pallidum interne Stimulation du dans la dystonie primaire généralisée 3

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3 questions à...
Stimulation du pallidum interne
dans la dystonie primaire généralisée
Entretien avec M. Vidailhet (service de neurologie, hôpital Saint-Antoine, Paris)
> Réalisé par G. Mégret
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Prérequis : les formes sévères de
dystonie répondent faiblement au traitement médical. La stimulation cérébrale
profonde (SCP) est une technique neurochirurgicale réversible qui a été employée
pour le traitement de la dystonie, mais
l’évaluation de son efficacité s’est limitée
aux études en ouvert.
enregistrés par vidéo, furent validés par
un observateur qui ignorait le type du
traitement réalisé. À 3 mois, les patients
subirent une double évaluation en présence et en l’absence de neurostimulation.
La qualité de vie, les capacités cognitives
et l’humeur des patients à l’inclusion et à
12 mois ont également été évaluées.
cités cognitives. Au 3e mois, les scores
de mouvements dystoniques furent
significativement meilleurs avec neurostimulation que sans (24,6 ± 17,7 versus
34,6 ± 12,3 ; p < 0,001). Nous avons
relevé 5 événements péjoratifs (chez
3 patients) qui ont tous été réversibles
sans séquelles.
Méthodologie : nous avons réalisé une
Résultats : le score des mouvements
étude prospective, contrôlée et multicentrique évaluant l’efficacité et la tolérance de la stimulation bilatérale du pallidum chez 22 patients atteints de dystonie
primaire généralisée. La sévérité de la
dystonie a été évaluée avant la chirurgie
et 3, 6 et 12 mois après l’intervention pendant la neurostimulation grâce aux sousscores de mouvement et d’incapacité
fournis par l’échelle de dystonie de BurkeFahn-Marsden. Les scores de mouvement,
dystoniques s’est amélioré depuis une
moyenne (± SD) de 46,3 ± 21,3 avant
chirurgie, passant à 21,0 ± 14,1 au
12e mois (p < 0,001). Le score d’incapacité s’est lui aussi amélioré, en partant de 11,6 ± 5,5 avant chirurgie pour
atteindre 6,5 ± 4,9 à 12 mois. L’état
général et les fonctions physiques furent
significativement améliorés après un
an. Il n’y a pas eu de changement significatif concernant l’humeur et les capa-
Conclusions : ces résultats montrent l’efficacité et la tolérance de la stimulation
bilatérale du pallidum interne chez des
patients porteurs d’une dystonie primaire
généralisée.
>> Vidailhet M, Vercueil L, Houeto JL et al.
French Stimulation du Pallidum Interne dans
la Dystonie (SPIDY) Study Group. Bilateral
deep-brain stimulation of the globus pallidus
in primary generalized dystonia. N Engl J Med
2005;352(5):459-67.
Le groupe français SPIDY (Stimulation du Pallidum Interne
dans la Dystonie), qui associe 3 équipes pratiquant la stimulation cérébrale profonde (Grenoble, Paris et Lille), a montré
une amélioration des échelles de dystonie de l’ordre de 55 %
dans la dystonie primaire généralisée dans une population
de malades adultes. L’effet de ce traitement neurochirurgical
est donc majeur dans une pathologie invalidante. Pourtant,
ces résultats semblent inférieurs à ceux obtenus dans une
population pédiatrique par le pionnier de cette thérapie, le
Pr Coubes (Montpellier). Y a-t-il une explication à cette
différence de bénéfice ?
vidéos standardisées, qui sont elles-mêmes présentées dans
un ordre randomisé avant cette analyse. Cela écarte toute
possibilité d’être influencé, éventuellement de manière
favorable ou optimiste, par la connaissance préalable du
patient et de son état (pré- ou postopératoire).
Plusieurs hypothèses peuvent être avancées :
– L’étude SPIDY est la seule étude contrôlée publiée à ce jour.
De ce fait, l’analyse centralisée “en aveugle” des conditions
de stimulation et de l’identité des patients se fait à partir de
– Enfin, l’hétérogénéité relative de la population peut jouer
un rôle (DYT1 et non DYT1, présentations cliniques différentes
entre divers patients correspondant au critère de dystonie
généralisée). En effet, comme dans les séries anciennes de
– L’étude analyse une population de patients adultes alors
que les résultats publiés avec un pourcentage d’amélioration
important (> 70 %) portaient initialement sur des enfants.
Toutefois, les résultats publiés par la même équipe (Coubes)
chez les adultes sont comparables à ceux qui étaient obtenus
chez les enfants (l’argument de l’âge est donc peu solide).
La Lettre du Neurologue - Suppl. Les Actualités au vol. IX - n° 3 - mars 2005
pallidotomies et de thalamotomies, il existe une relative
variabilité interindividuelle de la réponse à la thérapeutique
(dans la série SPIDY, certains patients ont une amélioration
de plus de 80 % similaire à celle des patients provenant de
séries publiées en ouvert).
Existe-t-il des critères cliniques qui permettent de prédire
quels sont les malades bénéficiant le plus d’une telle
intervention ?
Certains critères ne semblent pas (à la lumière des données
de la littérature dans les études en ouvert) ou ne sont pas
(conclusions de l’étude SPIDY, avec les réserves de la puissance statistique sur un nombre de patients relativement
restreint) des facteurs prédicitifs de la réponse : l’âge au
moment de la chirurgie (enfant ou adulte), la durée d’évolution de la maladie, le sexe et le statut DYT1 ne sont pas
des facteurs influençant le pronostic chirurgical.
À ce jour, la localisation du contact de l’électrode de stimulation au sein du pallidum pourrait être un élément, mais,
pour une même localisation anatomique, on peut obtenir des
résultats excellents (80 %) ou n’en avoir aucun. Les caractères
sémiologiques de la dystonie sont peut-être importants (les
formes mobiles hyperkinétiques semblent avoir une meilleure
réponse que les formes avec postures fixées), mais cela n’a
pas été étudié rigoureusement. Pour l’instant, c’est plus
l’objet de consensus au cours de discussions informelles
entre experts des différents centres.
En se fondant sur les résultats de cette étude qui concerne
une pathologie rare, pensez-vous que l’indication pourrait
être étendue à d’autres dystonies plus fréquentes, telles
que la dystonie idiopathique focale, la dystonie généralisée
postanoxique ou la dystonie tardive ?
Cette technique de stimulation bipallidale peut être appliquée à d’autres formes de dystonies, mais cela ne peut se
concevoir que dans le cas d’études contrôlées. Ce point est
particulièrement important, car il s’agit de maladies rares, et
des groupes homogènes de patients doivent être constitués
et suivis dans le cadre d’études multicentriques. Une prise en
charge “au coup par coup” sera très utile pour les patients
pris individuellement, mais ne permettra pas de répondre à
des questions aussi importantes que celles des facteurs
pronostiques ou des indications optimales en fonction des
étiologies de dystonies, des meilleures conditions de stimulation. À terme, la population de petite taille des
patients aura été traitée dans son ensemble et les questions importantes de la recherche pourront, pour certaines
d’entre elles, rester sans réponse (et de ce fait, limiter la
possibilité d’améliorer la qualité de la prise en charge). En
pratique, des études contrôlées sont en cours : pour la dystonie tardive postneuroleptique (TARDYS), pour les formes
plus localisées et les dystonies postanoxiques (SPIDY 2),
mais ce ne sont que quelques exemples ; des études multicentriques sont en cours ou en passe d’être terminées
en Allemagne (avec des résultats comparables à ceux de
SPIDY), en Grande-Bretagne et au Canada, et débutent aux
États-Unis.
Il est probable que les réponses seront rapides pour
les dystonies plus focales et les dystonies tardives qui
peuvent obtenir des améliorations comparables à celles
qui ont été observées dans les dystonies généralisées.
En revanche, elles seront peut-être plus nuancées dans les
dystonies postanoxiques, du fait de l’hétérogénéité des
patients.
Il y a donc beaucoup de travail en cours et en projet. Cette
approche chirurgicale a complètement modifié la prise en
charge de la dystonie en apportant pour la première fois
une thérapeutique potentiellement très efficace, avec un
bon ratio bénéfice/risque, et en permettant une approche
physiopathologique nouvelle.
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