Un autre regard sur les algues marines
Laurent DABOUINEAU
Le thème des algues est souvent abordé dans le « Râle d’eau » mais généralement pour les
problèmes qu’elles causent : les marées vertes. Nous avons souhaité parler des autres algues,
celles qui sont utiles à l’homme, ou du moins exploitées par l’homme.
Les algues ont une connotation négative dans l’imaginaire des occidentaux qui ne vivent pas sur les
côtes. Elles sont gluantes et molles. Marcher sur les rochers recouverts d’algues est acrobatique. Elles
glissent et on ne sait jamais ce qu’il peut y avoir dessous ! De plus elles sentent très mauvais lorsqu’elles
se décomposent l’été en haut de plage.
Les gens du littoral, eux, savent depuis longtemps les utiliser. Certaines algues étaient consommées
dans les périodes difficiles par l’homme et même par les animaux domestiques. On pouvait voir alors des
troupeaux paître sur l'estran. Elles ont servi d’engrais depuis des générations. Au 18ème siècle, il y avait
dans le département une activité d’extraction de soude et d’iode à partir de cendre d’algues. Parfois même,
elles servaient de combustible bon marché. Enfin, dans certaines contrées bretonnes, on a dormi sur des
matelas de varech.
Actuellement 100 000 tonnes d’algues sont récoltées en France par an, principalement en Bretagne.
Les utilisations sont variées et en développement. En voici quelques exemples.
Les engrais et produits pour l’agriculture :
Des engrais sont fabriqués à partir d’algues récoltées par les goémoniers (algues brunes surtout,
fucus et laminaires). Elles sont ensuite séchées et broyées. A l’échelle du jardin on trouvera des terreaux
aux algues avec par exemple la marque « Or Brun® ». Le maërl, algue calcaire, est toujours utilisé comme
amendement et récolté localement sur un gisement (surexploité) en Manche et commercialisé dans le
département par la SECMA.
En transformant davantage cette matière première, et notamment en extrayant certaines molécules,
des sociétés comme Goëmar ont breveté des stimulateurs naturels des défenses contre les maladies du blé,
mais aussi des biostimulants de nutrition, de fécondation ou de croissance des arbres fruitiers, légumes,
vigne et céréales.
L’agar (gélifiant extrait de l’algue Gelidium sp) a permis l’essor de la culture in vitro en
horticulture. En effet, les boutures d’arbres, de fleurs ou de légumes sont clonées à l’infini sur des géloses
stériles à base d’agar.
Des farines d’algues entrent dans la composition de nombreux aliments pour animaux d’élevage y
compris poissons ou crevettes.
Les algues alimentaires :
Les algues alimentaires sont de loin le premier débouché mondial de la filière algue. En France 14
algues sont autorisées comme matière première alimentaire dans l’industrie et une vingtaine de sociétés en
commercialisent, fraîches, appertisées, saumurées ou déshydratées. Les algues sont riches en
oligoéléments comme l’iode, le calcium, le magnésium, le phosphore, le potassium, le sodium, le fer. A
titre d’exemple la teneur en fer est 15 fois plus importante dans la dulse (Palmaria palmata) que dans les
épinards ! Elles contiennent aussi des acides aminés, des protéines, des vitamines et des fibres. Pour
profiter de ces bienfaits, certaines espèces pourront être cuisinées comme légume ou servir à la fabrication
de compléments alimentaires conditionnés en gélules par exemple. D’autres seront utilisées en condiments
ou en paillettes (comme les ulves !) pour aromatiser une sauce ou un court-bouillon.
La plus facile à utiliser est sans aucun doute le haricot de mer (Himanthalia elongata). Faite de
grands filaments d’un à deux mètres, on la trouvera fixée sur les rochers en bas de l’estran lors de
coefficient de marée de 100 minimum. Il suffira de la cuire 30 mn dans l’eau, puis de la couper de taille
« haricot vert ». Passée à la poêle avec beurre (salé bien sûr) et ail, elles accompagnera très bien un
poisson ou une viande.
Le wakame ou ouessane (Undaria pinnatifida) est cultivé sur des cordages près d’ Ouessant depuis
1990 puis au Guilvinec et à Oléron. La production avoisine les 40 tonnes/an alors qu’en Corée du Sud elle
Wakamé