Quasi-Abelian Homological Algebra

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Laboratoire Analyse,
Géométrie et Applications
URA CNRS 742
Université Paris-Nord
Institut Galilée
Algèbre Homologique Quasi-Abélienne
Juin 1995
Mémoire présenté par
Fabienne Prosmans
pour l’obtention du Diplôme
d’Etudes Approfondies de
mathématiques
Introduction
Depuis de nombreuses années, les méthodes de l’algèbre homologique se sont avérées
efficaces pour traiter de nombreux problèmes mathématiques dans des domaines aussi
variés que la topologie algébrique, la géométrie algébrique ou plus récemment la
théorie des équations aux dérivées partielles. Malgré diverses tentatives intéressantes
(cf. [7]), l’application de ces techniques à l’analyse fonctionnelle n’a pas encore abouti
à une théorie entièrement satisfaisante.
L’algèbre homologique traditionnelle telle qu’elle est exposée dans [3] est en effet
construite pour des catégories abéliennes et ne s’applique donc pas à des catégories
telles que celle des espaces localement convexes.
L’algèbre homologique moderne basée sur la notion de catégorie dérivée peut
s’adapter plus facilement au but recherché. Des catégories telles que celle des espaces
de Banach ou des espaces de Fréchet sont en effet des catégories exactes au sens
de Quillen [9] et une définition de leur catégorie dérivée a été suggérée par Deligne
(cf. [1]). Laumon a exposé cette idée un peu plus en détails dans [5] pour l’appliquer
à l’étude des D-modules filtrés.
En pratique, la notion de catégorie exacte est trop générale et on peut obtenir
des résultats plus intéressants si on se limite à la notion de catégorie quasi-abélienne
comme nous l’a conseillé Jean-Pierre Schneiders.
Le but de ce mémoire est d’exposer de manière aussi autonome que possible
la construction de la catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne et de ses
t-structures canoniques. La démarche suivie consiste à construire tout d’abord la
catégorie K (A) des complexes modulo homotopie associée à une catégorie additive
A et à la munir de deux t-structures canoniques. Ensuite, lorsque la catégorie A
est quasi-abélienne, nous introduisons un système nul canonique N (A) de K (A) et
construisons la catégorie dérivée D(A) et ses t-structures par localisation. Nous
considérons également le problème de la dérivation des foncteurs dans ce contexte.
Enfin, à titre d’exemple nous appliquons la théorie générale au cas de la catégorie
des espaces de Banach et nous montrons comment dériver les foncteurs naturellement
associés à cette catégorie. Cela établit un lien avec notre mémoire [8].
i
ii
Nous nous sommes largement inspirés de la théorie des catégories dérivées telle
qu’elle est exposée dans [4] et [11], et d’un article en préparation de Jean-Pierre
Schneiders [10].
Nous supposerons que le lecteur a une bonne connaissance de la théorie des
catégories telle qu’elle est exposée par exemple dans [6]. En ce qui concerne les
résultats d’analyse fonctionnelle, notre référence standard sera [2].
Je tiens à remercier vivement Jean-Pierre Schneiders pour son aide précieuse, sa
grande disponibilité et ses encouragements pendant la préparation et la rédaction de
ce travail.
Enfin, je ne voudrais pas terminer cette introduction sans remercier très sincèrement mes parents qui m’ont permis d’entreprendre cette année d’études à Paris.
CHAPITRE 0
Rappels de théorie des catégories
0.1. Catégories additives
Définition 0.1.1. Une catégorie A est additive si elle vérifie les conditions suivantes :
i) pour tout A, B ∈ Ob(A), Hom A (A, B ) a une structure de groupe abélien,
ii) il existe un objet nul i.e. un objet 0 tel que Hom A (0, 0) = 0,
iii) pour tout A, B , C ∈ Ob(A), l’application
Hom A (A, B ) × Hom A (B, C )
- Hom (A, C )
A
est bi-additive,
iv) le produit et le coproduit d’un nombre fini d’objets de A existent.
Définition 0.1.2. Soient A et B deux catégories additives. Un foncteur F : A - B
est additif si pour tout A, B ∈ Ob(A), il induit un homomorphisme de groupes
abéliens de Hom A (A, B ) dans Hom B (F (A), F (B )).
Remarque 0.1.3. Soient A et B deux objets d’une catégorie additive A. Si A × B
est le produit de A et B , il existe un morphisme unique iA : A - A × B tel que le
diagramme suivant soit commutatif.
A
idA iA
A
@
@
R
0@
I
@ pA
@
@
- A×B
pB
B
(Les morphismes pA et pB sont les projections sur A et B respectivement.)
De même, il existe un morphisme unique iB : B - A × B tel que le diagramme
suivant soit commutatif.
A
0
B
iB
@
@
R
idB @
I pA
@
@
@
- A×B
pB
B
1
2
0. Rappels de théorie des catégories
Proposition 0.1.4. Soient A et B deux objets d’une catégorie additive A. En
reprenant les notations de la remarque précédente, on a les relations suivantes :
i) pA ◦ iA = idA , pB ◦ iB = idB ,
ii) pB ◦ iA = 0, pA ◦ iB = 0,
iii) iA ◦ pA + iB ◦ pB = idA×B .
Preuve. i) et ii) sont évidents.
iii) Comme le diagramme suivant
A
3
k
Q
Q pA
pA
Q
Q
iA ◦ pA + iB ◦ pB -Q
A×B
A×B
Q
Q
Q
Q
pB Q
pB
s
+
B
est commutatif, la conclusion s’ensuit aussitôt.
Proposition 0.1.5. Dans une catégorie additive A, le produit d’un nombre fini
d’objets de A est un coproduit de ces objets.
Preuve. Soient A, B , C ∈ Ob(A), a ∈ Hom A (A, C ) et b ∈ Hom A (B, C ). On vérifie
directement que le morphisme c : A × B
suivant commutatif.
- C , c = a ◦ pA + b ◦ pB rend le diagramme
A
iA
A×B
@a
@
R
@
c
-C
I
@
@
iB @
b
B
De plus, c est unique. En effet, supposons qu’il existe c0 : A × B
c0 ◦ iA = c ◦ iA = a et c0 ◦ iB = c ◦ iB = b. On en déduit que
- C tel que
c0 ◦ iA ◦ pA + c0 ◦ iB ◦ pB = c ◦ iA ◦ pA + c ◦ iB ◦ pB
et donc, c = c0 . Par conséquent, A × B est un coproduit de A et B .
Définition 0.1.6. La somme directe de deux objets A et B d’une catégorie additive,
notée A ⊕ B est le produit et donc le coproduit de ces deux objets.
Proposition 0.1.7. Soient A une catégorie additive et A, B , C ∈ Ob(A). Si les
morphismes
jA : A - C
jB : B - C
0.1. Catégories additives
-A
qA : C
qB : C
3
-B
vérifient les relations de la proposition 0.1.4, alors C ' A ⊕ B .
Preuve. Les morphismes
α:C
- A⊕B
α = iA ◦ qA + iB ◦ qB
- C
β = jA ◦ pA + jB ◦ pB
et
β : A⊕B
vérifient β ◦ α = idC et α ◦ β = idA⊕ B .
Corollaire 0.1.8. Soient A et B deux catégories additives et F : A
teur additif. Pour tout A, B ∈ Ob(A), F (A ⊕ B ) ' F (A) ⊕ F (B ).
- B un fonc-
Preuve. Puisque F est un foncteur additif, les morphismes
F (i A ) : F (A )
- F (A ⊕ B )
- F (A )
F (pA ) : F (A ⊕ B )
F (iB ) : F (B )
- F (A ⊕ B )
F (pB ) : F (A ⊕ B )
- F (B )
vérifient les relations de la proposition 0.1.4. On en déduit que F (A ⊕ B ) ' F (A) ⊕
F (B ).
Remarque 0.1.9. Soient A une catégorie additive et Ai, Bi ∈ Ob(A) (i = 1, 2). Donner un morphisme a ∈ Hom A (A1 ⊕ A2, B1 ⊕ B2 ) revient à donner la matrice
!
a11 a12
a21 a22
où aij ∈ Hom A (Aj , Bi ) est défini par
aij := pBi ◦ a ◦ iAj .
Le morphisme a peut en effet s’exprimer par la formule
a=
2
X
iBj ◦ aji ◦ pAi .
i,j =1
Proposition 0.1.10. Soient A une catégorie additive et
ϕ1 : A 1
- B1 ,
ϕ2 : A2
- B2
deux morphismes de A. Le morphisme
ϕ1 ⊕ ϕ 2 : A 1 ⊕ A 2
- B1 ⊕ B2
est un isomorphisme si et seulement s’il en est ainsi de ϕ1 et ϕ2 . En particulier,
A ⊕ B = 0 si et seulement si A ' 0 et B ' 0.
4
0. Rappels de théorie des catégories
Preuve. Si ϕ1 ⊕ ϕ2 est un isomorphisme, il existe une matrice
!
ϕ01 α
β ϕ02
avec ϕ0i : Bi
- Ai , α : B2
- A1 et β : B1
ϕ01 α
β ϕ02
et
ϕ1 0
0 ϕ2
!
- A2 tels que
!
!
ϕ1 0
0 ϕ2
!
ϕ01 α
β ϕ02
=
idA1
0
0 idA2
=
idB1
0
0 idB2
!
!
.
On en déduit facilement que ϕ1 et ϕ2 sont des isomorphismes puis que α = β = 0.
La réciproque est immédiate.
Définition 0.1.11. Soient A une catégorie additive et f : A
de A.
- B un morphisme
i) Un noyau de f est la donnée d’un couple (K, i) avec K ∈ Ob(A) et i ∈
Hom A (K, A), tel que f ◦ i = 0 et pour tout e ∈ Hom A (C, A) vérifiant f ◦ e = 0,
il existe un unique c ∈ Hom A (C, K ) tel que i ◦ c = e. Schématiquement, on a
K
iI
@
@
c@
A
6
e
f-
B
0
C
ii) Un conoyau de f est la donnée d’un couple (L, q ) avec L ∈ Ob(A) et q ∈
Hom A (B, L), tel que q ◦ f = 0 et pour tout g ∈ Hom A (B, C ) vérifiant g ◦ f = 0,
il existe un unique c ∈ Hom A (L, C ) tel que c ◦ q = g . Schématiquement, on a
A
f@
@
R
0@
B
q-
L
g
? c
C
Proposition 0.1.12. Soient A une catégorie additive et f : A
de A.
- B un morphisme
i) Si (K, i) est un noyau de f alors i est un monomorphisme.
un autre noyau de f , il existe un unique isomorphisme k : K
i0 ◦ k = i .
ii) Si (L, q ) est un conoyau de f , alors q est un épimorphisme. Si
autre conoyau de f , il existe un unique isomorphisme l : L
l ◦ q = q0.
Si (K 0 , i0 ) est
- K 0 tel que
(L0 , q 0 ) est un
- L0 tel que
0.1. Catégories additives
5
Preuve. Etablissons i), ii) en découlera par dualité.
Soient C ∈ Ob(A) et h ∈ Hom A (C, K ) tels que i ◦ h = 0. Comme f ◦ i ◦ h = 0, il
existe un unique c ∈ Hom A (C, K ) tel que le diagramme suivant soit commutatif.
K
i A
I
@
@
c@
f-
B
6
i◦h 0
C
Donc, i ◦ c = i ◦ h = 0. Comme c est unique, h = c = 0. Si (K 0, i0 ) est un autre noyau
de f , il existe par définition un seul morphisme k rendant commutatif le diagramme
suivant.
i0 fK0
A
B
I
@
@
k@
6
i
A
f-
0
K
De même, il existe un seul morphisme k 0 rendant le diagramme
K
iI
@
@
k0 @
6
i0
K
0
B
0
commutatif.
On en déduit que i0 ◦ k ◦ k 0 = i ◦ k 0 = i0 et i ◦ k 0 ◦ k = i0 ◦ k = i et comme i et i0 sont
des monomorphismes, k et k 0 sont des isomorphismes inverses l’un de l’autre.
Remarque 0.1.13. Dans la suite, si le morphisme f possède un noyau (resp. conoyau),
on notera ker f (resp. coker f ) un choix canonique de son noyau (resp. conoyau).
Remarque 0.1.14. Soient f : X - Y et i : K - X des morphismes de A. Si la
suite
Hom (W,i)
Hom (W,f )
- Hom (W, X )
- Hom (W, Y )
0 - Hom (W, K )
est exacte pour tout W ∈ Ob(A), alors (K, i) est un noyau de f .
On a une caractérisation duale pour le conoyau.
Définition 0.1.15. Si le morphisme i : ker f - A a un conoyau, il est appelé la
coimage de f et noté coim f .
Si le morphisme q : B - coker f a un noyau, il est appelé l’image de f et noté
im f .
Proposition 0.1.16. Soient A une catégorie additive, et
f :A
deux morphismes de A.
- B,
g:B
-C
6
0. Rappels de théorie des catégories
i)
ii)
iii)
iv)
f est un monomorphisme si et seulement si ker f ' 0.
f est un épimorphisme si et seulement si coker f ' 0.
Si g est un monomorphisme alors ker(g ◦ f ) ' ker f .
Si f est un épimorphisme alors coker(g ◦ f ) ' coker g .
Preuve. i) Supposons d’une part que ker f = 0 et donc i = 0. Soit C ∈ Ob(A) et
e ∈ Hom A (C, A) tel que f ◦ e = 0. Il existe donc un seul c ∈ Hom A (C, ker f ) tel que
le diagramme suivant soit commutatif.
0-
0
f-
A
6
I
@
@
c@
e
B
0
C
Par conséquent, e = 0.
D’autre part, démontrons que si f est un monomorphisme alors le couple (0, 0)
est un noyau de f . Soient C ∈ Ob(A) et e ∈ Hom A (C, A) tels que f ◦ e = 0. Comme
f est un monomorphisme, e = 0 et le diagramme suivant est commutatif.
0-
0
f-
A
I
@
@
0@
6
B
e
A
f-
0
C
iii) Il suffit de démontrer que ker f est un noyau de g ◦ f . Soit W ∈ Ob(A) et
e ∈ Hom A (W, A) tel que g ◦ f ◦ e = 0. Comme g est un monomorphisme, f ◦ e = 0
et par définition du noyau de f , il existe un seul w ∈ Hom A (W, ker f ) tel que le
diagramme
ker f
iI
@
@
w@
6
e
B
0
W
soit commutatif, ce qui suffit.
Les assertions ii) et iv) s’établissent par dualité.
Proposition 0.1.17. Soit A une catégorie additive dont les morphismes possèdent
des noyaux et conoyaux. Soient fi ∈ Hom A (Ai , Bi ), (i = 1, 2). Si
f1 ⊕ f2 : A1 ⊕ A2
alors
i) ker(f1 ⊕ f2) ' ker f1 ⊕ ker f2 ,
ii) coker(f1 ⊕ f2) ' coker f1 ⊕ coker f2 ,
iii) im(f1 ⊕ f2 ) ' im f1 ⊕ im f2,
- B1 ⊕ B2
0.1. Catégories additives
7
iv) coim(f1 ⊕ f2 ) ' coim f1 ⊕ coim f2 .
Preuve. Démontrons que si (ker f1 , i1) et (ker f2 , i2) sont des noyaux de f1 et f2 respectivement, alors (ker f1 ⊕ ker f2 , i1 ⊕ i2) est un noyau de f1 ⊕ f2 .
Bien sûr,
!
!
f1 0
i1 0
= 0.
0 f2
0 i2
Soit
!
e1
e2
tel que
- A1 ⊕ A2
:C
!
f1 0
0 f2
!
e1
e2
=
f1 ◦ e 1
f2 ◦ e 2
!
= 0.
Par définition de ker fi , il existe ci ∈ Hom A (C, ker fi ) tel que ii ◦ ci = ei , (i = 1, 2).
Par conséquent, le morphisme
!
c1
: C - ker f1 ⊕ ker f2
c2
rend le diagramme suivant commutatif.
ker f1 ⊕ ker f2
i1 0
0 i2
!
- A1 ⊕ A2
6 !
I
@
@
!@
c1 @
@
e1
e2
c2
f1 0
0 f2
!
- B1 ⊕ B2
0
C
On en déduit que ker(f1 ⊕ f2 ) ' ker f1 ⊕ ker f2 . Le point ii) s’obtient par dualité.
Les points iii) et iv) se déduisent de i) et ii) vu les définitions de im et coim.
Rappelons que dans une catégorie C , un carré cartésien est un carré commutatif
C1
f-
6
c1
C10
C2
6
0
f-
c2
C20
tel que pour tout C ∈ Ob(C ) et tout couple (γ1 , γ20 ) ∈ Hom C (C, C1) × Hom C (C, C20 )
vérifiant f ◦ γ1 = c2 ◦ γ20 , il existe un unique morphisme γ ∈ Hom C (C, C10 ) rendant le
8
0. Rappels de théorie des catégories
diagramme suivant commutatif.
C1
f-
C2
6
6
c2
c1
0
γ1 C 0 f - C 0
1
* 2
γ γ 0 2
C
Par dualité, un carré co-cartésien est un carré commutatif
C10
f 0-
60
60
c1
C1
C20
c2
f-
C2
0
tel que pour tout C ∈ Ob(C ) et tout couple (γ10 , γ2 ) ∈ Hom C (C10 , C 0) × Hom C (C2 , C 0)
vérifiant γ2 ◦ f = γ10 ◦ c01 , il existe un unique morphisme γ 0 ∈ Hom C (C20 , C 0) rendant
le diagramme suivant commutatif.
C0
*
0 0
γ
1 γ f0
- C 0 γ2 C10
2
60
60 c1
c 2
f- C1
C2
Proposition 0.1.18. i) Soit A une catégorie additive telle que tout morphisme possède un noyau et un conoyau. Si f ∈ Hom A (A, B ) et b ∈ Hom A (B 0, B ), alors il existe
A0 ∈ Ob(A), a ∈ Hom A (A0 , A) et f 0 ∈ Hom A (A0, B 0) tels que
A
f-
6
6
a
A0
B
b
0
f-
B0
soit un carré cartésien.
ii) Par dualité, on a le résultat analogue pour les carrés co-cartésiens.
Preuve. i) Considérons le morphisme
v = f −b : A ⊕ B 0
-B
0
◦ iv (où iv : ker v
et établissons que A0 = ker v , a = pA ◦ iv , f 0 = pB
répondent à la question.
- A ⊕ B 0)
0.1. Catégories additives
9
Soit (α, β 0 ) ∈ Hom A (X, A) × Hom A (X, B 0 ) tel que f ◦ α = b ◦ β 0 . Le morphisme
!
α
: X - A ⊕ B0
v0 =
β0
vérifie
v ◦ v 0 = f −b
!
α
β0
= f ◦ α − b ◦ β 0 = 0.
Donc, par définition de ker v , il existe un unique morphisme v 00 : X
iv ◦ v 00 = v 0 . Il s’ensuit que le diagramme suivant est commutatif.
f
A
X
- ker v tel que
-B
6
6
pA ◦ iv
b
α ker v pB 0 ◦ iv- B 0
*
v 00
β 0 Remarque 0.1.19. Soit A une catégorie additive telle que tout morphisme possède un
noyau et un conoyau, soient A, B ∈ Ob(A) et f ∈ Hom A (A, B ).
i) Il existe un morphisme canonique ϕ : coim f - im f . En effet, comme coim f
est le conoyau de i : ker f - A et que f ◦ i = 0, il existe f 0 ∈ Hom A (coim f, B ) tel
que le diagramme suivant soit commutatif.
ker f
i@
@
R
0@
A
0
q-
coim f
f
0
? f
B
Si q : B - coker f , on a q ◦ f 0 ◦ q 0 = q ◦ f = 0 et q ◦ f 0 = 0 car q 0 est un épimorphisme.
Comme im f est le noyau de q , il existe un unique morphisme ϕ ∈ Hom A (coim f, im f )
tel que le diagramme suivant soit commutatif.
im f
i0 B
I
@
@
ϕ@
6
f0
coim f
q
0
coker f
10
0. Rappels de théorie des catégories
ii)Soient C ∈ Ob(A) et g ∈ Hom A (B, C ) tels que g ◦ f = 0. Il existe un mor-
phisme canonique ψ : im f - ker g . En effet, comme g ◦ f = 0, il existe un unique
morphisme c ∈ Hom A (coker f, C ) tel que le diagramme suivant soit commutatif.
f-
A
q-
B
@
@
R
0@
coker f
g
? c
C
Il s’ensuit que g ◦ i0 = c ◦ q ◦ i0 = 0 (où i0 : im f - B ) et par définition de ker g ,
il existe un unique morphisme ψ ∈ Hom A (im f, ker g ) tel que le diagramme suivant
soit commutatif.
ig
g-B
ker g
C
6
I
@
@
ψ@
i0
0
im f
0.2. Catégories abéliennes
Définition 0.2.1. Une catégorie additive A est abélienne si elle vérifie les conditions
suivantes :
i) tout morphisme de A possède un noyau et un conoyau,
ii) pour tout morphisme f ∈ Hom A (A, B ), le morphisme canonique
coim f
- im f
est un isomorphisme.
Définition 0.2.2. Soit A une catégorie abélienne. Une suite de morphismes de A
A
f
-B
g
-C
est exacte si
i) g ◦ f = 0,
ii) le morphisme canonique im f
- ker g est un isomorphisme.
Remarque 0.2.3. Soit A une catégorie abélienne.
i) La suite 0
ii) la suite A
-A
f
-B
f
- B est exacte si et seulement si f est un monomorphisme.
- 0 est exacte si et seulement si f est un épimorphisme.
Proposition 0.2.4. Soient A une catégorie abélienne et
f :A
-B
un morphisme de A. On a les suites exactes suivantes :
i) 0
- ker f
-A
- im f
-0
0.2. Catégories abéliennes
ii) 0
- im f
-B
- coker f
11
-0
Preuve. C’est immédiat.
Proposition 0.2.5. Soient A une catégorie abélienne, A, B ∈ Ob(A). La suite
0
-A
iA
- A⊕B
pB
-B
-0
est exacte.
Preuve. a) Soit c ∈ Hom A (C, A) tel que iA ◦ c = 0. Puisque pA ◦ iA ◦ c = c = 0, iA
est un monomorphisme.
b) Si on démontre que le conoyau de iA est (B, pB ) alors im iA ' ker pB . Soit
c ∈ Hom A (A ⊕ B, C ) tel que c ◦ iA = 0. Le morphisme c ◦ iB : B - C rend le
diagramme suivant commutatif.
iA-
A
@
@
R
0@
A⊕B
pB-
B
c
? c ◦ iB
C
En effet, comme iA ◦ pA + iB ◦ pB = idA⊕ B , on a
c ◦ iA ◦ pA + c ◦ iB ◦ pB = c ◦ iB ◦ pB = c.
c) Soit c ∈ Hom A (B, C ) tel que c ◦ pB = 0. Puisque c ◦ pB ◦ iB = c = 0, pB est
un épimorphisme.
Définition 0.2.6. Soient A et B deux catégories abéliennes. Un foncteur additif
F : A - B est exact à gauche (resp. à droite ) si pour toute suite exacte dans A
0
-A
(resp.
A
-B
-B
-C
-C
- 0)
la suite
0
(resp.
- F (A )
F (A )
- F (B )
- F (B )
- F (C )
- F (C )
- 0)
est exacte dans B .
Le foncteur F : A - B est exact s’il est exact à gauche et à droite.
Un foncteur contravariant F : A - B est exact à gauche (resp. à droite ) s’il est
exact à gauche (resp. à droite) quand il est considéré comme foncteur F : Aop - B
(où Aop est la catégorie opposée de A).
12
0. Rappels de théorie des catégories
Exemple 0.2.7. Soit A une catégorie abélienne. Les foncteurs
Hom A (., X ) : Aop
- Ab
et
Hom A (X, .) : A
- Ab
(où Ab désigne la catégorie des groupes abéliens) sont exacts à gauche.
0.3. Foncteurs représentables
Définition 0.3.1. Soit A une catégorie additive. Soit hX : A
A - Ab) le foncteur additif défini par
- Ab (resp. hX :
hX (Y ) = Hom A (X, Y )
(resp. hX (Y ) = Hom A (Y, X )).
Un foncteur additif F : A
existe X ∈ Ob(A) tel que
- Ab (resp. F : Aop
- Ab) est représentable s’il
F ' hX
(resp. F ' hX ).
On dit que X est un représentant de F .
Proposition 0.3.2. Si F : A - Ab (resp. F : Aop
tif, alors pour tout X ∈ Ob(A)
- Ab) est un foncteur addi-
Hom (hX , F ) ' F (X ).
(resp. Hom (hX , F ) ' F (X ).)
Preuve. Considérons les morphismes
ϕ : Hom (hX , F )
- F (X ),
ψ : F (X )
- Hom (hX , F )
définis respectivement par
ϕ(α) = α(X )(idX )
∀α ∈ Hom (hX , F )
et
ψ (a)(Y )(f ) = F (f )(a)
∀a ∈ F (X ), ∀Y ∈ Ob(A), ∀f ∈ Hom A (X, Y ).
Le morphisme
ψ (a) : hX
-F
0.3. Foncteurs représentables
13
- Y 0 est un morphisme de A, le carré
est bien fonctoriel car si g : Y
ψ (a)(Y )
hX (Y )
hX (g )
F (Y )
F (g )
?
0
ψ
a
Y
( )( -)
0
hX (Y )
F (Y 0 )
?
commute car pour tout f ∈ Hom A (X, Y ), on a
F (g ) ◦ ψ (a)(Y )(f ) = F (g ) ◦ F (f )(a)
= F (g ◦ f )(a)
= ψ (a)(Y 0 ) ◦ hX (g )(f ).
Les morphismes ψ et ϕ sont inverses l’un de l’autre. En effet, d’une part, on a
ψ ◦ ϕ(α)(Y )(f ) = F (f )(ϕ(α))
= F (f )(α(X )(idX ))
= α(Y )(f )
car la carré
hX (X )
hX (f )
α(X-)
F (X )
F (f )
?
α(Y)
hX (Y )
F (Y )
?
commute.
D’autre part,
ϕ ◦ ψ (a) = ψ (a)(X )(idX )
= F (idX )(a)
= a.
Corollaire 0.3.3. On a l’ isomorphisme
Hom (hX , hY ) ' Hom (Y, X )
(resp. Hom (hX , hY ) ' Hom (X, Y )).
En particulier, f : X - Y est un isomorphisme si et seulement si hf : hX
(resp. hf : hX - hY ) est un isomorphisme.
Remarque 0.3.4. Soient A, A0 deux catégories additives et
F :A
deux foncteurs additifs.
- A0 ,
G : A0
-A
- hY
14
0. Rappels de théorie des catégories
i) Il résulte de la proposition précédente que se donner un morphisme de foncteurs
- Hom 0 (F (.), .)
A
A(., .) : Hom A (., G(.))
est équivalent à se donner un morphisme de foncteurs
T (.) : F ◦ G(.)
- id(.)
caractérisé par
A(X, Y )(f ) = T (Y ) ◦ F (f )
pour tout f ∈ Hom A (X, G(Y )).
ii) Par dualité, se donner un morphisme de foncteurs
A0 (., .) : Hom A0 (F (.), .)
- Hom (., G(.))
A
est équivalent à se donner un morphisme de foncteurs
T 0(.) : id(.)
- G ◦ F (.)
caractérisé par
A0 (X, Y )(f ) = G(f ) ◦ T 0 (X )
pour tout f ∈ Hom A0 (F (X ), Y ).
CHAPITRE 1
Catégories triangulées et t-structures
1.1. Catégories triangulées
Soit A une catégorie additive munie d’un automorphisme T : A
- A.
Définition 1.1.1. Un triangle de A est une suite de morphismes de A
a
b
- B
A
c
-C
- T (A ).
Un morphisme de triangles de A est la donnée d’un diagramme commutatif dans
A:
a-
A
b-
B
α
c-
C
β
T (A )
T (α)
γ
? a0
? b0
? c0
?
- B0
- C0
- T (A 0 )
A0
Définition 1.1.2. Une catégorie triangulée T est la donnée d’une catégorie additive
T munie d’un automorphisme T : T - T et d’une famille de triangles, appelés
triangles distingués vérifiant les axiomes suivants :
(TD 0) un triangle isomorphe à un triangle distingué est un triangle distingué,
(TD 1) pour tout X ∈ Ob(T ),
idX
-X
X
est un triangle distingué,
(TD 2) pour tout morphisme f : X
- T (X )
- Y dans T , il existe un triangle distingué
f
X
-0
- Y
-Z
- T ( X ),
f
g
h
(TD 3) le triangle
- Y
X
- Z
- T (X )
est distingué si et seulement si le triangle
g
-Z
Y
h
- T (X )
−T (f )
- T (Y )
est distingué,
(TD 4) étant donné deux triangles distingués
X
X0
f
- Y
f0
- Y0
-Z
- T ( X ),
- Z0
- T (X 0 ),
15
16
1. Catégories triangulées et t-structures
et un diagramme commutatif dans T ,
f-
X
Y
u
v
? f0
?
- Y0
X0
il existe w ∈ Hom T (Z, Z 0 ) tel que le diagramme suivant
X
f-
-Z
Y
u
v
- T (X )
w
? f0
?
- Y0
X0
?
- Z0
T (u )
?
- T (X 0 )
soit commutatif et donc, on a un morphisme de triangles distingués,
(TD 5) étant donné les triangles distingués
X
Y
X
f
- Z0
- T (X )
g
- X0
- T (Y )
g ◦f
- Y0
- T (X ),
- Y
-Z
-Z
il existe un triangle distingué
Z0
- Y0
- X0
- T (Z 0 )
tel que le diagramme suivant soit commutatif.
X
idX
f Y
g
? g◦f
?
-Z
X
f
?
Y
?
Z
0
idZ
?
g Z
?
- Y0
- Z0
?
- Y0
?
- X0
idX 0
?
- X0
- T (X )
idT (X )
?
- T (X )
T (f )
?
- T (Y )
?
- T (Z 0 )
1.1. Catégories triangulées
17
Cette dernière assertion, appelée “axiome de l’octaèdre”, peut être visualisée de
la manière suivante.
Y0
AK @
A @
R
A @
0 A
Z
X0
A
A 6
KA A
A
?
A
A
◦
g
f
- Z
X A
A
@ A
@ A
R A f @
g
Y
Notation 1.1.3. Soit X un objet d’une catégorie triangulée T . Par commodité
d’écriture, on posera
X [n] = T n (X ).
Définition 1.1.4. Soient T et T 0 deux catégories triangulées. Un foncteur triangulé
F : T - T 0 est un foncteur additif tel que
i) F (X [1]) ' F (X )[1]
ii) l’image par F d’un triangle distingué de T est un triangle distingué de T 0 .
Proposition 1.1.5. Si T est une catégorie triangulée et
f
g
-Y
X
-Z
- X [1]
-0
- X [1]
est un triangle distingué, alors g ◦ f = 0.
Preuve. Comme
idX
-X
X
est un triangle distingué, par (TD 4), il existe ϕ ∈ Hom T (0, Z ) tel que le diagramme
suivant
X
idX-
X
idX
?
X
-0
f
f-
?
Y
- X [1]
idX [1]
ϕ
g-
?
Z
?
- X [1]
soit commutatif, et donc, g ◦ f = 0.
Définition 1.1.6. Soit T une catégorie triangulée et A une catégorie abélienne. Un
foncteur cohomologique F : T - A est un foncteur additif tel que pour tout triangle
distingué de T
X
-Y
-Z
- X [1],
18
1. Catégories triangulées et t-structures
la suite
- F (Y )
F (X )
- F (Z )
est exacte.
Proposition 1.1.7. Soit T une catégorie triangulée. Pour tout W ∈ Ob(T ), les
foncteurs Hom T (W, .) : T - Ab et Hom T (., W ) : T op - Ab sont des foncteurs
cohomologiques.
f
g
Preuve. Soit X - Y - Z
la suite des groupes abéliens
- X [1] un triangle distingué de T . Etablissons que
Hom (W,f )
- Hom (W, Y )
T
Hom T (W, X )
Hom (W,g )
- Hom (W, Z )
T
est exacte, i.e. im(Hom (W, f )) = ker(Hom (W, g )).
D’une part, si ψ ∈ Hom T (W, X ), on a par la proposition 1.1.5
Hom (W, g ) ◦ Hom (W, f )(ψ ) = g ◦ f ◦ ψ = 0.
D’autre part, soit ϕ ∈ Hom T (W, Y ) vérifiant Hom (W, g )(ϕ) = g ◦ ϕ = 0. Puisque
W
idW
-W
-0
- W [1]
est un triangle distingué, par (TD 3) et (TD 4), il existe ψ ∈ Hom T (W, X ) rendant
le diagramme
-0
W [−1]
idW-
-W
ϕ[−1]
?
−g [−1]
- Z [−1]
Y [−1]
W
ψ
?
? f
-X
ϕ
?
-Y
commutatif. On a alors Hom (W, f )(ψ ) = f ◦ ψ = ϕ.
Corollaire 1.1.8. Soient T une catégorie triangulée et un morphisme de triangles
distingués dans T
X
ϕ
?
X0
-Y
-Z
ψ
?
- Y0
θ
?
- Z0
- X [1]
ϕ[1]
?
- X 0 [1]
Si ϕ et θ sont des isomorphismes alors ψ est un isomorphisme.
Preuve. Soit W ∈ Ob(T ). Comme Hom (W, .) est un foncteur cohomologique, on
obtient le diagramme commutatif suivant dont les lignes sont exactes :
Hom (W, Z [−1])
- Hom (W, X )
- Hom (W, Y )
- Hom (W, Z )
- Hom (W, X [1])
Hom (W, θ[−1])
Hom (W, ϕ)
Hom (W, ψ)
Hom (W, θ)
Hom (W, ϕ[1])
Hom (W, Z 0 [−1])
- Hom (W, X 0 )
?
?
?
- Hom (W, Y 0 )
?
- Hom (W, Z 0 )
?
- Hom (W, X 0[1])
1.1. Catégories triangulées
19
Comme ϕ et θ sont des isomorphismes, Hom (W, θ[−1]), Hom (W, ϕ), Hom (W, θ )
et Hom (W, ϕ[1]) sont des isomorphismes et par le lemme des cinq, on en déduit que
Hom (W, ψ ) est un isomorphisme pour tout W ∈ Ob(T ). Par le corollaire 0.3.3, on a
le résultat.
Corollaire 1.1.9. Soit T une catégorie triangulée, et soit
f
- Y
X
-N
- X [1]
un triangle distingué de T . Alors, f est un isomorphisme si et seulement si N ' 0.
Preuve. Supposons que f est un isomorphisme. Comme on a le morphisme de triangles distingués
idX-
X
idX
?
X
-0
X
- X [1]
0
f
f- ?
Y
?
-N
idX [1]
?
- X [1]
on en déduit que N ' 0.
Inversément, si on a un triangle distingué du type
f
- Y
X
-0
- X [1]
par le corollaire précédent, comme on a
idX-
X
idX
?
X
-0
X
0
f
f-
- X [1]
?
?
-0
Y
idX [1]
?
- X [1]
on en déduit que f est un isomorphisme.
Proposition 1.1.10. Si T est une catégorie triangulée et si X, Y ∈ Ob(T ), alors
X
0
-Y
iY
- X [1] ⊕ Y
- X [1]
est un triangle distingué dans T .
Preuve. Par (TD 2), il existe un triangle distingué dans T
X
0
-Y
g
-Z
h
- X [1]
et comme pour tout W ∈ Ob(T ), Hom (W, .) est un foncteur cohomologique, la suite
0
- Hom (W, Y )
Hom(W,g )
- Hom (W, Z )
Hom (W,h)
- Hom (W, X [1])
est exacte. Pour W = X [1], il existe donc h0 ∈ Hom (X [1], Z ) tel que
Hom (X [1], h)(h0 ) = h ◦ h0 = idX [1] .
- 0
20
1. Catégories triangulées et t-structures
Il s’ensuit que Hom (W, h) ◦ Hom (W, h0 ) = idHom (W,X [1]) et la suite ci-dessus est
scindée. Par conséquent, pour tout W ∈ Ob(T ),
Hom (W, Z ) ' Hom (W, Y ) ⊕ Hom (W, X [1]).
Comme cet isomorphisme est fonctoriel en W , on a Z ' X [1] ⊕ Y . D’où la conclusion.
Corollaire 1.1.11. Si T est une catégorie triangulée et si
-Y
X
0
-Z
- X [1]
est un triangle distingué dans T , alors Y ' X ⊕ Z .
Preuve. Par la proposition précédente, comme
0
- X [1]
Z
- Y [1]
- Z [1]
est un triangle distingué, Y [1] ' Z [1] ⊕ X [1] et Y ' X ⊕ Z .
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
Dans cette section, T désigne une catégorie triangulée.
Définition 1.2.1. Un sous-ensemble N de Ob(T ) est un système nul s’il satisfait
aux trois conditions suivantes :
(N 1) 0 ∈ N ,
(N 2) X ∈ N si et seulement si X [1] ∈ N ,
(N 3) si X - Y - Z - X [1] est un triangle distingué de T avec X , Y ∈ N ,
alors Z ∈ N .
On note S (N ) l’ensemble des morphismes f : X
distingué
X
f
-Y
-Z
- Y tels qu’il existe un triangle
- X [1],
avec Z ∈ N .
Proposition 1.2.2. Si N est un système nul de T , alors
i) pour tout X ∈ Ob(T ), idX ∈ S (N ),
ii) pour tout s1 ∈ Hom T (X, Y ), s2 ∈ Hom T (Y, Z ), tels que s1, s2 ∈ S (N ), on a
s2 ◦ s1 ∈ S (N ),
iii) tout diagramme
Z
X
s
f- ?
Y
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
21
avec s ∈ S (N ) peut être complété en un diagramme commutatif
-Z
W
s0
s
? f
?
-Y
X
avec s ∈ S (N ). On a le même résultat avec les morphismes renversés,
iv) si f et g ∈ Hom T (X, Y ), les conditions suivantes sont équivalentes :
1) il existe s ∈ Hom T (Y, Y 0 ), s ∈ S (N ) tel que s ◦ f = s ◦ g ,
2) il existe s0 ∈ Hom T (X 0 , X ), s0 ∈ S (N ) tel que f ◦ s0 = g ◦ s0.
0
id
X
Preuve. i) Soit X ∈ Ob(T ). Comme X X - 0 - X [1] est un triangle distingué et que 0 ∈ N , idX ∈ S (N ).
ii) Puisque s1 , s2 ∈ S (N ), il existe deux triangles distingués
X
Y
s1
- Z0
- X [1],
s2
- X0
- Y [1]
-Y
-Z
avec X 0 , Z 0 ∈ N . De plus, par (TD 2), on a un triangle distingué
X
s2 ◦s1
-Y0
-Z
- X [1]
et par l’axiome de l’octaèdre, on obtient le triangle distingué suivant.
Z0
- Y0
- X0
- Z 0 [1]
Par (TD 3),
X 0 [−1]
- Z0
- Y0
- X0
est un triangle distingué avec X 0 [−1] et Z 0 ∈ N , et donc Y 0 ∈ N , ce qui implique
que s2 ◦ s1 ∈ S (N ).
iii) Puisque s ∈ S (N ), il existe un triangle distingué
s
g
- X0
-Y
Z
h
- Z [1]
avec X 0 ∈ N et par (TD 2), on a le triangle distingué
X
g0
g ◦f
- X0
- X 00
h0
- X [1].
Par (TD 3) et (TD 4), il existe ϕ ∈ Hom T (X 00 [−1], Z ) tel que le diagramme suivant
soit commutatif.
−(g ◦ f )[−1]
−g 0 [−1]
−h0[−1]
- X 0 [−1]
- X 00 [−1]
-X
X [−1]
f [−1]
?
Y [−1]
idX 0 [−1]
ϕ
?
−g [−1] - 0
−h[−1] X [−1]
Z
?
Or, comme par (TD 3) on a le triangle distingué
X 00 [−1]
−h0 [−1]
-X
g ◦f
- X0
g0
- X 00
f
?
s Y
22
1. Catégories triangulées et t-structures
avec X 0 ∈ N , −h0[−1] ∈ S (N ). Par conséquent, W = X 00 [−1] et s0 = −h0 [−1]
conviennent.
iv) Soient f ∈ Hom T (X, Y ) et s ∈ Hom T (Y, Y 0), s ∈ S (N ) tels que s ◦ f = 0.
Démontrons qu’il existe s0 ∈ Hom T (X 0 , X ), s0 ∈ S (N ) tel que f ◦ s0 = 0. Puisque
s ∈ S (N ), il existe un triangle distingué
s
- Y0
Y
t
- Y 00
t0
- Y [1]
id
X
avec Y 00 ∈ N et comme X X - 0 - X [1] est un triangle distingué, par
(TD 3) et (TD 4), il existe ϕ ∈ Hom T (X, Y 00 [−1]) tel que le diagramme suivant soit
commutatif.
idX -0
-X
X [−1]
X
f [−1]
ϕ
f
?
?
0
?
−s[−1]
−t[−1]
−t [−1]
- Y 0 [−1]
- Y 00 [−1]
-Y
Y [−1]
?
Comme par (TD 2), on a le triangle distingué
X
ϕ
- Y 00 [−1]
ψ
- Z
ψ0
- X [1],
par (TD 3), on a alors le triangle distingué
Z [−1]
−ψ0 [−1]
-X
ϕ
- Y 00 [−1]
ψ
- Z.
Il s’ensuit que −ψ 0[−1] ∈ S (N ) car Y 00 [−1] ∈ N et
f ◦ ψ 0[−1] = t0[−1] ◦ ϕ ◦ ψ 0[−1] = 0.
Par conséquent, X 0 = Z [−1] et s0 = −ψ 0[−1] conviennent.
Lemme 1.2.3. Soit N un système nul de la catégorie triangulée T .
i) Soient X , Y ∈ Ob(T ). Si un triplet (X 0 , s, f ) est la donnée de X 0 ∈ Ob(T )
et des morphismes s ∈ Hom T (X 0 , X ), s ∈ S (N ) et f ∈ Hom T (X 0 , Y ), alors la
relation R définie par
(X10 , s1 , f1)R(X20 , s2 , f2)
si et seulement s’il existe un diagramme commutatif dans T
X
s1 v
X10 @
@
R
f1 @
6
@ s2
uI
@
@
v 0- 0
W
X2
u0
? f2
Y
avec W ∈ Ob(T ) et u ∈ S (N ), est une relation d’équivalence.
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
23
ii) Si les diagrammes suivants
X100
t10
X0
s
@ g10
@
R
@
@f
@
R
@
X
Y0
@g
@
R
@
t
Y
Z
X200
t20
X
s
0
@ g20
@
R
@
@f
@
R
@
X
Y0
t
Y
@g
@
R
@
Z
sont commutatifs, et si s ◦ t10 et s ◦ t20 appartiennent à S (N ) alors
(X100 , s ◦ t10 , g ◦ g10 )R(X200 , s ◦ t02, g ◦ g20 ).
Preuve. i) Il est clair que la relation R est réflexive et symétrique. Démontrons qu’elle
est transitive. Supposons que
(X10 , s1, f1 )R(X20 , s2, f2 ) et (X20 , s2 , f2)R(X30 , s3 , f3 ),
i.e. qu’il existe deux diagrammes commutatifs
X
s1 v1
X10 6
@ s2
u1I
@
@
v10- 0
W1
X2
@
u10
@
@ ? f2
f1 R
Y
X
s2 v2
X20 @
@
R
f2 @
6
@ s3
u2I
@
@
v20- 0
W2
X3
u20
? f3
Y
24
1. Catégories triangulées et t-structures
avec u1, u2 ∈ S (N ). Comme on a
W2
u2
u1-
W1
?
X
avec u2 ∈ S (N ), par la proposition 1.2.2, il existe un diagramme commutatif
u4-
W3
u3
W2
u2
? u
?
1W1
X
avec u3 ∈ S (N ). De plus, on a
s2 ◦ v10 ◦ u3 = u1 ◦ u3
= u2 ◦ u4
= s2 ◦ v 2 ◦ u 4
et par la proposition 1.2.2, il existe W4 ∈ Ob(T ) et t ∈ Hom T (W4, W3 ), t ∈ S (N )
tels que
v10 ◦ u3 ◦ t = v2 ◦ u4 ◦ t.
On vérifie alors aisément que le diagramme
X
6
I
@
@ s3
s1
u1 ◦ u3 ◦ t
@
@
@
0
v 1 ◦ u3 ◦ t
v2 ◦ u4 ◦-t 0
X10 W4
X3
@
@
u01 ◦ u3 ◦ t
@
f1 @
R
@
?
f3
Y
est commutatif et comme u1 ◦ u3 ◦ t ∈ S (N ), la relation R est transitive.
ii) Comme on a
X200
s ◦ t20
X100
s ◦ t10 - ?
X
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
25
avec s ◦ t02 ∈ S (N ), par la proposition 1.2.2, il existe un diagramme commutatif
W
h1
?
X100
h2 - 00
X2
s◦
t01-
s ◦ t02
?
X
avec h1 ∈ S (N ). Donc, on a s ◦ t01 ◦ h1 = s ◦ t02 ◦ h2 et par la proposition 1.2.2, il
existe W 0 ∈ Ob(T ) et h0 ∈ Hom T (W 0 , W ), h0 ∈ S (N ) tels que
t01 ◦ h1 ◦ h0 = t02 ◦ h2 ◦ h0 .
De plus, on a
t ◦ g10 ◦ h1 ◦ h0 = f ◦ t01 ◦ h1 ◦ h0
= f ◦ t02 ◦ h2 ◦ h0
= t ◦ g20 ◦ h2 ◦ h0 ,
et par la proposition 1.2.2, il existe W 00 ∈ Ob(T ) et h00 ∈ Hom T (W 00 , W 0 ), h00 ∈ S (N )
tels que
g10 ◦ h1 ◦ h0 ◦ h00 = g20 ◦ h2 ◦ h0 ◦ h00 .
On vérifie alors aisément que le diagramme
X
s ◦ t01
h1 ◦ h0 ◦ h00
X100 6
@
I
@
@
@
0
@ s ◦ t2
s ◦ t01 ◦ h1 ◦ h0 ◦ h00
@
@
@
@
0
00 @
h2 ◦ h ◦ h - 00
W 00
X2
@
@
@
@
@
g ◦ g10 ◦ h1 ◦ h0 ◦ h00
0 @
g ◦ g1 @
@
@
R
@
?
g ◦ g20
Z
est commutatif et comme s ◦ t01 ◦ h1 ◦ h0 ◦ h00 ∈ S (N ), on en déduit que
(X100 , s ◦ t01 , g ◦ g10 )R(X200 , s ◦ t02, g ◦ g20 ).
26
1. Catégories triangulées et t-structures
Définition 1.2.4. Soit N un système nul de la catégorie triangulée T . La catégorie
T /N appelée la localisation de T par N a pour objets les objets de T , les morphismes
d’un objet X dans un objet Y étant les classes d’équivalence des triplets (X 0 , s, f )
pour la relation considérée dans le lemme précédent.
Pour composer les morphismes représentés par (X 0 , s, f ) et (Y 0 , t, g), on forme le
diagramme commutatif
X 00
t0
X0
s
@h
@
R
@
@f
@
R
@
X
Y0
@g
@
R
@
t
Y
Z
avec t0 ∈ S (N ) (cf. proposition 1.2.2) et on pose
(Y 0 , t, g ) ◦ (X 0 , s, f ) = (X 00 , s ◦ t0 , g ◦ h).
Cette définition est licite. En effet, d’une part, supposons qu’il existe un diagramme commutatif
X100
t01
X0
s
@ h1
@
R
@
@f
@
R
@
X
Y0
t
Y
@g
@
R
@
Z
avec t01 ∈ S (N ). Puisque s ◦ t0 et s ◦ t10 appartiennent a S (N ), on en déduit du lemme
précédent que (X 00 , s ◦ t0, g ◦ h)R(X100 , s ◦ t01, g ◦ h1 ).
D’autre part, supposons que (X 0 , s, f )R(X10 , s1, f1 ) et démontrons que
((Y 0 , t, g ) ◦ (X10 , s1, f1 ))R((Y 0 , t, g) ◦ (X 0 , s, f )).
Comme (X 0 , s, f )R(X10 , s1 , f1), il existe un diagramme commutatif
X
s
v
X0 @
@
R
f @
6
I s1
u@
@
@
v 0- 0
W
X1
u0
? f1
Y
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
27
avec u ∈ S (N ). De plus, puisque t ∈ S (N ), il existe un diagramme commutatif
W0
u01-
Y0
t1
? u0
W
t
?
-Y
avec t1 ∈ S (N ). Donc, le diagramme suivant
W0
@ u01
@
R
@
@f
@
R
@
v ◦ t1
X
0
s
X
Y0
@g
@
R
@
t
Y
Z
est commutatif et s ◦ v ◦ t1 ∈ S (N ). Par le lemme précédent,
(W 0, s ◦ v ◦ t1 , g ◦ u01)R((Y 0 , t, g ) ◦ (X 0 , s, f )).
De la même manière, on a
(W 0, s ◦ v ◦ t1 , g ◦ u01)R((Y 0, t, g ) ◦ (X10 , s1 , f1)),
et par transitivité, on en déduit que la loi de composition est bien définie.
Remarquons que la loi de composition que l’on vient de définir est associative.
En effet, soient α : X - Y , β : Y - Z , γ : Z - W trois morphismes de T /N .
Supposons que α, β , γ sont respectivement représentés par (X 0 , s, f ), (Y 0 , t, g ) et
(Z 0, u, h). Considérons le diagramme commutatif
X 000
u00
X 00
t0
X0
s
X
@i
@
R
@
@f
@
R
@
t
Y
@k
@
R
@
Y 00
u0
Y0
@j
@
R
@
@g
@
R
@
u
Z
Z0
@h
@
R
@
W
avec t0, u0, u00 ∈ S (N ). D’une part,
(Z 0 , u, h) ◦ ((Y 0, t, g ) ◦ (X 0 , s, f )) = (Z 0 , u, h) ◦ (X 00 , s ◦ t0, g ◦ i)
= (X 000 , s ◦ t0 ◦ u00 , h ◦ j ◦ k )
28
1. Catégories triangulées et t-structures
car g ◦ i ◦ u00 = g ◦ u0 ◦ k = u ◦ j ◦ k , et d’autre part,
((Z 0 , u, h) ◦ (Y 0 , t, g )) ◦ (X 0 , s, f ) = (Y 00 , t ◦ u0 , h ◦ j ) ◦ (X 0 , s, f )
= (X 000 , s ◦ t0 ◦ u00 , h ◦ j ◦ k)
car f ◦ t0 ◦ u00 = t ◦ i ◦ u00 = t ◦ u0 ◦ k . On en déduit que la loi de composition est
associative.
Enfin, pour tout X ∈ Ob(T ), idX ∈ S (N ) et donc,
(X, idX , idX ) ∈ Hom T /N (X, X ).
De plus, si (X 0 , s, f ) ∈ Hom T /N (X, Y ), on a
(X 0 , s, f ) ◦ (X, idX , idX ) = (X 0 , s, f )
car le diagramme suivant
X0
@ idX
@
R
@
@ idX
@
R
@
s
X0
X
idX
X
s
@f
@
R
@
X
Y
est commutatif et s ∈ S (N ). De même, si (Y 0, s, f ) ∈ Hom T /N (Y, X ), on a
(X, idX , idX ) ◦ (Y 0 , s, f ) = (Y 0, s, f ).
Définition 1.2.5. On définit le foncteur
Q:T
- T /N
par Q(X ) = X pour tout X ∈ Ob(T ), et Q(f ) = (X, idX , f ) pour tout f ∈
Hom T (X, Y ).
Il s’agit bien d’un foncteur car
i) pour tout X ∈ Ob(T ), Q(idX ) = (X, idX , idX ),
ii) pour tout f ∈ Hom T (X, Y ), g ∈ Hom T (Y, Z ), on a
Q(g ) ◦ Q(f ) = (Y, idY , g ) ◦ (X, idX , f )
= (X, idX , g ◦ f )
= Q (g ◦ f )
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
car le diagramme suivant commute.
X
@f
@
R
@
idX
X
Y
@f
@
R
@
idX
@g
@
R
@
idY
X
Y
Z
Proposition 1.2.6. Soit N un système nul de la catégorie triangulée T .
i) Pour tout s ∈ S (N ), Q(s) est un isomorphisme.
ii) Pour tout X ∈ N , Q(X ) ' 0.
iii) Pour tout X ∈ Ob(T ), les conditions suivantes sont équivalentes :
a) Q(X ) ' 0,
b) il existe Y ∈ Ob(T ) tel que X ⊕ Y ∈ N ,
c) X ⊕ X [1] ∈ N .
Preuve. i) Soit s ∈ Hom T (X, Y ), s ∈ S (N ). On a
Q(s) = (X, idX , s),
et comme s ∈ S (N ), (X, s, idX ) ∈ Hom T /N (Y, X ). D’une part,
(X, s, idX ) ◦ (X, idX , s) = (X, idX , idX )
car le diagramme suivant est commutatif.
X
@ idX
@
R
@
idX
X
X
@s
@
R
@
idX
X
@ idX
@
R
@
s
Y
X
D’autre part,
(X, idX , s) ◦ (X, s, idX ) = (X, s, s)
car le diagramme
X
@ idX
@
R
@
idX
X
s
Y
X
@ idX idX
@
R
@
X
@s
@
R
@
Y
29
30
1. Catégories triangulées et t-structures
est commutatif. De plus, puisque le diagramme suivant
Y
6
@ idY
s s I
@
@
sidX
X
X
Y
@
@ s
R ? idY
s@
Y
commute, on a
(X, s, s)R(Y, idY , idY ),
et Q(s) est un isomorphisme.
ii) Soit X ∈ N . Puisque
X
idX
-X
-0
- X [1]
est un triangle distingué, par (TD 3),
α
-X
0
idX
-X
-0
est un triangle distingué et α ∈ S (N ). Par conséquent, Q(α) est un isomorphisme,
ce qui suffit.
iii) Si X ∈ Ob(T ), Q(X ) ' 0 si et seulement si idQ(X ) = 0Q(X ). Ainsi, l’annulation
de Q(X ) est équivalente à l’existence d’un diagramme commutatif
X
idX t
X
@
@
R
0@
6
@ idX
s I
@
@
t0 0
X
X
f
? idX
X
avec s ∈ S (N ). Dans un tel diagramme, s = t = t0 = f = 0. Il en résulte que
Q(X ) ' 0 si et seulement s’il existe un triangle distingué
X0
0
-X
-N
- X 0 [1]
avec N ∈ N . Vu la proposition 1.1.10 et le corollaire 1.1.8, dans un tel triangle,
N ' X 0 [1] ⊕ X . Ce qui établit l’équivalence de a) et b).
Comme on dispose aussi du triangle distingué
X
0
-X
- X [1] ⊕ X
- X [1],
l’axiome de l’octaèdre donne le triangle distingué
N
-N
- X [1] ⊕ X
- N [1].
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
31
Il en résulte que X [1] ⊕ X ∈ N . Ainsi, c) est un conséquence de a). Comme b) est
clairement une conséquence de c), iii) est démontré.
Remarque 1.2.7. Si α : X
alors
- Y est un morphisme de T /N représenté par (X 0 , s, f ),
α = Q(f ) ◦ Q(s)−1 .
En effet, le diagramme
X0
@ idX 0
@
R
@
idX 0
X0
X0
@ idX 0
@
R
@
s
X0
X
idX 0
@f
@
R
@
Y
est commutatif.
Proposition 1.2.8. Soit N un système nul de la catégorie triangulée T .
i) T /N est une catégorie triangulée en considérant comme triangles distingués
ceux isomorphes à l’image par Q d’un triangle distingué dans T .
ii) Si T 0 est une catégorie triangulée et si F : T - T 0 est un foncteur de
catégories triangulées tel que F (X ) ' 0 pour tout X ∈ N , alors il existe
un foncteur unique G : T /N - T 0 tel que G ◦ Q = F . Schématiquement,
T
F
Q-
T /N
? G
T0
Preuve. i) Vérifions que T /N satisfait aux axiomes d’une catégorie triangulée. Pour
(TD 0), (TD 1) et (TD 3), cela découle immédiatement de ce que la catégorie T est
triangulée.
(TD 2) Soit f ∈ Hom T /N (X, Y ). On peut supposer que f est représenté par
X0
s
@a
@
R
@
X
Y
avec s ∈ S (N ). Par (TD 2) appliqué à la catégorie T , il existe un triangle distingué
X0
a
-Z
- X 0 [1]
X0
Q( a)
-Z
- X 0 [1]
-Y
et donc,
- Y
32
1. Catégories triangulées et t-structures
est un triangle distingué dans T /N . Comme Q(s) est un isomorphisme et que f ◦
Q(s) = Q(a), on a l’isomorphisme de triangles de T /N
Q(a)-
X0
Q(s)
?
idY
Q(s)[1]
idZ
?
?
f Y
X
- X 0 [1]
-Z
Y
-Z
?
- X [1]
et
f
-Y
X
-Z
- X [1]
est un triangle distingué de T /N .
(TD 4) On peut supposer que les triangles de T /N que l’on doit considérer sont
l’image par Q des deux triangles distingués de T suivants.
f
g
h
f0
g0
h0
-Y
X
X0
-Z
- Y0
- X [1]
- Z0
- X 0 [1]
Soient u ∈ Hom T /N (X, X 0 ) et v ∈ Hom T /N (Y, Y 0 ) des morphismes tels que Q(f 0 ) ◦
u = v ◦ Q(f ). On a donc le diagramme suivant.
Q(f)
X
u
?
X0
Q(g)
Y
Z
Q(h)
X [1]
v
0
Q(f-)
?
Y0
u[1]
0
Q(g-)
Z0
0
Q(h-)
?
X 0 [1]
Supposons que u et v sont représentés respectivement par
X 00
Y 00
@a
@
R
@
s
X
@b
@
R
@
t
X0
Y
Y0
avec s, t ∈ S (N ), et que Q(f 0) ◦ u et v ◦ Q(f ) sont donnés respectivement par les
diagrammes commutatifs suivants
W
s0
X
s
X
00
@ a0
@
R
@
@a
@
R
@
idX 0
X0
X0
@ f0
@
R
@
Y0
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
33
W0
t0
@ b0
@
R
@
@f
@
R
@
X
idX
Y 00
@b
@
R
@
t
X
Y
Y0
avec s0 , t0 ∈ S (N ). Comme Q(f 0 ) ◦ u = v ◦ Q(f ), il existe un diagramme commutatif
X
6
0
@ t0
w00I
@
@
0
w
w
W W 00 - W 0
s◦s @
@
R
f ◦ a0 @
0
? b ◦ b0
Y0
avec w00 ∈ S (N ). Par (TD 2), il existe un triangle distingué dans T
W 00
b0 ◦w0
- Y 00
- Z 00
- W 00 [1].
Considérons alors le schéma suivant.
f Y
X
6
Z
h X [1]
6
w00
W 00
g-
600
t
0
0
b ◦ w- 00
Y
a0 ◦ w
?
- Z 00
- W 00 [1]
b
?
0
f - 0
Y
X0
w [1]
0
g-
Z0
0
a0 ◦ w[1]
?
h - 0
X [1]
On vérifie facilement que
f ◦ w00 = t ◦ b0 ◦ w0 , f 0 ◦ a0 ◦ w = b ◦ b0 ◦ w0 ,
et par (TD 4), il existe k ∈ Hom T (Z 00 , Z ) et k 0 ∈ Hom T (Z 00 , Z 0 ) tels que le diagramme
suivant soit commutatif.
f Y
X
6
6
w00
W 00
0
X0
0
b ◦ w- 00
Y
f0 -
Y0
h X [1]
k
600
- Z 00
- W 00 [1]
k0
b
?
Z
6
t
a0 ◦ w
?
g-
g0-
?
Z0
w [1]
a0 ◦ w[1]
?
h0 - 0
X [1]
34
1. Catégories triangulées et t-structures
En appliquant le foncteur Q, on obtient le diagramme commutatif suivant dont les
lignes sont des triangles distingués dans T /N .
Q(f ) Y
X
6
Q(g ) -
Z
6
Q(h)
- X [1]
6
Q(w00 )
Q (t )
0
0
◦
Q
b
w
(
)
- Y 00
W 00
6
Q(w00 [1])
Q (k )
- Z 00
- W 00 [1]
Q (a 0 ◦ w )
Q (b )
Q (k 0 )
Q(a0 ◦ w[1])
?
Q (f 0 ) - ?
Q (g 0 ) - ?
Q(h0 ) - 0 ?
X0
Y0
Z0
X [1]
Comme Q(w00 ) et Q(t) sont des isomorphismes, par le corollaire 1.1.8, Q(k ) est un
isomorphisme et on a donc le morphisme de triangles distingués suivant.
X
Q(f )
Q(a0 ◦ w ) ◦ Q(w 00 )−1
?
X0
Q(g)
- Y
- Z
Q(b) ◦ Q(t)−1
Q(f 0 )
Q(h)
Q(k0 ) ◦ Q(k)−1
?
- Y0
?
- Z0
Q(g0 )
- X [1]
Q(a0 ◦ w [1]) ◦ Q(w 00 )−1 [1]
Q(h0 )
?
- X 0[1]
Or, Q(a0 ◦ w) ◦ Q(w00 )−1 = u. En effet, Q(a0 ◦ w) ◦ Q(w00 )−1 est donné par le diagramme
commutatif
W 00
@ idW 00
@
R
@
idW 00
W 00
w00
W 00
@ idW 00
@ a0 ◦ w
@
@
R
@
idW 00
@
R
X
W 00
et (W 00 , w00 , a0 ◦ w)R(X 00 , s, a) car le diagramme suivant
X0
X
w00
idW
W 00 6
I
@
@ s
w
@
@
@
0
s ◦ w- 00
00
W
X
00
00
@
@
@
0
a ◦w @
R
@
a0 ◦ w
?
a
X0
est commutatif et w00 ∈ S (N ). De la même manière, Q(b) ◦ Q(t0 )−1 = v et l’axiome
(TD 4) est donc vérifié.
(TD 5) De la même manière que pour (TD 4), en utilisant l’axiome de l’octaèdre
pour la catégorie T , on obtient l’axiome de l’octaèdre pour la catégorie T /N .
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
35
ii) Etablissons tout d’abord que pour tout s ∈ S (N ), F (s) est un isomorphisme.
Si s ∈ S (N ), il existe un triangle distingué
X
s
-Y
-Z
- X [1]
avec Z ∈ N . Comme F est un foncteur de catégories triangulées et que F (Z ) ' 0,
on a le triangle distingué
F (X )
F (s)
- F (Y )
-0
- F (X )[1]
et par le corollaire 1.1.9, F (s) est un isomorphisme.
Démontrons à présent l’unicité du foncteur G. Soit α : X - Y un morphisme
de T /N représenté par (X 0 , s, f ). On sait que α = Q(f ) ◦ Q(s)−1 . Par conséquent,
il vient
G(α) = G(Q(f ) ◦ Q(s)−1 )
= G ◦ Q(f ) ◦ G ◦ Q(s)−1
= F (f ) ◦ (G ◦ Q(s))−1
= F (f ) ◦ F (s)−1 ,
ce qui assure l’unicité de G.
On définit le foncteur
- T0
G : T /N
par G(X ) = F (X ) pour tout X ∈ T /N et
G(α) = F (f ) ◦ F (s)−1
pour tout α ∈ Hom T /N (X, Y ) représenté par (X 0 , s, f ). Cette définition est licite. En
effet, supposons que (X 00 , s0, f 0 )R(X 0 , s, f ). Il existe alors un diagramme commutatif
X
s
6
v
X0 X
@
@
R
f @
I s0
u@
@
0@
000 v -
X 00
u0
0
? f
Y
avec u ∈ S (N ). Comme F (s) ◦ F (v ) = F (u), F (v ) est inversible. D’une part, on a
F (u0) ◦ F (u)−1 = F (f ◦ v ) ◦ (F (s ◦ v ))−1
= F (f ) ◦ F (v ) ◦ F (v )−1 ◦ F (s)−1
= F (f ) ◦ F (s)−1,
36
1. Catégories triangulées et t-structures
et d’autre part,
F (u0 ) ◦ F (u)−1 = F (f 0 ◦ v 0 ) ◦ (F (s0 ◦ v 0 ))−1
= F (f 0 ) ◦ F (s0 )−1 ,
et donc, G est bien défini.
Démontrons que G est un foncteur.
Soient α : X - Y et β : Y - Z deux morphismes de T /N représentés respectivement par (X 0 , s, f ) et (Y 0 , t, g ). Considérons le diagramme commutatif
X 00
t0
X0
s
@h
@
R
@
@f
@
R
@
t
Y0
@g
@
R
@
X
Y
Z
où t ∈ S (N ). Par définition, β ◦ α est représenté par (X 00 , s ◦ t0 , g ◦ h). Comme
f ◦ t0 = t ◦ h, on a F (f ) ◦ F (t0 ) = F (t) ◦ F (h) et par conséquent,
0
F (t)−1 ◦ F (f ) = F (h) ◦ F (t0 )−1 .
Il s’ensuit que
G(β ◦ α) = F (g ◦ h) ◦ (F (s ◦ t0 ))−1
= F (g ) ◦ F (h) ◦ F (t0 )−1 ◦ F (s)−1
= F (g ) ◦ F (t)−1 ◦ F (f ) ◦ F (s)−1
= G(β ) ◦ G(α).
De plus, comme idQ(X ) est représenté par (X, idX , idX ), il est clair que G(idQ(X )) =
idG(Q(X )) .
Enfin, par définition du foncteur G, on a G ◦ Q = F , d’où la conclusion.
Proposition 1.2.9. Soient N un système nul de la catégorie triangulée T et T 0 une
sous-catégorie pleine de T telle que tout triangle distingué dans T
X
-Y
-Z
- X [1]
avec X , Y ∈ Ob(T 0 ) est un triangle distingué dans T 0 . Alors, N 0 = N ∩ Ob(T 0 ) est
un système nul de T 0 .
De plus, les deux conditions suivantes sont équivalentes :
i) tout morphisme f ∈ Hom T (X, Y ), avec X ∈ Ob(T 0 ), Y ∈ N se factorise par
un élément de N 0 ,
ii) pour tout s ∈ Hom T (X, Y ), s ∈ S (N ) et Y ∈ Ob(T 0 ), il existe w ∈
Hom T (W, X ), W ∈ Ob(T 0 ) tel que s ◦ w ∈ S (N ).
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
37
Sous ces conditions, T 0/N 0 est une sous-catégorie pleine de T /N .
Preuve. On vérifie immédiatement que N 0 est un système nul de T 0 .
i) ⇒ ii) Soient s ∈ Hom T (X, Y ), s ∈ S (N ) et Y ∈ Ob(T 0). Il existe un triangle
distingué dans T
s
g
-Y
X
h
-Z
- X [1]
avec Z ∈ N . Par hypothèse, il existe Z 0 ∈ N 0 et des morphismes g1 ∈ Hom T (Y, Z 0 )
et g2 ∈ Hom T (Z 0, Z ) tels que g = g2 ◦ g1 . De plus, par (TD 2), on obtient les triangles
distingués dans T
(∗)
Y
g1
h1
f1
g2
h2
f2
- Z0
Z0
- Y 00
- Y [1]
- Z 00
-Z
- Z 0 [1]
et comme par (TD 3), on a le triangle distingué
Y
g
h
-Z
- X [1]
−s[1]
- Y [1],
on peut appliquer l’axiome de l’octaèdre et on a le diagramme suivant.
Y
g1 -
g2
idY
?
Y
g1
?
Z0
?
Y 00
h1-
Z0
?
gZ
Y 00
Y [1]
α
idY [1]
h- ? −s[1]- ?
X [1]
Y [1]
idZ
g2 - ? h2- ?
Z
Z 00
α-
f1 -
?
X [1]
g1 [1]
f2 -
idZ 00
?
?
Z 0[1]
?
- Y 00 [1]
- Z 00
Par conséquent, f1 = −s[1] ◦ α et donc,
−f1 [−1] = s ◦ α[−1].
Or, par (TD 3), on a le triangle distingué
Y 00 [−1]
−f1 [−1]
-Y
g1
- Z0
h1
- Y 00
et comme Z 0 ∈ N 0 , −f1 [−1] ∈ S (N ). De plus, vu (∗), puisque Y et Z 0 ∈ Ob(T 0 ),
Y 00 ∈ Ob(T 0). Il s’ensuit que W = Y 00 [−1] et w = α[−1] conviennent.
ii) ⇒ i) se démontre de manière analogue.
Pour conclure, il suffit de démontrer que le foncteur
I : T 0 /N 0
- T /N
38
1. Catégories triangulées et t-structures
défini par I (X ) = X pour tout X ∈ Ob(T 0 /N 0 ) et I (X 0 , s, f ) = (X 0 , s, f ) pour tout
(X 0 , s, f ) ∈ Hom T 0 /N 0 (X, Y ), est pleinement fidèle, i.e. l’application
- Hom
T /N (I (X ), I (Y ))
Hom T 0 /N 0 (X, Y )
est bijective.
Supposons d’une part que
I (X 0, s, f )RN I (X 00 , s0 , f 0 ),
donc, il existe un diagramme commutatif
X
s
v
X0 @
@
R
f @
6
I s0
u@
@
0@
vW
X 00
u0
0
? f
Y
avec u ∈ S (N ). Par ii), il existe W 0 ∈ Ob(T 0 ) et w ∈ Hom T (W 0, W ) tels que
u ◦ w ∈ S (N ). On en déduit que le diagramme suivant
X
6
I
@
@ 0
u ◦ w @s
@
@
0
v ◦ w- 00
0 v ◦ w
0
X
W
X
s
@
@
u0 ◦ w
@
f @
R ?
@
f0
Y
est commutatif. De plus, comme u ◦ w ∈ S (N ), il existe un triangle distingué dans
T
W0
u◦w
-X
- W 00
- W 0 [1]
avec W 00 ∈ N . Or, comme W 0 et X ∈ Ob(T 0 ), W 00 ∈ Ob(T 0 ). Par conséquent,
u ◦ w ∈ S (N 0 ) et
(X 0 , s, f )RN 0 (X 00 , s0, f 0 ).
D’autre part, considérons (X 0 , s, f ) ∈ Hom T /N (I (X ), I (Y )). Vu ii), il existe
W ∈ Ob(T 0 ) et w ∈ Hom T (W, X 0 ) tel que s ◦ w ∈ S (N ). Comme le diagramme
1.3. t-structures
39
suivant
X
s
w
X0 6
I
@
@
s ◦ w @s ◦ w
@
@
idW W
W
@
@
f ◦w
@
f @
R ?
@
f ◦w
Y
est commutatif, on a
I (W, s ◦ w, f ◦ w)RN (X 0 , s, f ),
ce qui suffit.
1.3. t-structures
Dans cette section, T désigne une catégorie triangulée.
Définition 1.3.1. Soient T ≤0 et T ≥0 deux sous-catégories strictement pleines de T .
Posons
T ≤n := T ≤0 [−n], T ≥n := T ≥0 [−n].
Le couple (T ≤0 , T ≥0 ) est une t-structure sur T si les conditions suivantes sont
vérifiées :
i) T ≤−1 ⊂ T ≤0 et T ≥1 ⊂ T ≥0 ,
ii) Hom T (X, Y ) = 0 pour X ∈ Ob(T ≤0 ) et Y ∈ Ob(T ≥1 ),
iii) pour tout X ∈ Ob(T ), il existe un triangle distingué
X0
-X
- X1
- X0 [1]
tel que X0 ∈ Ob(T ≤0 ) et X1 ∈ Ob(T ≥1 ).
Dans le reste de la section, (T ≤0 , T ≥0 ) est une t-structure sur T .
Théorème 1.3.2.
i) Il existe un foncteur
τ ≤n : T
-T
≤n
et pour tout X ∈ Ob(T ≤n ), pour tout Y ∈ Ob(T ) un isomorphisme
Hom T ≤n (X, τ ≤n (Y ))
fonctoriel en X et Y .
- Hom (X, Y )
T
40
1. Catégories triangulées et t-structures
ii) Il existe un foncteur
τ ≥n : T
-T
≥n
et pour tout X ∈ Ob(T ), pour tout Y ∈ Ob(T ≥n ) un isomorphisme
Hom T ≥n (τ ≥n (X ), Y )
- Hom (X, Y )
T
fonctoriel en X et Y .
Les foncteurs τ ≤n et τ ≥n sont les foncteurs de troncature associés à la t-structure
(T ≤0 , T ≥0 ).
Preuve. On peut supposer que n = 0.
i) Soit Y ∈ Ob(T ). Il existe un triangle distingué
Y0
-Y
- Y1
- Y0 [1]
tel que Y0 ∈ Ob(T ≤0 ) et Y1 ∈ Ob(T ≥1 ). Démontrons que
- Hom (X, Y )
T
Hom T ≤0 (X, Y0 )
est un isomorphisme pour tout X ∈ Ob(T ≤0 ). Comme Hom (X, .) est un foncteur
cohomologique, on a la suite exacte
Hom T (X, Y1 [−1])
- Hom (X, Y0 )
T
- Hom (X, Y )
T
- Hom (X, Y1 ).
T
Puisque X ∈ Ob(T ≤0 ) et Y1 , Y1 [−1] ∈ Ob(T ≥1 ), on a
Hom T (X, Y1 [−1]) = 0,
Hom T (X, Y1 ) = 0,
et par conséquent,
Hom T (X, Y0 ) ' Hom T (X, Y )
pour tout X ∈ Ob(T ≤0 ). De plus, comme T ≤0 est une sous-catégorie pleine de T ,
Hom T ≤0 (X, Y0 ) ' Hom T (X, Y ).
On définit le foncteur τ ≤0 : T - T ≤0 par τ ≤0 (Y ) = Y0 pour tout Y ∈ Ob(T )
(Y0 est défini par le triangle distingué ci-dessus).
Soit f ∈ Hom T (Y, Y 0 ). Il existe deux triangles distingués
Y0
Y00
α
- Y1
- Y0 [1]
α0
- Y0
1
- Y 0 [1]
0
-Y
- Y0
avec Y0 , Y00 ∈ Ob(T ≤0 ). Or, on a le schéma suivant,
Hom T ≤0 (Y0 , Y0 )
Hom (Y0 , α)
- Hom (Y0 , Y )
T
Hom (Y0 , f )
Hom T ≤0 (Y0 , Y00 )
?
- Hom (Y0 , Y 0 )
T
Hom (Y0 , α0 )
1.3. t-structures
41
et on définit
τ ≤0 (f ) = Hom (Y0 , α0 )−1 ◦ Hom (Y0 , f ) ◦ Hom (Y0 , α)(idY0 ).
On peut vérifier que τ ≤0 : T - T ≤0 est un foncteur.
Il nous reste à démontrer que l’isomorphisme
Hom T ≤0 (X, τ ≤0 (Y ))
- Hom (X, Y )
T
est fonctoriel en X et en Y . D’une part, si f ∈ Hom T ≤0 (X, X 0 ), le diagramme suivant
Hom (X, α)
Hom T ≤0 (X, τ ≤0 (Y ))
- Hom (X, Y )
T
Hom (f, τ ≤0 (Y ))
?
0
Hom T ≤0 (X , τ
≤0
Hom (f, Y )
?
- Hom (X 0 , Y )
T
Hom (X 0 , α)
(Y ))
est commutatif et l’isomorphisme est fonctoriel en X .
D’autre part, si f ∈ Hom T (Y, Y 0 ), par construction de τ ≤0 (f ), le diagramme
suivant est commutatif.
Hom (τ ≤0 (Y ), α)
- Hom (τ ≤0 (Y ), Y )
T
Hom T ≤0 (τ ≤0 (Y ), τ ≤0 (Y ))
Hom (τ ≤0 (Y ), τ ≤0 (f ))
Hom T ≤0 (τ
≤0
?
(Y ), τ
≤0
0
Hom (τ ≤0 (Y ), f )
(Y ))
?
- Hom (τ ≤0 (Y ), Y 0 )
T
Hom (τ ≤0 (Y ), α0 )
En appliquant le foncteur Hom (X, .), X ∈ Ob(T ≤0 ), on obtient le diagramme commutatif
Hom T ≤0 (X, τ ≤0 (Y ))
Hom (X, α)
- Hom (X, Y )
T
Hom (X, τ ≤0 (f ))
?
Hom (X, f )
Hom T ≤0 (X, τ ≤0 (Y 0 ))
?
- Hom (X, Y 0 )
T
Hom (X, α0 )
et l’isomorphisme est fonctoriel en Y .
ii) Soit X ∈ Ob(T ). Il existe un triangle distingué
X0
- X
- X1
- X0 [1]
avec X0 ∈ Ob(T ≤0 ) et X1 ∈ Ob(T ≥1 ). Dans ce cas, on définit τ ≥1 (X ) = X1 et la
preuve est analogue à celle de i).
42
1. Catégories triangulées et t-structures
Remarque 1.3.3. Appliquons la remarque 0.3.4 en prenant A = T ≤n , A0 = T , le
foncteur F étant l’inclusion I : T ≤n - T et le foncteur G étant le foncteur de
troncature τ ≤n : T - T ≤n . A l’isomorphisme fonctoriel
A≤n (X, Y ) : Hom T ≤n (X, τ ≤n (Y ))
- Hom (X, Y ),
T
on associe le morphisme de foncteurs
T ≤n (.) : τ ≤n (.)
- id(.)
caractérisé par
A≤n (X, Y )(f ) = T ≤n (Y ) ◦ f
pour tout f ∈ Hom T ≤n (X, τ ≤n (Y )).
De même, à l’isomorphisme fonctoriel
A≥n (X, Y ) : Hom T ≥n (τ ≥n (X ), Y )
- Hom (X, Y ),
T
on associe le morphisme de foncteurs
T ≥n (.) : id(.)
- τ ≥n (.)
caractérisé par
A≥n (X, Y )(f ) = f ◦ T ≥n (X )
pour tout f ∈ Hom T ≥n (τ ≥n (X ), Y ).
Lemme 1.3.4. Considérons deux triangles distingués de T
X
f
-Y
g
-Z
hi
- X [1]
(i = 1, 2).
Si Hom T (X [1], Z ) = 0, alors h1 = h2 .
Preuve. Par (TD 4), on a le morphisme de triangles distingués suivant.
X
f-
idX
?
X
g-
Y
idY
f-
?
Y
Z
h1-
u
X [1]
idX [1]
g - ? h2- ?
Z
X [1]
Il s’ensuit que u ◦ g = g , h1 = h2 ◦ u et donc,
(idZ −u) ◦ g = 0.
Comme Hom T (., Z ) est un foncteur cohomologique, on a la suite exacte
Hom T (X [1], Z )
Hom (h1 ,Z )
- Hom T (Z, Z )
Hom (g,Z )
- Hom T (Y, Z )
Hom (f,Z )
- Hom T (X, Z ).
Par conséquent, il existe ψ ∈ Hom T (X [1], Z ) tel que
ψ ◦ h1 = idZ −u,
et comme notre hypothèse entraı̂ne que ψ = 0, on en déduit que u = idZ et h1 =
h2 .
1.3. t-structures
43
Proposition 1.3.5. Pour tout X ∈ Ob(T ), il existe un morphisme unique
h(X ) : τ ≥n+1 (X )
- τ ≤n (X )[1]
tel que
τ ≤n (X )
- τ ≥n+1 (X )
-X
h(X )
- τ ≤n (X )[1]
est un triangle distingué.
De plus, h(X ) est fonctoriel en X et induit le morphisme de foncteurs
h : τ ≥n+1
- [1] ◦ τ ≤n .
Preuve. On peut supposer que n = 0.
Soit X ∈ Ob(T ). Par définition d’une t-structure et par le théorème 1.3.2, il
existe un triangle distingué
τ ≤0 (X )
-X
- τ ≥1 (X )
h(X )
- τ ≤0 (X )[1].
L’unicité de h(X ) résulte du lemme précédent. En effet, comme τ ≤0 (X )[1] ∈ Ob(T ≤0 )
et τ ≥1 (X ) ∈ Ob(T ≥1 ),
Hom T (τ ≤0 (X )[1], τ ≥1 (X )) = 0.
Finalement, démontrons que h(X ) est fonctoriel en X . Soit f ∈ Hom T (X, Y ).
En reprenant les notations de la remarque 1.3.3, on a deux triangles distingués dans
T,
τ ≤0 (X )
T ≤0 ( X )
T ≥1 ( X )
τ ≤0 (Y )
T ≤0 ( Y )
T ≥1 (Y )
et comme T ≤0 : τ ≤0 (.)
-X
- τ ≥1 (X )
- τ ≥1 (Y )
-Y
- τ ≤0 (X )[1]
- τ ≤0 (Y )[1],
- id(.) est un morphisme de foncteurs, le carré
τ ≤0 (X )
τ ≤0 (f )
T ≤0 (X)
X
f
≤0
?
T
Y
( )
τ ≤0 (Y )
Y
?
commute et par (TD 4), on a le morphisme de triangles distingués suivant.
τ ≤0 (X )
τ ≤0 (f )
?
τ ≤0 (Y )
T ≤0(X)
X
f
T ≥1 (X-)
τ ≥1 (X )
u
?
h(X-)
τ ≤0 (X )[1]
τ ≤0 (f )[1]
?
T ≤0(Y) ? T ≥1 (Y) ≥1
h(Y) ≤0
Y
τ (Y )
τ (Y )[1]
44
1. Catégories triangulées et t-structures
- τ ≥1 (.) est un morphisme de foncteurs, le carré
De même, comme T ≥1 : id(.)
X
f
T ≥1(X)
τ ≥1 (X )
τ ≥1 (f )
?
? T ≥1 (Y )
- τ ≥1 (Y )
Y
commute. Par conséquent, il vient
A≥1 (X, τ ≥1 (Y ))(u) = u ◦ T ≥1 (X )
= T ≥1 (Y ) ◦ f
= τ ≥1 (f ) ◦ T ≥1(X )
= A≥1 (X, τ ≥1 (Y ))(τ ≥1 (f )),
et puisque A≥1(X, τ ≥1 (Y )) est un isomorphisme, u = τ ≥1 (f ). Il s’ensuit que le carré
τ ≥1 (X )
τ ≥1 (f )
?
τ ≥1 (Y )
h(X-)
τ ≤0 (X )[1]
τ ≤0 (f )[1]
h(Y)
?
τ ≤0(Y )[1]
commute, ce qui suffit.
Remarque 1.3.6. Pour tout X ∈ Ob(T ), on a
i) τ ≤n (X [m]) ' τ ≤n+m (X )[m],
ii) τ ≥n (X [m]) ' τ ≥n+m (X )[m].
Pour établir i), il suffit de montrer que
τ ≤n (X [m])[−m] ' τ ≤n+m (X ).
Pour tout Y ∈ Ob(T ≤n+m ), il vient
Hom T ≤n+m (Y, τ ≤n+m (X )) ' Hom T (Y, X )
' Hom T (Y [m], X [m])
' Hom T ≤n (Y [m], τ ≤n(X [m]))
' Hom T ≤n+m (Y, τ ≤n (X [m])[−m]),
et donc, τ ≤n (X [m])[−m] ' τ ≤n+m (X ). On obtient ii) de manière analogue.
Proposition 1.3.7. Les assertions suivantes sont équivalentes :
i) X ∈ Ob(T ≤n ),
ii) τ ≤n (X ) ' X ,
iii) τ ≥n+1 (X ) ' 0.
On a un résultat analogue en échangeant ≤ et ≥.
1.3. t-structures
45
Preuve. i) ⇔ ii) Pour tout X ∈ Ob(T ≤n ), en reprenant les notations de la remarque 1.3.3, on a les isomorphismes
A≤n (τ ≤n (X ), X ) : Hom T ≤n (τ ≤n (X ), τ ≤n (X ))
A≤n (X, X ) : Hom T ≤n (X, τ ≤n (X ))
- Hom (τ ≤n (X ), X )
T
- Hom (X, X ).
T
On vérifie alors facilement que
A≤n (τ ≤n (X ), X )(idτ ≤n (X )) : τ ≤n (X )
-X
et
(A≤n (X, X ))−1 (idX ) : X
- τ ≤n (X )
sont des isomorphismes inverses l’un de l’autre. La réciproque est immédiate.
ii) ⇔ iii) Soit X ∈ Ob(T ). Comme on a le triangle distingué
τ ≤n (X )
- X
- τ ≥n+1 (X )
- τ ≤n (X )[1],
cela résulte du corollaire 1.1.9.
Proposition 1.3.8. Soit
X0
-X
- X 00
- X 0 [1]
un triangle distingué dans T . Si X 0 et X 00 ∈ Ob(T ≥0 ) (resp. Ob(T ≤0 )) alors X ∈
Ob(T ≥0 ) (resp. Ob(T ≤0 )).
Preuve. Comme Hom (τ ≤−1 (X ), .) est un foncteur cohomologique, on a la suite exacte
Hom T (τ ≤−1 (X ), X 0 )
- Hom (τ ≤−1 (X ), X )
T
- Hom (τ ≤−1 (X ), X 00 ),
T
et puisque τ ≤−1 (X ) ∈ Ob(T ≤−1 ) et X 0 , X 00 ∈ Ob(T ≥0 ),
Hom T (τ ≤−1 (X ), X 0 ) ' 0,
Hom T (τ ≤−1 (X ), X 00 ) ' 0.
Ainsi,
Hom T (τ ≤−1 (X ), X ) ' 0.
Or,
Hom T ≤−1 (τ ≤−1 (X ), τ ≤−1 (X )) ' Hom T (τ ≤−1 (X ), X ) ' 0,
et τ ≤−1 (X ) ' 0. La conclusion résulte alors de la proposition précédente.
Proposition 1.3.9. Soient a, b ∈ Z.
i) Si a ≤ b, alors
τ ≥b ◦ τ ≥a ' τ ≥a ◦ τ ≥b ' τ ≥b
et
τ ≤b ◦ τ ≤a ' τ ≤a ◦ τ ≤b ' τ ≤a .
ii) Si a > b, alors
τ ≤b ◦ τ ≥a ' τ ≥a ◦ τ ≤b ' 0.
46
1. Catégories triangulées et t-structures
iii) Il existe un unique morphisme
ϕ : τ ≥a ◦ τ ≤b
- τ ≤b ◦ τ ≥a
tel que le diagramme suivant commute.
τ ≤b (X )
- τ ≥a (X )
-X
6
τ
≥a
?
ϕ
◦ τ ≤b (X )
- τ ≤b ◦ τ ≥a (X )
De plus, ϕ est un isomorphisme.
Preuve. Soit X ∈ Ob(T ).
i) Comme τ ≥b (X ) ∈ Ob(T ≥b ) ⊂ Ob(T ≥a ), par la proposition 1.3.7, on a
τ ≥a ◦ τ ≥b (X ) ' τ ≥b (X ).
De plus, pour tout Y ∈ Ob(T ≥b ), il vient
Hom T ≥b (τ ≥b ◦ τ ≥a (X ), Y ) ' Hom T (τ ≥a (X ), Y )
' Hom T ≥a (τ ≥a (X ), Y )
' Hom T (X, Y )
' Hom T ≥b (τ ≥b (X ), Y ),
et donc,
τ ≥b ◦ τ ≥a (X ) ' τ ≥b (X ).
ii) Puisque a > b, Ob(T ≥a ) ⊂ Ob(T ≥b+1 ) et pour tout X ∈ Ob(T ),
τ ≤b ◦ τ ≥a (X ) ' 0.
De la même manière, τ ≥a ◦ τ ≤b ' 0.
iii) Vu ii), on peut supposer b ≥ a. En reprenant les notations de la remarque 1.3.3,
il existe deux triangles distingués
τ ≤b ◦ τ ≥a (X )
T ≤b (τ ≥a (X ))
τ ≤a−1 ◦ τ ≤b (X )
- τ ≥a (X )
- τ ≤b (X )
- τ ≥b+1 ◦ τ ≥a (X )
T ≥a (τ ≤b (X ))
- τ ≥a ◦ τ ≤b (X )
- τ ≤b ◦ τ ≥a (X )[1]
- τ ≤a−1 ◦ τ ≤b (X )[1],
et vu i), τ ≥b+1 ◦ τ ≥a (X ) ' τ ≥b+1 (X ) et τ ≤a−1 ◦ τ ≤b (X ) ' τ ≤a−1 (X ). On a donc les
deux triangles distingués
τ ≤b ◦ τ ≥a (X )
T ≤b (τ ≥a (X ))
τ ≤a−1 (X )
- τ ≤b (X )
- τ ≥a (X )
- τ ≥b+1 (X )
- τ ≤b ◦ τ ≥a (X )[1]
- τ ≥a ◦ τ ≤b (X )
- τ ≤a−1 (X )[1].
T ≥a (τ ≤b (X ))
Or, τ ≥a (X ) ∈ Ob(T ≥a ) et comme b ≥ a, τ ≥b+1 (X ) ∈ Ob(T ≥a ). Donc, par la
proposition précédente,
τ ≤b ◦ τ ≥a (X ) ∈ Ob(T ≥a ∩ T ≤b ).
1.3. t-structures
47
De même, τ ≤b (X ) et τ ≤a−1 (X ) ∈ Ob(T ≤b ) et donc,
τ ≥a ◦ τ ≤b (X ) ∈ Ob(T ≥a ∩ T ≤b ).
De plus, on a les triangles distingués suivants.
T ≤b ( X )
τ ≤b (X )
-X
τ ≤a−1 (X )
T ≥b+1 (X )
T ≤a−1(X )
-X
- τ ≥b+1 (X )
T ≥a ( X )
- τ ≥a (X )
- τ ≤b (X )[1]
- τ ≤a−1 (X )[1]
Puisque on a l’isomorphisme fonctoriel
A≤b (τ ≤b (X ), τ ≥a (X )) : Hom T ≤b (τ ≤b (X ), τ ≤b ◦ τ ≥a (X ))
- Hom (τ ≤b (X ), τ ≥a (X ))
T
et que T ≥a (X ) ◦ T ≤b (X ) ∈ Hom T (τ ≤b (X ), τ ≥a (X )), il existe un morphisme unique
ψ ∈ Hom T ≤b (τ ≤b (X ), τ ≤b ◦ τ ≥a (X )) tel que
A≤b (τ ≤b (X ), τ ≥a (X ))(ψ ) = T ≤b (τ ≥a (X )) ◦ ψ
= T ≥a (X ) ◦ T ≤b (X ),
i.e., le diagramme suivant
τ ≤b (X )
T ≤b (X )-
X
T ≥a (X ) - ≥a
τ (X )
H
HH
HH
ψ
HH
H
HH
HH
j
6
T ≤b (τ ≥a (X ))
τ ≤b ◦ τ ≥a (X )
commute. De même, puisque on a l’isomorphisme fonctoriel
A≥a (τ ≤b (X ), τ ≤b ◦ τ ≥a (X )) : Hom T ≥a (τ ≥a ◦ τ ≤b (X ), τ ≤b ◦ τ ≥a (X ))
- Hom T (τ ≤b (X ), τ ≤b ◦ τ ≥a (X )),
et que ψ ∈ Hom T ≤b (τ ≤b (X ), τ ≤b ◦ τ ≥a (X )), il existe un morphisme unique ϕ ∈
Hom T ≥a (τ ≥a ◦ τ ≤b (X ), τ ≤b ◦ τ ≥a (X )) tel que
A≥a (τ ≤b (X ), τ ≤b ◦ τ ≥a (X ))(ϕ) = ϕ ◦ T ≥a(τ ≤b (X ))
= ψ,
et donc, le diagramme suivant
τ ≤b (X )
T ≥a (τ ≤b (X ))
τ
≥a
?
◦ τ ≤b (X )
T ≤b (X )-
X
T ≥a (X ) - ≥a
τ (X )
T ≤b (τ ≥a (X ))
ϕ
6
- τ ≤b ◦ τ ≥a (X )
commute.
Il nous reste à établir que ϕ est un isomorphisme. Comme on a les triangles
distingués
τ ≤a−1 (X )
- τ ≤b (X )
- τ ≥a ◦ τ ≤b (X )
- τ ≤a−1 (X )[1]
48
1. Catégories triangulées et t-structures
τ ≤b (X )
-X
τ ≤a−1 (X )
- τ ≥b+1 (X )
- τ ≤b (X )[1]
- τ ≥a (X )
- τ ≤a−1 (X )[1],
-X
par l’axiome de l’octaèdre, on a le triangle distingué
τ ≥a ◦ τ ≤b (X )
- τ ≥a (X )
- τ ≥b+1 (X )
- τ ≥a ◦ τ ≤b (X )[1].
- τ ≥b+1 (X )
- τ ≤b ◦ τ ≥a (X )[1],
Or, on a le triangle distingué
τ ≤b ◦ τ ≥a (X )
- τ ≥a (X )
et donc, par (TD 4) et le corollaire 1.1.8, on a l’isomorphisme de triangles distingués
suivants.
τ ≥a ◦ τ ≤b (X )
τ
≤b
- τ ≥a (X )
- τ ≥b+1 (X )
ϕ0
id
id
≥a
- τ ≥a (X )
?
◦τ
(X )
?
τ ≤b (X )
τ
≥a
?
◦τ
≤b
ϕ0 [1]
?
- τ ≥b+1 (X )
Finalement, ϕ = ϕ0 . En effet, comme T ≥a (.) : id(.)
foncteurs, le carré
(X )
- τ ≥a ◦ τ ≤b (X )[1]
?
- τ ≤b ◦ τ ≥a (X )[1]
- τ ≥a (.) est un morphisme de
-X
?
- τ ≥a (X )
commute, d’où l’on tire que le diagramme
τ ≤b (X )
τ
≥a
?
◦ τ ≤b (X )
-X
?
- τ ≥a (X )
ϕ0
id
?
τ ≤b ◦ τ ≥a (X )
?
- τ ≥a (X )
est commutatif. La conclusion s’ensuit aussitôt.
Définition 1.3.10. Le cœur d’une t-structure (T ≤0 , T ≥0 ), noté C , est la sous-catégorie pleine de T définie par
C = T ≤0 ∩ T ≥0 .
Proposition 1.3.11. Si
X0
-X
- X 00
- X 0 [1]
est un triangle distingué dans T , et si X 0 , X 00 ∈ C alors X ∈ C .
Preuve. Cela résulte immédiatement de la proposition 1.3.8.
1.3. t-structures
Définition 1.3.12. On définit le foncteur H 0 : T
49
- C par
H 0 (X ) = τ ≤0 ◦ τ ≥0 (X ) ' τ ≥0 ◦ τ ≤0(X ).
On pose
H n(X ) = H 0 (X [n]) ' (τ ≥n ◦ τ ≤n (X ))[n].
Proposition 1.3.13. Soit X ∈ Ob(T ). S’il existe a ∈ Z tel que X ∈ Ob(T ≥a ) (resp.
Ob(T ≤a )) alors X ∈ Ob(T ≥0 ) (resp. Ob(T ≤0 )) si et seulement si H n (X ) = 0 pour
n < 0 (resp. n > 0).
Preuve. La condition est nécessaire. En effet, comme X ∈ Ob(T ≥0 ), τ ≤−1 (X ) = 0 et
on a donc
H −1 (X ) = (τ ≥−1 ◦ τ ≤−1 (X ))[−1] = 0.
Comme T ≥0 ⊂ T ≥n pour tout n < 0, on en déduit que H n (X ) = 0 pour n < 0.
La condition est suffisante. Si a ≥ 0, le résultat est trivial.
Supposons a < 0. Par hypothèse, H a (X ) = 0. On a le triangle distingué
τ ≤a ◦ τ ≥a (X )
- τ ≥a (X )
- τ ≥a+1 (X ) ◦ τ ≥a (X )
- τ ≤a ◦ τ ≥a (X )[1],
et comme τ ≤a ◦ τ ≥a (X ) = H a (X )[−a] = 0, et τ ≥a+1 (X ) ◦ τ ≥a (X ) ' τ ≥a+1 (X ), on a
par (TD 3), le triangle distingué suivant.
τ ≥a (X )
- τ ≥a+1 (X )
-0
- τ ≥a (X )[1]
Or, τ ≥a (X ) ' X car X ∈ Ob(T ≥a ). On a alors le morphisme de triangles distingués
τ ≥a (X )
- τ ≥a+1 (X )
?
?
-X
X
-0
?
-0
- τ ≥a (X )[1]
?
- X [1]
et par le corollaire 1.1.8, X ' τ ≥a+1 (X ). Par conséquent, X ∈ Ob(T ≥a+1 ) et en
raisonnant de proche en proche (pour la dernière étape a = −1), on obtient X ∈
Ob(T ≥0 ).
Lemme 1.3.14. Si C est le cœur de la t-structure (T ≤0 , T ≥0 ) et si on a le triangle
distingué
X
avec X , Y ∈ Ob(C ) alors
i) H 0 (Z ) ' coker(f ),
ii) H 0 (Z [−1]) ' ker(f ).
f
-Y
g
-Z
h
- X [1]
50
1. Catégories triangulées et t-structures
Preuve. Comme Y ∈ Ob(T ≤0 ) et X [1] ∈ Ob(T ≤0 ), par la proposition 1.3.8, Z ∈
Ob(T ≤0 ). De même, comme Y ∈ Ob(T ≥0 ) ⊂ Ob(T ≥−1 ) et X [1] ∈ Ob(T ≥−1 ), on
a Z ∈ Ob(T ≥−1 ). Puisque Z ∈ Ob(T ≤0 ), par la proposition 1.3.7, τ ≤0 (Z ) ' Z et
donc,
H 0 (Z ) ' τ ≥0 (Z ).
De même, comme Z ∈ Ob(T ≥−1 ), on a Z [−1] ∈ Ob(T ≥0 ) et donc
H 0 (Z [−1]) ' τ ≤0 (Z [−1]).
Pour tout W ∈ Ob(C ), Hom (W, .) et Hom (., W ) étant des foncteurs cohomologiques,
on a les deux suites exactes suivantes.
Hom (h,W )
Hom T (X [1], W )
Hom T (W, Y [−1])
- Hom T (Z, W )
Hom (g,W )
Hom (W,−g [−1])
- Hom T (W, Z [−1])
- Hom T (Y, W )
Hom (f,W )
- Hom T (X, W )
Hom (W,−h[−1])
- Hom T (W, X )
Hom (W,f )
- Hom T (W, Y )
D’une part, Hom T (X [1], W ) = 0 car X [1] ∈ Ob(T ≤−1 ) et W ∈ Ob(T ≥0 ); d’autre
part, Hom T (W, Y [−1]) = 0 car W ∈ Ob(T ≤0 ) et Y [−1] ∈ Ob(T ≥1 ). De plus, en
reprenant les notations de la remarque 1.3.3, on a les isomorphismes suivants.
A≥0(Z, W ) : Hom T ≥0 (τ ≥0 (Z ), W )
- Hom (Z, W )
T
f 7−→ f ◦ T ≥0 (Z )
A≤0 (W, Z [−1]) : Hom T ≤0 (W, τ ≤0 (Z [−1]))
- Hom (W, Z [−1])
T
f 7−→ T ≤0(Z ) ◦ f
Par conséquent, on a les deux suites exactes suivantes.
0
0
- Hom T ≥0 (τ ≥0 (Z ), W )
- Hom T ≤0 (W, τ ≤0 (Z [−1]))
Hom (T ≥0 (Z )◦g,W )
- Hom T (Y, W )
Hom (f,W )
Hom (W,−h[−1]◦T ≤0 (Z [−1]))
- Hom T (W, X )
- Hom T (X, W )
Hom (W,f )
- Hom T (W, Y )
Vu la proposition 0.1.14, cela suffit.
Théorème 1.3.15. Le cœur C = T ≤0 ∩ T ≥0 est une catégorie abélienne.
Preuve. On va décomposer la preuve en trois étapes.
a) Etablissons tout d’abord que la catégorie C est additive.
i) Comme on a l’isomorphisme
Hom T ≤0 (τ ≤0 (0), τ ≤0 (0))
∼
- Hom (τ ≤0 (0), 0),
T
τ ≤0 (0) est l’objet nul de T ≤0 . De même, τ ≥0 (0) est l’objet nul de T ≥0 .
ii) Soit X , Y ∈ Ob(C ). Par le corollaire 1.1.11, il existe un triangle distingué
X
-X⊕Y
-Y
et par la proposition 1.3.11, X ⊕ Y ∈ Ob(C ).
- X [1]
1.3. t-structures
51
b) Démontrons que tout morphisme de C a un noyau et un conoyau.
Soit f ∈ Hom C (X, Y ). Par (TD 2), il existe un triangle distingué dans T
f
-Y
X
-Z
- X [1].
Par le lemme précédent,
H 0 (Z ) ' coker(f )
H 0 (Z [−1]) ' ker(f ).
c) Finalement, établissons que pour tout f ∈ Hom C (X, Y ), coim(f ) ' im(f ).
Vu b), on a le triangle distingué
f
g
-Y
X
h
-Z
- X [1]
avec Z ∈ Ob(T ≤0 ∩ T ≥−1 ) et en reprenant les notations du lemme précédent, plongeons le morphisme
T ≥0(Z ) ◦ g : Y
- τ ≥0 (Z )
dans le triangle distingué
Y
T ≥0 ( Z ) ◦ g
- τ ≥0 (Z )
-W
- Y [1].
Par (TD 3), on a le triangle distingué
(τ ≥0 (Z ))[−1]
- W [−1]
- τ ≥0 (Z ),
-Y
et comme Y, (τ ≥0 (Z ))[−1] ∈ Ob(T ≥0 ), W [−1] ∈ Ob(T ≥0 ). Puisque on a les triangles
distingués
g
-Z
Y
Z
- X [1]
T ≥0 ( Z )
- τ ≥0 (Z )
Y
- Y [1]
- (τ ≤−1 (Z ))[1]
T ≥0 ( Z ) ◦ g
- τ ≥0 (Z )
-W
- Z [1]
- Y [1],
par l’axiome de l’octaèdre, on a le triangle distingué suivant.
X [1]
-W
- (τ ≤−1 (Z ))[1]
- X [2]
On a donc le triangle distingué
X
- W [−1]
- τ ≤−1 (Z )
- X [1]
et comme X , τ ≤−1 (Z ) ∈ Ob(T ≤0 ), W [−1] ∈ Ob(T ≤0 ). Par conséquent, W [−1] ∈
Ob(C ).
Comme on a le triangle distingué
(τ ≤−1 (Z ))[−1]
-X
- W [−1]
- τ ≤−1 (Z ),
52
1. Catégories triangulées et t-structures
et que par la remarque 1.3.6,
(τ ≤−1 (Z ))[−1] ' τ ≤0 (Z [−1])
' ker(f ),
on a alors le triangle distingué
-X
ker(f )
- W [−1]
- ker(f )[1]
et par le lemme précédent,
H 0 (W [−1]) ' coim(f )
' W [−1]
car W [−1] ∈ Ob(C ).
Comme τ ≥0 (Z ) ' coker(f ), on a le triangle distingué
- coker(f )
Y
-W
- Y [1],
et par le lemme précédent,
H 0 (W [−1]) ' im(f )
' W [−1],
d’où le résultat.
Proposition 1.3.16. Si
-X
0
f
-Y
-Z
-0
est une suite exacte dans le cœur C , alors il existe un unique h ∈ Hom T (Z, X [1]) tel
que
X
f
-Y
-Z
h
- X [1]
soit un triangle distingué dans T .
Preuve. On peut supposer Z ' coker f . Par (TD 3), il existe un triangle distingué
dans T
X
f
-Y
- Z0
- X [1]
avec Z 0 ∈ Ob(T ≤0 ∩ T ≥−1 ). Comme Z 0 [−1] ∈ Ob(T ≥0 ), H 0 (Z 0 [−1]) ' τ ≤0 (Z 0 [−1])
et par le lemme 1.3.14, on a
τ ≤0 (Z 0 [−1]) ' ker f ' 0
1.3. t-structures
53
car f est un monomorphisme. Par conséquent, Z 0[−1] ∈ Ob(T ≥1 ) et donc, Z 0 ∈
Ob(C ). Il s’ensuit que
H 0 (Z 0 ) ' Z 0
' coker f
' Z,
et on a alors le triangle distingué suivant.
-Y
X
-Z
h
- X [1]
L’unicité de h résulte du lemme 1.3.4.
- C est un foncteur cohomologique.
Théorème 1.3.17. Le foncteur H 0 : T
Preuve. Si
X
f
-Y
g
-Z
h
- X [1]
est un triangle distingué, établissons que
H 0 (X )
- H 0 (Y )
- H 0 (Z )
est une suite exacte dans C .
On va décomposer la preuve en quatre étapes.
a) Supposons que X , Y , Z ∈ Ob(T ≥0 ) et démontrons que la suite
0
- H 0 (X )
- H 0 (Y )
- H 0 (Z )
est exacte.
Soit W ∈ Ob(C ). Comme Hom (W, .) est un foncteur cohomologique, on a la suite
exacte suivante.
(†)
Hom T (W, Z [−1])
- Hom (W, X )
T
- Hom (W, Y )
T
- Hom (W, Z )
T
Puisque W ∈ Ob(T ≤0 ) et Z [−1] ∈ Ob(T ≥1 ), on a
Hom T (W, Z [−1]) ' 0.
De plus, il vient
Hom T (W, X ) ' Hom T ≤0 (W, τ ≤0(X ))
' Hom T ≤0 (W, H 0(X ))
car X ∈ Ob(T ≥0 ). On a alors la suite exacte
0
- Hom (W, H 0 (X ))
T
- Hom (W, H 0 (Y ))
T
- Hom (W, H 0 (Z )),
T
et on obtient donc la suite exacte
0
- H 0 (X )
- H 0 (Y )
- H 0 (Z ).
54
1. Catégories triangulées et t-structures
b) Supposons que Z ∈ Ob(T ≥0 ) et démontrons que la suite
0
- H 0 (X )
- H 0 (Y )
- H 0 (Z )
est exacte.
Soit W ∈ Ob(T ≤−1 ). Comme on a la suite exacte (†) et comme
Hom T (W, Z ) ' Hom T (W, Z [−1]) ' 0,
il vient
Hom T ≤−1 (W, τ ≤−1 (X )) ' Hom T (W, X )
' Hom T (W, Y )
' Hom T ≤−1 (W, τ ≤−1 (Y )),
et donc, τ ≤−1 (X ) ' τ ≤−1 (Y ). Par conséquent, on a les trois triangles distingués
τ ≤−1 (Y )
- τ ≥0 (X )
-X
X
τ ≤−1 (Y )
-Y
-Y
-Z
- τ ≤−1 (Y )[1]
- X [1]
- τ ≥0 (Y )
- τ ≤−1 (Y )[1],
et par l’axiome de l’octaèdre, on obtient le triangle distingué suivant.
τ ≥0 (X )
- τ ≥0 (Y )
- τ ≥0 (X )[1]
-Z
Or, τ ≥0 (X ), τ ≥0 (Y ) et Z appartiennent à Ob(T ≥0 ) et en appliquant la première
étape, la suite
0
- H 0 (τ ≥0 (X ))
- H 0 (τ ≥0 (Y ))
- H 0 (Z )
est exacte. Bien sûr, H 0 (τ ≥0 (X )) ' H 0 (X ) et on a le résultat annoncé.
c) Par dualité, si X ∈ Ob(T ≤0 ), la suite
- H 0 (Y )
H 0 (X )
- H 0 (Z )
-0
est exacte.
d) Démontrons le cas général. Comme on a les trois triangles distingués
τ ≤0(X )
-X
X
τ ≤0 (X )
- τ ≥1 (X )
-Y
-Y
-Z
-W
- τ ≤0 (X )[1]
- X [1]
- τ ≤0 (X )[1],
par l’axiome de l’octaèdre, on obtient le triangle distingué suivant.
τ ≥1 (X )
-W
-Z
- τ ≥1 (X )[1]
-W
- τ ≤0 (X )[1],
Si on applique c) au triangle distingué
τ ≤0 (X )
-Y
1.4. Localisation d’une t-structure
55
la suite
H 0 (X )
- H 0 (Y )
- H 0 (W )
-0
est exacte et si on applique b) au triangle distingué
W
- τ ≥1 (X )[1]
-Z
- W [1],
la suite
0
- H 0 (W )
- H 0 (τ ≥1 (X )[1])
- H 0 (Z )
est exacte. On en déduit que la suite
- H 0 (Y )
H 0 (X )
- H 0 (Z )
est exacte, d’où la conclusion.
1.4. Localisation d’une t-structure
Théorème 1.4.1. Soient N un système nul de T et
- T /N
Q:T
le foncteur canonique associé à la localisation de T par N . Désignons par Q(T ≤0 )
(resp. Q(T ≥0 )) l’image essentielle de Q|T ≤0 (resp. Q|T ≥0 ). Alors,
(Q(T ≤0 ), Q(T ≥0 ))
est une t-structure sur T /N si pour tout triangle distingué
X1
u
- X0
v
-N
- X1 [1]
de T tel que X1 ∈ Ob(T ≥1 ), X0 ∈ Ob(T ≤0 ) et N ∈ N , on a X0 , X1 ∈ N .
Preuve. Seul le deuxième axiome de la définition d’une t-structure n’est pas évident.
Soient X0 ∈ Ob(T ≤0 ) et X1 ∈ Ob(T ≥1 ). Démontrons que
Hom T /N (Q(X0 ), Q(X1)) = 0.
Un morphisme α ∈ Hom T /N (Q(X0 ), Q(X1 )) est représenté par le diagramme
Z
s
@a
@
R
@
X0
X1
avec s ∈ Hom T (Z, X0 ), s ∈ S (N ) et a ∈ Hom T (Z, X1 ). Il existe donc un triangle
distingué dans T
Z
s
- X0
-N
- Z [1]
avec N ∈ N . On a aussi un triangle distingué dans T
Z0
t
-Z
- Z1
- Z0 [1]
56
1. Catégories triangulées et t-structures
avec Z0 ∈ Ob(T ≤0 ) et Z1 ∈ Ob(T ≥1 ). De plus, par (TD 2), il existe un triangle
distingué dans T
s◦t
Z0 - X0 - N0 - Z0 [1],
et par la proposition 1.3.8, N0 ∈ Ob(T ≤0 ). Par l’axiome de l’octaèdre, on obtient le
triangle distingué
Z1 - N0 - N - Z1 [1],
et notre hypothèse montre que Z1 , N0 ∈ N . Par conséquent, t ∈ S (N ) et comme
Hom T (Z0 , X1 ) = 0,
on a le diagramme commutatif suivant.
X0
I s◦t
s s ◦6t @
@
@
id
t
X0
Z
Z0
Z0
@
@
R
a@
0
? 0
X1
On en déduit que
(Z, s, a)R(Z0 , s ◦ t, 0),
et donc α = 0, d’où la conclusion.
Remarque 1.4.2. Sous les hypothèses du théorème précédent,
τ ≤0 (N ) ⊂ N ,
τ ≥0 (N ) ⊂ N .
En effet, soit N ∈ N . Comme on a le triangle distingué
τ ≤0 (N )
-N
- τ ≥1 (N )
- τ ≤0 (N )[1],
le triangle
τ ≥1 (N )[−1]
- τ ≤0 (N )
-N
- τ ≥1 (N )
est distingué. Or,
τ ≥1 (N )[−1] ' τ ≥2 (N [−1]),
ce qui implique que τ ≥1 (N )[−1], τ ≤0 (N ) ∈ Ob(N ).
CHAPITRE 2
Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
2.1. Catégorie K (A) associée à une catégorie additive A
Dans toute cette section, A est une catégorie additive.
Définition 2.1.1. Un complexe X de A est la donnée d’une suite infinie
. . . X k−1
dkX−1
- Xk
dkX
- X k+1 . . .
telle que pour tout k ∈ Z, X k ∈ Ob(A), dkX ∈ Hom A (X k , X k+1 ) et dkX ◦ dkX−1 = 0.
La famille dX = {dkX }k∈ est la différentielle du complexe X .
Soient X et Y deux complexes de A. Un morphisme de complexes f : X - Y
est une suite de morphismes f k ∈ Hom A (X k , Y k ), k ∈ Z, telle que
Z
dkY ◦ f k = f k+1 ◦ dkX
∀k ∈ Z.
On note C (A) la catégorie des complexes ainsi obtenue. On peut vérifier qu’il
s’agit d’une catégorie additive.
Un complexe X est dit borné (resp. borné inférieurement ; borné supérieurement )
si X k = 0 pour |k | >> 0(resp. pour k << 0; pour k >> 0).
On note C b (A) (resp. C + (A), resp. C − (A)) la sous-catégorie pleine de C (A)
formée des complexes bornés (resp. bornés inférieurement; bornés supérieurement).
Définition 2.1.2. Un morphisme f ∈ Hom C (A) (X, Y ) est homotope à zéro s’il existe
une famille de morphismes sk ∈ Hom A (X k , Y k−1 ), k ∈ Z, telle que
f k = dkY−1 ◦ sk + sk+1 ◦ dkX ,
∀k ∈ Z.
Schématiquement,
...
X
k−1
dkX−1 -
f k−1
?
...
Y k−1
s
Xk
fk
k
dkY−1
dkX -
?
- Yk
s
dkY
X k+1
k+1
...
f k+1
?
- Y k+1
...
Deux morphismes f , g ∈ Hom C (A) (X, Y ) sont homotopes si f − g est homotope
à zéro.
57
58
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Pour X , Y ∈ Ob(C (A)), on pose
Ht(X, Y ) = {f : X
- Y homotope à zéro }.
On vérifie facilement qu’il s’agit d’un sous-groupe de Hom C (A) (X, Y ) stable pour la
composition.
Définition 2.1.3. On définit une nouvelle catégorie K (A) par
Ob(K (A)) = Ob(C (A)),
Hom K (A) (X, Y ) = Hom C (A) (X, Y )/Ht(X, Y ).
Définition 2.1.4. Soit X ∈ Ob(C (A)). On définit un nouveau complexe X [1] en
posant
X [1]k = X k+1 ,
dkX [1] = −dkX+1 .
- Y [1] en posant
Soit f ∈ Hom C (A) (X, Y ). On définit f [1] : X [1]
f [1]k = f k+1 .
On vient donc de définir un automorphisme
- C (A).
[1] : C (A)
Définition 2.1.5. Soit f ∈ Hom C (A) (X, Y ). Le mapping cone de f noté M (f ) est
l’objet de C (A) défini de la manière suivante :
M (f )k = X k+1 ⊕ Y k ,
dkM (f ) =
−dkX+1 0
f k+1 dkY
!
.
(On vérifie facilement que dkM (f ) ◦ dkM−(1f ) = 0, pour tout k ∈ Z.)
- M (f ) et β (f ) : M (f )
On définit les morphismes α(f ) : Y
!
α(f )k =
et
k
0
idY k
β (f ) = idX k+1
0 .
On vérifie directement qu’il s’agit de morphismes de complexes.
- X [1] par
2.1. Catégorie K (A) associée à une catégorie additive A
59
Lemme 2.1.6. Pour tout f ∈ Hom C (A) (X, Y ), il existe un isomorphisme
ϕ ∈ Hom K (A)(X [1], M (α(f )))
tel que le diagramme
)
α(f -
Y
idY
β (f ) X [1]
M (f )
idM (f )
?
)
α(f -
Y
?
α(α(f ))
-
Y [1]
idY [1]
ϕ
M (f )
−f [1]-
?
M (α(f ))
β (α(f ))-
?
Y [1]
commute dans K (A).
Preuve. On a
M (α(f ))k = Y k+1 ⊕ M (f )k ' Y k+1 ⊕ X k+1 ⊕ Y k ,
et
dkM (α(f )) =
Définissons ϕ : X [1]
et ψ : M (α(f ))
−dkY+1
k+1
α(f )
0
dkM (f )
!


0
0
−dkY+1


= 0
−dkX+1 0  .
idY k+1 f k+1 dkY
- M (α(f )) par
- X [1] par


−f k+1


ϕk =  idX k+1  ,
0
ψ k = 0 idX k+1 0 .
Démontrons que ϕ et ψ sont des morphismes de complexes. On a successivement



0
0
−dkY+1
−f k+1



dkM (α(f )) ◦ ϕk =  0
−dkX+1 0  idX k+1 
idY k+1 f k+1 dkY
0


dkY+1 ◦ f k+1


=  −dkX+1 
0


f k+2 ◦ dkX+1


=  −dkX+1 
0
= ϕk+1 ◦ dkX [1] ,
60
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
et


k+1
0
0
−dY


ψ k+1 ◦ dkM (α(f )) = 0 idX k+2 0  0
−dkX+1 0 
idY k+1 f k+1 dkY
= 0 −dkX+1 0
= dkX [1] ◦ ψ k .
Montrons maintenant que ϕ et ψ sont inverses l’un de l’autre dans K (A). D’une
part, on a


k+1
−f


ψ k ◦ ϕk = 0 idX k+1 0 idX k+1 
0
= idX k+1
= idX [1]k .
D’autre part, ϕ ◦ ψ est homotope à idM (α(f )) car la famille de morphismes
sk : M (α(f ))k
définie par
- M (α(f ))k−1


0 0 idY k


sk = 0 0 0 
0 0 0
vérifie
idM (α(f ))k −ϕk ◦ ψ k = sk+1 ◦ dkM (α(f )) + dkM−(1α(f )) ◦ sk .
En effet, il vient

 

idY k+1
0
0
−f k+1 
 

idM (α(f ))k −ϕk ◦ ψ k =  0
idX k+1
0  − idX k+1  0 idX k+1 0
0
0
idY k
0

 

idY k+1
0
0
0 −f k+1 0

 

= 0
idX k+1
0  − 0 idX k+1 0
0
0
idY k
0
0
0


idY k+1 f k+1
0


= 0
0
0 ,
0
0
idY k
2.1. Catégorie K (A) associée à une catégorie additive A
et
61



0 0 idY k+1
0
0
−dkY+1



sk+1 ◦ dkM (α(f )) + dkM−(1α(f )) ◦ sk = 0 0
0  0
−dkX+1 0 
0 0
0
idY k+1 f k+1 dYk



0
0
0 0 idY k
−dkY



+ 0
0  0 0 0 
−dkX
idY k f k dkY−1
0 0 0

 

idY k+1 f k+1 dkY
0 0 −dkY

 

= 0
0
0  + 0 0
0 
0 0 idY k
0
0
0


idY k+1 f k+1
0


= 0
0
0 .
0
0
idY k
Il nous reste à démontrer que le diagramme figurant dans l’énoncé commute.
Puisque


!
0
0
0


= idX k+1
α(α(f ))k =
0 ,
idM (f )k
0
idY k
il vient

0

ψ k ◦ α(α(f ))k = 0 idX k+1 0 idX k+1
0
= idX k+1 0

0

0 
idY k
= β (f )k .
On en déduit que ϕ ◦ β (f ) = α(α(f )) dans K (A). Finalement, on a


k+1
f
−


β (α(f ))k ◦ ϕk = idY k+1 0 0 idX k+1 
0
= −f k+1
= −f [1]k .
Théorème 2.1.7. La catégorie K (A) munie de l’automorphisme [1] et des triangles
isomorphes à ceux du type
X
f
-Y
α (f )
- M (f )
β (f )
- X [1]
62
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
est une catégorie triangulée.
Preuve. On doit vérifier que les différents axiomes d’une catégorie triangulée sont
satisfaits par K (A).
(TD 0) et (TD 2) sont évidents.
f
(TD 3) Soit X - Y - Z - X [1] un triangle distingué dans K (A). On peut
supposer qu’il est isomorphe à
f
α (f )
-Y
X
β (f )
- M (f )
- X [1].
Par le lemme précédent, il existe un isomorphisme ϕ ∈ Hom K (A) (X [1], M (α(f ))) tel
que le diagramme
Y
α(f )
idY
β (f ) X [1]
M (f )
ϕ
idM (f )
?
Y
?
α(f )
−f [1] -
α(α(f ))
-
M (f )
Y [1]
idY [1]
?
M (α(f ))
β (α(f ))-
?
Y [1]
commute dans K (A) et
Y
- M (f )
−f [1]
- X [1]
- Y [1]
est donc un triangle distingué.
(TD 1) Le mapping cone du morphisme f : 0
- X est donné par
M (f )k = X k
dkM (f ) = dkX ,
et α(f ) = idX , β (f ) = 0. Par conséquent, le triangle
-X
0
idX
-X
-0
est distingué et par(TD 3), on a le triangle distingué suivant.
X
idX
-X
-0
- X [1]
-Z
- X [1],
(TD 4) Soient
X
X0
f
-Y
f0
- Y0
- Z0
- X 0 [1]
deux triangles distingués dans K (A) et un carré commutatif dans K (A).
X
u
f-
Y
v
? f0
?
- Y0
X0
2.1. Catégorie K (A) associée à une catégorie additive A
63
On peut supposer que les deux triangles distingués sont isomorphes à
X
f
α( f )
f0
α( f 0 )
-Y
β (f )
- M (f )
- X [1],
et
X0
- Y0
- M (f 0 )
β (f 0 )
- X 0 [1]
respectivement. Comme v ◦ f = f 0 ◦ u dans K (A), pour tout k ∈ Z, il existe
0
sk ∈ Hom (X k , Y k−1 ) tel que
0
k
v k ◦ f k − f k ◦ uk = dkY−0 1 ◦ sk + sk+1 ◦ dX
.
On définit w : M (f )
- M (f 0 ) par
k
w =
uk+1 0
sk+1 v k
!
.
Il s’agit d’un morphisme de complexes car
!
!
k+1
k+1
d
u
0
0
−
X0
dkM (f 0) ◦ wk =
0
f k+1 dkY 0
sk+1 v k
!
=
k+1
0
−dkX+1
0 ◦ u
0 k+1
f
◦ uk+1 + dYk 0 ◦ sk+1 dkY 0 ◦ v k
=
0
−uk+2 ◦ dkX+1
k+1
k+1
k+1
k+2
k+1
v
v
◦f
−s
◦ dX
◦ dkY
et
wk+1 ◦ dkM (f ) =
=
!
k+2
u
0
k+2
k+1
s
v
−dkX+1
k+1
f
!
!
0
dkY
−uk+2 ◦ dkX+1
0
k+1
k+1
k+1
k+2
k+1
v
v
◦f
−s
◦ dX
◦ dYk
De plus, α(f 0 ) ◦ v = w ◦ α(f ) car
wk ◦ α(f )k =
=
uk+1 0
sk+1 v k
!
0
vk
!
= α(f 0 )k ◦ v k ,
,
!
0
idY k
!
.
64
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
et β (f 0 ) ◦ w = u[1] ◦ β (f ) car
uk+1 0
0 k
k
0
β (f ) ◦ w = idX k+1 0
sk+1 v k
= uk+1 0
!
= uk+1 ◦ β (f )k
= u[1]k ◦ β (f )k .
On a donc le morphisme de triangles distingués suivant.
f
X
)
α(f -
-Y
u
M (f )
v
?
X0
β (f )-
w
X [1]
u[1]
?
?
0
f0 - ?
α(f )
β (f 0 )
Y0
M (f 0 )
X 0 [1]
(TD 5) Considérons trois triangles distingués
X
Y
X
Définissons u : M (f )
g ◦f
f
-Y
α (f )
β (f )
g
α(g )
β (g )
- Z
- Z
- M (f )
- M (g )
- X [1]
α(g ◦f )
- M (g ◦ f )
- Y [1]
β (g ◦f )
- X [1].
- M (g ◦ f ) et v : M (g ◦ f )
uk : M (f )k = X k+1 ⊕ Y k
uk =
- M (g ◦ f )k = X k+1 ⊕ Z k
!
idX k+1 0
0
gk
v k : M (g ◦ f )k = X k+1 ⊕ Z k
vk =
- M (g ) par
,
- M (g )k = Y k+1 ⊕ Z k
f k+1
0
0
idZ k
!
.
Montrons que u et v sont des morphismes de complexes. On a successivement
!
!
k+1
d
−
0
id
0
+1
k
X
X
dkM (g◦f ) ◦ uk =
g k+1 ◦ f k+1 dkZ
gk
0
!
−dkX+1
0
=
g k+1 ◦ f k+1 dkZ ◦ g k
!
−dkX+1
0
,
=
g k+1 ◦ f k+1 g k+1 ◦ dkY
2.1. Catégorie K (A) associée à une catégorie additive A
!
idX k+2
0
k+1
g
0
uk+1 ◦ dkM (f ) =
−dkX+1
g k+1 ◦ f k+1
=
−dkX+1 0
f k+1 dkY
!
0
,
g k+1 ◦ dkY
!
et
−dkY+1 0
g k+1 dkZ
dkM (g) ◦ v k =
!
=
−dkY+1 ◦ f k+1
g k+1 ◦ f k+1
=
−f k+2 ◦ dkX+1
g k+1 ◦ f k+1
!
v k+1 ◦ dkM (g◦f ) =
f k+2
0
0
idZ k+1
=
−f k+2 ◦ dkX+1
g k+1 ◦ f k+1
f k+1
0
0
idZ k
!
0
dZk
!
0
,
dZk
!
−dkX+1
0
k+1
k+1
g
dZk
◦f
!
0
.
dkZ
!
- M (f )[1] par
Définissons w : M (g)
w = α(f )[1] ◦ β (g).
Alors, le diagramme suivant est commutatif.
X
idX
f
? g◦f
X
f
?
Y
α(f )
?
M (f )
En effet, on a
-Y
g
-Z
idZ
g
?
?
-Z
α(g ◦ f )
?
uM (g ◦ f )
α(f ) M (f )
u
β (f ) X [1]
idX [1]
α(g ◦ f-)
β (g ◦ f ) - ?
M (g ◦ f )
X [1]
?
v
?
α(g) M (g )
idM (g)
v
?
- M (g )
f [1]
β (g ) - ?
Y [1]
α(f )[1]
?
w M (f )[1]
65
66
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
i) u ◦ α(f ) = α(g ◦ f ) ◦ g car
!
!
idX k+1 0
gk
0
!
0
gk
uk ◦ α(f )k =
=
0
idY k
= α(g ◦ f )k ◦ g k ;
ii) β (g ◦ f ) ◦ u = β (f ) car
β (g ◦ f )k ◦ uk = idX k+1
= idX k+1
id k+1 0
X
0
gk
0
0
!
= β (f )k ;
iii) v ◦ α(g ◦ f ) = α(g ) car
v k ◦ α(g ◦ f )k =
=
f k+1
0
0
idZ k
!
0
idZ k
!
!
0
idZ k
= α(g )k ;
iv) β (g ) ◦ v = f [1] ◦ β (g ◦ f ) car
f k+1
0
β (g )k ◦ v k = idY k+1 0
0
idZ k
= f k+1 0
!
= f [1]k ◦ β (g ◦ f )k .
Il nous reste à démontrer que
M (f )
u
- M (g ◦ f )
v
- M (g )
w
- M (f )[1]
est un triangle distingué. On va construire un isomorphisme dans K (A)
ϕ : M (u)
- M (g )
ψ : M (g )
- M (u)
et son inverse
tels que
ϕ ◦ α(u) = v,
β (u) ◦ ψ = w,
2.1. Catégorie K (A) associée à une catégorie additive A
et on aura alors l’isomorphisme de triangles suivant.
M (f )
id
?
M (f )
u-
M (g ◦ f )
id
u-
α(u-)
M (u )
ϕ
?
M (g ◦ f )
v-
?
M (g )
β (u-)
M (f )[1]
id
w-
?
M (f )[1]
On a
M (u)k = M (f )k+1 ⊕ M (g ◦ f )k ' X k+2 ⊕ Y k+1 ⊕ X k+1 ⊕ Z k ,
et

dkM (u) =
−dkM+1
(f )
uk+1

k+2
0
0
0
d
X
!
−f k+2 −dk+1
0
0
0


Y
=

.
idX k+2
−dkX+1
0
0
dkM (g◦f )
0
g k+1 g k+1 ◦ f k+1 dkZ
Comme
M (g )k = Y k+1 ⊕ Z k ,
on définit ϕ et ψ par
0 idY k+1 f k+1
0
ϕk =
0
0
0
idZ k


0
0
id
0 
 Y k+1

k
ψ =
.
 0
0 
0
idZ k
!
Ce sont des morphismes de complexes car d’une part,
!
!
k+1
k+1
−
0
0
id
0
d
f
k
+1
Y
Y
dkM (g) ◦ ϕk =
k+1
k
0
0
0
idZ k
g
dZ
!
0 −dkY+1 −dkY+1 ◦ f k+1 0
=
0 g k+1
g k+1 ◦ f k+1 dkZ
!
0 −dkY+1 −f k+2 ◦ dkX+1 0
=
,
0 g k+1
g k+1 ◦ f k+1 dkZ
et
!
ϕk+1 ◦ dkM (u) =
0 idY k+2 f k+2
0
0
0
0
idZ k+1
=
0 −dkY+1 −f k+2 ◦ dkX+1
g k+1 ◦ f k+1
0 g k+1


dkX+2
0
0
0
−f k+2 −dk+1
0
0


Y


k+1
idX k+2
−dX
0
0
g k+1 g k+1 ◦ f k+1 dkZ
0
!
0
,
dkZ
67
68
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
et d’autre part,



0
0
0
0
0
dkX+2
−f k+2 −dk+1

0 
0
0

 idY k+1

Y
dkM (u) ◦ ψ k = 


k+1
idX k+2
0 
0
0  0
−dX
0
idZ k
0
g k+1 g k+1 ◦ f k+1 dkZ


0
0
−dk+1 0 


= Y
,
 0
0
g k+1 dkZ
et

0
0
0
0

id
 −dk+1 0
 k+2

Y
= Y

 0
 g k+1 dkZ
0
idZ k+1


0
0
−dk+1 0 


= Y
.
 0
0
g k+1 dkZ
ψ k+1 ◦ dkM (g)
De plus, ϕ ◦ α(u) = v car
ϕ ◦ α(u) =
k
k
=
0 idY k+1 f k+1
0
0
0
0
idZ k
0
f k+1
0
idZ k
!
!

0
0



idX k+1
0
!

0
0 


0 
idZ k
= v k,
et β (u) ◦ ψ = w car
β (u )k ◦ ψ k =
=
idX k+2
0
0 0
0
idY k+1 0 0
0
idY k+1
= wk .
!
0
0
!

0
id
 Y k+1

 0
0

0
0 


0 
idZ k
2.1. Catégorie K (A) associée à une catégorie additive A
69
Il nous reste donc à démontrer que ϕ et ψ sont des isomorphismes dans K (A). Tout
d’abord, ϕ ◦ ψ = idM (g) car


0
0
!
id
0 
0 idY k+1 f k+1
0
 Y k+1

k
k
ϕ ◦ψ =


0
0
0
idZ k  0
0 
0
idZ k
!
idY k+1
0
=
0
idZ k
= idM (g)k .
Ensuite, ψ ◦ ϕ est homotope à l’identité car le morphisme
sk : M (u)k
défini par

0
0

sk = 
0
0
- M (u)k−1
0 idX k+1
0
0
0
0
0
0

0
0


0
0
vérifie
idM (u)k −ψ k ◦ ϕk = sk+1 ◦ dkM (u) + dkM−(1u) ◦ sk .
En effet, on a


idX k+2
0
0
0
 0
idY k+1
0
0 


k
k
idM (u)k −ψ ◦ ϕ = 

 0
0
idX k+1
0 
0
0
0
idZ k


0
0
!
id
0 
0
 Y k+1
 0 idY k+1 f k+1
−

 0
0  0
0
0
idZ k
0
idZ k

 

0
0
0
0
idX k+2
0
0
0
 0

0 
idY k+1
0
0 

 0 idY k+1 f k+1

=
−

 0
0
0
0 
0
idX k+1
0  0
0
0
0
idZ k
0
0
0
idZ k


idX k+2 0
0
0
 0
k+1
0 −f
0


=
,
 0
0 idX k+1 0
0
0
0
0
70
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
et

0
0

sk+1 ◦ dkM (u) + dkM−(1u) ◦ sk = 
0
0
  k+2

0
0
0
0 idX k+2 0
dX

k+1
0
0
0
0
0
 −f k+2 −dY



k+1
0
0
0
0
0 idX k+2
−dX
0
0
0
0
g k+1 g k+1 ◦ f k+1 dkZ
 k+1


0 0 idX k+1 0
0
0
0
dX
−f k+1 −dk

0
0
0
0 

 0 0

Y
+


k
idX k+1
0
0
0
0  0 0
−dX
0 0
0
0
0
g k g k ◦ f k dkZ−1




0 0 dkX+1 0
idX k+2 0 −dkX+1 0
 0


0
0
0

 0 0 −f k+1 0
=
+

 0
0
0
0 0 0 idX k+1 0
0 0
0
0
0
0
0
0


idX k+2 0
0
0
 0
k+1
0 −f
0


=
,
 0
0 idX k+1 0
0
0
0
0
d’où la conclusion.
2.2. t-structure sur K (A)
Dans toute cette section, A désigne une catégorie additive telle que tout morphisme possède un noyau et un conoyau.
Définition 2.2.1. Une suite
A
-B
-C
de A est fortement exacte si pour tout X ∈ Ob(A), la suite de groupes abéliens
- Hom (X, B )
A
Hom A (X, A)
- Hom (X, C )
A
est exacte.
Plus généralement, une suite
A0
- A1 . . .
- An
est fortement exacte si la suite
Ak−1
- Ak
- Ak+1
est fortement exacte pour tout k ∈ {1, . . . , n − 1}.
2.2. t-structure sur K (A)
71
Exemple 2.2.2. i) La suite
0
-A
u
-B
est fortement exacte si et seulement si u est un monomorphisme.
ii) La suite
A
u
-B
-0
est fortement exacte si et seulement si u a une section, i.e., il existe s ∈ Hom A (B, A)
tel que u ◦ s = idB .
iii) Une suite
0
-A
u
v
-B
- C
est fortement exacte si et seulement si (A, u) est un noyau de v .
iv) Une suite courte
-A
0
u
-B
v
-C
-0
est fortement exacte si et seulement si elle est scindée.
-A
Preuve. i) La suite 0
X ∈ Ob(A), la suite
0
u
- B est fortement exacte si et seulement si pour tout
- Hom (X, A)
Hom (X,u)
- Hom (X, B )
est exacte. Soit f ∈ Hom (X, A) tel que
Hom (X, u)(f ) = u ◦ f = 0.
Par conséquent, Hom (X, u) est injectif pour tout X ∈ Ob(A), si et seulement si u
est un monomorphisme.
u
ii) La suite A - B - 0 est fortement exacte si pour tout X ∈ Ob(A), la suite
Hom (X, A)
- Hom (X, B )
-0
est exacte.
La condition est nécessaire. En effet, la suite
Hom (B,u)
Hom (B, A)
- Hom (B, B )
-0
étant exacte, il existe s ∈ Hom (B, A) tel que
Hom (B, u)(s) = u ◦ s = idB .
La condition est suffisante. Soit X ∈ Ob(A). La suite
Hom (X,u)
Hom (X, A)
- Hom (X, B )
-0
est exacte car si f ∈ Hom (X, B ), alors s ◦ f ∈ Hom (X, A) et
Hom (X, u)(s ◦ f ) = u ◦ s ◦ f = f.
72
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
iii) La suite 0
la suite
0
-A
u
-B
- Hom (X, A)
v
- C est fortement exacte si pour tout X ∈ Ob(A),
Hom (X,u)
- Hom (X, B )
Hom (X,v)
- Hom (X, C )
est exacte.
La condition est nécessaire. En effet, soient X ∈ Ob(A) et f ∈ Hom (X, B ) tels
que v ◦ f = 0. Par conséquent,
f ∈ ker(Hom (X, v )) = im(Hom (X, u)),
et il existe donc f 0 ∈ Hom (X, A) tel que
Hom (X, u)(f 0 ) = u ◦ f 0 = f.
Ainsi, le diagramme
u-
A
I
@
@
v-
B
6
f
f0 @
C
0
X
commute et (A, u) est un noyau de v .
La condition est suffisante. En effet, la suite
0
-A
u
-B
est fortement exacte car u est un monomorphisme. De plus, pour tout X ∈ Ob(A),
on vérifie facilement que la suite
Hom (X,u)
Hom (X, A)
- Hom (X, B )
Hom (X,v)
- Hom (X, C )
est exacte.
iv) La condition est évidemment suffisante, montrons qu’elle est nécessaire. Pour
tout X ∈ Ob(A), la suite
0
- Hom (X, A)
Hom (X,u)
- Hom (X, B )
Hom (X,v)
- Hom (X, C )
-0
est exacte. Ainsi v a une section s. Le morphisme Hom (X, s) est alors une section
de Hom (X, v ). Par conséquent, pour tout X ∈ Ob(A) on a l’isomorphisme
Hom (X, A) ⊕ Hom (X, C )
- Hom (X, B )
(a, c) 7−→ u ◦ a + s ◦ c.
Il s’ensuit que Hom (., A) ⊕ Hom (., C ) ' Hom (., B ), et donc B ' A ⊕ C .
2.2. t-structure sur K (A)
73
Proposition 2.2.3. La suite
u
v
-B
A
-C
est fortement exacte si et seulement si la suite courte
0
- ker u
-A
- ker v
- 0
est fortement exacte et donc scindée.
Preuve. Pour tout X ∈ Ob(A), la suite
Hom (X,u)
- Hom (X, B )
Hom (X, A)
Hom (X,v )
- Hom (X, C )
est exacte.
Rappelons que pour tout X ∈ Ob(A), on a la suite exacte
0
- Hom (X, ker u0 )
- Hom (X, A)
Hom (X,u0 )
- Hom (X, ker v )
où u0 est défini par le diagramme commutatif suivant.
ker v
iv -
v-
B
6
I
@
@
u0 @
C
u
0
A
Démontrons que Hom (X, u0 ) est surjectif. Soit f ∈ Hom (X, ker v ). Comme v ◦iv ◦ f =
0,
iv ◦ f ∈ ker(Hom (X, v )) = im(Hom (X, u)).
Il existe donc f 0 ∈ Hom (X, A) tel que
iv ◦ f = Hom (X, u)(f 0 )
= u ◦ f0
= i v ◦ u0 ◦ f 0 ,
et puisque iv est un monomorphisme, f = u0 ◦ f 0 et Hom (X, u0 ) est surjectif. On en
déduit que pour tout X ∈ Ob(A), la suite
0
- Hom (X, ker u0 )
- Hom (X, A)
- Hom (X, ker v )
- 0
est exacte et donc, que la suite
0
- ker u0
-A
u0
- ker v
-0
est fortement exacte. Comme iv est un monomorphisme, ker u0 ' ker u, d’où la
conclusion car la réciproque est immédiate.
74
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Définition 2.2.4. Par dualité, une suite
A
-B
-C
de A est fortement co-exacte si pour tout X ∈ Ob(A), la suite de groupes abéliens
- Hom (B, X )
Hom (C, X )
- Hom (A, X )
est exacte.
Plus généralement, une suite
- A1 . . .
A0
- An
est fortement co-exacte si la suite
Ak−1
- Ak
- Ak+1
est fortement co-exacte pour tout k ∈ {1, . . . , n − 1}.
Exemple 2.2.5. i) La suite
0
-A
u
-B
est fortement co-exacte si et seulement si u a une rétraction, i.e., il existe r ∈
Hom A (B, A) tel que r ◦ u = idA .
ii) La suite
u
A -B -0
est fortement co-exacte si et seulement si u est un épimorphisme.
iii) Une suite
u
v
A -B -C -0
est fortement co-exacte si et seulement si (C, v ) est un conoyau de u.
iv) Une suite courte
0
-A
u
-B
v
-C
-0
est fortement co-exacte si et seulement si elle est scindée.
Définition 2.2.6. Un complexe X ∈ C (A) est fortement exact (resp. co-exact ) en
degré k si la suite
X k−1
dkX−1
- Xk
dkX
- X k+1
est fortement exacte (resp. co-exacte).
Un complexe est fortement exact (resp. co-exact ) s’il est fortement exact (resp.
co-exact) en tout degré.
Proposition 2.2.7. Pour un complexe X ∈ C (A), les conditions suivantes sont
équivalentes :
i) X est fortement exact,
ii) X est fortement co-exact,
2.2. t-structure sur K (A)
75
iii) X est homotopiquement nul.
Preuve. i) ⇒ iii) Par la proposition 2.2.3, pour tout k ∈ Z,
X k ' ker dkX ⊕ ker dkX+1 .
Le complexe X est alors isomorphe au complexe
0
1
0
1
0 1C
0 1C
B
B
@
A
@
A
0
0
0
0
- ker dk ⊕ ker dk+1
- ker dk+1 ⊕ ker dk+2 . . .
. . . ker dkX−1 ⊕ ker dkX
X
X
X
X
Le morphisme
k
⊕ ker dkX+1
sk : ker dX
défini par
!
0 0
1 0
k
s =
!
0 1
◦ sk + sk+1 ◦
0 0
vérifie
- ker dk−1 ⊕ ker dk
X
X
0 1
0 0
!
=
!
1 0
,
0 1
et le complexe X est donc homotopiquement nul.
iii) ⇒ i) Pour tout k ∈ Z, il existe un morphisme sk ∈ Hom (X k , X k−1 ) tel que
k
= idX k .
dkX−1 ◦ sk + sk+1 ◦ dX
Démontrons que pour tout Z ∈ Ob(A), la suite
Hom (Z, X
k−1
)
Hom (Z,dkX−1 )
- Hom (Z, X k )
Hom (Z,dkX )
- Hom (Z, X k+1 )
est exacte. Bien sûr,
im(Hom (Z, dkX−1 )) ⊂ ker(Hom (Z, dkX )).
Soit f ∈ Hom (Z, X k ) tel que
Hom (Z, dkX )(f ) = dkX ◦ f = 0.
On a
f = dkX−1 ◦ sk ◦ f + sk+1 ◦ dkX ◦ f = dkX−1 ◦ sk ◦ f,
ce qui suffit.
ii) ⇔ iii) s’établit par dualité.
Lemme 2.2.8. Si X est un complexe de C (A), on a le triangle distingué dans K (A)
X0
-X
- X1
- X0 [1]
où X0 est le complexe
. . . X −2
2
d−
X
- X −1
−1
δX
- ker d0
X
-0
76
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
0
(ker dX
est en degré 0), X1 est le complexe
0
i0X
- ker d0
X
d0X
- X0
- X1
- ...
(X 0 est en degré 0).
−1
0
0
est le morphisme canonique de ker dX
dans X 0 et que δX
Preuve. Rappelons que iX
est donné par le diagramme commutatif suivant.
0
iX
-
0
ker dX
I
@
@
−1 @
δ
X
Soit u : X0
0
dX
-
X0
X1
6
−1 dX
0
X −1
- X le morphisme défini par


 idX k
k
u =
i0

 0
si
si
si
k < 0,
k = 0,
k > 0.
Il suffit de démontrer que le mapping cone de u est isomorphe à X1 dans K (A). Le
mapping cone de u est par définition le complexe M donné explicitement par
0
1
−1
0 C
−δ X
B
@
A
−1
0
−2
iX dX
idX −1 dX
d0
d1
- ker d0 ⊕ X −1
- X 0 X- X 1 X- X 2 . . .
. . . X −1 ⊕ X −2
X
Soient α : X1
- M le morphisme défini par
αk =
et β : M





0
idker d0X
0




!
idX k
si
k < −1,
si
k = −1,
si
k > −1,
- X1 le morphisme défini par
βk =


 

0
−1
idker d0X δX
idX k
si
k < −1,
si
k = −1,
si
k > −1.
On a β ◦ α = idX1 . Pour tout k ∈ Z, définissons
sk : M k
par
k
s =





0 idX k
0
0
0
- M k−1
!
si
k < 0,
si
k ≥ 0.
2.2. t-structure sur K (A)
77
Le calcul
sk+1 ◦ dkM + dkM−1 ◦ sk
donne pour k < −2
!
!
k+1
0 idX k+1
0
−dX
+
0
0
idX k+1 dkX
pour k = −2
0 idX −1
0
0
!
−1
0
−δ X
−2
idX −1 dX
!
+
−dkX
−2
0
−dX
−3
idX −2 dX
−1
−δ X
−1
0
0 iX
+
dX
0
idX −1
0
−2
dX
0 idX k
0
0
dkX−1
idX k
pour k = −1
!
!
!
0 idX −2
0
0
0 idX −1
0
0
!
=
!
!
=
=
idX k+1
0
0
idX k
!
,
!
idX −1
0
,
0
idX −2 ,
−1
−δ X
0
0 idX −1
!
,
et donne zéro pour k ≥ 0. De même, le calcul de
idM k −αk ◦ β k
donne pour k < −1
idX k+1
0
0
idX k
pour k = −1
0
idker dX
0
0
idX −1
!
−
0
idker dX
0
!
!
,
−1
=
0
idker dX
δX
−1
0 −δX
0 idX −1
!
,
et zéro pour k > −1.
Ainsi, α ◦ β est homotope à idM k et α, β sont des isomorphismes dans K (A).
D’où la conclusion.
Proposition 2.2.9. Si K ≤n (A) (resp. K ≥n (A)) sont les sous-catégories pleines de
K (A) formées des complexes fortement exacts en degré k > n (resp. k < n), alors
(K ≤0 (A), K ≥0 (A))
est une t-structure canonique sur K (A).
Preuve. On doit vérifier les trois axiomes de la définition d’une t-structure. Le premier résulte de la définition de K ≤n (A), K ≥n (A) et le troisième du lemme précédent.
Il nous reste à démontrer que si X ∈ Ob(K ≤0 (A)) et Y ∈ Ob(K ≥1 (A)) alors
Hom K (A) (X, Y ) = 0. Vu le lemme précédent, on a les deux triangles distingués
suivants.
X0 - X - X1 - X0 [1]
Y0
-Y
- Y1
- Y0 [1]
78
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Comme le complexe X est fortement exact en degré k > 0, il est clair que le complexe
X1 est fortement exact et donc, X1 ' 0 dans K (A). Par le corollaire 1.1.9, X0 ' X .
De même Y0 ' 0 et Y ' Y1 . Il suffit donc de démontrer que
Hom K (A) (X0 , Y1 ) = 0.
Soit u ∈ Hom K (A) (X0 , Y1 ). Comme le diagramme
. . . X −2
u−2
...
?
0
−2
dX
-
X −1
u−1
?
- ker d0
Y
−1
δX
-
0
ker dX
u0
iY0 - ?
Y0
-0
...
u1
dY0- ?
Y1 ...
commute, il vient uk = 0 si k ≤ −2 ou si k ≥ 1, et
−2
= 0,
u−1 ◦ dX
dY0 ◦ u0 = 0,
−1
= i0Y ◦ u−1 .
u0 ◦ δ X
0
Par définition du noyau de dY0 , il existe un unique s0 ∈ Hom (ker dX
, ker d0Y ) tel que
le diagramme suivant
ker dY0
iY0 - 0
Y
I
@
@
s0 @
6
u0
d0Y-
Y1
0
0
ker dX
soit commutatif. Par conséquent,
−1
−1
= i0Y ◦ s0 ◦ δX
= i0Y ◦ u−1 ,
u0 ◦ δ X
−1
et donc, u−1 = s0 ◦ δX
. Si on pose sk = 0 pour k 6= 0, on a

0
si



 s0 ◦ δ −1 = u−1 si
1
X
◦ sk + sk+1 ◦ dkX0 =
dkY−
0
0
0
1

◦
si
i
 Y s =u


0
si
k < −1,
k = −1,
k = 0,
k > 0,
et donc, u = 0 dans K (A).
Définition 2.2.10. On appelle t-structure gauche de K (A) la t-structure considérée
dans la proposition précédente.
La t-structure gauche de K (Aop ) induit une autre t-structure sur K (A). On
l’appellera la t-structure droite.
2.2. t-structure sur K (A)
79
Notons LK(A) la catégorie dont les objets sont les morphismes de A. Un morphisme de u : A - B dans u0 : A0 - B 0 étant une classe d’équivalence de carrés
commutatifs
uA
B
a
b
?
u- ?
B0
0
A0
pour la relation R définie par
(a, b)R(a0 , b0 ) ⇔ ∃h : B
- A 0 : u0 ◦ h = b − b0 .
Proposition 2.2.11. Le foncteur I de LK(A) dans K (A) qui envoie le morphisme
u
-B
A
vers le complexe
...0
iu
- ker u
u
-A
-B
- 0...
(b en degré 0) induit une équivalence de catégories entre LK(A) et le cœur de la
t-structure gauche de K (A).
Preuve. Démontrons tout d’abord que le foncteur I est bien défini. Considérons un
morphisme de u : A - B dans u0 : A0 - B 0 , donné par un couple de morphismes
(a, b) rendant le diagramme
A
a
?
A0
u-
B
b
u- ?
B0
0
commutatif. Comme
u0 ◦ a ◦ iu = b ◦ u ◦ iu = 0,
par définition du noyau de u0 , il existe un unique α ∈ Hom A (ker u, ker u0 ) tel que le
diagramme suivant commute.
ker u0
iu0 - 0
A
u0-
6
I
@
@ a ◦ iu
α@
B0
0
ker u
On définit alors l’image par I du couple (a, b) par le morphisme de complexes suivant.
0
- ker u
α
0
iu -
A
u-
B
a
b
? u0
?
0
i
- ker u0 u - A0
- B0
?
-0
-0
80
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Cette définition a un sens car si (a0, b0 )R(a, b), i.e., il existe h : B - A0 tel que
u0 ◦ h = b − b0 , alors I ((a0, b0 )) est homotope à I ((a, b)). En effet, on a le diagramme
commutatif
iu0 - 0
A
u0-
6
I
@
0
a
iu
◦
@
α0 @
ker u0
B0
0
ker u
et I ((a0, b0 )) est le morphisme de complexes suivant.
0
- ker u
α0
0
iu -
A
u-
a0
-0
B
b0
? i 0
? u0
?
- ker u0 u - A0
- B0
-0
Puisque
u0 ◦ (a − a0 ) = (b − b0 ) ◦ u = u0 ◦ h ◦ u,
on a u0 ◦ (a − a0 − h ◦ u) = 0, et par définition du noyau de u0 , il existe un unique
h0 ∈ Hom (A, ker u0 ) tel que le diagramme
ker u0
iu0
- A0
6
u0 - 0
B
I
@
@
0
@ a−a −h◦u
h0 @
@
0
A
commute. On en déduit que
a − a0 = h ◦ u + iu0 ◦ h0 ,
et que
iu0 ◦ h0 ◦ iu = (a − a0 − h ◦ u) ◦ iu
= (a − a 0 ) ◦ i u
= iu0 ◦ (α − α0 ),
et donc, h0 ◦ iu = α − α0 . Par conséquent, I ((a, b)) est homotope à I ((a0, b0 )) et le
foncteur I est bien défini.
On vérifie facilement que I est pleinement fidèle.
Il nous reste à établir que le foncteur I est essentiellement surjectif. Pour tout
X ∈ Ob(K ≤0 (A) ∩ K ≥0 (A)), on a
X ' τ ≤0 ◦ τ ≥0 (X ),
2.3. Catégories quasi-abéliennes
81
et comme τ ≥0 (X ) est le complexe
0
1
i−
X
- ker d−1
X
- X −1
−1
dX
- X0
0
dX
- X1 . . . ,
τ ≤0 ◦ τ ≥0 (X ) est le complexe
...0
- ker d−1
X
1
i−
X
- X −1
−1
δX
- ker d0
X
- 0...
Ce dernier complexe est l’image par le foncteur étudié du morphisme
X −1
−1
δX
- ker d0 .
X
Le foncteur I est donc essentiellement surjectif.
Remarque 2.2.12. Un objet u : A - B de LK(A) est isomorphe à zéro si et seulement si u a une section.
En effet, il existe des couples (a : A - 0, b : B - 0) et (a0 : 0 - A, b0 :
0 - B ) tels que
((a, b) ◦ (a0 , b0 ))R(0, 0)
((a0 , b0 ) ◦ (a, b))R(idA , idB ).
Or, a = b = a0 = b0 = 0. Donc,
(idA , idB )R(0, 0)
i.e., il existe h : b
- A tel que u ◦ h = idB .
Remarque 2.2.13. La catégorie A est une sous-catégorie pleine de LK(A).
En effet, le foncteur J : A - LK(A) qui envoie un objet a de A vers le morphisme 0 - A, et qui envoie un morphisme u : A - B vers le couple (0, u) est
pleinement fidèle.
2.3. Catégories quasi-abéliennes
Dans cette section, A désigne une catégorie additive telle que tout morphisme
possède un noyau et un conoyau.
Définition 2.3.1. Un morphisme u ∈ Hom A (A, B ) est strict si le morphisme canonique (cf. 0.1.19)
u0 : coim u - im u
est un isomorphisme.
Proposition 2.3.2. Soit u ∈ Hom A (A, B ).
i)
ii)
iii)
iv)
Le monomorphisme canonique i : ker u - A est strict.
Si u est un monomorphisme strict alors A ' im u.
Par dualité, l’épimorphisme canonique q : B - coker u est strict.
Si u est un épimorphisme strict, alors B ' coim u.
82
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Preuve. i) Comme i est un monomorphisme, on a coim i ' ker u. Il suffit donc de
démontrer que ker u ' im i.
Soient C ∈ Ob(A) et v ∈ Hom A (C, A) tels que u ◦ v = 0. Par définition du noyau
de u, il existe un unique v 0 ∈ Hom A (C, ker u) tel que le diagramme suivant
ker u
i-
A
u-
6
I
@
@
v0 @
B
v
0
C
soit commutatif. Si j : im i - A et q 0 : A - coker i sont les morphismes canoniques, on a q 0 ◦ i = 0 et par définition de im i, il existe un unique α ∈ Hom A (ker u, im i)
tel que le diagramme suivant
0
q-
j im i
A
6
I
@
@
α@
i
coker i
0
ker u
soit commutatif. On vérifie alors facilement que le diagramme suivant
im i
jI
@
@
α ◦ v0 @
A
6
v
u-
B
0
C
commute, ce qui suffit.
ii) est trivial.
Proposition 2.3.3. Une somme directe de morphismes stricts est stricte.
Preuve. Cela résulte immédiatement de la proposition 0.1.17.
Définition 2.3.4. La catégorie A est quasi-abélienne si elle vérifie les conditions
suivantes :
i) dans un carré cartésien,
A
f-
6
A0
B
6
f 0-
B0
si f est un épimorphisme strict alors f 0 est un épimorphisme strict,
2.3. Catégories quasi-abéliennes
83
ii) dans un carré co-cartésien,
A
f 0-
0
B0
6
6
f-
A
B
si f est un monomorphisme strict alors f 0 est un monomorphisme strict.
Proposition 2.3.5. Si A est une catégorie quasi-abélienne, la composée de deux
épimorphismes stricts est un épimorphisme strict.
Preuve. Soient u ∈ Hom A (A, B ), v ∈ Hom A (B, C ) deux épimorphismes stricts et les
morphismes canoniques iu : ker u - A, iv : ker v - B et iv◦u : ker(v ◦ u) - A.
Comme v ◦ u ◦ iv◦u = 0, par définition du noyau de v , il existe un unique f ∈
Hom A (ker(u ◦ v ), ker v ) tel que le diagramme suivant
ker v
iv
v-
-B
6
I
@
u ◦ iv ◦ u
@
f @
C
ker(v ◦ u)
0
soit commutatif.
Etablissons que le carré commutatif
uB
A
6
6
iv ◦ u
ker(v ◦ u)
iv
f-
ker v
est cartésien.
Soient W ∈ Ob(A), α ∈ Hom A (W, A) et β ∈ Hom A (W, ker v ) tels que u ◦ α =
iv ◦ β .
Puisque
v ◦ u ◦ α = v ◦ iv ◦ β = 0,
par définition du noyau de v ◦ u, il existe un unique γ ∈ Hom A (W, ker(v ◦ u)) tel que
le diagramme suivant soit commutatif.
ker(v ◦ u)
iv◦u-
A
I
@
@ α
γ@
6
W
v ◦u
0
C
84
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Comme on a
iv ◦ f ◦ γ = u ◦ iv◦u ◦ γ
=u◦α
= iv ◦ β,
f ◦ γ = β , et le diagramme suivant
u
A
-B
6
6
iv◦u
iv
α ker(v ◦ u) f - ker v
*
γ
β W
est commutatif. Le carré commutatif ci-dessus est donc cartésien. Comme u est un
épimorphisme strict, f est un épimorphisme strict.
Par la proposition 2.3.2 , il suffit de démontrer que (C, v ◦ u) est un conoyau de
iv◦u .
Soient W ∈ Ob(A) et γ ∈ Hom A (A, W ) tels que γ ◦ iv◦u = 0. Démontrons qu’il
existe un unique γ 00 ∈ Hom A (C, W ) rendant le diagramme
ker(v ◦ u)
iv◦u-
A
v ◦u
C
@
@ γ
R ? γ 00
0@
W
commutatif. Puisque v ◦ u ◦ iu = 0, par définition du noyau de v ◦ u, il existe un
unique g ∈ Hom A (ker u, ker(v ◦ u)) tel que le diagramme
ker(v ◦ u)
iv◦u-
A
I
@
@ iu
g@
6
v ◦u
0
ker u
commute. Par conséquent,
γ ◦ iu = γ ◦ iv◦u ◦ g = 0,
C
2.4. Dérivation d’une catégorie quasi-abélienne
85
et comme par la proposition 2.3.2, B ' coim u, il existe un unique γ 0 ∈ Hom A (B, W )
tel que le diagramme suivant
ker u
iu -
u-
A
B
@
@ γ
R ? γ0
0@
W
soit commutatif. On en déduit que
γ 0 ◦ iv ◦ f = γ 0 ◦ u ◦ iv ◦u
= γ ◦ iv◦u
= 0,
et comme f est un épimorphisme, γ 0 ◦iv = 0. De même, puisque v est un épimorphisme
strict, il existe un unique γ 00 ∈ Hom A (C, W ) tel que le diagramme suivant
ker v
iv -
v-
B
C
@ γ0
@
R ? γ 00
0@
W
soit commutatif. Il s’ensuit que
γ 00 ◦ v ◦ u = γ 0 ◦ u = γ,
d’où la conclusion.
2.4. Dérivation d’une catégorie quasi-abélienne
Dans cette section, A désigne une catégorie quasi-abélienne.
Définition 2.4.1. Une suite
A
u
-B
v
-C
de A telle que v ◦ u = 0 est strictement exacte si la flèche canonique
coim u
- ker v
est un isomorphisme.
Plus généralement, une suite
A0
- A1 . . .
- An
est strictement exacte si la suite
Ak−1
- Ak
- Ak+1
est strictement exacte pour tout k ∈ {1, . . . , n − 1}.
86
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
u
v
Remarque 2.4.2. Dire que la suite A - B - C telle que v ◦ u = 0 est strictement
exacte revient à dire que u est strict et que la flèche canonique
im u
- ker v
est un isomorphisme.
Exemple 2.4.3. i) La suite
0
-A
u
-B
est strictement exacte si et seulement si u est un monomorphisme.
ii) La suite
A
u
-B
-0
est strictement exacte si et seulement si u est un épimorphisme strict.
iii) Une suite
0
-A
u
-B
v
- C
est strictement exacte si et seulement si (A, u) est un noyau de v .
iv) Une suite courte
0
-A
u
-B
v
-C
-0
est strictement exacte si et seulement si (A, u) est un noyau de v et (C, v ) est un
conoyau de u.
Proposition 2.4.4. La suite
A
u
-B
v
-C
est strictement exacte si et seulement si v ◦ u = 0 et la suite courte
0
- ker u
iu
-A
u0
- ker v
-0
est strictement exacte.
Preuve. Rappelons que iv ◦ u0 = u.
La condition est nécessaire. En effet, comme iv est un monomorphisme, ker u '
ker u0 et (ker u, iu ) est un noyau de u0 . De plus, par hypothèse, ker v ' coim u et
donc, par définition de la coimage de u, (ker v, u0) est un conoyau de iu , ce qui suffit.
La condition est suffisante. En effet, v ◦ u = v ◦ iv ◦ u0 = 0. Comme (ker v, u0)
u
v
est un conoyau de iu, ker v ' coim u et la suite A - B - C est donc strictement
exacte.
Proposition 2.4.5. Une suite fortement exacte est strictement exacte.
2.4. Dérivation d’une catégorie quasi-abélienne
u
87
v
Preuve. Soit A - B - C une suite fortement exacte. Il suffit de démontrer que
coim u ' ker v .
Par la proposition 2.2.3, on a la suite fortement exacte
0
u0
iu
- ker u
-A
- ker v
- 0
où u0 est donné par le diagramme commutatif suivant.
ker v
iv I
@
@
u0 @
B
6
u
v-
C
0
A
Le morphisme u0 a donc une section. Soit s ∈ Hom A (ker v, A) tel que
u0 ◦ s = idker v .
Notons q : A - coim u le morphisme canonique. Par définition de coim u, il existe
un unique u00 ∈ Hom A (coim u, B ) tel que le diagramme suivant
iu -
ker u
@
@
R
0@
q-
A
u
? u
coim u
00
B
soit commutatif.
Démontrons que (coim u, u00 ) est un noyau de v . Soient X ∈ Ob(A) et α ∈
Hom A (X, B ) tels que v ◦ α = 0. Par définition du noyau de v , il existe un unique
α0 ∈ Hom A (X, ker v ) tel que le diagramme
ker v
iv I
@
@
α0 @
B
6
α
v-
C
0
X
soit commutatif. Par conséquent, il vient
u00 ◦ q ◦ s ◦ α0 = u ◦ s ◦ α0
= iv ◦ u0 ◦ s ◦ α0
= iv ◦ α0
= α,
88
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
et le diagramme
coim u
u00-
v-
B
6
I
@
@
q ◦ s ◦ α0 @
C
α
0
X
commute. La conclusion en résulte aussitôt.
Définition 2.4.6. Un complexe X ∈ C (A) est strictement exact en degré k si la
suite
dkX−1
X k−1
dkX
- Xk
- X k+1
est strictement exacte.
Un complexe est strictement exact s’il est strictement exact en tout degré.
Proposition 2.4.7. Si X et Y sont deux complexes isomorphes dans K (A), alors
ils sont simultanément strictement exacts en degré k .
Preuve. Soient u ∈ Hom K (A) (X, Y ), v ∈ Hom K (A) (Y, X ) et pour tout k ∈ Z, sk ∈
Hom A (Y k , Y k−1 ) tels que
dkY−1 ◦ sk + sk+1 ◦ dkY = idY k −uk ◦ v k .
Supposons que X est strictement exact en degré k . Par la proposition précédente,
on a la suite strictement exacte
0
ikX−1
- ker dk−1
X
- X k−1
k−1
δX
- ker dk
X
-0
k−1
où δX
est donné par le diagramme commutatif suivant.
ikX -
ker dkX
I
@
@
k−1 @
δ
X
Xk
dkX-
X k+1
6
dkX−1 0
X k−1
Il suffit d’établir que la suite courte
0
- ker dk−1
Y
ikY−1
- Y k−1
k −1
δY
- ker dk
Y
-0
est strictement exacte. Comme ikY est un monomorphisme, ker dkY−1 ' ker δYk−1 , et il
suffit donc d’établir que (ker dkY , δYk−1 ) est un conoyau de ikY−1 . Puisque
dkY ◦ uk ◦ ikX = uk+1 ◦ dkX ◦ ikX = 0,
2.4. Dérivation d’une catégorie quasi-abélienne
89
0
par définition du noyau de dkY , il existe un unique u k ∈ Hom A (ker dkX , ker dkY ) tel que
le diagramme
dkY-
ikY - k
Y
ker dkY
6
I
@
k
◦
u
ikX
@
0k
@
u
Y k+1
0
ker dkX
0
soit commutatif. De même, il existe un unique v k ∈ Hom A (ker dYk , ker dkX ) tel que le
diagramme
dkX-
ikX - k
X
ker dkX
6
I
@
v k ◦ iYk
0 k@
v @
X k+1
0
ker dkY
soit commutatif. Par conséquent, puisque
idY k −uk ◦ v k = dkY−1 ◦ sk + sk+1 ◦ dYk ,
on a successivement
ikY − uk ◦ v k ◦ ikY = dkY−1 ◦ sk ◦ ikY + sk+1 ◦ dkY ◦ ikY ,
0
ikY − uk ◦ ikX ◦ v k = ikY ◦ δYk−1 ◦ sk ◦ ikY ,
0
0
ikY − ikY ◦ u k ◦ v k = ikY ◦ δYk−1 ◦ sk ◦ ikY .
Comme ikY est un monomorphisme, il vient
0
0
idker dkY −u k ◦ v k = δYk−1 ◦ sk ◦ ikY .
De plus,
ikY ◦ δYk−1 ◦ uk−1 ◦ v k−1 = dkY−1 ◦ uk−1 ◦ v k−1
k−1
= uk ◦ dX
◦ v k−1
= uk ◦ v k ◦ dkY−1
= uk ◦ v k ◦ ikY ◦ δYk−1
0
= uk ◦ ikX ◦ v k ◦ δYk−1
0
0
= ikY ◦ u k ◦ v k ◦ δYk−1 ,
et
0
0
δYk−1 ◦ uk−1 ◦ v k−1 = u k ◦ v k ◦ δYk−1 .
90
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Il s’ensuit que
δYk−1 ◦ (idY k−1 −uk−1 ◦ v k−1 − sk ◦ ikY ◦ δYk−1 )
=δYk−1 − δYk−1 ◦ uk−1 ◦ v k−1 − δYk−1 ◦ sk ◦ ikY ◦ δYk−1
0
0
=(idker dkY −u k ◦ v k − δYk−1 ◦ sk ◦ ikY ) ◦ δYk−1
=0.
Comme ker δYk−1 ' ker dkY−1 , il existe un unique wk−1 ∈ Hom A (Y k−1 , ker dkY−1 ) tel que
le diagramme
ker dkY−1
ikY−-1
I
@
@
k−1 @
w
Y k−1
1
δYk−-
6
ker dkY
γ k−1 0
Y k−1
(où γ k−1 = idY k−1 −uk−1 ◦ v k−1 − sk ◦ ikY ◦ δYk−1 ) soit commutatif, et donc,
uk−1 ◦ v k−1 = idY k−1 −sk ◦ ikY ◦ δYk−1 − ikY−1 ◦ wk−1 .
A présent, établissons que (ker dkY , δYk−1 ) est un conoyau de ikY−1 . Soient Z ∈ Ob(A)
et α ∈ Hom A (Y k−1 , Z ) tels que
α ◦ ikY−1 = 0.
On a
0
α ◦ uk−1 ◦ ikX−1 = α ◦ ikY−1 ◦ u k−1 = 0.
k−1
Comme par hypothèse, (ker dkX , δX
) est un conoyau de ikX−1 , il existe un unique
α0 ∈ Hom A (ker dkX , Z ) tel que le diagramme
ker dkX−1
ikX−1 -
X
k−1
k−1
δX
-
ker dkX
@
k−1
@ α◦u
R
α0
0@
?
Z
soit commutatif. De plus, on a
0
ikX ◦ v k ◦ δYk−1 = v k ◦ ikY ◦ δYk−1
= v k ◦ dkY−1
= dkX−1 ◦ v k−1
k−1
= ikX ◦ δX
◦ v k−1,
et donc,
0
k−1
v k ◦ δYk−1 = δX
◦ v k−1 .
2.4. Dérivation d’une catégorie quasi-abélienne
91
On en déduit que
0
k−1
α0 ◦ v k ◦ δYk−1 = α0 ◦ δX
◦ v k−1
= α ◦ uk−1 ◦ v k−1
= α − α ◦ sk ◦ ikY ◦ δYk−1 − α ◦ ikY−1 ◦ wk−1
= α − α ◦ sk ◦ ikY ◦ δYk−1 ,
et par conséquent,
0
α = (α ◦ sk ◦ ikY + α0 ◦ v k ) ◦ δYk−1 .
Le diagramme suivant
ker dkY−1
ikY−-1
Y k−1
@
@
R
0@
1
δYk−-
ker dkY
α
0
? α ◦ sk ◦ ikY + α0 ◦ v k
Z
est donc commutatif, d’où le résultat.
Proposition 2.4.8. Soit
u
v
-Y
X
w
-Z
- X [1]
un triangle distingué dans K (A). Si X et Z sont strictement exacts en degré k , alors
Y est strictement exact en degré k .
Preuve. Puisque
Z [−1]
−w[−1]
-X
u
- Y
v
-Z
est un triangle distingué, la proposition 2.4.7 nous permet de supposer que Y est le
mapping cone de −w[−1]. Par conséquent, on a
Y k = M (−w[−1])k = X k ⊕ Z k
!
k
k
−
d
w
X
dkY = dkM (−w[−1]) =
.
0
dkZ
Considérons le carré
Z k−1
(∗)
pZ k−1
1
δZk−-
6
ker dkX ⊕ Z k−1
avec
i) pZ k−1 la projection canonique sur Z k−1 ,
ker dkZ
60
k
β-
pZ k
ker dkY
92
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
ii) δZk−1 donné par le diagramme commutatif suivant,
ikZ -
ker dkZ
I
@
@
k−1 @
δ
Z
iii) pZ0 k
Zk
dkZ-
Z k+1
6
dkZ−1 0
Z k−1
défini de la manière suivante : comme
pZ k+1
dk −wk
X
◦ dkY = 0 idZ k+1
0
dkZ
= 0 dkZ
!
= dkZ ◦ pZ k ,
on a
dkZ ◦ pZ k ◦ ikY = pZ k+1 ◦ dkY ◦ ikY = 0,
et par définition du noyau de dkZ , il existe un unique pZ0 k ∈ Hom A (ker dkY , ker dkZ )
tel que le diagramme suivant
ikZ - k
Z
ker dkZ
dkZ-
6
I
@
k
p
k ◦ iY
@
Z
p0 k @
Z
Z k+1
0
ker dkY
soit commutatif.
iv) β k défini de la manière suivante : si
0
k
⊕ Z k−1
β k : ker dX
- Xk ⊕ Zk = Y k
est défini par
0k
β =
ikX −wk−1
0
dkZ−1
alors
0k
dkY ◦ β =
=
dkX −wk
0
dkZ
!
!
,
ikX −wk−1
0
dkZ−1
!
dkX ◦ ikX −dkX ◦ wk−1 − wk ◦ dkZ−1
0
dkZ ◦ dkZ−1
=0
car w : Z - X [1] est un morphisme de complexes.
Par définition du noyau de dkY , il existe un unique
β k ∈ Hom A (ker dkX ⊕ Z k−1 , ker dYk )
!
2.4. Dérivation d’une catégorie quasi-abélienne
tel que le diagramme suivant
ker dkY
ikY
I
@
@
@
βk @
@
- Yk
6
β
dkY - k+1
Y
0k
0
ker dkX ⊕ Z k−1
soit commutatif.
Démontrons que le carré (*) est cartésien. On a successivement
ikZ ◦ pZ0 k ◦ β k = pZ k ◦ ikY ◦ β k
0
= pZ k ◦ β k
ik −wk−1
X
= 0 idZ k
dkZ−1
0
= 0 dkZ−1
!
= dkZ−1 ◦ pZ k−1
= ikZ ◦ δZk−1 ◦ pZ k−1 ,
et le carré est donc commutatif.
Soient W ∈ Ob(A), γ1 ∈ Hom (W, Z k−1 ) et γ2 ∈ Hom (W, ker dkY ) tels que
δZk−1 ◦ γ1 = p0Z k ◦ γ2 .
93
94
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Comme dkY ◦ ikY ◦ γ2 = 0, il vient
0=
dkX
0
−w
dkZ
k
!
pX k ◦ ikY
pZ k ◦ ikY
◦ γ2
◦ γ2
!
=
dkX ◦ pX k ◦ ikY ◦ γ2 − wk ◦ pZ k ◦ ikY ◦ γ2
dkZ ◦ pZ k ◦ ikY ◦ γ2
=
dkX ◦ pX k ◦ ikY ◦ γ2 − wk ◦ ikZ ◦ p0Z k ◦ γ2
dkZ ◦ pZ k ◦ ikY ◦ γ2
=
=
=
=
!
!
dkX ◦ pX k ◦ ikY ◦ γ2 − wk ◦ ikZ ◦ δZk−1 ◦ γ1
dkZ ◦ pZ k ◦ ikY ◦ γ2
!
dkX ◦ pX k ◦ ikY ◦ γ2 − wk ◦ dkZ−1 ◦ γ1
dkZ ◦ pZ k ◦ ikY ◦ γ2
!
dkX ◦ pX k ◦ ikY ◦ γ2 + dkX ◦ wk−1 ◦ γ1
dkZ ◦ pZ k ◦ ikY ◦ γ2
!
dkX ◦ (pX k ◦ ikY ◦ γ2 + wk−1 ◦ γ1 )
.
dkZ ◦ pZ k ◦ ikY ◦ γ2
!
Donc, par définition du noyau de dkX , il existe un unique ϕ ∈ Hom A (W, ker dkX ) tel
que le diagramme
ker dkX
ikX-
dkX
-
Xk
I
@
@ ψ
ϕ@
6
X k+1
0
W
(où ψ = pX k ◦ ikY ◦ γ2 + wk−1 ◦ γ1 ) soit commutatif. Le morphisme
γ ∈ Hom A (W, ker dkX ⊕ Z k−1 )
défini par
!
γ=
ϕ
γ1
vérifie d’une part,
pZ k−1
◦ γ = 0 idZ k−1
!
ϕ
γ1
= γ1 ,
2.4. Dérivation d’une catégorie quasi-abélienne
95
et d’autre part,
0
ikY ◦ β k ◦ γ = β k ◦ γ
!
!
=
ikX −wk−1
dkZ−1
0
=
ikX ◦ ϕ − wk−1 ◦ γ1
dkZ−1 ◦ γ1
=
=
=
ϕ
γ1
!
pX k ◦ ikY ◦ γ2 + wk−1 ◦ γ1 − wk−1 ◦ γ1
ikZ ◦ δZk−1 ◦ γ1
!
pX k ◦ ikY ◦ γ2
ikZ ◦ p0Z k ◦ γ2
!
pX k ◦ ikY ◦ γ2
pZ k ◦ ikY ◦ γ2
!
= ikY ◦ γ2 .
Par conséquent, le diagramme suivant
Z k−1
δZk−1-
ker dkZ
6
6
pZ k−1
p0Z k
k
γ1ker dk ⊕ Z k−1 β - ker dk
X
Y
*
γ
γ
2
W
commute. Comme γ est le seul morphisme ayant cette propriété, le carré (*) est
cartésien.
Par hypothèse, le complexe Z est strictement exact en degré k. Il en résulte que
la suite
ik−1
δ k −1
0 - ker dkZ−1 Z - Z k−1 Z - ker dkZ - 0
est strictement exacte et que δZk−1 est un épimorphisme strict. Puisque la catégorie
A est quasi-abélienne, β k est un épimorphisme strict. De même, X étant strictek−1
ment exact en degré k, δX
est un épimorphisme strict. Comme idZ k−1 est aussi un
épimorphisme strict, la proposition 2.3.3 montre que
!
k−1
0
δX
k
k
: X k−1 ⊕ Z k−1 - ker dX
α =
⊕ Z k−1
0 idZ k−1
96
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
est un épimorphisme strict. La composée de deux épimorphismes stricts étant un
épimorphisme strict, β k ◦ αk est un épimorphisme strict. Or,
0
ikY ◦ β k ◦ αk = β k ◦ αk
=
=
=
ikX −wk−1
0
dkZ−1
!
k−1
0
δX
0 idZ k−1
!
!
k−1
ikX ◦ δX
−wk−1
0
dkZ−1
!
k−1
k−1
dX
−w
0
dkZ−1
= dkY−1
= ikY ◦ δYk−1 ,
et δYk−1 = β k ◦ αk . Par conséquent, δYk−1 est un épimorphisme strict et la suite courte
0
- ker dk−1
Y
ikY−1
- Y k−1
k −1
δY
- ker dk
Y
- 0
est strictement exacte. Le complexe Y est donc strictement exact en degré k .
Proposition 2.4.9. Soit A une catégorie quasi-abélienne.
i) La sous-catégorie pleine de K (A) formée des complexes strictement exacts est
un système nul.
ii) Si
X1
- X0
-N
- X1 [1]
est un triangle distingué de K (A) avec X1 ∈ Ob(K ≥1 (A)), X0 ∈ Ob(K ≤0 (A))
et N strictement exact alors X1 et X0 sont strictement exacts.
Preuve. i) résulte de la proposition précédente.
ii) Comme X1 est fortement exact en degré négatif , X1 est strictement exact en
degré négatif et comme N est strictement exact, par la proposition précédente X0
est strictement exact en degré négatif. Le complexe X0 est donc strictement exact et
par la proposition précédente, X1 est strictement exact, ce qui suffit.
Définition 2.4.10. Le système nul de K (A) formé des complexes strictement exacts
est noté N (A).
La catégorie localisée correspondante K (A)/N (A) est la catégorie dérivée de A.
On la note D(A).
Grâce à la proposition précédente et au théorème 1.4.1, la t-structure gauche de
K (A) induit une t-structure canonique sur D(A). On l’appellera la t-structure gauche
2.4. Dérivation d’une catégorie quasi-abélienne
97
de D(A) et on la notera (D≤0 (A), D≥0 (A)). Son coeur sera noté LH(A). Quant aux
foncteurs cohomologiques correspondants, ils seront notés
LH k : D(A)
- LH(A).
Définition 2.4.11. Si X et Y ∈ Ob(D(A)), posons
Extk (X, Y ) = Hom D(A) (X, Y [k ])
Proposition 2.4.12. Si
Y0
- Y 00
- Y
- Y 0 [1]
est un triangle distingué dans D(A), pour tout X ∈ Ob(D(A)), on a les deux suites
exactes longues suivantes :
. . . Extk (X, Y 0 )
- Extk (X, Y )
- Extk (X, Y 00 )
- Extk+1 (X, Y 0 ) . . .
. . . Extk (Y 00 , X )
- Extk (Y, X )
- Extk (Y 0 , X )
- Extk+1 (Y 00 , X ) . . . .
Preuve. Cela provient du fait que Hom (X, .) et Hom (., X ) sont des foncteurs cohomologiques.
Proposition 2.4.13. Soit X ∈ Ob(D(A)). Le tronqué τ ≤n (X ) (resp. τ ≥n (X )) de
X pour la t-structure gauche de D(A) est isomorphe à
. . . X n−2
- X n−1
- ker dn
X
- 0...
où ker dnX est en degré n (resp.
...0
- coim dn−1
X
- Xn
- X n+1 . . .
où X n est en degré n).
Preuve. Comme la t-structure de D(A) est induite par la t-structure de K (A), on
sait que le tronqué τ ≤n (X ) (resp. τ ≥n (X )) pour la t-structure gauche de D(A) est
donné par
. . . X n−2
- X n−1
- ker dn
X
- 0...
(resp.
...0
- ker dn−1
X
- X n−1
- X n . . . ).
Il nous reste donc à démontrer que ce dernier complexe que l’on note T1 est
isomorphe dans D(A) au complexe T2
...0
- coim dn−1
X
- Xn
- X n+1 . . .
98
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Il suffit d’établir que τ ≤n (T1) ' τ ≤n (T2) car τ ≥n+1 (T1) ' τ ≥n+1 (T2) et par le corollaire 1.1.8, on aura l’isomorphisme de triangles distingués suivant.
τ ≤n (T1)
?
τ ≤n (T2)
- T1
- τ ≥n+1 (T1 )
- τ ≤n (T1 )[1]
?
- T2
?
- τ ≥n+1 (T2 )
?
- τ ≤n (T2 )[1]
Il nous suffit donc de démontrer que le morphisme de complexes
0
- ker dn−1
X
inX−1 -
n−1
qX
?
?
-0
0
X
n−1
- coim dn−1
X
n−1
δX
-
0 n−1
-0
ker dnX
idker dnX
?
δX ker dnX
-0
appartient à S (N (A)), i.e., que le mapping cone de ce morphisme donné explicitement
par
0
-
n−1
−1 −iX
ker dn
X
- X n−1
0 n−1 1
−δ
B
@ nX−1 C
A
idker dnX
qX
- ker dnX ⊕ coim dnX−1
0
δXn−1
- ker dnX
- 0
(ker dnX en degré n) est strictement exact.
Par l’exemple 2.4.3, la suite
0
1
n−1
−
δ
B
C
@ nX
A
−1
n−1
q
−
i
X
- ker dn ⊕ coim dn−1
0 - ker dnX−1 X- X n−1
X
X
!
n−1
−δ X
n−1
n−1
est strictement exacte car (ker dX , −iX ) est un noyau de
.
n−1
qX
De plus, en degré n − 1, on doit établir que
!
n−1
−δX
0 n−1
n
coim
'
ker
.
id
δ
ker dX
X
n−1
qX
Or, comme
n−1
−δX
coim
n−1
qX
!
' coker inX−1 ' coim dnX−1 ,
!
0 n−1
−
δ
0
X
il suffit de démontrer que (coim dnX−1 ,
) est un noyau de idker dnX δXn−1 .
idcoim dn−1
X
Soient W ∈ Ob(A) et
!
f
: W - ker dnX ⊕ coim dnX−1
g
tels que
0 n−1
idker dnX δX
f
g
!
0
= f + δXn−1 ◦ g = 0.
2.4. Dérivation d’une catégorie quasi-abélienne
Le diagramme
0
coim dnX−1
−δXn−1
idcoim dn−1
X
!
- ker dn ⊕ coim dn−1
X
X
0
idker dnX δXn−1
- ker dn
X
6 !
I
@
@
@
g @
@
99
f
g
0
W
est donc commutatif, ce qui suffit.
Finalement,
ker dnX ⊕ coim dnX−1
est strictement exact car
0
idker dnX δXn−1
- ker dn
X
- 0
!
idker dnX
0
: ker dnX
- ker dn ⊕ coim dn−1
X
X
0
est une section de idker dnX δXn−1 , d’où la conclusion.
Proposition 2.4.14. Un complexe appartient au cœur de la t-structure gauche de
D(A) si et seulement s’il est isomorphe à un complexe de la forme
A
u
-B
(B en degré 0) où u est un monomorphisme de A.
Preuve. On sait que X appartient au cœur si et seulement si
X ' τ ≥0 ◦ τ ≤0 (X ).
Par la proposition précédente, X est isomorphe au complexe Y donné par
0
- coim d−1
X
0
δX−1
- ker d0
X
- 0.
Or, τ ≤−1 (Y ) est isomorphe à zéro dans D(A), i.e., le complexe
0
0
- ker δ −1
X
0
- 0
0
est strictement exact. Par conséquent, ker δX−1 ' 0 et δX−1 est un monomorphisme,
d’où la conclusion.
Proposition 2.4.15. i) Si X ∈ Ob(C (A)) alors LH 0 (X ) ' 0 dans LH(A) si et
seulement si X est strictement exact en degré zéro.
ii) Si f : A - B est un morphisme de A, alors f est un épimorphisme dans
LH(A) si et seulement si f est un épimorphisme strict.
100
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Preuve. i) Par définition du cœur LH(A), LH 0 (X ) ' 0 si et seulement si le complexe
0
- coim d−1
X
0
δX−1
- ker d0
X
- 0
0
1
−1
0
est strictement exact, donc, si et seulement si coim d−
est un
X ' ker dX car δX
monomorphisme.
ii) Par le lemme 1.3.14, f est un épimorphisme si et seulement si
coker f ' LH 0 (M (f )) ' 0
dans LH(A), donc, si et seulement si M (f ) est strictement exact en degré 0. Comme
M (f ) est donné par
0
-A
f
-B
- 0
avec B en degré 0, la conclusion s’ensuit aussitôt.
2.5. Dérivation des foncteurs entre catégories quasi-abéliennes
Dans cette section, A désigne une catégorie quasi-abélienne.
Définition 2.5.1. Un objet P de A est projectif si pour tout épimorphisme strict
u : E - F de A, et pour tout v ∈ Hom A (P, F ), il existe v 0 ∈ Hom A (P, E ) tel que
u ◦ v 0 = v . Schématiquement, on a
E
uI
@
@
v0 @
F
6
v
P
La catégorie A a assez de projectifs si pour tout A ∈ Ob(A), il existe un épimorphisme strict u : P - A avec P projectif.
Par dualité, un objet I de A est injectif si pour tout monomorphisme strict
u : E - F de A, et pour tout v ∈ Hom A (E, I ), il existe v 0 ∈ Hom A (F, I ) tel que
v 0 ◦ u = v . Schématiquement, on a
E
v
u-
F
0
? v
I
La catégorie A a assez d’injectifs si pour tout A ∈ Ob(A), il existe un monomorphisme strict u : A - I avec I injectif.
Proposition 2.5.2. Si P1 et P2 sont deux objets de A, P1 ⊕ P2 est projectif si et
seulement si P1 et P2 sont projectifs.
2.5. Dérivation des foncteurs entre catégories quasi-abéliennes
Preuve. La condition est nécessaire. En effet, soit u : E
strict de A. Puisque l’application
Hom (P1 ⊕ P2 , E )
101
- F un épimorphisme
Hom (P1 ⊕ P2 ,u)
- Hom (P1 ⊕ P2 , F )
est surjective et comme
Hom (P1 ⊕ P2 , E ) ' Hom (P1 , E ) ⊕ Hom (P2 , E )
Hom (P1 ⊕ P2 , F ) ' Hom (P1 , F ) ⊕ Hom (P2 , F ),
les applications
Hom (P1 , E )
Hom (P2 , E )
Hom (P1 ,u)
- Hom (P1 , F )
Hom (P2 ,u)
- Hom (P2 , F )
sont surjectives et P1 , P2 sont donc projectifs.
La suffisance de la condition s’établit de manière analogue.
Proposition 2.5.3. Une suite strictement exacte
0
-A
u
v
- B
-P
-0
avec P projectif est scindée.
Preuve. Par l’exemple 2.2.2, il suffit de démontrer que la suite est fortement exacte.
Comme u est un noyau de v , il suffit de démontrer que v a une section. Comme v
est un épimorphisme strict et que P est projectif, il existe v 0 ∈ Hom A (P, B ) tel que
le diagramme
v-
B
I
@
@
v0 @
P
6
idP
P
commute, ce qui suffit.
Lemme 2.5.4. Si A a assez de projectifs, pour tout C ∈ Ob(C − (A)), il existe un
morphisme
u:P
-C
de S (N (A)) tel que pour tout k ∈ Z, P k soit projectif et
uk : P k
soit un épimorphisme strict.
- Ck
102
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Preuve. On peut supposer que C k = 0 pour k > 0. Par commodité d’écriture,
posons Ck := C −k . Construisons le complexe P et le morphisme u par récurrence.
Pour k < 0, prenons Pk = 0 et uk = 0. Supposons avoir construit Pk , uk , dPk de sorte
que
0
- Pk
- Pk−1
uk
?
0
- Ck
- ...
- P0
uk−1
?
- Ck−1
-0
u0
?
- ...
- C0
-0
soit un morphisme de complexes dont le mapping cone est strictement exact en
chaque degré supérieur ou égal à −k et que chaque ul : Pl - Cl (0 ≤ l ≤ k )
soit un épimorphisme strict avec Pl projectif. Nous notons u(k ) : P (k ) - C (k ) le
morphisme ci-dessus.
Formons le carré cartésien(cf. 0.1.18)
Ck+1
δkC+1
- ker dC
k
60
60
v
uk
v-
Ck0 +1
ker dPk
où δkC+1 et u0k sont donnés respectivement par les diagrammes commutatifs suivants.
ker dC
k
iC
kI
@
@
@
δkC+1
dC
k-
Ck
6C
dk+1 0
Ck+1
dC
k-
iC
k Ck
ker dC
k
Ck−1
6P
I
@
◦
u
ik
k
@
u0k @
Ck−1
0
ker dPk
Comme A a assez de projectifs, il existe un épimorphisme strict
w : Pk+1
- C0
k+1
avec Pk+1 projectif. Posons
dPk+1 = iPk ◦ v ◦ w,
uk+1 = v 0 ◦ w,
et démontrons que
dPk+1
0
- Pk+1
0
? dC
?
- Ck+1 k+1
- Ck
uk+1
- Pk
- ...
uk
- P0
-0
u0
- ...
?
- C0
-0
2.5. Dérivation des foncteurs entre catégories quasi-abéliennes
103
est un morphisme de complexes dont le mapping cone est strictement exact en chaque
degré supérieur ou égal à −(k + 1) et chaque ul : Pl - Cl (0 ≤ l ≤ k + 1) est un
épimorphisme strict avec Pl projectif. Comme on a
0
C
dC
k+1 ◦ uk+1 = dk+1 ◦ v ◦ w
0
C
= iC
k ◦ δk+1 ◦ v ◦ w
0
= iC
k ◦ uk ◦ v ◦ w
= uk ◦ iPk ◦ v ◦ w
= uk ◦ dPk+1 ,
et
dPk ◦ dPk+1 = dPk ◦ iPk ◦ v ◦ w = 0,
on a bien construit un morphisme de complexes. Vu l’hypothèse de récurrence, son
mapping cone est strictement exact en chaque degré supérieur ou égal à −k . Il sera
strictement exact en degré −(k + 1) si la suite
0
1
0
1
uk+1 C
dC
uk C
B
B
k+1
@ P A
@
A
0
−dk+1
−dPk
- Ck+1 ⊕ Pk
- Ck ⊕ Pk−1
Pk+1
est strictement exacte.
La suite ci-dessus est strictement exacte si et seulement si
!
C
d
u
k
α : Pk+1 - ker k+1
0 −dPk
défini par le diagramme commutatif
dC
uk
ker k+1
0 −dPk
!
i
- Ck+1 ⊕ Pk
I
@
@
@
@
@
α@
@
@
@
@
6
!
- Ck ⊕ Pk−1
!
uk+1
−dPk+1
Pk+1
est un épimorphisme strict.
dC
uk
k+1
−dPk
0
0
104
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Remarquons que (Ck0 +1 ,
!
v0
!
dC
u
k
k+1
. En effet,
−dPk
0
) est un noyau de
−iPk ◦ v
!
soit
tel que
dC
k+1
0
f
g
:W
!
!
uk
−dPk
f
g
- Ck+1 ⊕ Pk
=
dC
k+1
◦ f + uk ◦ g
−dPk ◦ g
!
= 0.
Par définition du noyau de dPk , il existe un unique morphisme g 0 : W
que le diagramme
ker dPk
iPk-
Pk
dPk-
6
I
@
@
g0 @
- ker dP tel
k
Pk−1
g
0
W
soit commutatif. Par conséquent, il vient
0 = dC
k+1 ◦ f + uk ◦ g
P
0
= dC
k+1 ◦ f + uk ◦ ik ◦ g
C
C
0
0
= iC
k ◦ δk+1 ◦ f + ik ◦ uk ◦ g ,
et donc, δkC+1 ◦ f = −uk0 ◦ g 0 . Par définition d’un carré cartésien, il existe un seul γ
tel que le diagramme
Ck+1
δkC+1
- ker dC
k
60
60
uk
v
vf C0
ker dPk
k
+1
*
γ −g 0
W
soit commutatif et le diagramme
!
v0
−iPk ◦ v
0
- Ck+1 ⊕ Pk
Ck+1
6 !
@
I
f
@
@
g
γ @
@
W
commute.
dC
uk
k+1
−dPk
0
0
!
- Ck ⊕ Pk−1
2.5. Dérivation des foncteurs entre catégories quasi-abéliennes
Soit
β : Ck0 +1
dC
uk
k+1
- ker
0 −dPk
!
défini par le diagramme commutatif suivant.
ker
dC
uk
k+1
0 −dPk
dC
k+1
!
i-
Ck+1 ⊕ Pk
I
@
@
@
β @
@
6
v
0
!
0
uk
−dPk
!
−iPk ◦ v
105
- Ck ⊕ Pk−1
0
Ck0 +1
Il résulte de ce qui précède que β est un isomorphisme. C’est donc un épimorphisme strict. Or, il vient
!
v0
◦w
i◦β◦w =
−iPk ◦ v
!
uk+1
=
−dPk+1
= i ◦ α,
et donc, α = β ◦ w et comme la composée de deux épimorphismes stricts est un
épimorphisme strict, α est un épimorphisme strict.
Pour conclure, démontrons que uk+1 est un épimorphisme strict. Par hypothèse
de récurrence, il existe un triangle distingué
P (k )
- C (k )
-D
- P (k )[1]
avec D strictement exact en degré supérieur ou égal à −k. En appliquant le foncteur
LHk , on obtient la suite exacte
LHk (P (k))
- LHk (C (k ))
- LHk (D)
dans LH(A) et comme par la proposition 2.4.15, LHk (D) ' 0,
LHk (P (k))
- LHk (C (k ))
est un épimorphisme dans LH(A). On en déduit que
u0k : ker dPk
- ker dC
k
est un épimorphisme dans LH(A). Par la proposition 2.4.15, uk0 est donc un épimorphisme strict dans A. La catégorie A étant quasi-abélienne, v 0 est un épimorphisme
strict, et par composition, uk+1 est un épimorphisme strict, d’où la conclusion.
106
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Proposition 2.5.5. Si A a assez de projectifs, alors le foncteur canonique
J : K − (P )
- D− (A)
(où P désigne la sous-catégorie pleine de A formée des objets projectifs) est une
équivalence de catégories. Il existe donc un foncteur
J 0 : D− (A)
- K − (P )
tel que J ◦ J 0 ' idD− (A) et J 0 ◦ J ' idK − (P ).
Preuve. Par le lemme précédent, le foncteur J est essentiellement surjectif. Démontrons qu’il est pleinement fidèle. Nous allons appliquer la proposition 1.2.9 pour
démontrer que le foncteur
J 00 : K − (P )/N (A) ∩ Ob(K − (P ))
- D− (A)
est pleinement fidèle. Pour cela, il suffit de montrer que si X , Y sont deux objets de
Ob(K − (A)) et f : X - Y un morphisme de S (N (A)) alors il existe un morphisme
u : P - X avec P ∈ K − (P ) tel que f ◦ u ∈ S (N (A)). Cela résulte du lemme
précédent.
Pour conclure, il suffit d’établir que N (A) ∩ Ob(K − (P )) = 0. Soit P un complexe
de Ob(K − (P )) strictement exact. Par la proposition 2.2.7, il suffit de démontrer que
P est fortement exact, i.e., pour tout k ∈ Z la suite
0
- ker dP
k
- Pk
- ker dP
k−1
-0
est scindée. Pour cela, il suffit que ker dPk soit projectif pour tout k ∈ Z. Démontrons
donc par récurrence que ker dPk est projectif. C’est évident pour k << 0. Supposons
que ker dPk−1 est projectif. Comme la suite
0
- ker dP
k
- Pk
- ker dP
k−1
-0
est strictement exacte, elle est scindée et, par la proposition 2.5.2, ker dPk est projectif.
Définition 2.5.6. Soient A et A0 deux catégories quasi-abéliennes et F : A
un foncteur additif. Soient les foncteurs naturels
Q : K − ( A)
Q 0 : K − (A0 )
- D − (A )
- D − (A 0 ).
Un foncteur dérivé à gauche de F est la donnée d’un couple (T, s) où
T : D − ( A)
- D − (A 0 )
est un foncteur de catégories triangulées, et
s: T ◦Q
- Q0 ◦ K − (F )
- A0
2.5. Dérivation des foncteurs entre catégories quasi-abéliennes
107
est un morphisme de foncteurs tel que pour tout couple (T 0, t) où
T 0 : D − (A )
t : T0 ◦ Q
- D − (A 0 )
- Q 0 ◦ K − (F ),
il existe un unique morphisme de foncteurs α : T 0
soit commutatif.
T ◦Q
- T tel que le diagramme suivant
6
@s
@
R
@
t
T 0 ◦ Q - Q 0 ◦ K − (F )
α ◦ idQ
Lemme 2.5.7. Soient A et A0 deux catégories triangulées, N un système nul de A
et P une sous-catégorie pleine de A. Supposons que pour tout X ∈ Ob(A), il existe
X 0 ∈ Ob(P ) et s ∈ Hom A (X 0 , X ), s ∈ S (N ). Soient F et G deux foncteurs de A
dans A0 tels que F (s) soit un isomorphisme pour tout s ∈ S (N ). Alors,
Hom (F, G) ' Hom (F ◦ I, G ◦ I )
où I est l’injection de P dans A.
Preuve. Démontrons d’abord l’injectivité. Soit
-G
α:F
tel que pour tout X 0 ∈ Ob(P ), α(X 0 ) = 0. Soit X ∈ Ob(A). Il existe X 0 ∈ Ob(P )
et s ∈ Hom A (X 0 , X ), s ∈ S (N ). Comme α est un morphisme de foncteurs, le
diagramme
F (X )
α(X)
G(X )
6
6
F (s)
F (X 0 )
G(s)
0-
G(X 0 )
commute et comme F (s) est un isomorphisme, α(X ) est nul, ce qui établit l’injectivité.
Démontrons à présent la surjectivité. Si
α0 : F ◦ I
- G◦I
est un morphisme de foncteurs, construisons un morphisme de foncteurs
α:F
-G
tel que α ◦ idI = α0 . Soit X ∈ Ob(A). Il existe X 0 ∈ Ob(P ) et s ∈ Hom A (X 0 , X ),
s ∈ S (N ). Comme F (s) est un isomorphisme, définissons
α(X ) = G(s) ◦ α0 (X 0 ) ◦ F (s)−1.
108
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
Vérifions que α(X ) ne dépend pas du choix de s. Supposons qu’il existe X 00 ∈ Ob(P )
et s0 ∈ Hom A (X 00 , X ), s0 ∈ S (N ). Par la proposition 1.2.2 il existe s00 et s000 deux
morphismes de S (N ) tels que le diagramme
X
s000-
000
X 00
s00
s0
?
s- ?
X0
X
soit commutatif. De plus, il existe Y ∈ Ob(P ) et t ∈ Hom A (Y, X 000 ), t ∈ S (N ). Le
diagramme
Y
s000 ◦-t
s00 ◦ t
?
X 00
s0
s - ?
X0
X
0
00
est donc commutatif. Posons t = s ◦ s ◦ t ∈ S (N ) et démontrons que
G(s) ◦ α0 (X 0 ) ◦ F (s)−1 = G(t0 ) ◦ α0 (Y ) ◦ F (t0)−1 .
Considérons le diagramme commutatif suivant.
F (Y )
α0 (Y )
- G(Y )
A@
A @
0
0
F
t
G
t
(
)
(
)
A @
A
@
A
R
@
α(X )
A
F (X )
G(X )
A
00
F (s00 ◦ t) A
G(s ◦ t)
6
6
A
A
F (s)
G(s)
A
A
0
0
AU
α (X)
F (X 0 )
G(X 0 )
Il vient
G(t0) ◦ α0 (Y ) ◦ F (t0)−1
=G(s) ◦ G(s00 ◦ t) ◦ α0 (Y ) ◦ (F (s) ◦ F (s00 ◦ t))−1
=G(s) ◦ G(s00 ◦ t) ◦ α0 (Y ) ◦ F (s00 ◦ t)−1 ◦ F (s)−1
=G(s) ◦ α0 (X 0 ) ◦ F (s)−1.
De même,
G(s0 ) ◦ α0 (X 00 ) ◦ F (s0)−1 = G(t0) ◦ α0(Y ) ◦ F (t0)−1 .
Ainsi, α(X ) ne dépend pas du choix de s.
Finalement, par construction de α, on vérifie directement que si X 0 ∈ Ob(P ),
α(X 0 ) = α0 (X 0 ) et donc, α ◦ idI = α0 .
2.5. Dérivation des foncteurs entre catégories quasi-abéliennes
109
Proposition 2.5.8. Soient A et A0 deux catégories quasi-abéliennes et F : A - A0
un foncteur additif. Si A a assez de projectifs, si J 0 est le foncteur défini dans la
proposition 2.5.5, et si I est l’injection de P dans A alors
T = Q0 ◦ K − (F ) ◦ I ◦ J 0 : D− (A)
- D− (A0 )
est un foncteur dérivé à gauche de F .
Preuve. Construisons le morphisme de foncteurs
- Q 0 ◦ K − (F ).
s: T ◦Q
On a successivement
T ◦Q◦I ' T ◦J
' Q 0 ◦ K − (F ) ◦ I ◦ J 0 ◦ J
' Q0 ◦ K − (F ) ◦ I,
et par le lemme précédent
Hom (T ◦ Q, Q0 ◦ K − (F )) ' Hom (T ◦ Q ◦ I, Q0 ◦ K − (F ) ◦ I ),
ce qui assure l’existence du morphisme s. Considérons un couple (T 0, t) où
T 0 : D− (A)
t : T0 ◦ Q
- D− (A0 )
- Q 0 ◦ K − (F ) ,
et démontrons qu’il existe un unique morphisme de foncteurs α : T 0
diagramme suivant soit commutatif.
T ◦Q
6
@s
@
R
@
t
T 0 ◦ Q - Q0 ◦ K − (F )
α ◦ idQ
Comme on a le morphisme de foncteurs
t ◦ idI : T 0 ◦ Q ◦ I
- Q0 ◦ K − (F ) ◦ I,
et comme d’une part,
T0 ◦ Q ◦ I ' T0 ◦ J
et d’autre part,
s ◦ idI : T ◦ J
- Q 0 ◦ K − (F ) ◦ I
- T tel que le
110
2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
est un isomorphisme, il existe un morphisme de foncteurs α : T 0
diagramme
T ◦Q◦I
α ◦ idQ ◦ idI
6
T0 ◦ Q ◦ I
- T tel que le
@ s ◦ idI
@
R
@
t ◦ id-I 0
Q ◦ K − (F ) ◦ I
commute. Par le lemme précédent, le diagramme
T ◦Q
6
@s
@
R
@
t- 0
0
T ◦Q
Q ◦ K − (F )
α ◦ idQ
est donc commutatif. Pour conclure, établissons l’unicité de α. Soit α0 : T 0
tel que le diagramme
T ◦Q◦I
α0 ◦ idQ ◦ idI
6
T0 ◦ Q ◦ I
@ s ◦ idI
@
R
@
t ◦ idI
Q 0 ◦ K − (F ) ◦ I
commute. Comme s ◦ idI est un isomorphisme α = α0.
-T
CHAPITRE 3
Application aux espaces de Banach
3.1. Algèbre homologique pour les espaces de Banach
Définition 3.1.1. La catégorie des espaces de Banach a pour objets les espaces de
Banach et pour morphismes entre deux espaces de Banach E et F , les applications
linéaires continues, i.e., les applications linéaires u de E dans F pour lesquelles il
existe une constante C > 0 telle que
ku(x)kF ≤ C kxkE
∀x ∈ E.
On note B an cette nouvelle catégorie.
Il résulte de la définition précédente que u : E - F est un isomorphisme dans
B an si et seulement s’il existe des constantes C et C 0 strictement positives telles que
∀e ∈ E
ku(e)kF ≤ C kekE
et
kekE ≤ C 0 ku(e)kF .
Proposition 3.1.2. La catégorie B an est additive.
Preuve. Il est clair que Hom Ban (E, F ) posséde une structure naturelle de groupe
abélien et que la composition est bi-additive. Il nous reste à établir qu’elle admet des
produits finis.
Pour cela, démontrons que si E et F sont deux espaces de Banach, l’espace
E × F = {(e, f ) : e ∈ E, f ∈ F }
muni de la norme
k(e, f )kE ×F = sup(kekE , kf kF )
est un produit de E et F . Bien sûr, E × F est un espace de Banach. De plus, si
W est un espace de Banach et si α : W - E , β : W - F sont deux applications
linéaires continues, alors l’application
γ:W
- E ×F
w 7−→ (α(w), β (w))
111
112
3. Application aux espaces de Banach
est linéaire, continue et rend le diagramme
E
α
W
I
@ pE
@
@
γ E×F
@
@
R
β@
pF
F
commutatif. Comme γ est la seule application à avoir ces propriétés, on en déduit
que E × F est un produit de E et F .
Remarque 3.1.3. Sur E ⊕ F , les normes
k(e, f )k = sup(kekE , kf kF )
et
k(e, f )k = kek + kf k
sont équivalentes.
Rappelons que si F est un sous-espace linéaire fermé de l’espace de Banach E ,
alors F muni de la norme induite par celle de E est un espace de Banach. De plus,
l’espace quotient E/F muni de la norme quotient définie par
k[e]kE/F = inf ke + f kE
f ∈F
est de Banach.
Proposition 3.1.4. Soient E et F deux espaces de Banach et u : E
application linéaire continue.
i)
ii)
iii)
iv)
- F une
ker u ' u−1 (0) où la norme de u−1 (0) est induite par celle de E .
coker u ' F/u(E ) où F/u(E ) est muni de la norme quotient.
im u ' u(E ) où la norme de u(E ) est induite par celle de F .
coim u ' u(E ) où
kf ku(E ) = inf kekE .
u(e)=f
Preuve. i) Soient G ∈ Ob(B an) et v ∈ Hom Ban (G, E ) tels que u ◦ v = 0. Par
conséquent, v (G) ⊂ u−1 (0) et l’application
v0 : G
- u−1 (0)
g 7−→ v (g )
est bien définie, linéaire, continue et rend le diagramme
u−1 (0)
iI
@
@
v0 @
E
6
v
G
u
0
F
3.1. Algèbre homologique pour les espaces de Banach
113
commutatif. Comme v 0 est la seule application à jouir de ces propriétés, (u−1 (0), i)
est un noyau de u.
ii) Soient G ∈ Ob(B an) et v ∈ Hom Ban (F, G) tels que v ◦ u = 0. Comme v −1 (0)
est un sous-espace fermé de F , u(E ) ⊂ v −1 (0). Il existe donc une seule application
linéaire continue v 0 : F/u(E ) - G rendant le diagramme
u-
E
@
@
R
0@
q-
F
F/u(E )
v
0
? v
G
commutatif.
iii) est évident vu i) et ii).
iv) Comme le sous-espace u−1 (0) est fermé, on a
coim u ' E/u−1 (0).
On vérifie facilement que l’application
u0 : E/u−1 (0)
- u(E )
[e] 7−→ u(e)
est bijective. Il nous reste à vérifier l’équivalence des normes. Si e0 ∈ E , il vient
k[e0]kcoim u = k[e0]kE/u−1 (0)
=
inf
e∈u−1 (0)
ke 0 + e kE
= inf ke0 + ekE
u(e)=0
=
inf
u(e0 )=u(e0 )
ke 0 kE
= ku(e0)ku(E ) .
Comme u0 est une bijection, cela suffit.
Corollaire 3.1.5. Soient E et F deux espaces de Banach et u : E
cation linéaire continue.
- F une appli-
i) u est un monomorphisme si et seulement si u est injectif.
ii) u est un épimorphisme si et seulement si u est d’image dense.
iii) u est strict si et seulement si une des deux conditions équivalentes suivantes
est satisfaite :
a) u est relativement ouvert, i.e., il existe une constante C > 0 telle que
inf
e0 ∈u−1 (0)
b) u(E ) est fermé.
ke + e0k ≤ C ku(e)k
∀e ∈ E,
114
3. Application aux espaces de Banach
Preuve. i) et ii) sont des conséquences immédiates de la proposition précédente.
iii) Supposons que u soit strict. Par la proposition précédente, le morphisme
canonique
E/u−1 (0)
- u (E )
est un isomorphisme d’espaces de Banach. Par conséquent, u(E ) = u(E ) et les
normes
kf ku(E ) = inf kekE
u(e)=f
kf ku(E ) = kf kF
et
sont équivalentes. En particulier, il existe C > 0 tel que
ku(e)ku(E ) ≤ C ku(e)kF .
Il en résulte que
inf
e0 ∈u−1 (0)
ke + e0 kE ≤ C ku(e)kF
et u est relativement ouvert.
La réciproque est immédiate.
L’équivalence des conditions a) et b) résulte d’un théorème célèbre de Banach
(cf. [2, IV §4 no. 2]).
Corollaire 3.1.6. Soient E et F deux espaces de Banach et u : E
cation linéaire continue.
- F une appli-
i) u est un monomorphisme strict si et seulement si u est injectif et s’il existe une
constante C > 0 tel que
kekE ≤ C ku(e)kF
∀e ∈ E.
ii) u est un épimorphisme strict si et seulement si u est surjectif et s’il existe C > 0
tel que
inf kekE ≤ C kf kF .
u(e)=f
Preuve. C’est immédiat.
Proposition 3.1.7. La catégorie B an est quasi-abélienne.
Preuve. Décomposons la preuve en deux étapes.
i) Considérons le carré cartésien
E
u-
6
6
v0
E0
F
v
u0-
F0
3.1. Algèbre homologique pour les espaces de Banach
115
où u est un épimorphisme strict, et démontrons que u0 est un épimorphisme strict.
Rappelons que
0
E = ker u −v
−1
= u −v
(0)
et que si i : ker u −v
= {(e, f 0 ) : u(e) = v (f 0 )},
- E ⊕ F 0 est l’injection canonique, on a
v 0 = pE ◦ i,
u0 = pF 0 ◦ i.
L’application u0 est surjective. En effet, si f 0 ∈ F 0 , comme u est surjectif, il existe
e ∈ E tel que u(e) = v (f 0 ). Par conséquent, (e, f 0 ) ∈ E 0 et
u0 (e, f 0 ) = f 0 .
De plus,
0
u −1 (0) = {(e, 0) : u(e) = 0},
et pour tout (e, f 0 ) ∈ E 0 , il vient
inf0
(e0 ,0)∈u
−1 (0)
k(e, f 0 ) + (e0 , 0)kE 0 =
inf
e0 ∈u−1 (0)
k(e + e0 , f 0 )kE ⊕ F 0
≤ C ( inf
0
−1
e ∈u
(0)
ke + e0 kE + kf 0 kF 0 )
≤ C 0 ku(e)kF + C kf 0 kF 0
≤ C 0 kv (f )kF + C kf 0 kF 0
≤ C 00 kf 0 kF 0 .
On en déduit que u0 est un épimorphisme strict.
Considérons un carré co-cartésien
u0- 0
E0
F
6
v
6
v0
uE
F
où u est un monomorphisme
strict, et démontrons que u0 est un monomorphisme
!
v
strict. Notons α =
et rappelons que
−u
F 0 = coker α = (E 0 ⊕ F )/α(E ),
et que si q : E 0 ⊕ F
- coker α est le morphisme canonique, on a
u0 = q ◦ i E 0 ,
v 0 = q ◦ iF .
116
3. Application aux espaces de Banach
Comme u est un monomorphisme strict, il existe une constante C > 0 telle que
kekE ≤ C ku(e)kF
∀e ∈ E.
Il s’ensuit que
kekE ≤ C sup(kv (e)kE 0 , k−u(e)kF )
≤ C kα(e)kE 0 ⊕ F
∀e ∈ E.
Ainsi, α est un monomorphisme strict et son image est fermée. Par conséquent,
F 0 = (E 0 ⊕ F )/α(E ).
L’application u0 est injective. En effet, soit e0 ∈ E 0 tel que u0 (e0) = 0. On en
déduit que
(e0, 0) ∈ α(E ),
et il existe donc e ∈ E tel que
(e0, 0) = (v (e), −u(e)).
Comme u est un monomorphisme, e = 0 et on obtient e0 = v (e) = 0.
De plus, pour tout e0 ∈ E 0 , on a
ke0kE 0 ≤ ke0 + v (e)kE 0 + kv (e)kE 0
≤ ke0 + v (e)kE 0 + C kekE
≤ ke0 + v (e)kE 0 + CC 0 ku(e)kF
≤ (1 + CC 0 ) k(e0 + v (e), −u(e)kE 0 ⊕ F
∀e ∈ E.
Par conséquent, pour tout e0 ∈ E 0 , on a
ke0kE 0 ≤ (1 + CC 0 ) inf k(e0 + v (e), −u(e)kE 0 ⊕ F
e∈E
0
≤ (1 + CC )
inf
(e00 ,f )∈α(E )
k(e0 + e00 , f )kE 0 ⊕ F
≤ (1 + CC 0 ) k[(e0, 0)]kF 0
≤ (1 + CC 0 ) ku0 (e0 )kF 0 .
Il s’ensuit que u0 est un monomorphisme strict.
La catégorie dérivée de B an sera notée D(B an). Elle est munie d’une t-structure
gauche canonique et les éléments du cœur gauche sont des complexes de la forme
0
- E1
(où E0 est en degré 0) avec u injectif.
u
- E0
- 0
3.2. Espaces de Banach injectifs et projectifs
117
3.2. Espaces de Banach injectifs et projectifs
Soit I un ensemble (éventuellement infini). Rappelons que si E est un espace de
Banach, les espaces l1(I, E ), l∞ (I, E ) définis respectivement par
X
l1(I, E ) = {(ei)i∈I : ei ∈ E,
keikE < ∞},
i∈ I
l∞ (I, E ) = {(ei)i∈I : ei ∈ E, sup kei kE < ∞},
i∈ I
et munis respectivement des normes
k(ei)i∈I kl1 (I,E ) =
X
kei kE ,
i∈ I
k(ei )i∈I kl∞ (I,E ) = sup keikE ,
i∈ I
sont des espaces de Banach.
Pour simplifier les notations, on pose
l1(I ) = l1(I, C) et l∞ (I ) = l∞ (I, C).
Proposition 3.2.1. i) L’espace l1(I ) est projectif.
ii) L’espace l∞(I ) est injectif.
Preuve. i) Soient u : E - F un épimorphisme strict et v : l1(I ) - F une application linéaire continue. Construisons une application linéaire continue v 0 : l1(I ) - E
telle que u ◦ v 0 = v . Soit 1j la suite définie par
1j = (δij )i∈I .
Puisque u est un épimorphisme strict, on a
inf
u(e)=v(1i )
kekE ≤ C kv (1i )kF
≤ CC 0 k1i kl1(I )
≤ CC 0
< CC 0 + 1.
Donc, il existe ei ∈ E tel que
u(ei ) = v (1i ),
et kei kE < CC 0 + 1. Soit (ci )i∈I une suite de l1(I ). Il vient
X
X
kci ei kE =
|ci | kei kE
i∈ I
i∈ I
≤ (CC 0 + 1)
X
|ci |
i∈ I
0
≤ (CC + 1) k(ci )i∈I kl1 (I ) .
118
3. Application aux espaces de Banach
Par conséquent, l’application
v 0 : l 1 (I )
-E
(ci )i∈I 7−→
X
ci e i
i∈I
est linéaire et continue.
De plus, il vient
u ◦ v 0((ci )i∈I ) = u(
X
ci e i )
i∈I
=
X
ci u(ei )
i∈ I
=
X
ci v (1i )
i∈ I
= v(
X
ci (δji )j ∈I )
i∈ I
= v ((ci)i∈I ),
et donc, u ◦ v 0 = v .
ii) Soient u : E - F un monomorphisme strict et v : E - l∞ (I ) une application linéaire continue. Construisons une application linéaire continue v 0 : F - l∞ (I )
telle que v 0 ◦ u = v . L’application
vi : E
-C
e 7−→ v (e)i
est linéaire et continue car
|v (e)i| ≤ sup |v (e)i|
i∈ I
≤ kv (e)kl∞ (I )
≤ C kekE .
Comme u est un monomorphisme strict, par le théorème de Hahn-Banach (cf. [2, II
§3 no.2]), il existe une application linéaire continue vi0 : F - C telle que
vi0 ◦ u = vi,
et pour laquelle
|vi0 (f )| ≤ C kf kF .
Par conséquent, l’application linéaire
v0 : F
- l∞ (I )
f 7−→ (vi0 (f ))i∈I
est continue car
kv 0(f )kl∞ (I ) = sup |vi0(f )|
i∈ I
≤ C kf kF .
3.2. Espaces de Banach injectifs et projectifs
119
De plus, on a
v 0 ◦ u(e) = (vi0 (u(e)))i∈I
= (vi (e))i∈I
= (v (e)i)i∈I
= v (e),
et v 0 ◦ u = v .
Proposition 3.2.2. La catégorie B an a assez de projectifs et d’injectifs.
Preuve. i) Démontrons que B an a assez de projectifs. Soit E un espace de Banach.
Si B = {e ∈ E : kek ≤ 1} est la boule unité de E , l’application
X
(cb )b∈B 7−→
u : l1 (B ) - E
cb b
b∈B
est linéaire et continue car
X
k cb b k ≤
b∈B
X
|cb | = k(cb )b∈B kl1 (B ) .
b∈B
Montrons que u est un épimorphisme strict. Pour cela, il suffit d’établir que u est
surjectif. C’est bien le cas car pour tout e ∈ E \ {0}, la suite
kek 1 keek ∈ l1 (B ),
et on a
u(kek 1 keek ) = kek
e
ke k
= e.
Comme l1 (B ) est un espace projectif, B an a assez de projectifs.
ii) Démontrons que B an a assez d’injectifs.
Rappelons que E 0 désigne le dual de E , c’est-à-dire l’espace des fonctionnelles
linéaires continues muni de la norme
kT kE 0 = sup |T (e)|.
kek≤1
Si B 0 = {T : |T (e)| ≤ kek} est la boule unité de E 0 , l’application
u:E
- l∞(B 0 )
e 7−→ (T (e))T ∈B 0
est linéaire et continue car
ku(e)kl∞ (B 0) = sup |T (e)| ≤ kekE .
T ∈B 0
Or,
B M = {T : |T (e)| ≤ 1 ∀e ∈ B } = B 0,
120
3. Application aux espaces de Banach
et puisque B est fermé, par le théorème des bipolaires (cf. [2, II §6 no. 3]), on a
0
B = B MO = B O ,
et donc,
{e : kek ≤ 1} = {e : |T (e)| ≤ 1 ∀T ∈ B 0 }
= {e : sup |T (e)| ≤ 1}.
T ∈B 0
On en déduit que
kekE = sup |T (e)| = ku(e)kl∞ (B 0) .
T ∈B 0
Ainsi, u est un monomorphisme strict. Comme l∞ (B 0 ) est un espace injectif, B an a
assez d’injectifs.
Proposition 3.2.3. i) Un espace de Banach P est projectif si et seulement s’il existe
un ensemble I tel que P soit facteur direct de l1 (I ).
ii)Un espace de Banach I est injectif si et seulement s’il existe un ensemble J tel
que I soit facteur direct de l∞(J ).
Preuve. i) Vu 2.5.2 la condition est clairement suffisante. Démontrons qu’elle est
nécessaire. Par la proposition précédente, il existe un épimorphisme strict
- P.
u : l1 (J )
Par conséquent, la suite
0
- ker u
- l1 (I )
u
-P
-0
est strictement exacte et comme P est projectif, la proposition 2.5.3 montre que
l1(I ) ' P ⊕ ker u.
ii) s’établit de manière analogue.
Définition 3.2.4. Soient X et Y deux complexes de C (B an). On définit le complexe
Hom (X, Y ) par
Y
(Hom (X, Y ))k =
Hom Ban (X p , Y p+k )
p∈
et
Z
dhk = dY ◦ hk − (−1)k hk ◦ dX
pour tout hk ∈ (Hom (X, Y ))k .
Par la proposition 2.5.5, on a une équivalence de catégories
JP : K − (P )
- D− (B an)
de quasi-inverse JP0 et par dualité, on a une équivalence de catégories
JI : K + (I )
- D+ (B an)
3.3. Produit tensoriel et Hom interne d’espaces de Banach
121
de quasi-inverse JI0 . On définit alors le foncteur
RHom : D− (B an) × D+ (B an)
- D + (A b )
par
RHom (X, Y ) = Hom (JP0 (X ), JI0 (Y ))
pour tout X ∈ Ob(D− (B an)) et pour tout Y ∈ Ob(D+ (B an)).
3.3. Produit tensoriel et Hom interne d’espaces de Banach
Définition 3.3.1. Soient E et F deux espaces de Banach. Notons E ⊗ F le produit
tensoriel de E et F en tant que C-vectoriels. On sait qu’un élément h de E ⊗ F s’écrit
comme une somme finie
X
h=
ek ⊗ fk
k∈K
avec ek ∈ E et fk ∈ F . Cette décomposition n’est bien sûr pas unique. Munissons
E ⊗ F de la semi-norme
X
(
p(h) = P inf
kek kE kfk kF ).
h=
k ∈K
ek ⊗fk
k∈K
On définit alors le produit tensoriel des espaces de Banach E et F par
ˆ F = E ⊗\
E⊗
F/p−1 (0).
ˆ F est le séparé complété de E ⊗ F (cf. [2, II §1 no. 4]).
Ainsi, E ⊗
Remarque 3.3.2. Si l’application β : E × F
kβ (e, f )kG ≤ C kekE kf kF
- G est bilinéaire et vérifie
∀e ∈ E, ∀f ∈ F,
il résulte de la définition précédente qu’il existe une seule application linéaire continue
ˆ F - G telle que
α:E⊗
ˆ f ) = β (e, f ).
α(e ⊗
En effet, par définition du produit tensoriel d’espaces vectoriels complexes, il existe
une seule application
β0 : E ⊗ F - G
telle que β 0 (e ⊗ f ) = β (e, f ) pour tout e ∈ E et pour tout f ∈ F . De plus, si
X
h=
ek ⊗ fk
k∈K
est un élément de E ⊗ F , on a
X
β (ek , fk )
kβ 0 (h)k = k∈K
X
≤C
kek k kfk k .
k∈K
122
3. Application aux espaces de Banach
Ainsi,
kβ 0(h)k ≤ Cp(h),
et β 0 est continu. Cette dernière relation montre également que
0
β −1 (0) ⊃ p−1 (0).
Par conséquent, β 0 se factorise au travers d’un unique
β 00 : E ⊗ F/p−1 (0)
- G.
Comme β 00 est continu pour la semi-norme quotient induite par p, la construction du
complété assure qu’il existe une seule application linéaire continue
ˆF
α:E⊗
-G
rendant le diagramme
ˆF
E⊗
6
@α
@
R
00@
β
−1
-G
E ⊗ F/p (0)
i
commutatif.
Définition 3.3.3. Dans la suite, L(E, F ) désignera l’espace vectoriel complexe formé
des applications linéaires continues de E dans F muni de la norme
kukL(E,F ) = sup ku(e)kF .
kekE ≤1
C’est bien sûr un espace de Banach.
Proposition 3.3.4. Si E , F et G sont des espaces de Banach, alors
ˆ F, G) ' Hom (E, L(F, G)).
Hom (E ⊗
Preuve. Soit
ˆ F, G)
α : Hom (E ⊗
- Hom (E, L(F, G))
le morphisme défini par
ˆ f)
α(u)(e)(f ) = u(e ⊗
ˆ F, G), pour tout e ∈ E et pour tout f ∈ F . Cette définition
pour tout u ∈ Hom (E ⊗
est licite car d’une part,
α(u)(e) ∈ L(F, G).
En effet, on a
ˆ f )
kα(u)(e)(f )kG = u(e ⊗
G
ˆ
≤ C e ⊗ f E ⊗ˆ F
≤ C ke kE kf kF .
3.3. Produit tensoriel et Hom interne d’espaces de Banach
123
D’autre part, α(u) est continu car
kα(u)(e)kL(E,F ) = sup kα(u)(e)(f )kG
kf k≤1
≤ C sup kekE kf kF
kf k≤1
≤ C k e kE .
Soit v ∈ Hom (E, L(F, G)). Comme l’application
β 0 (v ) : E × F
-G
(e, f ) 7−→ v (e)(f )
est bilinéaire, et que
kv (e)(f )k ≤ kv (e)k kf k ≤ C kek kf k ,
il résulte de la remarque 3.3.2 qu’il existe une seule application
ˆF
β (v ) : E ⊗
-G
telle que
ˆ f ) = β 0 (v )(e, f )
β (v )(e ⊗
∀e ∈ E, ∀f ∈ F.
= v (e)(f )
Démontrons que les applications α et β sont inverses l’une de l’autre.
ˆ F, G). On a
Soit u ∈ Hom (E ⊗
ˆ f ) = α(u)(e)(f )
β (α(u))(e ⊗
ˆ f ),
= u(e ⊗
et donc, β ◦ α(u) = u.
De même, soit v ∈ Hom (E, L(F, G)). On a
ˆ f)
α(β (v ))(e)(f ) = β (v )(e ⊗
= v (e)(f ),
et donc, α ◦ β (v ) = v , d’où la conclusion.
Proposition 3.3.5. Pour tout espace de Banach E , on a les isomorphismes d’espaces
de Banach suivants :
ˆ E ' l1(I, E ),
i) l1(I ) ⊗
ii) L(l1(I ), E ) ' l∞ (I, E ),
iii) L(E, l∞ (I )) ' l∞(I, E 0 ).
124
3. Application aux espaces de Banach
Preuve. Soient (ci )i∈I ∈ l1(I ) et e ∈ E . Comme
X
k(ci e)i∈I kl1 (I,E ) =
k ci e k E
i∈I
X
=(
| ci | ) k e k E
i∈I
= k(ci )i∈I kl1 (I ) kekE ,
il existe une seule application linéaire continue
- l1 (I, E )
ˆE
α : l 1 (I ) ⊗
telle que
ˆ e) = (ci e)i∈I .
α((ci )i∈I ⊗
L’application
- l 1 (I ) ⊗
ˆE
β : l1(I, E )
X
(ei )i∈I 7−→
ˆ ei
1i ⊗
i∈I
est linéaire et continue car
X
X
1i ⊗
ˆ ei ≤
k1i kl
i∈I
1 (I )
kei kE
i∈I
≤
X
k e i kE .
i∈ I
De plus, les applications α et β sont inverses l’une de l’autre car d’une part,
ˆ e) = β ((cie)i∈I )
β ◦ α((ci )i∈I ⊗
X
ˆ ci e
=
1i ⊗
i∈ I
=(
X
ˆe
ci 1i ) ⊗
i∈ I
ˆ e,
= (ci )i∈I ⊗
et d’autre part,
α ◦ β (ei)i∈I = α(
X
ˆ ei )
1i ⊗
i∈ I
=
X
(ei 1i )i∈I
i∈ I
= ( e i ) i∈ I ,
ce qui suffit.
3.3. Produit tensoriel et Hom interne d’espaces de Banach
125
ii) On vérifie facilement que les applications
α : L(l1(I ), E )
- l∞ (I, E )
u 7−→ (u(1i ))i∈I
et
β : l∞ (I, E )
- L(l1 (I ), E )
(fi )i∈I 7−→ ((ci )i∈I 7−→
X
ci fi )
i∈I
sont linéaires, continues et inverses l’une de l’autre.
iii) On vérifie facilement que les applications
- l∞ (I, E 0 )
α : L(E, l∞ (I ))
u 7−→ (e 7−→ u(e)i )i∈I
et
β : l∞ (I, E 0 )
- L(E, l∞ (I ))
(ui )i∈I 7−→ (e 7−→ (ui (e))i∈I )
sont linéaires, continues et inverses l’une de l’autre.
ˆ P0
Corollaire 3.3.6. i) Si P et P 0 sont deux espaces de Banach projectifs, alors P ⊗
est projectif.
ii) Si P est un espace de Banach projectif et I un espace de Banach injectif, alors
L(P, I ) est injectif.
Preuve. i) Par la proposition 3.2.3, il existe des ensembles I et I 0 et des espaces de
Banach K et K 0 tels que
P ⊕ K ' l 1 (I )
et
P 0 ⊕ K 0 ' l1(I 0 ).
Comme par la proposition précédente,
ˆ l1(I 0) ' l1(I, l1(I 0)) ' l1(I × I 0 ),
l 1 (I ) ⊗
on a
ˆ (P 0 ⊕ K 0) ' l1(I × I 0).
(P ⊕ K ) ⊗
ˆ P 0 est facteur direct de l1(I × I 0 ), ce qui suffit.
On en déduit que P ⊗
ii) s’établit de manière analogue.
Définition 3.3.7. Soient X et Y deux complexes de K − (B an). On définit le comˆ Y ∈ K − (B an) par
plexe X ⊗
M
ˆ Y )k =
ˆ Yq
(X ⊗
Xp ⊗
p+q =k
126
3. Application aux espaces de Banach
(la somme est finie vu les hypothèses sur X et Y ). La différentielle
- (X ⊗
ˆ Y )k+1
ˆ Y )k
dkX ⊗ˆ Y : (X ⊗
est la seule application qui vérifie
ˆ y q ) = dpX xp ⊗
ˆ y q − (−1)p xp ⊗
ˆ dqY y q
dkX ⊗ˆY (xp ⊗
pour tout xp ∈ X p , pour tout y q ∈ Y q tels que p + q = k .
Par la proposition 2.5.5, on a une équivalence de catégories
JP : K − (P )
- D− (B an)
de quasi-inverse JP0 . On définit alors le foncteur
ˆ L : D− (B an) × D− (B an)
⊗
- D− (B an)
par
ˆ L Y = JP0 (X ) ⊗
ˆ JP0 (Y )
X⊗
pour tout X ,Y ∈ Ob(D− (B an)).
Définition 3.3.8. Soient X ∈ Ob(K − (B an)) et Y ∈ Ob(K + (B an)). On définit le
complexe L(X, Y ) par
Y
(L(X, Y ))k =
L(X p , Y p+k )
p
(le produit est fini vu les hypothèses sur X et Y ). La différentielle est donnée par
dhk = dY ◦ hk − (−1)k hk ◦ dX
pour tout hk ∈ (L(X, Y ))k .
Par la proposition 2.5.5, on a une équivalence de catégories
JP : K − (P )
- D− (B an)
de quasi-inverse JP0 et par dualité, on a une équivalence de catégories
JI : K + (I )
- D+ (B an)
de quasi-inverse JI0 . On définit alors le foncteur
RL : D− (B an) × D+ (B an)
- D+ (B an)
par
RL(X, Y ) = L(JP0 (X ), JI0 (Y ))
pour tout X ∈ Ob(D− (B an)) et pour tout Y ∈ Ob(D+ (B an)).
Proposition 3.3.9. Si X et Y sont deux complexes de D− (B an) et si Z est un
complexe de D+ (B an), alors
ˆ L Y, Z ) ' RHom (X, RL(Y, Z )).
RHom (X ⊗
3.3. Produit tensoriel et Hom interne d’espaces de Banach
127
ˆ Y q est projectif si X p et Y q le sont et L(Y p , Z q )
Preuve. Vu le corollaire 3.3.6, X p ⊗
est injectif si Y p est projectif et Z q injectif. Il suffit donc de démontrer que
ˆ Y, Z ) ' Hom (X, L(Y, Z ))
Hom (X ⊗
si X , Y ∈ Ob(K − (P )) et Z ∈ Ob(K + (I )).
Il vient successivement
Y M
ˆ Y, Z ) '
ˆ Y s , Z p+k )
Homk (X ⊗
(
Xr ⊗
p
'
r +s=p
Y Y
ˆ Y s , Z p+k )
Hom (X r ⊗
p r +s=p
'
YY
r
'
Y
Hom (X r , L(Y s , Z r+s+k ))
s
Hom (X r ,
r
'
Y
Y
L(Y s , Z r+s+k ))
s
Hom (X r , (L(Y, Z ))r+k )
r
' Homk (X, L(Y, Z )).
Notons αk la composée de ces isomorphismes. Il reste à démontrer que αk est compatible aux différentielles. Pour ce faire, explicitons d’abord le morphisme αk .
Remarquons que se donner un morphisme
ˆ Y, Z )
uk ∈ Homk (X ⊗
revient à se donner la famille de morphismes
M
ˆYs
ukp :
Xr ⊗
- Z p+k
r +s=p
ou la famille de morphismes
- Z r+s+k .
ˆ Ys
ukr,s : X r ⊗
De même, se donner un morphisme
v k ∈ Homk (X, L(Y, Z ))
revient à se donner la famille de morphismes
vrk : X r
- (L(Y, Z ))k+r
ou la famille de morphismes
k
: Xr
vr,s
- L(Y s , Z k+r+s ).
Par la proposition 3.3.4, le morphisme
ˆ Y, Z )
αk : Homk (X ⊗
- Homk (X, L(Y, Z ))
128
3. Application aux espaces de Banach
est caractérisé par
ˆ y s)
[αk (uk )]r,s(xr )(y s ) = ukr,s (xr ⊗
pour tout xr ∈ X r et y s ∈ Y s . Posons v k = αk (uk ). Puisque
dv k = d ◦ v k − (−1)k v k ◦ d,
on a
[dv k ]r (xr ) = d(vrk (xr )) − (−1)k vrk+1 (dxr )
= d ◦ vrk (xr ) − (−1)k+r vrk (xr ) ◦ d − (−1)k vrk+1(dxr )
et donc,
[dαk (uk )]rs (xr )(y s )
k
k
r
s
k k
r
s
= d(vr,s
(xr )(y s)) − (−1)k+r vr,s
+1 (x )(dy ) − (−1) vr +1,s (dx )(y )
ˆ y s )) − (−1)k+r ukr,s+1 (xr ⊗
ˆ dy s ) − (−1)k ukr+1,s (dxr ⊗
ˆ y s)
= d(ukr,s (xr ⊗
ˆ y s )) − (−1)k ukr+s+1 (dxr ⊗
ˆ y s + (−1)r xr ⊗
ˆ dy s )
= d(ukr,s (xr ⊗
ˆ y s )) − (−1)k ukr+s+1 (d(xr ⊗
ˆ y s ))
= d(ukr,s (xr ⊗
ˆ y s)
= [duk ]r,s (xr ⊗
= [αk+1 (duk )]r,s(xr )(y s ).
Par conséquent, αk+1 (duk ) = d(αk (uk )), d’où la conclusion.
Bibliographie
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129
130
Table des Matières
Introduction
i
Chapitre 0. Rappels de théorie des catégories
0.1. Catégories additives
0.2. Catégories abéliennes
0.3. Foncteurs représentables
1
1
10
12
Chapitre 1. Catégories triangulées et t-structures
1.1. Catégories triangulées
1.2. Localisation d’une catégorie triangulée
1.3. t-structures
1.4. Localisation d’une t-structure
15
15
20
39
55
Chapitre 2. Catégorie dérivée d’une catégorie quasi-abélienne
2.1. Catégorie K (A) associée à une catégorie additive A
2.2. t-structure sur K (A)
2.3. Catégories quasi-abéliennes
2.4. Dérivation d’une catégorie quasi-abélienne
2.5. Dérivation des foncteurs entre catégories quasi-abéliennes
57
57
70
81
85
100
Chapitre 3. Application aux espaces de Banach
3.1. Algèbre homologique pour les espaces de Banach
3.2. Espaces de Banach injectifs et projectifs
3.3. Produit tensoriel et Hom interne d’espaces de Banach
111
111
117
121
Bibliographie
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