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Act. Méd. Int. - Angiologie (16) n° 7/8, septembre/octobre 2000
angiologie et
Angiologie et Rhumatologie
par sa nature subjective, elle possède, au
plan analytique, une particularité remar-
quable pour le praticien, son caractère
essentiellement clinique. En d’autres
termes, par la seule prise en compte minu-
tieuse d’éléments d’interrogatoire et
d’examen clinique, il doit être possible,
dans la majorité des cas, de préciser au
mieux le diagnostic étiologique.
Aussi, à partir d’une dizaine d’items
simples réunis dans le tableau (page 318)
peut-on caractériser la douleur. Ces divers
éléments sémiologiques, ajoutés à notre
connaissance et à notre expérience cli-
nique doivent nous permettre de répondre
aux deux principales interrogations que
suscite pour l’angiologue un patient se
plaignant d’une douleur des membres
inférieurs :
•S’agit-il d’une douleur “vraie” ?
Parvenir à faire préciser le mieux possible
la plainte exprimée permettra souvent,
sinon le diagnostic immédiat, du moins
d’en éliminer un certain nombre. Exemple
classique : à la question simple “de quoi
vous plaignez-vous ?”, la réponse habi-
tuelle sera : “j’ai mal à la jambe…”. Mais
si nous demandons au patient de préciser
le type de plainte (brûlure, crampe, lour-
deur ?) un certain nombre d’étiologies
pourront s’exclure d’elles-mêmes. Il vous
répond “une lourdeur” et on peut alors
aisément éliminer une névralgie quelle
que soit son origine.
•Y-a-t-il un rapport direct entre cette dou-
leur et une éventuelle pathologie vasculaire
présente ? Exemple non moins classique
d’une patiente porteuse d’une varicose
manifeste et se plaignant de douleurs des
deux jambes. De prime abord, il paraît
bien tentant de relier les deux phéno-
mènes. Mais, si votre interrogatoire vous
permet de retrouver un éthylisme notoire,
une amyotrophie surale, des réflexes
ostéotendineux nettement diminués, vous
vous orienterez bien plus volontiers vers
des douleurs d’origine polynévritiques
que veineuses. Autre situation d’autant
plus fréquente que l’âge croît : le fumeur
de 75 ans présentant une douleur surale à
type de crampes, lors de la marche. Si les
pouls périphériques sont mal perçus, les
pieds souvent froids, il devient difficile de
ne pas penser à une artérite oblitérante des
membres inférieurs. Et cependant, si vous
parvenez à faire préciser les conditions de
survenue (très rapidement après le début
de la marche) et les phénomènes d’ac-
compagnement (lombalgies), il faudra
repenser le diagnostic et rechercher un
canal lombaire soit prédominant dans la
symptomatologie, soit isolé.
Transition naturelle qui nous conduit à
l’analyse clinique des douleurs non vascu-
laires des membres inférieurs dont beau-
coup appartiennent à la pathologie neuro-
vertébrale rendant bien compte des
projections sensitivo-motrices à ce même
membre inférieur.
Étiologies à évoquer
Les atteintes radiculaires
Quelques affections neurologiques se
manifestent, dans leur forme typique, par
une symptomatologie suffisamment nette
pour que le diagnostic clinique ne présen-
te pas de difficultés importantes.
Autrement dit, elles ne relèveront d’ex-
plorations complémentaires que dans le
cadre d’un bilan lésionnel ou pour déter-
miner des options thérapeutiques.
Sciatique et sciatalgie L5-S1
– La sciatique aiguë avec impotence fonc-
tionnelle quasi totale, de déclenchement
brutal – torsion vertébrale, traumatismes
répétés, voyage prolongé, grossesse, etc. –
avec une douleur intense, “paralysante”,
une topographie unilatérale caractéristique
postéro-interne et cruro-jambière évoque
d’emblée la pathologie disco-radiculaire.
Aucune autre affection vasculaire périphé-
rique ne peut générer un tel tableau.
– En revanche, on peut hésiter dans les
formes segmentaires, tronquées, au
cours desquelles ne sont intéressées que
la cuisse, la jambe voire la cheville.
Outre l’interrogatoire qui recherchera
des antécédents plus ou moins nets de
dorsolombalgies chroniques, on fera
appel aux habituelles manœuvres objec-
tivant l’irritation radiculaire L5 ou S1 :
signe de Lasègue, douleur déclenchée à
la toux, point sonnette, épreuve de la
marche sur la pointe des pieds, diminu-
tion ou abolition des réflexes ostéotendi-
neux, etc.
La cruralgie
– On distinguera là encore les formes
aiguës, typiques par leur topographie, face
antéro-interne de la cuisse, et leur mode
d’expression en “broiement”, “torsion”.
Aux stades chroniques, le réflexe rotulien
sera diminué ou aboli.
– Bon signe d’examen dans les états
frustes : le signe de Léri, Lasège inversé
appliqué au crural. Malade en decubitus
ventral, on déclenche la douleur sur la
face antérieure de la cuisse en la mettant
en hyperextension sur le bassin.
Rappelons que la découverte d’une crural-
gie impose un bilan glucidique étant
donné la fréquence de cette association
pathologique.
Les radiculalgies L4-L3
•Les lésions de cet étage semblent moins
fréquentes qu’aux niveaux inférieurs L4-
L5 ou L5-S1, sans doute du fait de la plus
grande couverture du disque offerte par le
ligament postérieur. Pour autant, le dia-
gnostic n’en est pas plus aisé. Et a fortio-
ri, plus rares encore, les lésions L2-L1.
•Une fois encore, outre le type de douleur
aiguë ou subaiguë, on retiendra surtout la
topographie pour déterminer le niveau
lésionnel.
– Pour L4 : la zone couvre une bande
transversale du haut et de l’extérieur de la
cuisse, en croisant vers la face interne de
la jambe.
– Pour L3 : territoire assez semblable à la
cuisse mais plus antéro-interne et stoppant
souvent sous le genou.
On décrit parfois une atteinte du réflexe