CHÂTEAUVALLON.COM LE BAOU / GRAND STUDIO PROCHAINEMENT COPRODUCTION — GENRE THEATRE — DATE(S) MARDI 7, MERCREDI 8, JEUDI 9 FÉVRIER 2017 — HORAIRE(S) 19H00 — DURÉE — SPECTACLE — L’ INSTANT DÉCISIF LA BEAUTÉ DU GESTE -1 CIE DU ZIEU — MENTIONS — Production (en cours) Maison de la Culture d’Amiens - Pôle Européen de Création, Châteauvallon-Scène Nationale, Les Scènes du Jura-Scène Nationale. L’ INSTANT DÉCISIF DU ZIEU Conception, mise en scène, écriture Nathalie Garraud et Olivier Saccomano Acteurs, actrices Mitsou Doudeau, Cédric Michel, Florian Onnein, Conchita Paz et Charly Totterwitz Scénographie Jean-François Garraud Costumes Sarah Leterrier, assistée de Sabrina Noiraux Vidéo Camille Lorin Lumières Guillaume Tesson Administration, production Ariane Salesne En exergue à son nouveau cycle théâtral «La Beauté du geste», la compagnie du Zieu cite le film de Leos Carax, Holy Motors : « Je continue comme j’ai commencé. Pour la beauté du geste ». Mais comment commencer ? «L’instant décisif», première pièce d’une fresque sans chronologie ni épisodes, porte sur ce point de bascule qui engage dans l’action théâtrale ou dans l’action politique. Les acteurs disent la première morsure, les premiers pas sur scène. Comment ils sortirent par effraction de ce dont on ne sort pas : sa condition. Comment ils entrèrent de plainpied dans la minorité, dans la lumière publique. Comment les morts parlent aux vivants, et réciproquement. Après Othello, variation pour trois acteurs, la troupe s’engage dans une réflexion originale, à l’écoute du monde, en quatre temps dont «L’instant décisif» est le premier mouvement. Ici pas de ring circulaire pour embarquer les spectateurs dans la tragédie de Shakespeare, mais un dispositif bi-frontal qui enserre les acteurs dans la masse du public. Comme pour mesurer les effets politiques d’être en minorité… Notre travail de troupe, qui est aussi un travail d’écriture, s’est toujours inscrit dans la durée : jusqu’à présent celle de cycles de création et aujourd’hui celle d’une longue pièce, composée de trois « unités » indépendantes. «La beauté du geste» est une fresque, dont le motif central est le rapport entre l’action théâtrale et l’action politique. Concrètement, son sujet est aussi l’expérience que nous faisons : l’histoire d’une troupe de theatre confrontée, à la faveur d’un moment historique singulier, aux idées, aux éléments politiques et biographiques qui travaillent ses fondations. Les unités qui composeront la fresque se dessinent à partir de trois motifs : L’INSTANT DECISIF (LA BEAUTE DU GESTE - 1) Des acteurs. Leurs histoires, à force d’être frottées à des masques et à des fictions, ne s’en distinguent plus. Documentaire théâtral. Récits des premières morsures, des premiers pas sur scène. Comment ils sortirent par effraction de ce dont on ne sort pas : sa condition. Comment ils entrèrent de plain-pied dans la minorité, dans la lumière publique. Pourriture du royaume du spectacle. Les morts parlent aux vivants, et réciproquement. A MAINS LEVEES (LA BEAUTE DU GESTE - 2) Une pièce. Les acteurs jouent une pièce répétée ou répètent une pièce jouée. Titre de la pièce : A mains levées. Le titre appelle deux gestes : un type de vote, qui n’est plus celui de l’isoloir et de l’Etat ; un type de violence, qui n’est plus celle de la brutalité sourde et de l’Etat. Epitaphe de l’Etat moderne. Provocation à la désobéissance. Désertion : la soumission (exercée ou subie) déserte l’âme. L’ANGLE MORT (LA BEAUTE DU GESTE - 3) Un procès. L’Etat entre en scène. La troupe est accusée. Procès qu’on n’avait pas vu venir, mais qu’on voit se tenir. Etat d’urgence. Simulacre de justice. Les avocats sont des acteurs, les acteurs sont des avocats. Ils portent des robes : les femmes en savent davantage. Où sont les personnages ? Ils agonisent au vieux théâtre où l’Etat et les terroristes se renvoient la balle. -Dites-moi, vous aimez toujours votre travail ? Je vous demande ça parce que certains d’entre nous trouvent que vous avez l’air un peu fatigué ces derniers temps. Certains commencent même à se plaindre, quand ils vous voient, de ne plus y croire. -Je regrette les caméras. Quand j’étais jeune, elles étaient plus grosses que nous. Ensuite, elles sont devenues plus petites que nos têtes. Aujourd’hui, on ne les voit plus du tout. Alors oui, moi aussi, j’ai du mal à y croire parfois. -Cette nostalgie est un peu sentimentale, non ? Le voyou n’a pas besoin de voir les caméras qui le surveillent dans son quartier pour y croire, lui. -Vous voulez ça ? Qu’on devienne tous paranoïaques ? -Vous ne l’êtes pas déjà ? Moi si, très. J’ai toujours été persuadé que j’allais mourir un jour… -Qu’est-ce que vous me voulez ? -Rien. J’aime votre travail, vous le savez. Mais certains d’entre nous… - Mais de qui parlez-vous, enfin ? merde! -Laissez-moi poser les questionsQu’est-ce qui vous pousse à continuer, Oscar ? -Je continue comme j’ai commencé. Pour la beauté du geste. -La beauté. On dit qu’elle est dans l’œil de celui qui regarde. - Mais alors si personne ne regarde plus ? Leos Carax, Holy Motors L’INSTANT DECISIF Première pièce : «l’instant décisif». L’expression, employée par le photographe Cartier Bresson, dit la seconde où le doigt presse sur le déclencheur. Elle est reprise par Eric Hazan dans « Dynamique de la révolte » pour désigner le point d’accroc ou de bascule des mouvements insurrectionnels. De tels instants, qui décident du sort d’une existence ou d’une politique, appartiennent au feu de l’action, au cœur de la bataille. Historiquement, ils se signalent au temps des guerres, où les camps et les alliances se clarifient. Depuis 70 ans, l’Europe occidentale connaît une paix apparente sur son territoire, bornée par deux guerres officiellement déclarées : celle qui s’est achevée en 1945 par la victoire militaire sur l’état nazi et celle, de forme encore incertaine, contre l’état islamique, dont les autorités viennent de proclamer l’ouverture. Entre les deux, des « mouvements » (68), des « événements » (la guerre d’Algérie), des « crises » (pétrolières, financières, sociales) gérées par les divers gardiens de la paix. Les acteurs sont nés et ont vécu en Europe occidentale. Ils ont entre 25 et 40 ans. Ils ont décidé d’être acteurs à un moment de l’histoire où la politique refluait, où elle avait disparu des livres, des discussions, des écrans. Ils ont traversé un temps où les repères idéologiques dominants se limitaient à l’opposition formelle démocratie/totalitarisme. Ils n’ont pas été des militants politiques. Ils ont cherché au théâtre un lieu d’étude, de destruction et de construction de soi, un atelier et un laboratoire des attitudes historiques. Ils se sont, à tâtons, arrachés à eux-mêmes et à la domination du temps. Ils se sont méfiés du théâtre lui-même, de sa suffisance et de ses insuffisances. Ils ont développé une dureté et une douceur. Une forme de précision. Puis ils ont entendu revenir les mots de la politique : capitalisme, communisme, fascisme. Ils les ont retrouvés dans certains livres, certaines discussions, sur certains écrans. Ces mots éclairaient les fragments de politique perdue qu’ils avaient rencontrés dans certains textes, travaillés sur certains plateaux, recueillis dans certaines expériences. A présent, les voici. prêts a dire et a faire.[...] Ils se tiennent à présent entre deux époques. ils se retrouvent maintenant au point de bascule ou le théâtre et la politique s’agregent en une seule masse, attirés par un même noyau : cœur d’une pierre ou d’un fruit sur le point de se fendre. LA COMPAGNIE DU ZIEU Du zieu est une compagnie théâtrale dirigée par Nathalie Garraud (metteure en scène) et Olivier Saccomano (auteur). Depuis 2006, ils ont réuni une troupe d’acteurs et de techniciens, et travaillent sous forme de cycles de création. Ces cycles sont le lieu d’une recherche commune sur l’écriture théâtrale et sur la pratique de l’acteur, ils sont aussi le lieu d’une expérience de pensée collective. De 2007 à 2010, ils mènent un premier cycle de recherche sur la tragédie : «Les Suppliantes». De 2010 à 2013, le cycle sur la jeunesse, intitulé «C’est bien C’est mal», se bâtit sur le principe d’un laboratoire permanent, en lien continu avec le public : deux années de création de formes brèves expérimentales – les Études, présentées dans des lieux accueillant des adolescents – donnent lieu à l’écriture et à la création de la pièce «Notre jeunesse». La compagnie vient d’achever le cycle «Spectres de l’Europe», les trois pièces de ce cycle sont : «L’avantage du printemps», «Othello variation pour trois acteurs» et «Soudain la nuit» . Parallèlement à ces cycles de création, Nathalie Garraud est engagée dans des projets de coopération à l’étranger, notamment avec le collectif Zoukak à Beyrouth. Olivier Saccomano poursuit une recherche théorique en philosophie et publiera en 2016 «Le Théâtre comme pensée» dans la collection Expériences philosophiques des éditions Les Solitaires Intempestifs. Les pièces sont également publiées aux éditions Les Solitaires Intempestifs.