-lactamines
•
•
•
•
ATB les plus prescrits en ville et à l’hôpital
Efficaces, bactéricides, peu toxiques, mais…
…répandus dans la nature
…résistances acquises fréquentes
• Ciblent la paroi bactérienne
Paroi bactérienne et peptidoglycane
GRAM +
GRAM -
La synthèse du peptidoglycane est vitale pour les bactéries
Une brève histoire de la résistance
aux β-lactamines
A. FLEMING
Découverte
pénicilline
Introduction
pénicilline
RESISTANCE
PENICILLINE
Usage large des
C3G
RESISTANCE
C3G
Introduction
C4G
Introduction
méticilline
RESISTANCE
METICILLINE
Usage large des
carbapénèmes
RESISTANCE
C4G
???
RESISTANCE
CARBAPENEMES
Apparition rapide des résistances à chaque nouvelle molécule
β-lactamines :
mode d’action et résistance
• Le peptidoglycane est synthétisé par des enzymes, les protéines
liant la pénicilline (PLP)
• Les β-lactamines fixent et inactivent les PLP
• Résistance (GRAM +)
– PLP supplémentaire sans affinité
• S.aureus résistant à la méticilline, SARM
– PLP modifiées d’affinité diminuée
• pneumocoque de sensibilité diminuée à la pénicilline, PSDP
• Résistance (GRAM + & GRAM -)
– Enzymes hydrolysant les β-lactamines : β-lactamases
• GRAM + & - : pénicillinases
• GRAM - : céphalosporinases, β-lactamases à spectre étendu (BLSE),
carbapénémases
S. aureus résistants à la méticilline
(SARM)
• Les SARM résistent à toutes les β-lactamines
• C’est une BMR
• Acquisition d’un nouveau gène mecA codant
une PLP surnuméraire (PLP2A) sans affinité
pour les
S. aureus sensible
SARM
β-lactamines
Β-lactamine
X
PLP
PLP2A
SURVIE
Pneumocoques de sensibilité
diminuée à la pénicilline (PSDP)
Gène codant pour
la PLP normale
du pneumocoque
sensible
aux pénicillines
Gène codant pour la PLP
d’autres streptocoques
de sensibilité diminuée
aux pénicillines
sélectionnés
par les antibiotiques
Gène mosaïque codant pour
la PLP d ’un pneumocoque
de sensibilité diminuée
aux pénicillines (PSDP) :
Affinité PLP-Pénicilline
Résistance enzymatique :
β-lactamases
β-lactamines
β-lactamases
pénicillines
pénicillinases
pénicillines + inhibiteur BL pénicillinases haut niveau
BMR
BHR
céphalosporines
C1G / C2G
C3G
céphalosporinases
de bas niveau
de haut niveau
β-lactamases à spectre
étendu (BLSE)
carbapénèmes
carbapénémases
Les inhibiteurs de
β-lactamases
• Toujours associés à une β-lactamine
– Amoxicilline + acide clavulanique = AUGMENTIN®
– Pipéracilline + tazobactam = TAZOCILLINE®
• Leurre : sature la β-lactamase pour éviter la
dégradation de la β-lactamine
Pas de pénicillinase
Pénicillinase
Pénicillinase bloquée
par Ac. clav.
PLP
PLP
PLP
Amox.
Pénicillinase
Ac. clav.
Les inhibiteurs de
β-lactamases
• Chez les SARM et les PSDP:
–résistance non liée à β-lactamase
–pas d’intérêt des inhibiteurs de βlactamase
Les glycopeptides
• Administration IV  à l’hôpital
• Bactéricides mais délai d’action environ 24h
• Toxicité rénale
• Ciblent la paroi bactérienne
Glycopeptides:
mode d’action et résistance
• Les glycopeptides bloquent la stabilisation du peptidoglycane
• Résistance naturelle des GRAM- par imperméabilité
• Résistance acquise
– par épaississement de la paroi (R de bas niveau, rare)
– par modification du peptidoglycane (R de haut niveau, exceptionnel)
encodée par les gènes Van -> entérocoques Van+ BHR
Les aminosides
• Administration IV  à l’hôpital
• Rapidement bactéricides
• Toxicité rénale et auditive
• Ciblent le ribosome bactérien
ERREURS DE
LECTURE
Protéines
malformées
Aminoside
ARN messager
Résistance aux aminosides
• Les aminosides utilisent des systèmes de
transport membranaires pour entrer dans la
bactérie
– Résistance naturelle des bactéries dépourvues de
transporteurs: streptocoques, anaérobies
– Association à des ATB ciblant la paroi  pénétration
de l’aminoside  restauration d’activité
• Résistance acquise : enzymes inactivant
l’aminoside
– Pas encore de parade…
Les macrolides
•
•
•
•
Administration per os  surtout en ville
Bactériostatiques : pas sur des infections sévères
Peu toxiques
Ciblent le ribosome bactérien
BLOCAGE DE
L’ELONGATION
Arrêt de synthèse
protéique
ARN messager
macrolide
• Résistance naturelle des GRAM- par imperméabilité
• Résistance acquise par modification de la cible ou
efflux
Les fluoroquinolones
•
•
•
•
Administration IV et per os
Rapidement bactéricides
Toxicité tendineuse et musculaire
Contre-indiquées chez l’enfant
• Ciblent l’ADN bactérien
Fluoroquinolones :
mode d’action et résistance
• L’ADN surenroulé doit être déroulé puis réenroulé pour la
réplication bactérienne
• Les FQ stabilisent le complexe ADN – ADN gyrase
• L’ADN reste déroulé  mort bactérienne
• Résistance acquise
– mutation des cibles
– pompes à efflux
Objectifs du cours
Critères de choix microbiologiques
d’un antibiotique (ATB)
Antibiogramme et
concentration minimale inhibitrice
Mécanismes d’action, mécanismes de
résistance
Notions d’antibiothérapie
Schéma général d’une antibiothérapie
• J0 : diagnostic clinique
– Prélèvements bactériologiques
– ATB empirique selon pathogènes suspectés
• J1 : identification du pathogène
– Adaptation ATB selon résistances naturelles
• J2 : antibiogramme
– Adaptation ATB selon résistances spécifiques du
pathogène
– RETROGRADATION : choix d’ATB efficace ayant le
spectre le plus étroit
Association ou monothérapie ?
• But des associations d’ATB :
– Sévérité > Bactéricidie accrue (synergie)
– Path. inconnu > Elargissement du spectre
– Eviter la sélection de mutants résistants
Synergie / antagonisme
• Pour deux ATB A et B
– Synergie
Effet(A + B) > Effet(A) + Effet(B)
• β-lactamines + aminosides
– Additivité
Effet(A + B) = Effet(A) + Effet(B)
• β-lactamines + fluoroquinolones
– Antagonisme
Effet(A + B) < Effet(A) et Effet(B)
• Vancomycine + rifampicine
Les ATB ont toujours existé…
…les résistances aussi
Micro-organismes
résistants
®
A
®
ATB naturels
A
Bactéries sensibles
®
A
Compétition naturelle pour les ressources
Les ATB ont toujours existé…
…les résistances aussi
Micro-organismes
résistants
®
A
®
ATB naturels
A
®
®
A
®
®
Sélection naturelle
Utilisation excessive des ATB
Prescription
inappropriée
ATB
à l’hôpital ou
en ville
A
A
A
®
®
®
Pression de sélection -> BMR, BHR
Sélection de mutants résistants
Concentration prévenant la sélection des mutants
CPM ≥ CMI de la sous-population résistante
Choix des antibiotiques
• Connaître les pathogènes les plus probables selon le
site d’infection, la porte d’entrée, le terrain, le contage
• Tenir compte de la diffusion au site de l’infection
• Tenir compte de la tolérance en fonction de la gravité :
– Infection bénigne
– Infection grave
= privilégier la tolérance
= privilégier l’efficacité
Primum non nocere…
Balance bénéfice/risque
BACTERICIDIE
MACROLIDES
-
β-LACTAMINES
+++
FLUOROQUINOLONES +++
GLYCOPEPTIDES
+
AMINOSIDES
++++
TOXICITE
SEVERITE
Chez la femme enceinte
• Non contre-indiqués :
– β-lactamines
– Groupe MLS
• Contre-indiqués au premier trimestre :
– Rifampicine
– Métronidazole
• Contre-indiqués sauf indication majeure :
– Glycopeptides
– Aminosides
– Cotrimoxazole
• Contre-indiqués :
– Cyclines
– Fluoroquinolones
Diffusion tissulaire
• Certains tissus et organes ne sont pas propices à la
diffusion des antibiotiques :
–
–
–
–
–
LCR et cerveau
Prostate
Oeil
Os
Végétations dans l’endocardite infectieuse
• Utiliser des ATB à bonne diffusion : C3G,
fluoroquinolones, fosfomycine, a. fusidique, rifampicine
Points essentiels
• Classes principales d’ATB
–
–
–
–
–
β-lactamines
glycopeptides
aminosides
macrolides
fluoroquinolones
• Résistances
– absence de cible
– imperméabilité
– dégradation
enzymatique
– modification de la cible
• Antibiogramme / CMI
• Maniement des ATB
–
–
–
–
–
–
–
balance bénéfice/risque
associations
spectre d’activité
résistance naturelle
résistance acquise
résistances croisées
résistances associées
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