IMAGERIE
La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. VIII - mai-juin 2005
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Sur le plan paraclinique, le scanner et l’échographie sont les exa-
mens de choix. L’abdomen sans préparation est peu utile au dia-
gnostic mais permet d’évaluer le degré d’obstruction et de détec-
ter des signes de complications tels qu’un pneumopéritoine ou
une pneumatose (5). Les radiographies standard avec produit de
contraste ne sont plus utilisées.
L’échographie a l’avantage d’être facilement disponible, rapide,
non irradiante, et permet une visualisation en temps réel ; mais elle
est opérateur-dépendante, les gaz digestifs peuvent empêcher l’exa-
men et l’étiologie sous-jacente est rarement mise en évidence. On
retrouve classiquement un aspect en cible transversalement et en
couches successives longitudinalement. Le cercle ou couche
externe, hypoéchogène, correspond aux parois œdématiées du
segment d’aval, et la partie interne, hyperéchogène, au segment
d’amont invaginé (5).
Le scanner est devenu l’examen le plus souvent réalisé, après les
clichés standard, dans le cadre de douleurs abdominales. L’aspect
caractéristique retrouve une masse, ronde ou ovalaire selon l’angle
de coupe, représentant un segment de tube digestif épaissi, qui cor-
respond aux deux segments invaginés avec une densité graisseuse
plus ou moins centrale correspondant au mésentère avec une éven-
tuelle prise de contraste des vaisseaux. Un aspect en cible ou en
couche est fréquemment visible en cas d’œdème des parois ou de
liquide présent entre les parois du segment d’aval et du segment
invaginé. Le scanner permet de mieux estimer la souffrance vascu-
laire du tube digestif et permet aussi d’orienter, de manière indirecte,
vers une cause maligne en présence d’adénopathies ou d’autres
localisations suspectes. L’étiologie sous-jacente est difficile à
identifier ; seuls les lipomes sont plus fréquemment mis en
évidence (5).
La préférence entre échographie et scanner varie selon les équipes,
avec une certaine tendance en faveur du scanner (2, 3). Malgré ces
techniques, le diagnostic préopératoire n’est posé que dans 32 (2)
à 40 % (3) des cas ; le plus souvent, le diagnostic se fait en per-
opératoire. Une série récente sur un petit nombre de cas montrait
une amélioration, avec un diagnostic préopératoire dans 80 % des
cas (4).
L’importance majeure du diagnostic vient de l’étiologie. Contrai-
rement à ce qui est observé chez l’enfant, on retrouve une lésion sous-
jacente dans 90 % des cas (2, 3),néoplasique dans 50 % des cas (3, 4).
La nature des lésions varie en fonction de la localisation.
Les invaginations du grêle représentent 70 à 80 % des invagina-
tions (2, 3, 5). La cause en est néoplasique dans 45 à 48 % des cas
(2,3),avec, par ordre approximatif de fréquence : métastase de méla-
nome, de cancer pulmonaire, de cancer rénal, lymphome, sarcome
et adénocarcinome primitif. Les causes bénignes sont dominées
par les adhérences postopératoires. Viennent ensuite les diverti-
cules de Meckel, puis les causes plus rares : lipome, Peutz-Jeghers,
hamartome, neurofibrome, polype fibreux inflammatoire et les
états pathologiques tels que la sclérodermie, le purpura rhumatoïde
ou la maladie cœliaque. L’invagination n’est idiopathique que dans
2% (2) à 16 % des cas (5).
La fréquence des lésions néoplasiques dans les invaginations
coliques est encore plus importante, allant de 43 % (2) à 80 % (3).
L’adénocarcinome primitif est de loin le plus fréquent ; des cas
de léiomyosarcomes et de métastases ont été rapportés. Les lésions
bénignes sont essentiellement des lipomes, des polypes adénoma-
teux et des hyperplasies lymphoïdes.
L’existence d’une lésion sous-jacente dans 90 % des cas contre-
indique la simple réduction hydrostatique ; l’indication chirurgicale
est formelle, dans un but thérapeutique, mais aussi étiologique.
Dans le cadre d’une invagination colique, une résection carcino-
logique, sans réduction de l’invagination, est indiquée, sauf si une
lésion bénigne a pu être diagnostiquée en préopératoire avec certi-
tude (1-4). Dans le cadre d’une invagination grêle, si les examens
complémentaires n’ont pas permis de diagnostic étiologique, le
contexte (antécédents de laparotomie, anastomoses sur l’intestin
grêle, maladie systémique) et les constatations peropératoires (via-
bilité du tube digestif après réduction, examen extemporané de la
lésion) guident la résection chirurgicale (1-4). Quelle que soit l’étio-
logie, le traitement chirurgical permet d’éviter une récidive. On
peut, de plus, dans certains cas, tel le cas clinique n° 2,amé-
liorer considérablement le pronostic à long terme d’une pathologie
néoplasique. ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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