REVUE DE PRESSE
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La Lettre du Sénologue - n° 31 - janvier/février/mars 2006
férencier, ce qui relève du jugement méthodologique plutôt que
de la pertinence clinique. Cet article est méthodologique mais
montre combien la collaboration entre cliniciens et méthodolo-
gistes est importante pour interpréter les résultats. Cet élément est
d’autant plus net que l’on arrive à des taux élevés de survie
même avec les traitements de reférence et que l’effet thérapeu-
tique trouvé n’est pas toujours lié à la nouvelle drogue étudiée.
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E. Luporsi, Centre Alexis-Vautrin, Nancy
LA PAROXÉTINE (DÉROXAT®) EST UN TRAITEMENT
EFFICACE CONTRE LES BOUFFÉES DE CHALEUR
1. Stearns V, Slack R, Greep N et al. Paroxetine is an effec-
tive treatment for hot flashes: results from a prospective ran-
domized clinical trial. J Clin Oncol 2005;23:6919-30.
2. Jin Y, Stearns V, Ward B et al. CYP2D6 genotype, antide-
pressant use, and tamoxifen metabolism during adjuvant
breast cancer treatment. J Natl Cancer Inst 2005;97:30-9.
Résumé. Les résultats d’une étude randomisée en double
aveugle avec paroxétine contre placebo viennent d’être publiés
en octobre 2005 (1). La population étudiée concerne des
femmes ayant au moins deux bouffées vasomotrices par jour
depuis plus d’un mois. 279 femmes étaient éligibles et 151 ont
été randomisées dans un bras A avec 4 semaines de paroxétine
(10 ou 20 mg par jour) et 4 semaines de placebo et dans un
bras B avec 4 semaines de placebo et 4 semaines de paroxétine
(10 ou 20 mg par jour). La plupart était ménopausée, 80 %
d’entre elles avaient été traitées pour un cancer du sein, 60%
recevaient un traitement antiestrogénique.
Les patientes notaient sur un journal quotidien la fréquence et
l’intensité des bouffées vasomotrices.
La paroxétine a entraîné avec les deux posologies différentes
une diminution de la fréquence et de l’intensité des bouffées
vasomotrices (score combiné) : 40,6 % avec 10 mg par jour
versus 13, 7 % pour le placebo (p = 0,0006) et 52,7 % avec
20mg par jour versus 26,6 % pour le placebo (p = 0,002). La
diminution de la fréquence des bouffées est la même quelle que
soit la posologie (18,9 % avec 10 mg et 22,5 % avec 20 mg).
La qualité de vie, appréciée par plusieurs tests d’évaluation
(échelles et questionnaires validés) est similaire. L’améliora-
tion du sommeil est significative avec 10 mg de paroxétine par
rapport au placebo. Les nausées sont plus fréquentes avec 20 mg
qu’avec 10 mg.
Les trois quart des patientes ont préféré la paroxétine au pla-
cebo, 81% souhaitaient continuer le traitement avec la dose de
10 mg, contre 65 % avec la dose de 20 mg.
Ces résultats sont indépendants des caractéristiques des
patientes (âge, statut ménopausique, antécédent de THS, anté-
cédent de cancer du sein traité, traitement antiestrogénique,
niveau d’anxiété).
Les bouffées vasomotrices induites par l’arrêt du THS au
moment du diagnostic du cancer du sein ou provoquées par la
chimiothérapie et/ou l’hormonothérapie sont gênantes, parfois
invalidantes. La paroxétine est efficace à la dose de 10 mg par
jour, sans effet secondaire important contrairement à d’autres
inhibiteurs sélectifs de la sérotonine (venlafaxine, Effexor®) ou
inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (fluoxétine, Prozac®).
Commentaire. Le mécanisme d’action de la paroxétine est
mal connu. L’étude a porté sur une courte période, les auteurs
ne peuvent donc pas préciser le bénéfice éventuel d’un traite-
ment au long cours.
Les auteurs font la remarque, à juste titre, que la paroxétine est
un inhibiteur de l’enzyme CYP2D6 et qu’elle pourrait ainsi
inhiber la voie du métabolisme du tamoxifène vers l’endoxi-
fène (2) sachant qu’il n’a pas été rapporté dans la littérature de
corrélation directe entre la diminution de la concentration plas-
matique de l’endoxifène et la survie à long terme des patientes
avec un cancer du sein.
Les auteurs recommandent l’utilisation de la paroxétine à la
dose de 10 mg par jour pour les femmes qui souhaitent un trai-
tement non hormonal de leurs bouffées de chaleur, quelle que
soit leur étiologie.
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J.-M. Dilhuydy , Institut Bergonié, Bordeaux
ACCÉLÉRATION DES CYCLES POUR TRAITER UN CANCER
DU SEIN CHEZ DES PATIENTES À HAUT RISQUE
Nitz UA, Mohrmann S, Fischer J et al. Comparaison of
rapidly cycled tandem high-dose chemotherapy plus periphe-
ral blood-stem – cell support versus dose-dense conventional
chemotherapy for adjuvant treatment of high risk breast can-
cer: results of a multicentre phase III trial. Lancet 2005;3,
366(9501):1935-44.
Résumé. Il s’agit d’une étude de phase III chez des patientes à
haut risque (au moins 9 N+). Au cours de deux cycles accélé-
rés (toutes les deux semaines avec G-CSF), les patientes
étaient traitées par une association d’épirubicine et de cyclo-
phosphamide suivis par deux cycles de chimiothérapie à hautes
doses (épirubicine, cyclophosphamide et thiotepa + cellules
souches) ou quatre cycles identiques d’EC suivis par trois
cycles accélérés de cyclophosphamide, de méthothrexate et de
5FU. Ainsi 403 patientes furent randomisées. Le follow-up
médian est de 48,6 mois. La survie sans événement à 4 ans (en
intention de traiter) est de 60 % dans le bras haute dose versus
44 % dans le bras contrôle (p = 0,00069). La survie globale est
de 75 % versus 70 % (p = 0,02). Aucun décès toxique n’a été
rapporté.
Pour la première fois, une étude randomisée montre une amé-
lioration de la survie globlale des cancers du sein à haut risque,
par un traitement intensif avec greffe de cellules souches
hématopoïétique.
Commentaire. Cette étude allemande ravive donc l’intérêt
pour ce traitement.
Deux explications à cet avantage sont possibles : l’inclusion de
sujets à très haut risque avec en moyenne 17,6 N+ et, d’autre
part un protocole différent avec une accélération des cycles.
Un bémol à ces résultats : le protocole “contrôle” n’est pas un
vrai bras standard en Europe.
Sans conclure définitivement, les auteurs pensent que cette “stra-
tégie reste à approfondir”, malgré l’absence, dans ces protocoles,
de taxanes qui ont démontré leur intérêt en adjuvant, mais pas
pour les patientes avec fort envahissement ganglionnaire.
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A. Lesur, Centre Alexis-Vautrin, Nancy