23/02/04 15:49 Page 19 PLAIES ET CICATRISATION • Les soins 19 Sommaire Quand l’équilibre est rompu • Les pansements De plus en plus actifs • Le patient diabétique Une prise en charge globale • Les plaies de la main À ne jamais négliger © Burger/Phanie • Les brûlures © Garo/Phanie Quel degré d’urgence ? Quel soin ? • Les escarres Ce n’est pas une fatalité • Les ulcères de jambes Être attentif à la douleur et à l’infection Plaies et cicatrisation Des schémas de soins toujours différents Une plaie se définit par une rupture de la continuité des tissus de l’enveloppe corporelle. On distingue divers types de plaies. Aiguës ou chroniques, superficielles ou profondes, les plaies sont associées à divers objectifs de soins et risques d’infection. Le premier objectif est la reconstitution tissulaire : la cicatrisation, phénomène biologique naturel de réparation du tissu après une lésion. L es tissus humains sont capables, en effet, de réparer des lésions localisées par des processus de réparation et de régénération qui leur sont propres. Cependant, cette capacité reste soumise à de nombreuses variations. De ce fait, le traitement et les soins d’une plaie n’obéissent jamais au même schéma. Même en présence de lésions d’étiologie identique, le processus de cicatrisation pourra se dérouler de façon totalement différente selon les personnes. Pour cette raison, un bon concept thérapeutique débutera toujours par une analyse et une appréciation précises, pour évaluer tant les caractéristiques locales de la plaie que les facteurs généraux du sujet atteint. Cette évaluation devra également être répétée systématiquement afin de reconnaître les phases successives normales d’une guérison spontanée, ou de détecter à temps des anomalies pour apporter une correction rapide et appropriée. Les différentes phases La cicatrisation d’une plaie se déroule en trois phases. Dans la pratique courante, ces trois phases sont appelées respectivement phase de détersion, de bourgeonnement et d’épithélialisation. Chacune de ces phases est caractérisée par des activités cellulaires spécifiques qui font progresser le processus de réparation selon des séquences chronologiques précises, mais imbriquées les unes dans les autres. La durée et l’intensité de chacune des phases sont variables. Une immaturité des cellules, une activité cellulaire insuffisante, tout comme une croissance exubérante entravent ou empêchent le déroulement de la phase suivante. Le but d’un traitement de plaie bien conduit sera d’intervenir par une action régulatrice ou stimulante sur les différentes phases de la cicatrisation. Le pansement devra correspondre aux besoins de la plaie au cours de chacune de ses phases. La cicatrisation commence par l’apparition de phénomènes inflammatoires précoces suivis par des sécrétions à partir de vaisseaux sanguins et lymphatiques. La coagulation est induite par activation de la thrombokinase qui, libérée, permet la formation de fibrine. Après environ 10 minutes, débutent l’exsudation, qui va assurer la défense contre l’infection, et la détersion de la plaie. Au cours de cette phase, les mitoses augmentent en nombre au niveau de la plaie. Alors que la détersion de la plaie se poursuit encore, les fibroblastes se multiplient sous l’impulsion des macrophages. Ces fibroblastes effectueront par la suite un travail de reconstruction. >> DOSSIER Dossier >> Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 23/02/04 20 15:49 Page 20 DOSSIER >> DOSSIER >> Focus ... La rapidité et la qualité de la cicatrisation d’une plaie dépendent de l’état général de l’organisme atteint, de l’étiologie de la lésion, de l’état et de la localisation de la plaie, ainsi que de la survenue ou de l’absence d’une infection. Environ 4 jours après la blessure, l’organisme commence à combler la perte de substance par un nouveau tissu. Dans ce but, les fibroblastes produisent, en premier lieu, des mucopolysaccharides qui serviront de matrice à l’élaboration des fibres collagènes du tissu conjonctif. La fibre collagène, définitive et insoluble, sera incorporée dans la matrice mucopolysaccharide. Dans le même temps, des néocapillaires vont progresser dans cette matrice pour assurer la nutrition du tissu nouvellement formé. En présence de pertes de substance plus importantes, les capillaires se présentent à la surface de la plaie avec un aspect de granulation rouge vif. Une couche de sécrétions fibrineuses apparaît à la surface du tissu néoformé. Des bourgeons vasculaires et des cellules du tissu conjonctif y pénètrent et vont, à leur tour, produire une nouvelle couche de sécrétions. Par ce mécanisme, ils font progresser lentement le bourgeonnement et, ainsi, combler progressivement la plaie. Entre le 6e et le 10e jour en moyenne, commence la maturation des fibres collagènes. La plaie se rétracte sous l’influence des myofibroblastes. En s’appauvrissant progressivement en eau et en contenant de moins en moins de vaisseaux, le tissu de granulation devient plus ferme. Il se transforme en tissu cicatriciel qui, à son tour, favorisera la rétraction cicatricielle. L’épithélialisation marque la fin de la cicatrisation. Plaies aiguës et plaies chroniques Les plaies aiguës et les plaies chroniques diffèrent notamment par le temps nécessaire à l’achèvement de l’épithélialisation. Les plaies aiguës sont créées par un agent traumatique dans un tissu sain. La cicatrisation se déroule normalement si le tissu est bien vascularisé. Mais les plaies aiguës comme les brûlures peuvent durer, ou devenir chroniques lorsque la cicatrisation est perturbée, dans le cas d’une infection, par exemple. Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 Il existe différentes lésions de la peau dont l’aspect varie en fonction de la cause. Ainsi, les abrasions traumatiques de la peau sont provoquées par le frottement d’une surface mobile contre la peau ou une friction sur une surface rugueuse (escarres). La destruction peut être superficielle, intermédiaire ou profonde. Indiquée pour le traitement des lésions épidermiques, la dermabrasion en traitement chirurgical est réalisée avec une brosse métallique ou une meule (petit instrument rotatif). Elle met à nu le derme superficiel pour améliorer l’aspect esthétique de la cicatrice. Son traitement est identique à celui d’une brûlure de même profondeur. La plaie par avulsion peut provoquer des lésions du tissu conjonctif souple sous-jacent. Dans le cas d’une plaie par contusion traumatisme contondant, les lèvres de la plaie sont dévitalisées. Dans le cas d’une coupure provoquée par un objet tranchant, les lèvres sont lisses, intactes. Souvent produite par des forces de cisaillement (morsure), la lacération est, elle, une plaie déchiquetée, irrégulière. Les plaies chroniques surviennent généralement sur des tissus déjà cicatrisés. Elles peuvent être favorisées par une mauvaise fixation de l’épiderme sur le derme ou des anomalies vasculaires ou métaboliques. Elles sont souvent caractérisées par une importante quantité de collagène qui réduit la vascularisation et l’apport d’oxygène. Les brûlures, enfin, sont des lésions aiguës mais, pour certaines, les soins peuvent durer longtemps. Andrée-Lucie Pissondes Quel type de plaie ? La plaie correspond à : • un érythème ; • une phlyctène ; • une dermabrasion ; • une nécrose sèche. La plaie est-elle : • fibrineuse ± exsudative ; • cavitaire ± exsudative ? La plaie est-elle : • cavitaire ± bourgeonnante ; • bourgeonnante ± exsudative ; • bourgeonnante ± épidermisée ; • hyperbourgeonnante ? Facteurs pouvant avoir un effet néfaste sur la cicatrisation ✓ Obésité : diminution de la vascularisation du tissu adipeux et augmentation de la tension dans la plaie. ✓ Tabagisme : diminution de l’oxygénation de la plaie et anomalies de la coagulation dans les petits vaisseaux sanguins. ✓ Âge : affaiblissement des défenses immunitaires et diminution de la résistance aux germes pathogènes. ✓ Diabète : dysfonctionnement leucocytaire, à cause de l’hyperglycémie. Risque d’ischémie régionale en raison d’une oblitération vasculaire ou de l’épaississement de la membrane basale des capillaires. ✓ Autres : mauvaise circulation/hypoperfusion, malnutrition, médicaments immunosuppresseurs, irradiation de la lésion, stress important, déficit sensitif dans la région de la plaie, corticoïdes. © Raguet/Phanie Dossier 23/02/04 15:49 Page 21 PLAIES ET CICATRISATION 21 Les soins Quand l’équilibre est rompu Toute plaie doit être évaluée de façon à adapter les soins et le pansement. L’évaluation se fait à partir de la couleur de la plaie, de sa dimension, de sa profondeur, de sa quantité d’exsudat. Par exemple, les plaies chroniques étant rarement monochromes (rouges, jaunes ou noires), leur traitement sera adapté à la couleur dominante. M ais dès qu’une lésion cutanée, même minime, entraîne une brèche dans les défenses antimicrobiennes de la peau, des bactéries pénètrent dans l’organisme... Pour soigner une lésion aiguë de la peau, il faut, en premier lieu, éliminer les débris organiques (sang, nécrose) qui constituent un milieu idéal pour la prolifération des bactéries et retardent la cicatrisation. Le rinçage se fait au sérum physiologique. En présence de signes d’inflammation ou d’infection, la plaie sera ensuite nettoyée avec un antiseptique aqueux en respectant le temps de contact spécifique de l’antiseptique choisi. Les antiseptiques L’utilisation d’un antiseptique en solution alcoolique (cytoxique) est à proscrire sur une plaie. Les produits iodés ont une activité bactéricide rapide sur Gram (+) et Gram (–), sur les mycobactéries, une activité fongicide, mais aucune activité sporicide, et une activité virucide discutée actuellement. Il ne faut pas les utiliser chez l’enfant de moins de 30 mois, chez les brûlés à plus de 30 %, chez les insuffisants rénaux, en cas d’intolérance à l’iode, et ils sont incompatibles avec les dérivés mercuriels. La chlorhexidine est un bactéricide, plus actif sur Gram (+) que sur Gram (–), inactif sur les mycobactéries, non sporicide, virucide sur le VIH, virus herpès, non virucide sur le virus de l’hépatite B, fongistatique. Elle est incompatible avec les savons, il faut donc soigneusement rincer entre le savonnage et l’application de l’antiseptique. Tout flacon ouvert doit être utilisé immédiatement et ne pas être conservé. Les dérivés chlorés sont bactéricides sur Gram (+) et Gram (–). Leur action est rapide (moins d’une minute), non bactéricide sur les mycobactéries, dont le BK à cette concentration, leur action sporicide discutée et leur action virucide probable. Comme la chlorhexidine, ils sont incompatibles avec les savons et les matières organiques (pus, sang, protéines), d’où la nécessité d’un rinçage soigneux. Les ammoniums quaternaires, qui sont des produits tensio-actifs cationiques, sont bactériostatiques sur Gram (+) et Gram (–), ont un spectre étroit, sont non sporicides, fongistatiques et ont une activité virucide variable. Les carbanilides ont un spectre très étroit sur les bactéries Gram (+) et certains champignons comme trichlophyton. Ils ne doivent pas être utilisés chez le nouveau-né, lors d’un accouchement ou sur une muqueuse, et sont incompatibles avec les savons. Les dérivés mercuriels en solutions aqueuse ou diluée et en solution alcoolique sont bactériostatiques sur Gram (+). De nombreux germes sont résistants à ce produit aujourd’hui (Pseudomonas, entérobactéries, staphylocoques). Traitement d’appoint des affections cutanées infectées ou susceptibles de le devenir, ils ne doivent pas être utilisés chez le prématuré, chez le nouveau-né, sur peau lésée, brûlée, sur une muqueuse, avant prélèvement ou injection et en cas d’hypersensibilité aux dérivés mercuriels. Ils présentent de nombreuses incompatibilités (matières organiques, autres antiseptiques, dérivés chlorés, dérivés iodés…). Les infections Dès que la peau est lésée, les bactéries pénètrent dans l’organisme. Selon les possibilités de défense du patient, elles peuvent avoir un pouvoir pathogène alors que, parallèlement, se déclenche le processus de cicatrisation. Tout d’abord, il existe un certain consensus : pas d’antibiothérapie locale. On traite par voie générale et, parfois, uniquement lorsque la plaie provoque une bactériémie. L’analyse bactériologique d’une plaie est inutile, on pratique plutôt des hémocultures en cas de fièvre. Les plaies chroniques sont colonisées par une flore bactérienne issue de la flore cutanée, des flores commensales des cavités voisines, de l’environnement hydro-aérien. Cette flore évolue au cours des différentes étapes du processus de cicatrisation. Au stade de la détersion, les Gram (+) commensaux de la peau saine disparaissent au profit de Gram (–). Au fur et à mesure de la détersion, on note une disparition progressive des Gram (–) et une réapparition des Gram (+). Dès que ceux-ci deviennent majoritaires, on peut considérer que l’on est en phase de cicatrisation ; la guérison ne sera totale que lorsque les Gram (–) auront complètement disparu et que la peau aura retrouvé sa flore à Gram (+). >> DOSSIER Dossier Colonisation ou infection ? Comment faire la différence entre colonisation et infection d’une plaie chronique ? La simple multiplication locale de bactéries ayant adhéré à la plaie est appelée colonisation par opposition à l’infection définie comme une invasion plus profonde de la plaie et des tissus sains, entraînant une réponse immunitaire de l’hôte et des signes cliniques : douleur, rougeur, pus, fièvre, polynucléose. En pratique, la différence entre colonisation et infection est difficile à faire, car la colonisation est un état d’équilibre entre le patient et sa flore microbienne. C’est la rupture de cet équilibre qui conduit à l’infection, dont les >> Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 15:49 Page 22 DOSSIER facteurs tiennent vraisemblablement plus à l’hôte qu’à la bactérie. Un faisceau de présomptions à la fois cliniques et biologiques peut aider, et le résultat de l’analyse bactériologique doit être interprété en fonction du contexte clinique et de l’état du patient, de l’examen microscopique, des espèces cultivées (cultures monomicrobienne ou plurimicrobienne). Les prélèvements L’écouvillonnage est la technique la plus simple, la moins coûteuse et la plus ancienne. On peut utiliser également une compresse de gaze, toujours de la même taille pour un même protocole. La compresse sera humectée de sérum physiologique stérile et déposée sur la plaie pendant un temps donné. Le résultat des cultures bactériennes sera exprimé en UFC/cm2. Un autre procédé consiste à prélever au moyen de dispositifs utilisés en hygiène pour le contrôle des surfaces. Il s’agit d’une boîte de Petri de conformation particulière, dont le fond est quadrillé afin de faciliter le compte des colonies. Le prélèvement biopsique sera effectué au scalpel ou avec un trocart calibré, après lavage de la plaie et rinçage à l’eau distillée. Ce type de prélèvement permettrait de mettre en évidence la flore bactérienne infiltrée dans la profondeur des tissus. Cependant, outre le coût du trocart calibré à usage unique, beaucoup de cliniciens hésitent à “faire une plaie dans la plaie”. L’examen microscopique présente l’avantage de visualiser la présence de polynucléaires et fournit une appréciation sur l’importance de la population bactérienne et sa compo- Les pansements De plus en plus actifs Pour une bonne cicatrisation de la plaie, le pansement doit permettre de conserver l’humidité, favoriser les échanges gazeux, procurer une isolation thermique et mécanique, être une barrière bactériologique, absorber les exsudats. Les pansements sont indissociables du traitement. C e sont des dispositifs médicaux, bien qu’ils soient associés de plus en plus souvent à des produits actifs. Les pansements, n’étant pas considérés comme des médicaments, ne font l’objet que d’une conformité à la législation européenne ou “norme CE”. Les études d’efficacité contrôlées, randomisées sont nombreuses par rapport aux médicaments. Leurs différentes indications sont basées essentiellement sur leurs propriétés physico-chimiques évaluées in vitro et sur un consensus basé sur l’expérience. Il existe quatre principales classes de pansements. D’autres, “moins traditionnels”, ont vu le jour ces dernières années, notamment ceux dits “biologiquement actifs”. Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 Les hydrocolloïdes Les hydrocolloïdes sont indiqués de la phase de détersion à la phase d’épidermisation sur les plaies modérément exsudatives : plaies aiguës (brûlures, moignons et amputations, dermabrasions, sites donneurs de greffe, plaies postopératoires) ; plaies chroniques (escarres, ulcères de jambes). Ils sont contre-indiqués pour les plaies très exsudatives par insuffisance de contrôle de l’exsudat, à l’inverse des nécroses sèches, les brûlures du 3e degré, les plaies infectées, et en cas d’allergie à un des composants. Leur couche interne est composée de carboxyméthylcellulose (CMC) sodique, noyée dans une masse adhésive. Certains hydro- sition. On considère que cet examen est positif à partir de 105 bactéries/g de tissu. Mais dans les plaies chroniques, souvent atones, la réaction à polynucléaires n’existe pas toujours. La morphologie bactérienne et le Gram peuvent être difficiles à déterminer. Enfin, il existe des discordances dans les résultats quelquefois faussement positifs et inversement [les Gram (–) étant plus difficiles à repérer que les Gram (+)]. ALP © Burger/Phanie >> © Garo/Phanie 22 23/02/04 >> DOSSIER Dossier colloïdes contiennent en outre de la pectine ou de la gélatine. La couche externe est une mousse ou un film de polyuréthane, semi-perméable. Ils sont adhésifs sur toute leur surface, avec parfois un renforcement en périphérie. La plupart d’entre eux existent en plusieurs dimensions et sous plusieurs formes. Les hydrocolloïdes se délitent dans les plaies au contact des exsudats, pour former une substance brun-jaunâtre, souvent malodorante, en dehors de toute infection (il faut en prévenir le patient). L’intérêt de ces pansements repose sur la simplicité de leur utilisation et la possibilité de les laisser en place plusieurs jours, autorisant un à trois changements par semaine. Les risques d’utilisation sont un bourgeonnement excessif (réductible par des corticoïdes locaux), un eczéma de contact à l’adhésif (très rare), une macération de la peau autour de la plaie en cas de plaie très exsudative (sans réelles conséquences pour la cicatrisation). 23/02/04 15:49 Page 23 PLAIES ET CICATRISATION Les alginates Les hydrocellulaires Les alginates sont indiqués depuis la phase de détersion à la phase de bourgeonnement sur des plaies très exsudatives, parfois hémorragiques : plaies aiguës suintantes et hémorragiques (brûlures, plaies postopératoires, sites donneurs de greffe, moignons d’amputation, sinus, fistules, abcès) et plaies chroniques (escarres de décubitus, ulcères veineux ou artériels, ulcères d’origine diabétique). Sur les ulcères de jambe, parfois moins exsudatifs, ils peuvent être humidifiés par du sérum physiologique pour pallier le manque d’exsudat. Un pansement secondaire est toujours nécessaire : compresse et film de polyuréthane pour maintenir l’humidité dans le cas des plaies moins exsudatives. Une allergie à l’un des composants, les plaies non exsudatives, les plaies avec nécroses noires et sèches sont des contre-indications. Les alginates de calcium sont composés de polymères extraits d’algues marines (acide mannuronique, acide guluronique), associés parfois à de la CMC. Ils se présentent sous forme de compresses. Ils possèdent un haut pouvoir d’absorption (10 à 15 fois leur poids) et ont des capacités hémostatiques ainsi que des propriétés bactériostatiques. Ils se présentent sous plusieurs formes (compresse non adhésive, mèches). Les alginates ne se délitent pas dans la plaie. Au contact des exsudats, l’alginate de calcium se transforme en alginate de sodium gélifié et le retrait du pansement n’est pas douloureux. Les hydrocellulaires présentent également un haut pouvoir absorbant (jusqu’à dix fois leur poids) et adhèrent à la peau saine, mais pas à la plaie. On les emploie de la phase de bourgeonnement à la phase d’épidermisation sur les plaies modérément exsudatives (essentiellement pour soigner les ulcères et les escarres). Il ne faut pas les employer sur des plaies infectées et lors d’une allergie à un des composants et avec du Dakin® et H2O2 qui entraînent une détérioration du support en polyuréthane. C’est une classe plus récente que celle des hydrocolloïdes. Ils permettent une meilleure absorption avec absence de résidu, mais leur coût est plus important et certains présentent des problèmes de déformation après absorption de l’exsudat, à l’origine des problèmes de réfection. Ils sont composés de trois couches : un film semi-perméable externe, une couche hydrophile très absorbante de polyuréthane et une couche de transfert, adhérente ou non, située au contact de la plaie. Ils existent sous forme de plaque non adhésive ou adhésive en périphérie ou adhésive en totalité, sous forme triangulaire pour les escarres sacrées et sous forme de coussinet destiné aux plaies creuses. Contrairement aux hydrocolloïdes, ils ne se délitent pas au contact de la plaie et ne dégagent pas d’odeur désagréable. L’absence de délitement du pansement et la possibilité de formes non adhésives diminuent le risque d’altération de la peau autour de la plaie. Les hydrogels Les hydrofibres Les hydrofibres, bien que de composition très différente, sont regroupés dans la même classe que les alginates en raison de leur importante capacité d’absorption et de leur aspect. Ils sont constitués d’une fibre de CMC très absorbante (compresse ou mèche) qui se transforme en gel cohésif au contact de la plaie. Un pansement secondaire est nécessaire, de préférence un hydrocolloïde ou un film, pour conserver l’humidité. Les hydrogels nécessitent un pansement secondaire, si possible peu absorbant (plaque d’hydrocolloïde ou film de polyuréthane), et sont indiqués en phase de détersion. Ils ont la capacité de relarguer l’eau qu’ils contiennent dans la plaie, et sont donc particulièrement adaptés à la phase de détersion et de bourgeonnement des plaies sèches ou peu exsudatives comme des plaies présentant des croûtes ou des plaques de nécrose sèche. Il ne faut pas les 23 associer à un pansement très absorbant. Ils sont contre-indiqués sur des plaies infectées ou à forte exsudation et lorsqu’il existe un risque d’allergie à un des composants. La CMC qui les compose est hydratée (75 à 80 % d’eau). Ces pansements existent sous forme de gel présenté en tubes. Les pansements au charbon Il existe d’autres pansements de situations spécifiques. Ainsi les pansements au charbon, qui sont utilisés pour des plaies malodorantes et à risque de prolifération bactérienne, sont imprégnés ou non d’ions argentiques et sont particulièrement indiqués à la phase de détersion sur les plaies infectées ou dans les plaies cancéreuses où prolifèrent les germes anaérobies et à Gram (–). Ils se présentent sous la forme de compresses. Il faut quelquefois les humidifier si la plaie est peu exsudative. Ils nécessitent un pansement secondaire (films, compresses épaisses). Les pansements d’interface Ce sont des tulles gras neutres, utilisés depuis très longtemps à toutes les phases de la cicatrisation. Ils sont peu absorbants et nécessitent d’être changés quotidiennement. Ils sont utiles, notamment dans les plaies postchirurgicales, les dermabrasions et les plaies de grande taille ou circonférentielles. Ils ne contiennent pas de produit allergisant, contrairement aux tulles médicamenteux. >> DOSSIER Dossier Les pansements siliconés Il s’agit d’un tricot de polyamide élastique enduit de silicone. C’est un pansement inerte, souple, s’adaptant à tous les contours anatomiques. Son intérêt essentiel est de ne pas coller à la plaie, permettant un retrait non douloureux. Il adhère sans créer de lésions au niveau de la peau autour des plaies. Ses indications sont ciblées (dermabrasion, plaies des épidermolyses bulleuses, brûlures, plaies chirurgicales, au stade de bourgeonnement). Il nécessite un pansement secondaire (compresses, bandes tissées). >> Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 24 23/02/04 15:49 Page 24 DOSSIER >> >> DOSSIER Dossier Les films Ce sont des films de polyuréthane semi-perméables, ni absorbants, ni adhérents à la plaie. Ils sont transparents, permettant un contrôle visuel de la plaie, et sont particulièrement indiqués au stade d’épidermisation, pour les sutures, pour les brûlures ou les escarres superficielles, et en pansement secondaire. Les pansements à base d’acide hyaluronique L’acide hyaluronique est un constituant physiologique de la matrice provisoire lors de la cicatrisation cutanée et y joue un rôle essentiel au niveau cellulaire. Il est utilisé en topique dans la cicatrisation des plaies difficiles. Le principe est d’apporter dans la plaie un composant participant à la cicatrisation. Les pansements sont complètement absorbés au bout de quelques jours. Ils se présentent sous la forme d’un film destiné plus particulièrement aux plaies superficielles de type dermabrasion, laser, d’une compresse destinée aux plaies chroniques et en crème. Ils sont pour l’instant assez coûteux et non remboursés. Les substituts cutanés Des pansements dits biologiquement actifs ont été développés pour les brûlés, les plaies postchirurgicales et les patients atteints de plaies chroniques. Ce sont : – Les pansements contenant des cellules auto- ou allogéniques, des fibroblastes allogéniques. Vendus congelés, ils sont utilisables à n’importe quel moment sur une plaie, mais ne sont utilisés pour l’instant que sur les maux perforants plantaires. Ils ont également été expérimentés, avec des résultats prometteurs (en comparaison avec l’allogreffe de peau de cadavre ou de porc, utilisée en couverture provisoire avant autogreffe), dans la prise en charge initiale des brûlés. – La matrice de collagène (gel épais de collagène bovin) contenant des fibroblastes allogéniques, provenant de prépuces humains. – Les pansements qui se présentent sous la forme d’une fine plaque Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 d’acide hyaluronique percée de minuscules puits réalisés au laser dans lesquels sont cultivés des kératinocytes autologues. Ces derniers, provenant d’une biopsie cutanée du patient auquel est destiné le pansement, permettent d’élaborer, en laboratoire, un film épithélial greffable de kératinocytes spécifique à ce patient. – Les cultures de kératinocytes autologues sont utilisées maintenant pour le traitement des grands brûlés. À partir d’une biopsie de peau du patient, un laboratoire fabrique une surface suffisante de kératinocytes autologues pour greffer le patient. – Integra™ est un pansement qui ne contient pas de cellules. Constitué d’une matrice de collagène et de chondroïtine-6-sulfate, recouverte d’une couche de silicone, ce pansement est destiné à la couverture des grands brûlés. La couche de silicone est enlevée secondairement pour permettre la greffe des kératinocytes autologues. ALP Focus ... Cathéter central Sauf en cas d’extrême urgence, un cathéter central doit être posé sous anesthésie générale ou association antalgique majeur/anesthésique local. Le retrait des adhésifs est douloureux : dans le cas d’un pansement adhésif occlusif transparent, il faut exercer une traction s’éloignant du centre du pansement pour faire pénétrer l’air sous l’adhésif, mouiller avec de l’eau stérile ou du sérum physiologique, voire faire un trempage préalable rapide. Les surfaces collantes doivent être limitées, notamment sur une surface trop large et sur des endroits sensibles (mamelons, aisselles, cou). Toute mobilisation du cathéter peut générer de la douleur. Lors de la désinfection du cathéter et de la peau, ne pas tirer sur les fils, penser à la boucle de sécurité du cathéter sous le pansement qui amortit les tractions et tensions. Objectifs de qualité La qualité du soin est optimisée par l’unification du matériel utilisé, des gestes à effectuer et des règles à appliquer. Une bonne technique de pansement vise à minimiser les risques d’infection de la plaie et à rétablir l’intégrité de l’épiderme. Règles à respecter : – Prévenir la personne soignée avant d’effectuer le soin. – Vérifier l’environnement et l’état de propreté du patient, du lit, de la chambre (l’entretien de la chambre et la réfection du lit doivent être réalisés avant le soin). – Le pansement doit être effectué conformément aux prescriptions médicales, les informations concernant le pansement notées sur le dossier du malade. – Préférer le guéridon facile à nettoyer/désinfecter entre deux chambres au chariot magasin qui doit rester dans le couloir, ou utiliser un matériel à usage unique : seul le matériel nécessaire entre dans la chambre. – Noter les transmissions sur le dossier de soins infirmiers. – Dater et signer. 23/02/04 15:49 Page 25 PLAIES ET CICATRISATION 25 Le patient diabétique Une prise en charge globale Les lésions du pied des diabétiques nécessitent souvent des hospitalisations prolongées en milieu spécialisé. Elles mènent encore trop souvent à l’amputation. Il existe peu de centres spécialisés en France pour la prise en charge de ces lésions. B eaucoup de patients reçoivent des soins sans voir de diabétologue, sans stratégie concertée, en restant longtemps hospitalisés faute d’une structure ambulatoire accessible. Cependant, les lésions profondes, ischémiques ou infectées, nécessitent d’adresser le patient à une structure spécialisée multidisciplinaire sans perdre de temps, car l’évolution peut être très vite péjorative. Le bilan initial doit rapidement répondre à deux questions : existe-til une infection ou une ischémie qui pourraient justifier un traitement urgent ? À ce stade, l’examen clinique est au premier plan. L’atteinte artérielle est évoquée devant des pouls non palpables, un souffle vasculaire, des troubles de la recoloration, un pied froid. L’examen est utilement complété au lit du malade par une étude des pressions avec un doppler de poche ou, mieux, par une vélocimétrie doppler. L’infection est évidente dans les cas extrêmes de gangrène gazeuse, phlegmon, cellulite de l’arrière-pied, ou plus torpide et plus profonde, à suspecter quand le sondage au stylet révèle un pertuis, un contact osseux, ou provoque un écoulement purulent... Parfois, l’infection est superficielle, notamment en cas de mycose. Le bilan de la neuropathie est effectué mais n’a aucune incidence sur la décision thérapeutique immédiate. Toute suspicion d’atteinte artérielle ou d’infection profonde doit faire pratiquer des examens spécialisés : bilan artériel, bilan infectieux, radiographies des pieds face et profil (ostéite ou ostéo-arthropathie ?) et, dans certains cas difficiles, le diagnostic d’ostéite peut être aidé par la pratique d’une IRM ou d’une scintigraphie aux leuco- cytes marqués. Une biopsie osseuse doit être pratiquée durant le temps opératoire pour analyse bactériologique et histologique. Aucun topique n’a fait la preuve de son efficacité. La mise en décharge est indispensable à obtenir en cas de plaie plantaire. Elle est assurée par le port de chaussures à appui partiel, soit talonnier (Barouk), soit antérieur (Sanital). Le traitement des mycoses fait appel aux antifongiques locaux ou, parfois, généraux. Le pied chirurgical infecté Examen général, métabolique et local La prévention du tétanos doit être systématique. Celle des thromboses veineuses profondes fait appel à l’héparinothérapie (HBPM). Un bon état nutritionnel est indispensable pour la cicatrisation. En effet, l’existence d’une dénutrition, dont témoigne une albuminémie inférieure à 30 g/l, doit faire prendre des mesures diététiques hyperprotidiques. Toute lésion du pied impose une équilibration stricte du diabète. Le traitement hypoglycémiant habituel (même par ADO) peut être maintenu si l’équilibre est parfait en présence de plaies superficielles, non infectées. Dans les autres cas, on doit avoir largement recours à l’insulinothérapie, même en cas de diabète de type 2. L’indication de cette insulinothérapie et de son mode requiert l’avis diabétologique. Le pied chirurgical non infecté Pour soigner une plaie non infectée et non ischémique (grade I de la classification de Wagner) dans un pied chirurgical non infecté, les soins locaux doivent être réalisés par un personnel infirmier entraîné. Ils sont largement dominés par le débridement de la plaie au bistouri (décornage, pelage). Le pansement doit se limiter à des antiseptiques et ne doit pas être agressif pour les tissus, ni masquer leur aspect (pas de colorant, pas d’antibiotiques locaux, pas de sparadrap collé sur la peau...). Pour le pied chirurgical infecté, la mise à plat rapide et large de tous les tissus touchés doit être effectuée dès qu’il y a une infection clinique patente (pied inflammatoire, collection). Une antibiothérapie doit être instaurée, associant au moins deux molécules répondant aux critères suivants : spectre suffisamment large pour couvrir les germes aérobie et anaérobie, diffusion tissulaire et osseuse élevée, possibilité dans certains cas d’utiliser la voie orale pour respecter le suivi ambulatoire. Cette antibiothérapie doit être adaptée dans un deuxième temps selon l’évolution clinique et les données des antibiogrammes. Sa durée est déterminée par l’extension du sepsis, et notamment l’atteinte osseuse, qui peut faire poursuivre ce traitement durant plusieurs mois. En ce qui concerne le pied chirurgical ischémique, les possibilités d’une revascularisation doivent être discutées avant tout geste d’exérèse. L’atteinte du trépied jambier est fréquente, mais les artères sont souvent perméables au niveau de la cheville et du pied, permettant la réalisation de pontages distaux. Les résultats de ces procédures de revascularisation sont actuellement comparables entre diabétiques et non-diabétiques. Quand aucun geste de revascularisation n’est possible, les différents traitements médicaux tels que les anticoagulants, les vasoactifs même injectables, les prostacyclines (AMM pour la maladie de Buerger) ou l’hémodilution n’ont pas une efficacité démontrée. >> DOSSIER Dossier >> Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 Dossier 26 23/02/04 15:49 Page 26 DOSSIER >> DOSSIER >> L’hyperbarie a quelques indications, mais elle est peu disponible. Ces traitements ne doivent en aucun cas retarder l’heure de l’amputation si cette dernière s’avère inéluctable. Il faut, en effet, opérer les patients quand ils sont encore en bon état général. Une amputation peut s’imposer devant des lésions évoluées et putrides, une douleur difficile à maîtriser, une aggravation rapide des lésions ou de l’état général. Une consultation auprès d’un médecin podologue doit être programmée dès la cicatrisation obtenue permettant un bilan des deux pieds pour adapter le chaussage (orthèses/ chaussures). Le suivi régulier des patients en podologie est indispensable pour vérifier la bonne adaptation des orthèses plantaires et chaussures orthopédiques prescrites et les faire modifier ou renouveler si nécessaire. Pratique infirmière Devant une plaie du pied chez un patient diabétique, outre le contrôle du suivi des traitements, le rôle infirmier consiste à : – s’enquérir du statut vaccinal du patient (tétanos), – préférer une détersion “chimique” adaptée si une composante artéritique est présente, – en cas d’hyperappui, éviter les semelles avec un vide, préférer un coussinet, – mettre les plaies plantaires en décharge (Barouk, Sanital, béquilles). De même, pour les escarres talonnières, préconiser des dispositifs nocturnes. Pour les plaies d’autres localisations, supprimer les frottements, – inspecter soigneusement les chaussures et donner des conseils d’achat, – s’enquérir de la “technique” de la coupe des ongles, – nettoyer le pied avec du Dakin® ou du Septéal® avant le soin, et ensuite laver la plaie avec du sérum physiologique. Éviter les antibiotiques locaux (antibiothérapie par voie générale si infection locorégionale, signes généraux ou ostéite), – en cas de mycose sans fissure avec macération, utiliser une poudre type Mycoster, veiller à la désinfection de la chaussure, utiliser une serviette personnelle, effectuer le séchage avec un séchoir à cheveux position froid, éviter les produits qui colorent (éosine), – en cas de fissure et de macération, appliquer des compresses de Mélolin ou de Multidress pour sécher et favoriser la fermeture des fissures (après désinfection) et procéder ensuite comme précédemment. Il ne faut pas employer d’adhésif sur la peau (risque de plaie à l’ablation) mais utiliser une bande et mettre une compresse entre les orteils pour éviter la macération et protéger les orteils des ongles sous le pansement. Les pansements primaires sont découpés à la taille exacte de la lésion. Il faut éviter de mécher (allergie avec l’alcool iodoformé, traumatisme du bourgeon et mauvais drainage de la plaie). Éventuellement, si la plaie est très profonde, la tapisser sans “bourrer” avec de l’Urgosorb®. Des pulvérisations (plaies fibrineuses) avec de l’Hexomédine diluée de moitié avec du sérum physiologique pourront être utilisées. Rincer avec du sérum physiologique. ALP Les plaies de la main À ne jamais négliger Focus ... Chez un diabétique, le pansement doit être refait tous les jours. L’infirmière doit inspecter systématiquement les deux pieds et profiter du temps du soin pour éduquer le patient tant au niveau de l’hygiène que des situations dangereuses chez le neuropathique, le choix des chaussures ou des chaussettes, etc. Toute plaie de la main nécessite un avis médical, et le plus souvent une exploration chirurgicale, en raison du risque majeur d’une lésion d’éléments tels que les nerfs, les tendons ou les vaisseaux. Il ne faut pas mettre un garrot et ne jamais négliger une plaie de la main, même minime. E n règle générale, il faut nettoyer la plaie avec un antiseptique incolore (Hexomédine, Biseptine) ou au sérum physiologique, faire un pansement modérément compressif sur la plaie et surélever le membre si le saignement est abondant. Le blessé doit rester strictement à jeun (pas de boisson). Un médecin doit être consulté et, si c’est grave, le centre SOS Main. Plaie franche Il faut laver la plaie sous le robinet d’eau puis savonner les deux mains au Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 savon liquide. Mettre un pansement (ou à défaut une serviette propre) et garder la main en l’air. Prendre contact et gagner un centre d’urgence. Brûlure Pour une brûlure chimique ou thermique, mettre sous l’eau courante 15 mn. Ne pas mettre de produit inconnu sur la brûlure. Mettre un pansement (ou à défaut une serviette propre) et garder la main en l’air. Prendre contact avec le “15” si la surface corporelle totale brûlée est importante, ou directement avec un centre d’urgence si elle est peu importante. Amputation complète Ne jamais mettre les fragments sectionnés directement en contact avec la glace. C’est la règle fondamentale. ✓ Rassembler tous les fragments sectionnés dans une compresse et les placer dans un sac en plastique étanche. ✓ Fermer le sac et le poser dans une boîte contenant de la glace. Le sac fermé doit flotter sur l’eau glacée comme une bouée. ✓ Envelopper l’extrémité amputée dans un pansement compressif. Surélever la main. Ne pas poser de garrot. ✓ Ne jamais jeter un fragment qui paraît détruit. Le chirurgien peut utili- 23/02/04 15:49 Page 27 PLAIES ET CICATRISATION ✓ Poser un sac plastique étanche contenant de l’eau et de la glace autour de la main. ✓ Soulager la main en l’immobilisant sur une attelle. 27 Si l’animal mordant est domestique, essayer d’identifier ou de connaître ses origines pour vérifier avec le Centre Pasteur les vaccinations adéquates. Chez le jeune enfant En cas de fracture © Alix/Phanie ser certains composants (nerf, os, tendon) qui sont intacts ; c’est le principe du “doigt-banque”. Amputation incomplète ✓ Envelopper la partie blessée dans un pansement compressif. ✓ Immobiliser la main ou le segment fracturé sur un support rigide sans contraintes. ✓ Garder la main ou le membre supérieur en position surélevée. ✓ Faire rapidement une radiographie et prendre contact avec le service de garde. Interdiction de lui donner à boire ou à manger. D’abord, laver la plaie sous le robinet d’eau puis savonner les deux mains au savon liquide. Mettre un pansement (ou à défaut une serviette propre) et garder la main en l’air. Prendre contact et gagner un centre d’urgence. S’il souffre beaucoup, lui administrer un suppositoire de paracétamol. Après une morsure D’abord laver la plaie sous le robinet d’eau puis savonner les deux mains au savon liquide. Mettre un pansement (ou à défaut une serviette propre) et garder la main en l’air. Prendre contact et gagner un centre d’urgence. ALP Pour en savoir plus sur l’urgence SOS Main : http://www.institut-main.fr/ www.clinique-victorhugo.fr/institut Les brûlures Quel degré d’urgence ? Quel soin ? La grande brûlure constitue la deuxième cause d’accidents mortels en France. Si le phénomène est limité quant au nombre de personnes atteintes, il n’en est pas moins catastrophique sur le plan humain, et particulièrement lourd sur le plan de la prise en charge. Chaque année, en France, se produisent 400 à 500 000 brûlures. P armi les brûlures, 150 à 200 000 sont invalidantes, 15 à 20 000 nécessitent une hospitalisation. Concernant le nombre de brûlures annuelles, la répartition selon les zones atteintes n’est pas homogène : les plus touchées sont d’abord les mains (50 % des atteintes), puis viennent la tête et le cou (35 %). La cause de la lésion diffère également en fonction de l’âge du patient. Une brûlure est caractérisée par son étendue et sa profondeur. L’origine de la brûlure nécessite également une prise en charge spécifique. ✓ La brûlure thermique est provoquée par la chaleur, qui induit une destruction des protéines, des thromboses capillaires, une nécrose tissulaire. La profondeur de la lésion dépend de l’intensité de la chaleur et de la durée de contact avec la source thermique. ✓ La brûlure électrique est provoquée par l’électricité, qui induit des thromboses dans les artérioles (et parfois dans les gros vaisseaux), une ischémie et une nécrose tissulaire. La lésion est due au passage d’un courant à travers le corps : zone d’entrée/sortie, et sa sévérité dépend du type et de la quantité d’énergie. ✓ La brûlure chimique provoque des lésions occasionnées par une destruction directe des protéines tissulaires par des produits chimiques. La profondeur de la lésion varie suivant la nature du produit et la durée du contact avec la peau. Il est difficile d’apprécier la profondeur de la lésion pendant les 8/10 premiers jours, car la nature des produits n’est pas toujours certaine, ceux-ci pouvant avoir des effets toxiques systémiques. >> DOSSIER Dossier Que faire devant une brûlure thermique ? Il faut refroidir immédiatement la brûlure, tout simplement avec de l’eau du robinet, laissant celui-ci couler sur les lésions pendant 4 à 5 minutes. Ensuite, on doit évaluer le degré de l’atteinte : selon sa profondeur, s’il y a présence d’une phlyctène signifiant une atteinte du derme, les lésions sont généralement très douloureuses. Sur la brûlure refroidie, il convient d’appliquer une pommade calmante (des gels réfrigérants et antalgiques) une crème grasse ou un tulle gras, puis la couvrir d’une compresse ; on peut encore appliquer des pansements hydrocolloïdes. La guérison est obtenue en 15 jours en cas d’atteinte superficielle, elle est plus longue (3 semaines), avec un risque plus important de chéloïde >> Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 23/02/04 28 15:49 Page 28 DOSSIER >> DOSSIER L’étendue des brûlures >> Focus ... Les brûlures étendues affectant plus de 10 % de la surface corporelle exigent une réanimation par voie intraveineuse. Les brûlures circonscrites affectant moins de 10 % de la surface corporelle relèvent d’un traitement ambulatoire. Elle est exprimée en pourcentage de la surface corporelle, à l’aide : – d’abaques ; – de la règle des 9 % : 9 % pour la tête ; 9 % pour chaque bras ;18 % pour la face antérieure du tronc, 18 % pour la face postérieure ; 18 % pour chaque jambe ; 1 % pour le cou, le périnée et les organes génitaux. cicatricielle, si le degré est plus profond. En revanche, en cas de troisième degré, l’atteinte importante de la zone et des nerfs fait que la partie brûlée est devenue grise, insensible, parfois blanchâtre. Le personnel soignant doit immédiatement en apprécier les éléments de gravité, à savoir l’étendue de la brûlure. De même, les taux de la règle des 9, valables chez l’adulte, sont différents de ceux existant chez l’enfant et ne tiennent également pas compte du degré de la brûlure, d’où la nécessité d’établir une compilation des deux : c’est le score UBS (unité de brûlure standard). L’UBS est le pourcentage de surface brûlée totale + 3 X (% de surface brûlée au 3e degré) avec un maximum de 400 UBS. Un score de 50 UBS caractérise une situation grave à partir de laquelle une admission en centre spécialisé est indispensable. Un score de 100 UBS est très grave. Au-delà de 200 UBS, le pronostic vital est en jeu. Pour tenir compte de l’âge, il existe l’indice de Baux, qui se calcule ainsi : I = (âge en années) + (% de surface brûlée). Un I supérieur à 75 est de mauvais pronostic. L’évaluation de la brûlure établie, l’infirmière doit immédiatement détecter d’éventuels signes de gravité, tels qu’une détresse respiratoire. Il faut alors intuber et ventiler en position demi-assise au ballon puis au respirateur (penser à éliminer un pneumothorax par effet de blast). Elle recherche également des troubles de la conscience comme un collapsus : il faut dans ce cas placer deux voies d’abord et passer une perfusion Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 En bref ... La profondeur des brûlures ✓ Premier degré : coup de soleil : destruction de l’épiderme : l’épiderme se régénère sans cicatrice dans les 8 jours. ✓ Deuxième degré superficiel avec lésion du derme superficiel : destruction de l’épiderme et du derme superficiel ; destruction partielle de la couche basale ondulée ; cicatrisation spontanée : la plaie est érythémateuse, humide, la sensibilité à la douleur et à la pression est intacte, la peau guérie est moins pigmentée que le tissu normal. ✓ Deuxième degré intermédiaire avec atteinte partielle profonde du derme : destruction de l’épiderme, du derme intermédiaire et de toute la couche basale ondulée ; des îlots intacts de la couche basale subsistent autour des annexes de la peau : la plaie est blanche, souple ; la sensibilité à la pression est intacte, mais pas la sensibilité à la douleur. La guérison peut se faire spontanément en moins de trois semaines si les îlots de la couche basale sont en nombre suffisant (par exemple : brûlure du cuir chevelu ou de la face). ✓ Troisième degré ou brûlure de toute l’épaisseur de la peau : la peau est totalement détruite, la lésion peut atteindre le tissu souscutané (muscle ou os) : la plaie est brun jaunâtre, sèche et dure, sans sensibilité à la douleur ou à la pression. (Ringer lactate). Si les brûlures atteignent les voies génito-urinaires, il faut sonder le patient. En cas de brûlure par liquide chaud, il faut ôter les vêtements en coton ; en revanche, il faut laisser en place ceux composés de matières synthétiques. Il faut penser aussi à bien vérifier les vaccinations, notamment l’antitétanique. Le bilan est fait après un déshabillage total du patient, du moins de ce qui n’adhère pas à la peau. Il comprend le calcul des différents indices. Il ne faut pas omettre de vérifier l’état des voies aériennes supérieures et des tympans, mais on doit aussi chercher les atteintes circulaires des membres avec risque de nécrose de ceux-ci par compression. Enfin, il faut rechercher des lésions associées, comme une hémorragie. – une couverture à l’aide d’un pansement hydrocolloïde ; – un pansement stérile isolant doit être appliqué à chaque doigt, chaque orteil étant mis en position de fonction ; – ne pas percer les phlyctènes ; – ne pas utiliser de produits camphrés (risque de convulsions). Lorsque la brûlure touche des plis de flexion, placer là aussi les membres en position de fonction avant de les bander. ✓ Si l’état est grave, l’infirmière doit : – installer deux grosses voies veineuses en zone saine si possible ; – passer un remplissage vasculaire, même si aucun signe de collapsus n’existe ; – faire une sédation par cette voie ; – en cas de signes importants de détresse, l’anesthésie peut être indispensable. >> Traitement Au terme du bilan, le personnel soignant a pu déterminer le degré d’urgence à la prise en charge. ✓ Si l’état n’est pas grave, on doit respecter quelques règles comprenant : – une asepsie parfaite utilisant des gants, compresses, champs stériles ; – une aspersion de la zone atteinte avec de l’eau ; © Burger-HIA Percy/Phanie Dossier Dossier 23/02/04 15:49 Page 29 PUB > 23/02/04 30 15:49 Page 30 DOSSIER >> DOSSIER >> Des incisions de décharge et une antibiothérapie s’avèrent nécessaires en cas de brûlure profonde, souillée, ou de fractures ouvertes. La brûlure due à un produit caustique Aux urgences, l’IAO (infirmière d’accueil et d’orientation), par son interrogatoire, va rechercher, interroger le malade et son entourage et noter : – le type de caustique, sa forme, sa concentration ; – l’heure d’ingestion, la quantité absorbée ; – l’état du patient, ses antécédents médicaux. Tous ces éléments réunis, elle recherche les stigmates de l’atteinte caustique, telles une brûlure locale au niveau de la bouche et des lèvres, voire du cou ou du thorax par coulée caustique, ou une lésion oculaire. Elle apprécie de même la présence d’un état de choc, d’une détresse respira- toire, d’un encombrement bronchique, l’existence d’une défense à la palpation abdominale. Dans le cadre du bilan d’extension seront pratiqués : – un ECG avec une recherche de l’allongement du segment QT qui signe une hypocalcémie, des troubles du rythme et de l’excitabilité , – une saturation en O2, qui peut être normale ou abaissée ; – une formule sanguine, une glycémie. L’état du patient peut être considéré comme grave si on note la présence de signes abdominaux mais aussi, lorsque l’ingestion de produits a été massive, qu’un long délai s’est écoulé depuis l’accident. En ce cas, quelle attitude adopter ? ✓ En cas de dysphonie avec signe d’atteinte laryngée : traitement au Solumédrol. ✓ En cas de collapsus : pose de deux voies veineuses et remplissage par colloïde (pas de cathéter jugulaire au cas où une intervention serait nécessaire). © Burger-HIA Percy/Phanie Dossier ✓ En cas d’œdème glottique, réanimation respiratoire et intubation, si besoin ventilation assistée. Si l’état du patient n’est pas inquiétant, il suffit de pratiquer : – un nettoyage de la bouche par essuyage ; – un lavage oculaire à l’eau ; – la pose d’une voie d’abord veineuse avec un remplissage. ✓ Attention ! En cas d’absorption de caustique : – ne pas faire vomir, – ne pas donner de “supposé antidote”, – ne pas mettre de sonde gastrique, – ne pas faire de lavage gastrique. Jacques Bidart Les escarres Ce n’est pas une fatalité Focus ... Selon les recommandations de l’ANAES : “L’acte chirurgical doit être encadré d’une préparation médicale et de soins postopératoires particulièrement rigoureux. Ces soins portent sur la surveillance de l’état cutané local, l’aspect de la plaie et des sutures, une mise en décharge en utilisant un support, un équilibre nutritionnel et hydro-électrolytique.” L’escarre est souvent évitable. Elle se doit d’être prévenue au mieux, sinon combattue, afin d’éviter les nombreuses complications au minimum handicapantes, douloureuses, voire présentant un risque létal. Il convient pour ce faire de bien connaître ses caractéristiques ainsi que les facteurs de risque de son déclenchement. S elon la définition retenue de l’escarre, la prévalence de l’affection tourne autour de 8 % de la population française hospitalisée, avec une nette augmentation en cas de maladie neurologique sousjacente. À son stade initial, il s’agit d’un simple érythème qui blanchit à la pression et disparaît spontanément sans séquelle au bout de 24 heures. Au stade II, la rougeur ne disparaît plus à la levée de la pression, on note un œdème, une induration localisés. Au stade III, est notée une perte de substance touchant essentiellement l’épiderme et légèrement le derme, l’aspect réalisé étant celui d’une simple érosion, d’une ulcération Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 superficielle, ou d’une phlyctène. Au stade suivant (IV), le décollement périphérique s’accompagne d’une perte de substance comprenant le tissu sous-cutané. Au dernier stade (V), la perte touche les os, les articulations, les muscles ou les tendons. À chaque stade, doivent être précisées la situation, l’étendue des lésions, leur profondeur, les caractéristiques de la nécrose sèche ou humide, la nature des tissus et l’existence de signes infectieux locaux. Au terme de ce bilan effectué conjointement par l’infirmière et le médecin, l’escarre est classée en accidentelle, consécutive à un épisode de mobilité réduite réversible, neurolo- gique lorsqu’une pathologie neurologique sous-jacente existe, ou multifactorielle, lorsque plusieurs facteurs s’imbriquent. Mieux comprendre les phénomènes de déclenchement de la plaie cutanée permet d’en prévenir l’apparition et d’en apprécier les facteurs de risque de déclenchement. Physiopathologie Se produisant préférentiellement à un point de pression du corps, l’escarre est due à plusieurs mécanismes. Le premier est la simple pression qui, en interrompant la microcirculation, cause l’escarre. La deuxième cause est le cisaillement. Lorsque le corps glisse vers le bas, il provoque un glissement des couches cutanées les unes sur les autres. Ce phénomène est aggravé par l’humidité (incontinence urinaire, transpiration excessive), mais aussi par la housse du matelas ou le port de vêtements trop serrés. Le second mécanisme à éviter est le frottement tel que celui provo- 23/02/04 15:49 Page 31 PLAIES ET CICATRISATION qué par la mobilisation pour les soins (surtout dans les régions des coudes, du sacrum, des talons). Il provoque une abrasion épidermo-dermique. Enfin, l’étirement est responsable de fissures, par exemple au niveau du pli interfessier. Tous ces phénomènes mécaniques sont aggravés par l’existence de facteurs de risque locaux ou généraux. L’immobilisation prolongée est un facteur de risque important. Autre facteur, la dénutrition, fréquente chez la personne âgée, doit être systématiquement dépistée, ne serait-ce que par le dosage de l’albuminémie, alors bas. Elle entraîne une déshydratation, une cachexie et donc une souffrance tissulaire vulnérabilisant les zones exposées. L’humidité, par exemple, celle résultant d’une incontinence, par la macération qu’elle provoque, favorise également la lésion de la peau qui, en vieillissant, devient plus vulnérable. La vulnérabilité est d’autant plus aggravée par l’existence sous-jacente d’une affection neurologique. En effet, une para- ou une tétraplégie diminue, ou fait disparaître, toute sensibilité cutanée, tout sens de la douleur, toute capacité à réagir. Le patient, ne sentant pas ou peu, ne souffrant pas, ne signale pas de symptômes annonciateurs de lésions. Instrument de mesure du risque L’instrument de mesure du risque d’escarre de Braden est traduit de l’anglais par l’ANAES. ✓ Perception sensorielle C’est la capacité à répondre de manière adaptée à l’inconfort provoqué par la pression. 1. Complètement limité : aucune réaction (plainte, action) à la douleur, due à une diminution de la conscience ou aux effets de sédatifs OU incapacité à sentir la douleur sur presque toute la surface du corps. 2. Très limité : répond seulement à la douleur. Ne peut communiquer son inconfort que par des plaintes ou de l’agitation OU une altération de la sensibilité qui limite la capacité à sentir la douleur ou l’inconfort sur la moitié du corps. 3. Légèrement diminué : répond aux commandes verbales, mais ne peut pas toujours communiquer son inconfort ou son besoin d’être tourné OU a une sensibilité diminuée qui limite sa capacité à sentir la douleur ou l’inconfort à l’un des deux membres inférieurs ou aux deux. 4. Aucune diminution : répond aux commandes verbales. N’a aucun déficit sensoriel qui limite sa capacité à sentir et à exprimer sa douleur et son inconfort. ✓ Humidité Le degré d’humidité auquel est exposée la peau est ainsi calculé. 1. Constamment mouillé : la peau est presque continuellement en contact avec la transpiration, l’urine, etc. L’humidité de la peau est observée à chaque fois que le patient est tourné ou mobilisé. 2. Humide : la peau est souvent mais pas toujours humide. La literie doit être changée au moins une fois par équipe. 3. Humidité occasionnelle : la peau est occasionnellement humide, un changement de la literie est nécessaire environ une fois par jour. 4. Rarement humide : la peau est généralement sèche ; la literie est changée selon les habitudes de l’équipe. ✓ Activité C’est le calcul du degré d’activité physique. 1. Alité : confiné au lit. 2. Au fauteuil : capacité à marcher très limitée ou inexistante. Ne peut supporter son propre poids et/ou doit être aidé au fauteuil ou fauteuil roulant. 3. Marche occasionnellement : marche occasionnellement durant la journée mais sur de petites distances, avec ou sans aide. Passe la grande majorité du temps au lit ou au fauteuil. 4. Marche fréquemment : marche en dehors de sa chambre au moins deux fois par jour et dans sa chambre au moins une fois toutes les deux heures durant la journée. ✓ Mobilité C’est la capacité à changer et à contrôler la position du corps. 1. Complètement immobile : ne peut effectuer le moindre changement de position du corps ou de ses extrémités sans aide. 2. Très limité : effectue occasionnellement de légers changements de position du corps et de ses extrémités, mais est incapable d’effectuer de manière autonome de fréquents et importants changements de position. 3. Légèrement limité : effectue seul de fréquents petits changements de position du corps et de ses extrémités. 4. Aucune limitation : effectue des changements de position majeurs et fréquents sans aide. ✓ Nutrition Quelles sont les habitudes alimentaires ? 1. Très pauvres : ne mange jamais un repas complet. Mange rarement plus du tiers des aliments proposés. Mange deux rations de protéines, ou moins, par jour (viande ou produits laitiers). Boit peu. Ne prend pas de suppléments alimentaires liquides OU est à jeun et/ou est hydraté par voie orale ou intraveineuse depuis plus de cinq jours. 2. Probablement inadéquates : mange rarement un repas complet et mange en général seulement la moitié des aliments proposés. Prend seulement trois rations de viande ou de produits laitiers par jour. Peut prendre occasionnellement un supplément diététique OU reçoit moins que la quantité optimale requise par un régime liquide ou par sonde. 3. Adéquates : mange plus de la moitié des repas. Mange quatre rations de protéines (viande, produits laitiers) par jour. Refuse occasionnellement un repas, mais prend généralement un supplément alimentaire s’il est proposé OU est alimenté par sonde ou nutrition parentérale, adaptée à la plupart de ses besoins nutritionnels. 4. Excellentes : mange presque la totalité de chaque repas. Ne refuse jamais un repas. Prend habituellement au moins quatre rations de viande ou de produits laitiers par jour. Mange occasionnellement entre les repas. Ne requiert aucun supplément alimentaire. ✓ Friction et cisaillement 1. Problème : requiert une assistance modérée à complète pour se 31 >> DOSSIER Dossier >> Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 23/02/04 32 15:49 Page 32 DOSSIER >> DOSSIER >> mobiliser. Se relever complètement dans le lit sans glisser sur les draps est impossible. Glisse fréquemment dans le lit ou le fauteuil, nécessite de fréquents repositionnements avec un maximum d’aide. Spasticité, contractures ou agitation provoquent presque constamment des frictions. 2. Problème potentiel : se mobilise difficilement ou requiert un minimum d’aide pour le faire. Durant le transfert, la peau glisse contre les draps, la chaise, les contentions ou autres appareillages. Garde la plupart du temps une relative bonne position au fauteuil ou au lit, mais glisse occasionnellement vers le bas. 3. Aucun problème apparent : se mobilise seul au lit et au fauteuil et a suffisamment de force musculaire pour se soulever complètement durant le transfert. Garde en tout temps une bonne position au lit et au fauteuil. ✓ Score total Un score total de 23 points est possible. Plus le score est bas (15 points ou moins), plus l’individu a de risques de développer une escarre. L’évaluation du patient étant établie et le bilan de risque défini, il convient d’adopter une stratégie préventive pour le personnel soignant. Les mesures générales de prévention Focus ... Pour mieux établir le bilan de la situation du patient, l’équipe soignante peut s’aider d’échelles d’évaluation. Mais un examen attentif journalier de tout le corps est le premier soin de l’escarre. D’après les recommandations de l’ANAES : “La mise en place des mesures générales de prévention commence dès l’identification des facteurs de risque. Elle s’applique à tout patient dont l’état cutané est intact mais estimé à risque, et vise à éviter la survenue de nouvelles escarres chez les patients déjà porteurs d’escarre. Elle concerne l’ensemble des professionnels de santé en contact avec le patient. Les mesures de prévention sont les suivantes : ✓ Identifier les facteurs de risque au moyen du jugement clinique associé à l’utilisation d’une échelle validée d’identification des facteurs de risque. L’élaboration d’une stratégie de prévention adaptée à chaque patient découle de l’évaluation du risque, réalisée dès le premier contact avec le patient. Si la fréquence de rééva- Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 luation du risque n’est pas bien établie, il est néanmoins recommandé de procéder à une nouvelle évaluation à chaque changement d’état du patient. Les soignants doivent être entraînés à la reconnaissance des facteurs de risque et formés à l’utilisation d’une échelle d’identification du risque. ✓ Diminuer la pression en évitant les appuis prolongés par la mobilisation, la mise au fauteuil, la verticalisation et la reprise de la marche précoces. Des changements de position doivent être planifiés toutes les 2 à 3 heures, voire à une fréquence plus élevée, et les phénomènes de cisaillement et de frottement doivent être évités par une installation et une manutention adéquates du patient. Le décubitus latéral oblique à 30 ° par rapport au plan du lit est à privilégier car il réduit le risque d’escarre trochantérienne. ✓ Utiliser des supports (matelas, surmatelas, coussins de siège) adaptés au patient et à son environnement y compris sur les tables de blocs opératoires, les lits de salles de surveillance postinterventionnelle et en postopératoire. ✓ Observer de manière régulière l’état cutané et les zones à risque (au moins quotidiennement, à chaque changement de position et lors des soins d’hygiène) afin de détecter précocement une altération cutanée. L’observation cutanée doit être associée à une palpation de la peau à la recherche d’une induration ou d’une chaleur, en particulier pour les peaux pigmentées. ✓ Maintenir l’hygiène de la peau et éviter la macération par une toilette quotidienne et renouvelée si nécessaire. Le massage et la friction des zones à risque sont à proscrire puisqu’ils diminuent le débit microcirculatoire moyen. Les massages, frictions, applications de glaçons et d’air chaud sont interdits. ✓ Assurer un équilibre nutritionnel en évaluant quantitativement les prises alimentaires. L’utilité d’une prise en charge nutritionnelle spécifique a été insuffisamment évaluée. ✓ Favoriser la participation du patient et de son entourage à la prévention des escarres par une information et des actions éducatives ciblées en fonction du caractère temporaire ou © Raguet/Phanie Dossier permanent du risque d’escarre (autosurveillance, autosoulèvement). Une transcription des facteurs de risque, des mesures de prévention mises en œuvre et de l’observation de l’état cutané dans le dossier du patient est utile à la continuité des soins. Une démarche d’amélioration de la qualité est nécessaire à l’appropriation des mesures de prévention, quel que soit leur lieu de mise en œuvre.” Au stade thérapeutique Un important distinguo thérapeutique est à faire. Il convient, en effet, de distinguer la surinfection à combattre de la colonisation bactérienne à respecter. Quasi constante dans les plaies chroniques, cette dernière est foncièrement utile à la cicatrisation et doit être favorisée par un nettoyage et une détersion soigneux des tissus nécrotiques. En revanche, l’infection d’escarre se caractérise par la présence de deux au moins des symptômes suivants : rougeur, douleur ou œdème des bords de la plaie. La confirmation est apportée par l’isolement du germe à la culture du liquide obtenu par aspiration ou biopsie du bord de la plaie. L’intérêt des antibiotiques ou des antiseptiques locaux en l’absence de diagnostic d’infection d’escarre n’a pas été démontré. Le traitement chirurgical est nécessaire en cas de nécrose tissulaire importante, d’atteinte marquée, d’infection nécessitant une mise à plat de vaisseaux, de tendons, d’os, d’articulations. Il est contre-indiqué chez le sujet âgé porteur d’escarres plurifactorielles, ainsi qu’en l’absence de mise en place ou d’efficacité des mesures de prévention des récidives. JB (Selon les conférences de consensus de l’ANAES 1998/2001) 23/02/04 15:49 Page 33 PLAIES ET CICATRISATION 33 Les ulcères de jambes Être attentif à la douleur et à l’infection L’ ulcère ne doit pas être confondu avec l’ulcération, qui correspond à une plaie provenant d’une infection, d’un cancer, etc. Il débute par une lésion dont la surface est variable et, compte tenu des problèmes veineux et artériels, le processus de cicatrisation est ralenti. L’ulcère d’origine veineuse est généralement situé au niveau des deux malléoles (saillies osseuses de chaque côté de la cheville). Ce sont des ulcères relativement douloureux, associant des problèmes cutanés et s’accompagnant de suintement, généralement secondaire à une infection localisée. L’ulcère artériel, lui, est plus petit que l’ulcère veineux, et classiquement beaucoup plus douloureux. Les ulcères mixtes associent les deux variétés d’ulcères précédents. Traitement de la plaie Quel que soit l’ulcère, le traitement passe par plusieurs étapes. Après le nettoyage de la plaie, la deuxième étape consiste à faire proliférer les cellules (bourgeonnement). La troisième étape, l’épidermisation, dure parfois plusieurs mois. Quand la cicatrisation a du mal à se faire, il est parfois néces- saire d’avoir recours à la greffe de peau. Quand la cicatrisation est trop importante, son hypertrophie peut être diminuée par du nitrate d’argent. Parallèlement au traitement des lésions, celui du terrain est primordial. En effet, il faut agir, d’une part, sur l’amélioration de la circulation artérielle et veineuse par le port de bande élastique ou de bas de contention et, d’autre part, éliminer les facteurs favorisants (équilibre d’un diabète, suppression de l’alcool et du tabac, diminution de l’apport de graisses alimentaires). Le débridement et le nettoyage sont des actes particulièrement importants dans le soin des ulcères de jambe. Le type, la quantité et le siège des tissus nécrotiques, ainsi que la profondeur de la lésion ulcéreuse, l’abondance de l’exsudat, l’état général du patient déterminent les modalités de débridement. Il convient de distinguer l’ablation des éléments superficiels, c’est-à-dire des tissus épidermiques ou dermiques, de celle qui intéresse les tissus nécrotiques sous-cutanés situés en profondeur. En effet, la procédure à appliquer est différente et il en est de même de l’évaluation des résultats. Traitement ambulatoire de l’ulcère de jambe Traitement local Traitement systémique – Débridement, – Nettoyage de la plaie, – Contrôle bactériologique, – Cicatrisation en milieu humide, – Pansements biologiques, – Contention veineuse, – Rééducation à visée vasculaire par des exercices adaptés. – Intervention relationnelle, – En cas de thrombophilie : traitement anticoagulant, – En cas d’artériopathie oblitérante : minimisation des facteurs de risque, – Correction des troubles nutritionnels, – Traitement antalgique. © Phanie L’ulcère de jambe est une perte localisée de peau sur la jambe, généralement située au niveau d’une des deux malléoles. Ce type d’ulcère survient généralement chez des personnes présentant une insuffisance veineuse, mais également après la survenue d’une phlébite. Le débridement de la plaie peut faire appel à une détersion mécanique, autolytique, enzymatique ou chirurgicale. ✓ Le débridement mécanique fait appel, entre autres, à l’application de pansements humidifiants ou secs, à l’hydrothérapie (l’irrigation au sérum physiologique). ✓ La détersion autolytique peut être favorisée et renforcée par le maintien d’un microclimat humide au moyen de pansements occlusifs. ✓ Le débridement enzymatique repose sur l’application d’enzymes protéolytiques au niveau de la plaie. Ces méthodes peuvent être utilisées en vue d’un débridement superficiel car l’ablation des tissus nécrotiques situés en profondeur nécessite, elle, une intervention chirurgicale. Le débridement des lésions ulcéreuses est nécessaire car il diminue le risque d’apparition d’une surinfection. Cependant, le débridement manuel des tissus nécrotiques, ainsi que des dépôts fibrineux particulièrement adhérents, peut être extrêmement désagréable et douloureux pour le patient, notamment lorsqu’il existe une composante étiologique artérielle. Néanmoins, cette technique présente les avantages d’un résultat immédiat et d’une stimulation des mécanismes de cicatrisation. >> DOSSIER Dossier >> Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 Dossier 23/02/04 34 15:49 Page 34 DOSSIER >> DOSSIER Avant le débridement... >> Focus ... La lésion ulcéreuse doit être nettoyée de façon exhaustive, rapidement et aussi soigneusement que possible. Comme toujours dans le soin des plaies, quelles qu’elles soient, la vitesse de l’épithélialisation dépend de l’âge du patient, de la pathologie sousjacente et de la qualité des soins prodigués. Les douleurs occasionnées par le débridement manuel au moyen d’un scalpel et d’une pince peuvent être atténuées en appliquant des compresses imbibées de lidocaïne à 2 % ou d’une pommade pour anesthésie locale en sachant que le délai d’action est d’une heure sous un pansement occlusif. Cette préparation peut être effectuée par le patient luimême à son domicile ou en consultation par le personnel paramédical. Après l’installation de l’anesthésie locale, la plaie peut être débridée manuellement. Contrôle bactériologique Un état de santé satisfaisant ne signifie pas que l’organisme soit microbiologiquement stérile. En effet, un équilibre délicat existe entre les mécanismes de résistance du patient et la flore bactérienne à laquelle il est constamment exposé. Si cet équilibre est stable, ses mécanismes de résistance peuvent vaincre la contamination de la plaie par les bactéries, car l’infection ne survient qu’à partir d’une densité bactérienne > 105 germes/g de tissu. Mais l’infection doit être traitée car elle inhibe différents mécanismes responsables de la cicatrisation. Néanmoins, la mise en évidence de germes au niveau de la plaie à partir de prélèvements sur écouvillon ne signe pas l’infection car toutes les plaies chroniques sont contaminées. L’infection n’apparaît que lorsque l’équilibre entre les mécanismes de résistance de l’hôte et la flore bactérienne penche en faveur de celle-ci. Les patients suivant un traitement médicamenteux ou encore souffrant d’un diabète ou d’une immunodéficience acquise sont particulièrement exposés. Comment se signale l’infection ? Un écoulement purulent, une chaleur, un érythème, un œdème locaux, sont des signes de diagnostic. Il en est de même d’une exacerbation des douleurs et de la constatation de signes généraux tels qu’une fièvre ou une hyperleucocytose. La numération bactérienne à partir de cultures de prélèvements tissulaires permet de distinguer la contamination Professions Santé Infirmier Infirmière N° 52 • janvier-février 2004 de l’infection bactérienne. Après avoir nettoyé la plaie, une biopsie tissulaire est pratiquée en vue d’une numération exacte des germes par gramme de tissu. Une densité microbienne supérieure à 100 000/g de tissu signe l’infection de la plaie et, pour la plupart des micro-organismes, un passage dans la circulation sanguine. Prés de 33 % des ulcères de jambe d’origine veineuse sont des plaies sévères, justiciables d’un pansement biologique. Les pansements biologiques et le traitement par les facteurs de croissance sont proscrits en cas d’infection de la plaie. Les pansements biologiques ne doivent pas être utilisés en cas d’exposition des structures osseuses ou tendineuses. Les pansements Le traitement local doit être hypoallergénique et prendre compte de l’existence d’une hypersensibilité. Plusieurs types de pansements conviennent aux ulcères de jambe, déterminés selon la sévérité et la chronicité (hydrocolloïdes, alginates, pansements biologiques, etc.). Les pansements doivent toujours recouvrir les berges de la plaie, ses bords se situant sur peau saine. Au cours de la phase exsudative, le type de pansement doit être adapté à la quantité d’exsudat sécrété par l’ulcère. D’une manière générale, le pouvoir d’absorption des hydrocolloïdes est adéquat vis-à-vis de la plupart des ulcères de jambe exsudatifs. En cas de suintement abondant, la préférence sera accordée aux alginates car l’abondance des exsudats conditionne la fréquence de renouvellement des pansements : quotidienne au début du traitement, la fréquence peut être espacée de trois à quatre jours. Au stade de la phase proliférante, le pansement peut être renouvelé une fois par semaine. Pendant la phase d’épithélialisation, caractérisée par des besoins en oxygène, il convient d’utiliser des pansements non occlusifs qui peuvent être laissés en place une semaine, sous réserve de signe clinique d’infection. Le rôle de la contention Le taux de cicatrisation sous contention est plus élevé qu’en l’absence de contention. En outre, la contention élastique accélère la cicatrisation. En fonction de l’étiologie de la lésion ulcéreuse, une contention élastique adéquate et la mobilisation active constituent la pierre angulaire de la phase initiale du traitement. La contention par des bandes peu extensibles ou des bandes en spires superposées est indiquée chez les patients ambulatoires. Les bandes peu extensibles ainsi que les bandes en couches superposées permettent d’obtenir une pression de travail élevée de sorte qu’en association avec la pompe musculaire, elles favorisent le retour veineux et donc la résorption des œdèmes au cours de l’insuffisance veineuse chronique. La contention doit être entreprise avec prudence en cas d’insuffisance cardiaque congestive chronique en évitant une augmentation excessive de la précharge. La contention élastique est contre-indiquée en cas d’insuffisance cardiaque congestive décompensée. Une contention jusqu’au niveau du genou peut être suffisante. ALP La prise en charge de la douleur Le bilan d’une plaie chronique doit toujours comporter un interrogatoire du patient concernant le niveau d’intensité et la fréquence des douleurs, ainsi que l’efficacité des différents traitements antalgiques. Les douleurs liées aux lésions ulcéreuses peuvent être soulagées et, dans certains cas, éliminées par une association appropriée de contention élastique et d’antalgiques. Chez la majorité des patients présentant un ulcère de jambe d’origine veineuse, les douleurs ulcéreuses sont d’intensité modérée à sévère. Les phénomènes douloureux entraînent fréquemment des troubles du sommeil. Les douleurs sévères ne traduisent pas nécessairement une artériopathie ou une infection, mais elles peuvent constituer un élément d’orientation vers de tels diagnostics.