Des tablettes d’argile aux tablettes numériques :
l’aventure du livre et de l’écrit
En quoi l’évolution des supports de l’écrit détermine-t-elle différents rapports à l’écrit ?
« On fait découvrir aux élèves la longue histoire des supports de l’écrit et on leur propose de
réfléchir aux relations qui, depuis les origines de l’écriture, ont existé entre un type de support
notamment le livre et des modalités de production et de réception des textes. »
L’apparition de l’écriture : quand ? où ? pourquoi ?
Les supports de l’écriture dans l’Antiquité : quel support pour quel usage et quelle pratique
de l’écriture ?
Du volumen au codex : quels changements sont induits par le passage du rouleau au
codex ?
Le livre médiéval : les lieux et les techniques du livre / le rapport au savoir / livre et pouvoir.
- Quels sont les lieux lon produit et conserve les livres au Moyen-âge ? Le savoir est-il
accessible ? Quelle évolution notable intervient à partir du XIIème siècle ?
- Quel rôle jouent les souverains en matière de production de livres à partir du XIIème siècle ?
- Lenluminure, une particularité du M.A : quappelle-t-on une enluminure ? quelle est sa
fonction ?
Bilan intermédiaire : en prenant appui sur le cours et vos recherches, expliquez en quoi lécriture a
été au cours de lAntiquité et du Moyen-âge un enjeu de pouvoir.
L’invention de l’imprimerie : la diffusion de l’esprit critique (16ème-18ème siècles)
Le livre à l’époque industrielle : le temps des démocratisations
Révolution numérique ? : Innovations et limites du support numérique
1/ LAntiquité : apparition de lécriture et variété des supports.
Naissance de l'écriture
Des foyers d'écriture s'allument peu à peu à la surface de la terre. Elle n'est que l'un des éléments d'une série
d'innovations au sein de sociétés qui se développent : invention de la roue, travail du métal, sédentarisation,
domestication des animaux, agriculture, naissance des villes, centralisation du pouvoir, architecture, sculpture. En
Mésopotamie et en Égypte, l'écriture naît presque simultanément vers 3300/3200 avant J.-C. fondant la civilisation
historique.
L'écriture est un système organisé et codifié qui emploie des signes à usage répété dans un contexte social et
symbolique. Au Proche-Orient, elle est inventée d'abord pour compter et désigner ce que l'on compte, pour un
usage commercial et pour la distribution de rations.
"La première écriture sert à noter la comptabilité, les noms propres, à cataloguer le monde et les
phénomènes naturels, la hiérarchie des titres et des professions du roi à l'artisan ; il faut attendre
plusieurs siècles pour qu'apparaissent les textes véritablement littéraires, la transmission orale étant
alors considérée comme la vraie tradition"
(Béatrice André-Salvini).
Diversité des supports de l'écrit
Les premiers supports de l'écrit sont l'argile, la pierre, l'os, le papyrus, le bois, le cuir, le métal, le
tissu. Utiliser d'abord comme support d'écriture ce dont on dispose facilement dans son environnement
proche est un invariant dans toutes les civilisations. C’est dans la pierre que les civilisations anciennes ont
gravé, pour l’éternité, leurs codes administratifs, tandis que des planchettes de bois ou des tablettes, brutes
ou enduites de stuc ou de cire, ont couramment été employées du IIIe millénaire avant J.-C. jusqu’au
XXe siècle pour l’apprentissage et les écrits utilitaires. Les matières précieuses, elles, qu’il s’agisse de l’or, de
la soie ou de l’ivoire, ont toujours été réservées aux dieux et aux princes.
Les vallées du Tigre et de l'Euphrate ne possèdent qu'une ressource naturelle : leur terre, dont la seule
richesse est le limon fertile déposé par l'eau des fleuves, domestiquée grâce à un réseau de canaux
d'irrigation. L'argile sert de matériau de construction, comme elle sert à fabriquer les ustensiles de la vie
quotidienne. Elle devint donc naturellement le matériau privilégié pour écrire. Malgré leur apparente
fragilité, conservées dans la terre ou, souvent, cuites par les incendies qui ont détruit les royaumes dont
elles constituaient les archives et les bibliothèques, les tablettes d'argile crue sont parvenues jusqu'à nous,
restituant la mémoire et l'histoire des civilisations antiques du Proche-Orient.
Plante répandue essentiellement dans le delta du Nil, le papyrus a fourni pendant longtemps, entre autres
usages aussi variés que l'alimentation, le vêtement, la confection de cordes et le calfatage de bateaux, le
support presque exclusif et en tout cas de loin majoritaire pour toutes sortes d'écritures en grec, latin,
araméen, démotique, copte et arabe. Vecteur presque exclusif de l'écrit et de ce fait objet commercial de
premier plan, À l'époque hellénistique et romaine, le papyrus est produit de façon presque industrielle en
Égypte afin de satisfaire les besoins du monde méditerranéen tout entier. Le sort du papyrus comme
support d'écriture est directement lié à la forme que revêt le livre pendant une bonne partie de l'Antiquité.
Si l'on excepte les écrits occasionnels couchés sur d'autres supports, l'Égypte ancienne, l'Antiquité classique
grecque et romaine ne connaissent que le rouleau, le texte est disposé en colonnes alignées
perpendiculairement à la longueur du rouleau. C'est sous cette forme que sont conservées, à Alexandrie par
exemple, les œuvres antiques, un rouleau de papyrus de taille moyenne pouvant contenir un ou deux livres
d'Homère, ou une œuvre tragique.
Les inscriptions dans la pierre sont quasiment universelles. Mieux que d’autres matériaux plus périssables, la
pierre a gardé trace des premiers signes d’écriture, mais surtout, elle a été choisie de volonté délibérée
chaque fois qu’on a voulu donner à l’écrit durée, solennité et publicité : matériau presque indestructible, la
pierre pérennise le message qu’elle porte. Aussi fut-elle le support de prédilection des textes fondateurs de
nombreuses civilisations, qu’ils émanent d’autorités religieuses ou politiques.
2/ Du volumen au codex.
Le parchemin
Le parchemin, peau animale traitée, est le support essentiel du livre du début de notre ère jusqu’au IXe siècle
au Proche-Orient, et durant tout le Moyen Âge en Occident. Sa fabrication à partir de peaux, le plus souvent
de mouton, de veau ou de chèvre, a été mise au point vers le IIe siècle avant J.-C. à Pergame (Asie Mineure)
pour remplacer le papyrus, alors monopole de l’Egypte. Le mot parchemin, en grec pergamênê, vient du
nom de la ville de Pergame (sur la côte est de l'actuelle Turquie). C'est le mot latin pergamena qui a donné
"parchemin" en français.
L'utilisation du parchemin entraîne un changement fondamental dans l’histoire du livre : le passage du
volumen au codex. Le codex est un mot latin qui désigne le livre formé de feuilles pliées et assemblées en
cahiers, et couvert d'une reliure tel que nous le connaissons. Il vient du mot caudex qui se réfère à la matière
"bois" du tronc d'arbre ou de la souche. Plus tard, le terme est employé pour les livres en papyrus ou en
parchemin utilisant ce format.
Le parchemin, en effet, matière solide, facile à plier, inscriptible des deux côtés, donne des feuillets que l’on
réunit et assemble en cahiers. Le codex ainsi formé contient beaucoup plus de textes que le rouleau antique
(volumen), peu à peu abandonné. Cette mutation, qui bouleverse les habitudes d’écriture et de lecture,
prend plusieurs siècles. Elle est impulsée par les chrétiens : la Bible est copiée sur codex dès le IIe siècle ;
mais les Romains et les Grecs continuent d’inscrire leurs comptes, contrats et notes diverses sur des
tablettes de bois recouvertes de cire et lisent les textes littéraires dans des rouleaux.
Le codex s’impose vraiment au IVe siècle dans l’Occident latin et au Ve siècle dans l’Empire byzantin.
Le codex : une révolution intellectuelle
Le codex présente de nombreux avantages : il permet de réunir une grande quantité d'écriture, il occupe
moins de place dans les bibliothèques que le papyrus et permet une organisation plus rationnelle du texte.
Enfin, il favorise le travail scolastique d'annotation. Grâce au codex, la page n'est plus comme sur le rouleau
un défilé continuel de colonnes, mais bien un espace délimité, une entité visuelle intellectuellement
autonome. Le codex permet au lecteur de garder une main libre pour écrire et donc annoter, commenter,
gloser le texte. Il lui offre une véritable architecture du texte, séquencée en pages, hiérarchisée en chapitres,
puis en paragraphes, aisément feuilletable grâce à un index. Il lui autorise également retours et avancées au
fil de sa curiosité ou des besoins de sa mémoire et fortifie son rapport au savoir.
3/ Le livre au Moyen-âge : .
On prend appui sur lexemple de la France
Les lieux du livre
Pendant le Haut Moyen-âge et la Période Romane, c’est-à-dire du VIIIe au XIIe siècle, les ateliers sont
essentiellement monastiques ou ecclésiastiques, on les trouve dans les abbayes et les églises cathédrales :
l’atelier de copie s’appelle scriptorium, dérivé du latin « scribere », écrire.
Jusqu’au XIIe siècle, les monastères et les écoles cathédrales sont au centre de l’histoire du livre. Ce ne sont
pas seulement des centres de réflexion spirituelle et de production intellectuelle, ce sont aussi des lieux de
production et de conservation des livres et des lieux d’enseignement avec les livres. Ces trois fonctions sont
représentées par trois lieux :
o un scriptorium, la pièce où on écrit les livres ;
o une bibliothèque ou plutôt un coffre à livres appelé armarium, ou une pièce qui s’appelle librairie (le
mot « bibliothèque » apparaît dans le sens que nous lui donnons aujourd'hui au début du XVIIe s.) ;
o une école.
Le XIIe siècle marque un tournant dans l’accès au savoir : tandis que les écoles monastiques déclinent, le
réseau des écoles cathédrales et canoniales s’étoffe. A côté de Laon, Reims et Chartres, le veloppement
des écoles parisiennes est spectaculaire. A Paris, on enseigne vers 1100 les arts libéraux et l’Ecriture à l’Ecole
Cathédrale, installée dans le cloître Notre-Dame. Dans la seconde moitié du XIIe siècle, les écoles
s’émancipent de la tutelle des abbayes et des cathédrales et les enseignants s’associent au sein d'universités
dont les statuts sont définis en 1215. Dans le même temps, l’administration royale s’installe définitivement à
Paris, devenue la capitale politique. Des ateliers laïques de production de livres se développent dans le
quartier Saint-Séverin, la rue Saint-Jacques et devant le parvis Notre-Dame.
Le livre et le pouvoir
C'est Charles V (1364-1380), fondateur de la librairie du Louvre, qui exerça l'action la plus concertée et la
plus durable en faveur des lettres françaises. Ce souverain sut s'entourer d'esprits éminents, qu'il employa à
mettre en français de grands textes philosophiques, théologiques, historiques, politiques et scientifiques,
dont il considérait la traduction comme une nécessité d'intérêt public. Charles V est le roi mécène et
bibliophile par excellence. Il ne se contente pas de perpétuer une tradition de mécénat artistique ou
intellectuel, il construit une véritable politique culturelle avec, en son cœur, les deux éléments
principaux que sont le développement de la Librairie royale et les traductions en français. Charles V
transfère sa bibliothèque elle porte alors le terme de librairie du Palais de la cité à la tour de la
Fauconnerie, à l’angle nord-ouest du Louvre où sont installés sur trois étages 900 volumes
Avec Charles V, la monarchie prend conscience de ses responsabilités dans le domaine intellectuel et
littéraire, et du bénéfice moral et politique qu'elle peut retirer de l'exercice de cette mission. L'exemple de
Charles V fut suivi par ses frères, Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, et Jean, duc de Berry. Au XVe siècle, le
prestige de l'écrit est tel que les princes ne se contentent plus de collectionner les manuscrits et
d'encourager les auteurs ou traducteurs en distribuant pensions et récompenses. Certains manient la plume
à leur tour, comme Charles d'Orléans, le duc poète, organisateur à la cour de Blois de tournois poétiques
auxquels
Lenluminure
La nature de l'enluminure, depuis le haut Moyen Âge, est double : illustrative mais aussi ornementale.
L'illustration apparaît dès l'Antiquité. Ce n'est qu'à une époque relativement tardive que le décor fait son
apparition en Occident dans le manuscrit, sous la forme de la lettre ornée, dont les plus anciens témoins
conservés ne remontent guère avant le VIe siècle. L'introduction de cet élément décoratif, au départ très
modeste, devait avoir une influence considérable sur l'aspect des mises en page. Les initiales enluminées
servent de repères pour mettre en valeur les diverses articulations du texte. Ainsi se mettent en place pour
une lecture plus aisée, livres, chapitres, paragraphes ou autres sections propres à l'ouvrage. Qu'elle soit
occupée par un décor historié s'inspirant du texte ou par des motifs purement ornementaux, l'initiale subit
au cours de l'époque médiévale de nombreuses métamorphoses liées à l'évolution des types d'écriture, des
styles, de la technique, et marquées par des étapes significatives. C'est ainsi qu'à partir de la seconde moitié
du XIIIe siècle, la lettre ornée s'est vue dotée de prolongements marginaux qui donnèrent naissance aux
bordures et aux encadrements végétaux et floraux, caractéristiques des manuscrits français de la fin du
Moyen Âge.
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