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Correspondances en neurologie vasculaire - n° 3 - Vol. II - juillet-août-septembre 2002
éditorial
modérée ou non jusqu’à la ventilation artificielle avec intubation ou même
l’hyperventilation. Quelle que soit la qualité de l’équipe et des moyens, la mortalité
demeure colossale, emportant les malades dans 75 à 80 % des cas. C’est pourquoi,
on a proposé ces 15 dernières années des thérapeutiques beaucoup plus agressives
de type chirurgical consistant en une hémicrâniectomie permettant la diminution
de la pression intracrânienne, l’augmentation de la perfusion tissulaire, l’amélioration
du flux circulatoire des vaisseaux du polygone de Willis et collatéraux leptoméningés,
l’expansion cérébrale vers la convexité soulageant les déplacements qui menacent
les structures médianes. Le volet crânien décompressif avec durotomie a pour effet
essentiel de prévenir l’engagement transtentoriel mortel.
Historiquement, la crâniectomie décompressive remonte à 1935 et a été utilisée
dans les infarctus cérébraux massifs, dans les traumatismes crâniens et dans certains
cas d’encéphalite herpétique œdémateuse avec des résultats variables et plutôt
décevants. De 1935 à 1985, malgré quelques succès isolés dans des études fragmentaires
ou anecdotiques, s’est produite une irrésistible réticence de la part des neurochirurgiens
pour cette technique opératoire. Celle-ci associait parfois à l’hémicrâniectomie
une excision du tissu cérébral nécrosé, notamment dans les encéphalites herpétiques
et les traumatismes crâniens. Elle n’a été reprise que dans le milieu des années 1980,
surtout depuis 1990, sous la forme d’un volet décompressif de taille et de topographie
variables. Le mouvement neurochirurgical nouveau pour ces thérapeutiques,
lent à se développer, a eu pour justification les nombreux échecs des thérapeutiques
médicales qui, même bien conduites, n’empêchaient pas une issue fatale pour la
majorité des patients.
Plusieurs publications, surtout américaines et germaniques, de cohortes de malades
présentant des infarctus massifs de la cérébrale moyenne – 8 études en ouvert
depuis 1988, dont une seule a été prospective (Hacke, Schwab) – ont montré
que la chirurgie décompressive pouvait réduire la mortalité de 80 à 30 ou à 25 %.
Il se trouve que l’évolution des patients frappés d’infarctus malin de la sylvienne
est souvent prédictible sur des critères cliniques et neuroradiologiques, et cela bien
avant l’apparition d’une mydriase et d’un coma qui traduisent la souffrance
mésencéphalique à un stade beaucoup trop tardif. L’ équipe d’Heidelberg a montré
qu’il était possible d’opérer les malades très tôt, dans les premières 24 heures, avant
que ne se produise la hernie transtentorielle fatale. Si les séries publiées jusqu’à présent
ont été encourageantes du point de vue de la mortalité, les résultats fonctionnels n’ont
pas été suffisamment étudiés. Les infarctus de l’hémisphère droit ont évidemment
un bien meilleur pronostic fonctionnel que ceux de l’hémisphère gauche.
L’évolution postopératoire est à la fois mouvementée et très prolongée. L’évaluation
définitive du niveau séquellaire nécessite un long suivi allant jusqu’à un ou deux ans.
Tous les malades reprennent la marche et un certain degré d’autonomie.
De l’avis général, le pronostic est beaucoup plus favorable chez des sujets jeunes
de moins de 50 ans que chez les sujets plus âgés. Néanmoins, les indications
opératoires dépendent fortement des antécédents, de l’état somatique
et des comorbidités du patient à son arrivée, ainsi que de son contexte socio-familial
avec toutes les difficultés éthiques qui s’y rattachent. Les progrès enregistrés
ces dernières années au niveau des moyens de réanimation, de la précision
des indications cliniques et radiologiques de l’hémicrâniectomie, de la technique
opératoire, nous ont incités à entreprendre une étude prospective ouverte sur 30 patients
avec des résultats préliminaires encourageants sur la mortalité globale et la qualité
de la récupération fonctionnelle.
Les interrogations et les controverses actuelles portent sur la taille et la topographie
du volet, la validation des critères radio-cliniques de malignité de l’œdème, sur l’instant