DOSSIER PÉDAGOGIQUE
Les Controverses – Saison 14-15 – « Humains / Inhumains »
Une abeille d’Arménie
Texte Lancelot Hamelin
Mise en scène Maïanne Barthès
Jeu Odile Ernoult et Arthur Van de Poel
Création par La Comédie de Valence
THÉÂTRE DE LA VILLE
DU 02 AU 06 MARS 2015
LA COMÉDIE ITINÉRANTE
DU 11 MARS AU 09 AVRIL 2015
Dossier pédagogique réalisé par Annie Perrier
Coordinatrice du Jumelage
Éducation Nationale
Place Charles-Huguenel
26000 Valence - FR
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direction : Richard Brunel
LE GÉNOCIDE ARMÉNIEN
LE CONTEXTE
Le déclin de l’Empire ottoman
Après des siècles de progression vers l’ouest, l’Empire ottoman perd la majeure partie de ses territoires européens à partir du
XVIIIe siècle.
La montée des nationalismes
Au XIXe siècle, les minorités nationales au sein des Empires formulent des revendications en termes de droits, voire
revendiquent leur indépendance, tandis que le nationalisme est à l’œuvre au sein des majorités gouvernantes des mêmes
Empires, poussant chacun à des positions de plus en plus radicales.
La Première Guerre mondiale
Elle constitue pour l’Empire ottoman une occasion de restaurer son autorité et de reconquérir des territoires. La guerre est alors
le prétexte à réprimer toute révolte, puis à organiser le massacre de la population arménienne.
LES FAITS
Dès l’entrée en guerre de la Turquie, les Arméniens sont massivement envoyés au front. Puis eut lieu, le 24 avril 1915, la
première rafle à Constantinople qui concerne plusieurs centaines d’hommes politiques, intellectuels et nobles de la
communauté arménienne. La communauté est alors privée de son élite comme de ses forces vives, ne restent que les femmes,
les enfants, les personnes âgées. À partir de ce moment, les rafles se multiplient.
Le 27 mai 1915 est promulguée une loi sur le déplacement des personnes suspectes, dite « loi provisoire de déportation », qui
sert de couverture légale à la déportation des Arméniens. L’ensemble du territoire est concerné, des colonnes de déportation
partent de toutes les régions en direction du désert de Syrie. Des massacres systématiques ont lieu, et les conditions de
déportation ne permettent qu’à très peu d’Arméniens de rallier Alep.
À la fin de l’été 1915, il n’y a plus d’Arméniens en Anatolie, pour une population estimée à l’origine à 1,5 millions d’individus
2,2 millions pour le territoire de l’Empire ottoman.
En 1916, 870.000 déportés arméniens sont répartis dans des camps le long de l’Euphrate. La plupart d’entre eux meurent du
fait des conditions d’internement ou sont exécutés. On estime à 240.000 le nombre de rescapés.
CHRONOLOGIE
De 1894 à 1896
Une série de massacres a lieu sous les ordres du Sultan Abdul Hamid, qui vise à annihiler les groupes politiques arméniens.
Du 14 au 25 avril 1909
Massacres d’Arméniens à Adana sous les ordres du gouvernement Jeune-Turc. Près de 20.000 morts
Novembre 1914
L’Empire ottoman rejoint le conflit aux côtés de l’Allemagne.
24 avril 1915
Grande rafle des intellectuels et notables arméniens à Constantinople
Du 27 avril au 19 août 1915
Vagues de massacres et de déportations dans tout le pays
16 mai 1915
Loi du 16 mai 1915 concernant les instructions relatives aux biens mobiliers et immobiliers abandonnés par les Arméniens
déportés, la loi prévoit l'installation de réfugiés turcs dans ces demeures et sur ces terres.
15 septembre 1915
Le télégramme de Talaat, ministre de l'Intérieur à la Préfecture d'Alep, confirme l'ordre de déportation et d'extermination
précédemment communiqué.
7 mars 1916
Télégramme de Talaat, ministre de l'Intérieur à la Préfecture d'Alep : ordre d'extermination des enfants dans les stations
militaires
30 octobre 1918
Fin de la guerre entre les alliés et la Turquie. Estimation globale des massacres : près de 1.500.000 morts
10 Août 1920
Signature du Traité de Sèvres. La Turquie admet explicitement la réalité des massacres et déportations survenus lors de la
guerre et s'engage à procéder à "des" réparations. La République arménienne, indépendante depuis le 28 mai 1918, est
transformée en République socialiste soviétique d'Arménie.
25 avril 1923
Loi sur « les propriétés abandonnées » qui prévoit la confiscation de tous les biens abandonnés par les Arméniens absents du
pays, quels que fussent la date, le motif et les conditions de leur départ.
24 juillet 1923
Traité de Lausanne remplaçant le Traité de Sèvres, qui reconnaît la souveraineté turque sur un territoire qui correspond, pour la
plus grande partie, à celui de la Turquie actuelle
29 octobre 1923
Proclamation de la République turque, dont Mustafa Kemal est aussitôt élu président.
31 août 1985
Un rapport sur la prévention et la répression des génocides de la sous-commission des droits de l'homme de l’ONU reconnaît le
génocide de 1915.
18 juin 1987
Reconnaissance du génocide de 1915 par le Parlement européen
29 janvier 2001
Vote par la France de l’article unique reconnaissant le génocide des Arméniens de 1915
QU’EST-CE QU’UN GÉNOCIDE ?
Article 2 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide entrée en vigueur le 12 janvier 1951 :
« Le génocide s’entend de l’un quelconque des actes ci-après, commis dans l’intention de détruire tout ou en partie, un
groupe national, ethnique, racial ou religieux comme tels :
a) meurtres de membres du groupe
b) atteinte à l’intégrité physique ou mentale des membres du groupe
c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entrainer sa destruction physique totale ou
partielle
d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe
e) transfert forcé d’enfants d’un groupe à un autre groupe »
Inventé en 1944 par le juriste américain d’origine polonaise, Raphaël Lemkin, le concept de génocide (du grec genos groupe,
race et du latin caedere tuer) a été établi au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en référence à l’extermination des juifs
par les nazis : il revêtira une valeur juridique lors de sa définition le 9 décembre 1948 par l’Assemblée générale des Nations
unies qui adopte la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.
Crime d’État, perpétré par un gouvernement contre la population de son propre pays, le génocide se distingue par une
intention criminelle, la prise de décision et le caractère planifié du meurtre. Si le passage à l’acte est limité dans le temps,
il intervient le plus souvent après une maturation longue, empreinte de propagande et liée à un contexte politique et social
difficile. Diabolisées, les victimes font partie d’un groupe qui représente une menace plus ou moins grande, rationnelle ou non,
ancienne ou récente, potentielle ou fictive. Comme tous les crimes contre l’humanité, le génocide est imprescriptible : ses
auteurs peuvent être poursuivis sans limite dans le temps.
Pour le XXe siècle, cette définition juridique s’est appliquée à la destruction des Arméniens par le gouvernement jeune-turc en
1915-1916, à celle des juifs et des Tsiganes par les nazis, celle des Cambodgiens par les Khmers rouges, celle des Tutsi par le
pouvoir hutu au Rwanda. Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie a qualif de génocide le massacre de
Srebrenica, où 7.000 à 8.000 Bosniaques musulmans ont été tués par des Serbes de Bosnie en juillet 1995.
Le Centre du Patrimoine Arménien attire votre attention sur quelques-unes de ses propositions pédagogiques, autour du
spectacle « une abeille d’Arménie ».
Le voyage de Gayané • Atelier-visite
Public : de 6 à 11 ans - Primaire
Le génocide des Arméniens • Atelier
Public : à partir de 14 ans - Collège - Lycée
Les génocides : histoire, concept et usages Atelier-réflexion
Public : à partir de 15 ans - Lycée
Centre du Patrimoine Arménien - 14 rue Louis Gallet 26000 Valence
Le service de l’action éducative : 04 75 80 13 03 / laurence.vezirian@valenceromansagglo
UNE ABEILLE D’ARMÉNIE
La fable
La pièce commence par un court prélude qui rassemble les protagonistes : Haïk, dont la voix est habitée par des
souvenirs douloureux auxquels il voudrait échapper, Salomé et Ozgur, conscients de l’existence d’une mémoire
qui se dérobe à eux tandis qu’« un homme en tenue d’apiculteur » traverse l’espace.
Tout au long des différents tableaux, Salomé et Ozgur, seront, selon les moments, adultes ou enfants et ils porteront
sur le génocide, sa moire, sa non reconnaissance, des regards marqués par leur âge et l’appartenance à leur
peuple respectif.
Le grenier d’une vieille maison, bardée du panneau « Attention aux abeilles » et appartenant à un vieux docteur,
monsieur Dakhanavar, deviendra le terrain d’un jeu de la vérité, vérité de l’histoire, vérité de la mémoire, auquel se
livrent Salomé et Ozgur, enfants.
Salomé, l’Arménienne, Ozgur, le Turc, vont parcourir à deux un chemin difficile, entre amour et haine. Un
magnétophone, indispensable pour capter la voix des fantômes, des abeilles et leurs bourdonnements, le récit de
contes, une photographie et une lettre mystérieuses, un secret de famille les aideront dans leur quête.
Et ils auront bien besoin de tout cela pour affronter les silences, les mensonges qui entourent leur histoire,
l’histoire du génocide « Ecoute ton histoire, Ozgur, toi qui crois que tu es qui tu es. » (VII, Le grenier)
Distribution
Ozgur, 11ans.
Salomé, 11 ans.
Monsieur Dakhanavar, 70 ans.
Voix de Haïk - 15 ans.
La structure de la pièce
La pièce est composée de séquences ou tableaux numérotés de I à VII :
I Prélude
II La grille
III La cuisine
IV Les escaliers
V La chambre du vieux Dakhanavar
VI Couloirs et corridors
VII Le grenier
Le « sens » d’une déambulation
Les titres de chacune des séquences mettent l’accent sur un mouvement qui va de l’extérieur à l’espace intérieur de
la maison. A l’intérieur de cette dernière, la progression se fait du bas vers le haut.
Sous l’impulsion de Salomé qui connaît bien la maison et qui se fait guide, les deux enfants vont progresser vers le
grenier, vers la vérité :
Salomé : […] Je crois que j’ai entendu ma mère descendre à la cave. Profitons-en pour monter !
Ozgur : Pourquoi monter ?
Salomé : Ben, pour les fantômes. Les fantômes, c’est pas dans les greniers ?
Ozgur : Pourquoi pas dans la cave ?
Salomé : Tu n’y connais rien aux maisons, dans la cave, c’est les cadavres. Viens !
(III La cuisine)
Cette même nécessité de l’ascension vers le grenier revient à la fin de la séquence VI :
Ozgur : C’était lui ?
Salomé : Qui lui ?
Ozgur : Le fantôme qui ne nous parle pas.
Salomé : Je… Je ne sais pas… peut-être…Peut-être, oui…
Ozgur : Il faut filer ;
Salomé : Ils nous bloquent le chemin du retour… Nous devons monter… Aller plus loin…
Ozgur : Monter ?
Salomé : Oui, regarde, l’échelle.
Ozgur : L’échelle, oui, prenons l’échelle. Là-haut, nous serons sauvés.
(VICouloirs et corridors)
Des temporalités différentes
Le texte de Lancelot Hamelin mêle les époques et tisse ainsi un espace temporel composé de plusieurs strates dont
chacune se fait l’écho de l’histoire et de la mémoire du génocide arménien.
- Il y a d’abord le temps des témoins directs du génocide : Haïk et le docteur Dahkanavar
Haïk et sa voix de fantôme :
« Nous avons dû quitter la maison, et nous avons emporle maximum de choses dans la charrette. Nous ne savions
pas pourquoi il fallait partir.
[…]
On nous a dit qu’il fallait aller jusqu’à Deir ez-Zor, dans le désert, en Syrie : -bas, il y avait un camp pour nous.
Mon père m’a montré sur une carte, c’était si loin, il faudrait une année pour y arriver à pieds. »
(V La chambre du vieux Dakhanavar)
Haïk, encore, et sa lettre qui révèle le secret du lien qui unit Salomé et Ozgur. Haïk, l’arrière grand-père de Salomé
avait une petite ur qui a été enlevée, dans le camp de Deir-ez-Zor, à sa mère par un officier turc, et « élevée
comme une autre, dans la culture d’un autre peuple. ». Elle est l’arrière grand-mère d’Ozgur.
Le docteur Dakhanavar, quant à lui, est, comme le dit Haïk dans la lettre qu’il adresse à l’oncle d’Ozgur, « la
mémoire de notre peuple et il connaît votre histoire, l’histoire que vous ignorez ». Il est le conservateur d’une
mémoire endormie, anesthésiée, gommée « Un jour la justice sera rendue et nous pourrons oublier ».
- Plus proches temporellement, les mères respectives de Salomé et d’Ozgur, accouchées toutes deux par le
docteur Dakhanavar et l’oncle d’Ozgur qui ne veut entendre parler ni du génocide ni de la vérité concernant sa
grand-mère.
- Salomé et Ozgur, enfants de 11 ans, porteurs de l’histoire de leur peuple et traversés l’un et l’autre par l’appel
de la mémoire du génocide.
[Dans la séquence V, Salomé et Ozgur découvrent dans la chambre du docteur des photos des massacres perpétrés durant le
génocide ]
Ozgur : J’ai mal pour eux, je te le dis. On les a tués.
Salomé : On les a tués. Mon arrière grand-mère m’a dit qui les a tués.
Ozgur : Mon oncle dit : il n’y a aucune preuve. Mon oncle dit…
Salomé sert Ozgur contre elle.
Salomé : Ne dis rien, ça va, ne dis rien. Tout va bien. Ce sont des photographies. Partons.
- Enfin, Salomé et Ozgur, adultes : elle est devenue conteuse et lui photographe.
L’imaginaire, le conte pour aborder la réalité des faits
A deux reprises, Lancelot Hamelin s’empare de récits traditionnels arméniens que Salomé raconte à Ozgur :
l’histoire de la goutte de miel et l’histoire du Dakhavanar, un vampire, vaincu par la fraternité et la ruse de deux
enfants.
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