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Revue de presse
MÉTA-ANALYSE DU GANGLION SENTINELLE (GS)
APRÈS CHIMIOTHÉRAPIE PREMIÈRE POUR CANCER
DU SEIN
Xing Y, Foy M, Cox DD et al. Meta-analysis of sentinel lymph
node biopsy after preoperative chemotherapy in patients with
breast cancer. Br J Surg 2005;2(Epub ahead of print).
Résumé. Les auteurs ont repris les études publiées depuis 1993
jusqu’en 2004 pour évaluer la fiabilité de la technique du ganglion
sentinelle (GS) après chimiothérapie à partir des banques de données Medline, Embase, Cancerlit et CTR de Cochrane Librairy.
Les critères pour retenir une étude étaient : un cancer du sein opérable (non opérable ou inflammatoire exclus), un GS fait après
chimiothérapie, suivi d’un curage systématique. La méthodologie
de la méta-analyse reprend les principes de l’équipe d’Oxford et
utilise des modèles statistiques bayesiens. Vingt et une études ont
été ainsi retenues (publiées entre 2000 et 2004) regroupant
1 273 patientes. Dix-neuf de ces études avaient un effectif inférieur à 100, une (NSABP B27), un effectif de 428. Le taux de
détection pour chaque étude varie de 72 à 100%, le taux global de
la méta-analyse est de 91 % (IC 95 % : 88-94). Ce taux ne varie
pas selon la technique utilisée : 92% pour la technique combinée
(quatre études, 151 patientes), 95 % pour l’isotope seul (quatre
études, 213 patientes), 93 % pour le bleu seul (deux études,
41 patientes). La sensibilité est de 88 % (IC 95 % : 84-94), la
valeur prédictive négative de 90 %, le taux de faux négatifs de
12%, l’efficacité de 94 %. Ces résultats sont comparés à ceux des
trois méta-analyses publiées pour le GS sans chimiothérapie préalable avec des résultats similaires (taux de faux négatifs : 8,4 %,
5,1%, 9%). Les auteurs concluent que la technique du GS pour
les patientes N0 après chimiothérapie première est fiable.
Commentaires. Une analyse intéressante à une époque où la
question n’est plus de savoir s’il on peut faire la technique du ganglion sentinelle, mais si l’on peut en élargir les indications au-delà
du “T1 N0 unifocal sans traitement préalable, tumeur en place”.
La méthodologie est extrêmement rigoureuse, mais l’acceptation
d’un taux de faux négatifs de 12% comme satisfaisant peut faire
bondir, surtout en France où nous sommes restés très frileux sur
les indications de cette technique par rapport aux autres pays.
Rappelons le taux de 9,8% de faux négatifs dans l’essai NSABP
B32 (GS et curage systématique versus curage si GS+) mais sans
utilisation de l’immuno-histochimie sur le ganglion, les modalités
d’étude histologique du GS ne sont pas non plus précisées dans
cette méta-analyse. Résultats encourageants certes pour un élargissement des indications du GS, les auteurs rappelant que 25% des
patientes sont N- après chimiothérapie première et pourraient donc
La Lettre du Sénologue - n° 31 - janvier/février/mars 2006
ainsi “échapper” à la morbidité du curage. Attendons cependant les
résultats de l’étude multicentrique française GANEA (GS après
chimiothérapie suivi d’un curage systématique avec inclusion
prévue de 200 patientes) avant de retenir cette indication du
GS dans notre pratique quotidienne.
■
S. Giard, Centre Oscar-Lambret, Lille
LES ANALYSES DE SOUS-GROUPES :
DES PROBLÈMES DE MÉTHODE
Schulz KF, Grimes DA. Multiplicity in randomised trials II:
subgroup and interim analyses. Lancet 2005;7-13,365(9471):
1657-61.
Résumé. Actuellement, de nombreux essais sont publiés avec
des analyses de sous-groupes, la première partie de l’article porte
sur ces analyses qui posent des problèmes sur le plan méthodologique, car elles sont peu puissantes. En effet, même si le “p” est
significatif, les intervalles de confiance sont larges et donc peu
précis. Les résultats ne sont donc pas pertinents cliniquement
pour modifier une attitude thérapeutique, ne pouvant servir que
d’hypothèse pour un futur essai. Il ne faut pas oublier que le
risque d’erreur alpha à 0,05 est important à prendre en compte,
car ces analyses de sous-groupes font courir le risque de l’inflation non contrôlée de ce risque qui augmente la probabilité
d’obtenir un test significatif uniquement lié au hasard.
Les analyses de sous-groupes doivent être prévues au départ avec
un nombre de sujets calculé avant de débuter l’essai. Si les sousgroupes sont prévus au départ, il est possible d’avoir des
méthodes d’ajustement du risque d’erreur. Il est tout à fait légitime pour un clinicien de se poser de multiples questions au cours
d’un essai. Il faut bien comprendre que multiplier les analyses
risque d’aboutir à des conclusions faussement positives et
d’affecter ainsi la crédibilité des résultats.
Les tests d’interaction sont importants à connaître pour le clinicien lors de la lecture d’un article.
Les analyses intermédaires font l’objet de la deuxième partie de
l’article, elles doivent être prévues au départ, les interprétations
sont erronnées lorsque le seuil de significativité exigé est à 0,05,
il doit être largement inférieur à 0,05. Il faut faire attention également à l’inflation du risque alpha si les analyses intermédiaires
sont répétées.
Commentaires. Les analyses de sous-groupes faites a posteriori
ne doivent pas être encouragées et les analyses intermédaires doivent remplir des conditions statistiquement solides.
Le clinicien doit avoir une lecture critique statistique et bien dif31
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férencier, ce qui relève du jugement méthodologique plutôt que
de la pertinence clinique. Cet article est méthodologique mais
montre combien la collaboration entre cliniciens et méthodologistes est importante pour interpréter les résultats. Cet élément est
d’autant plus net que l’on arrive à des taux élevés de survie
même avec les traitements de reférence et que l’effet thérapeutique trouvé n’est pas toujours lié à la nouvelle drogue étudiée. ■
E. Luporsi, Centre Alexis-Vautrin, Nancy
LA PAROXÉTINE (DÉROXAT®) EST UN TRAITEMENT
EFFICACE CONTRE LES BOUFFÉES DE CHALEUR
1. Stearns V, Slack R, Greep N et al. Paroxetine is an effective treatment for hot flashes: results from a prospective randomized clinical trial. J Clin Oncol 2005;23:6919-30.
2. Jin Y, Stearns V, Ward B et al. CYP2D6 genotype, antidepressant use, and tamoxifen metabolism during adjuvant
breast cancer treatment. J Natl Cancer Inst 2005;97:30-9.
Résumé. Les résultats d’une étude randomisée en double
aveugle avec paroxétine contre placebo viennent d’être publiés
en octobre 2005 (1). La population étudiée concerne des
femmes ayant au moins deux bouffées vasomotrices par jour
depuis plus d’un mois. 279 femmes étaient éligibles et 151 ont
été randomisées dans un bras A avec 4 semaines de paroxétine
(10 ou 20 mg par jour) et 4 semaines de placebo et dans un
bras B avec 4 semaines de placebo et 4 semaines de paroxétine
(10 ou 20 mg par jour). La plupart était ménopausée, 80 %
d’entre elles avaient été traitées pour un cancer du sein, 60 %
recevaient un traitement antiestrogénique.
Les patientes notaient sur un journal quotidien la fréquence et
l’intensité des bouffées vasomotrices.
La paroxétine a entraîné avec les deux posologies différentes
une diminution de la fréquence et de l’intensité des bouffées
vasomotrices (score combiné) : 40,6 % avec 10 mg par jour
versus 13, 7 % pour le placebo (p = 0,0006) et 52,7 % avec
20 mg par jour versus 26,6 % pour le placebo (p = 0,002). La
diminution de la fréquence des bouffées est la même quelle que
soit la posologie (18,9 % avec 10 mg et 22,5 % avec 20 mg).
La qualité de vie, appréciée par plusieurs tests d’évaluation
(échelles et questionnaires validés) est similaire. L’amélioration du sommeil est significative avec 10 mg de paroxétine par
rapport au placebo. Les nausées sont plus fréquentes avec 20 mg
qu’avec 10 mg.
Les trois quart des patientes ont préféré la paroxétine au placebo, 81 % souhaitaient continuer le traitement avec la dose de
10 mg, contre 65 % avec la dose de 20 mg.
Ces résultats sont indépendants des caractéristiques des
patientes (âge, statut ménopausique, antécédent de THS, antécédent de cancer du sein traité, traitement antiestrogénique,
niveau d’anxiété).
Les bouffées vasomotrices induites par l’arrêt du THS au
moment du diagnostic du cancer du sein ou provoquées par la
chimiothérapie et/ou l’hormonothérapie sont gênantes, parfois
invalidantes. La paroxétine est efficace à la dose de 10 mg par
jour, sans effet secondaire important contrairement à d’autres
inhibiteurs sélectifs de la sérotonine (venlafaxine, Effexor®) ou
inhibiteurs de la recapture de la sérotonine (fluoxétine, Prozac®).
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Commentaire. Le mécanisme d’action de la paroxétine est
mal connu. L’étude a porté sur une courte période, les auteurs
ne peuvent donc pas préciser le bénéfice éventuel d’un traitement au long cours.
Les auteurs font la remarque, à juste titre, que la paroxétine est
un inhibiteur de l’enzyme CYP2D6 et qu’elle pourrait ainsi
inhiber la voie du métabolisme du tamoxifène vers l’endoxifène (2) sachant qu’il n’a pas été rapporté dans la littérature de
corrélation directe entre la diminution de la concentration plasmatique de l’endoxifène et la survie à long terme des patientes
avec un cancer du sein.
Les auteurs recommandent l’utilisation de la paroxétine à la
dose de 10 mg par jour pour les femmes qui souhaitent un traitement non hormonal de leurs bouffées de chaleur, quelle que
■
soit leur étiologie.
J.-M. Dilhuydy , Institut Bergonié, Bordeaux
ACCÉLÉRATION DES CYCLES POUR TRAITER UN CANCER
DU SEIN CHEZ DES PATIENTES À HAUT RISQUE
Nitz UA, Mohrmann S, Fischer J et al. Comparaison of
rapidly cycled tandem high-dose chemotherapy plus peripheral blood-stem – cell support versus dose-dense conventional
chemotherapy for adjuvant treatment of high risk breast cancer: results of a multicentre phase III trial. Lancet 2005;3,
366(9501):1935-44.
Résumé. Il s’agit d’une étude de phase III chez des patientes à
haut risque (au moins 9 N+). Au cours de deux cycles accélérés (toutes les deux semaines avec G-CSF), les patientes
étaient traitées par une association d’épirubicine et de cyclophosphamide suivis par deux cycles de chimiothérapie à hautes
doses (épirubicine, cyclophosphamide et thiotepa + cellules
souches) ou quatre cycles identiques d’EC suivis par trois
cycles accélérés de cyclophosphamide, de méthothrexate et de
5FU. Ainsi 403 patientes furent randomisées. Le follow-up
médian est de 48,6 mois. La survie sans événement à 4 ans (en
intention de traiter) est de 60 % dans le bras haute dose versus
44 % dans le bras contrôle (p = 0,00069). La survie globale est
de 75 % versus 70 % (p = 0,02). Aucun décès toxique n’a été
rapporté.
Pour la première fois, une étude randomisée montre une amélioration de la survie globlale des cancers du sein à haut risque,
par un traitement intensif avec greffe de cellules souches
hématopoïétique.
Commentaire. Cette étude allemande ravive donc l’intérêt
pour ce traitement.
Deux explications à cet avantage sont possibles : l’inclusion de
sujets à très haut risque avec en moyenne 17,6 N+ et, d’autre
part un protocole différent avec une accélération des cycles.
Un bémol à ces résultats : le protocole “contrôle” n’est pas un
vrai bras standard en Europe.
Sans conclure définitivement, les auteurs pensent que cette “stratégie reste à approfondir”, malgré l’absence, dans ces protocoles,
de taxanes qui ont démontré leur intérêt en adjuvant, mais pas
■
pour les patientes avec fort envahissement ganglionnaire.
A. Lesur, Centre Alexis-Vautrin, Nancy
La Lettre du Sénologue - n° 31 - janvier/février/mars 2006
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