> Europe : actualités professionnelles psychiatriques

La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 1 - mars 2006
> Vie
professionnelle
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>
Europe : actualités
professionnelles
psychiatriques
H. Sontag, psychiatre libéral, Strasbourg.
>
Suisse : l’OMS montre l’exemple
D’
après le quotidien suisse
Le Temps, publié à
Genève, une manifesta-
tion a été organisée par
les 700 salariés de l’OMS, dont le siège
est à Genève. Elle a consisté à cesser
le travail pendant une heure et à défi-
ler autour des locaux de l’organisa-
tion, pour protester contre une longue
série de décisions prises par la Direc-
tion. Selon les manifestants, ces déci-
sions vont à l’encontre de l’intérêt
non seulement des employés, mais de
l’institution tout entière ; cela a
amené le directeur général Lee Jong
Wook à menacer de licenciement
toutes les personnes susceptibles de
participer à ce mouvement (!).
La révélation du Temps qui semble
avoir mobilisé beaucoup de gens
consiste en celle de la présence de
deux questions inhabituelles dans les
formulaires que les candidats à l’em-
bauche doivent désormais remplir
avant d’obtenir un rendez-vous :
“Fumez-vous, consommez-vous des
produits de tabac, et êtes-vous dis-
posé à un sevrage en cas d’intégration
au sein de l’OMS ?”
Ceux qui avoueraient leur tabagisme,
et qui ne manifesteraient aucune
volonté particulière pour quitter cette
mauvaise habitude une fois devenus
employés de l’OMS, verraient leur can-
didature automatiquement rejetée.
Cette disposition semble être très
solide juridiquement et Alain Simpson,
porte-parole de l’OMS, affirme que
cette décision ne peut être considérée
comme discriminatoire, et se justifie
par la volonté qu’a l’institution de ser-
vir d’exemple. Un avocat suisse spé-
cialiste de ces questions, Charles Pon-
cet, interrogé par Le Temps, ne peut
que confirmer avec regret : “la loi
n’est enfreinte que s’il est avéré qu’il y
a eu discrimination selon des critères
raciaux, ethniques ou religieux”, avant
de fustiger “une manifestation de plus
du délire politiquement correct dans
lequel nous vivons”.
Déjà d’autres voix s’élèvent. Citée par
Le Figaro, Manuela Tomei, membre du
Bureau international du travail, qui
siège aussi à Genève, n’est pas aussi
certaine que cette disposition ne
pourrait pas être attaquée pour dis-
crimination, le fait de fumer en privé
n’étant en rien lié à l’aptitude à réali-
ser les tâches requises.
Il faut rappeler que de nombreuses
sociétés américaines se sont déjà
engagées dans cette voie et que 5 %
des employeurs américains refusent
les candidats s’avouant fumeurs.
Par exemple, Alaska Airways dépiste le
taux de nicotine dans le sang des pos-
tulants, la compagnie d’assurance
Weyco décidant pour sa part en jan-
vier 2005 de taxer de 50 dollars par
mois ses employés fumeurs et les
menaçant de licenciement s’ils ne s’ar-
rêtaient pas. Des considérations éco-
nomiques sont systématiquement
invoquées par toutes ces compagnies
pour justifier leurs décisions.
Le rédacteur du Temps, qui a un cer-
tain humour, conclut en disant que,
cette mesure étant justifiée par l’OMS
par le comportement exemplaire que
se doivent d’avoir, selon elle, ses
employés, dans un domaine comme la
lutte antitabac où l’organisation est à
la pointe du combat, il reste à mettre
en place un contrôle de la fidélité
conjugale et de l’orthodoxie sexuelle
(puisque la lutte contre les maladies
sexuellement transmissibles
[MST] est également une prio-
rité de cet organisme), un engage-
ment sur l’honneur de ne pas boire
d’alcool pendant le week-end (le
combat contre l’alcoolisme n’étant pas
à négliger), et à refuser tous les
sujets dont l’indice de masse corpo-
relle est supérieur à 30 (l’obésité
étant en phase de devenir la première
cause de mortalité prématurée dans
les pays développés)...
14 La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 1 - mars 2006
> Vie
professionnelle
Italie : état de la psychiatrie près de 25 ans après Basaglia
O
n peut se poser la question
de savoir ce que sont deve-
nus les malades mentaux en
Italie, près de 25 ans après
la révolution Basaglia. Les répercus-
sions humaines ont souvent été abor-
dées, et l’exemple italien actuel
semble avoir permis aux patients et
aux professionnels de trouver un équi-
libre à la suite de la diminution des
dépenses de santé, sans que cela soit
préjudiciable à qui que ce soit.
Pour mémoire : à partir de 1980, l’Italie
s’est débarrassée de ses hôpitaux
psychiatriques en les remplaçant par
des structures d’accueil légères,
ouvertes 24 h/24, dotées de quelques
lits de secours. Le but était d’obtenir
que le malade mental puisse
bénéficier d’un logement,
d’un travail autant que faire
se peut, tout en lui laissant
une grande liberté. Actuelle-
ment, le pays compte en tout
et pour tout cinq établisse-
ments psychiatriques qui
sont des établissements judi-
ciaires, réservés aux sujets socialement
dangereux, et les auteurs de crimes
présentant des troubles mentaux reçoi-
vent des soins en milieu carcéral.
Suivant l’exemple de Basaglia, les Ita-
liens auraient jugé que l’hôpital psy-
chiatrique ne soigne pas ; quant aux
pouvoirs publics, ils ont alors mis l’ac-
cent sur une diminution des dépenses.
Les structures légères ont entraîné une
diminution de moitié des crédits
alloués à la santé mentale et les pres-
criptions de psychotropes ont été divi-
sées par trois. Cet exemple semble
intéresser particulièrement la Commis-
sion européenne, qui cherche, par tous
les moyens, à réduire les dépenses
sans diminuer la qualité des soins.
Espagne : démographie
et retraite des médecins
L’
Espagne, qui jusqu’à présent avait connu un fort déve-
loppement de son nombre de médecins en raison d’un
effort très important dans le développement de la
santé publique entre les années 1960 et 1970, pré-
sente actuellement le même profil que de nombreux pays de
l’Union européenne. On assiste à un vieillissement des méde-
cins, ainsi qu’à une pénurie de professionnels de santé dans
certaines provinces. Devant cet état de fait, les autorités sani-
taires de la région de Madrid ont récemment décidé de per-
mettre aux professionnels de santé actuellement en poste de
retarder leur départ à la retraite, avec une limite d’âge passant
de 65 à 70 ans pendant une période transitoire, tant que le
manque de personnel ne sera pas résolu.
Pour faire face à la pénurie, l’Espagne est obligée d’augmenter
le quota des médecins venant d’Amérique latine, ce qui, surtout
pour la psychiatrie, ne pose pas de problèmes majeurs si l’on
ne tient pas compte des formations qualitativement très
inégales selon les pays latino-américains, étant donné la
connaissance de la langue et l’existence de relations bilaté-
rales traditionnelles.
Union européenne :
la question des examens
européens
L
e Conseil de direction de l’Union
européenne des médecins spécia-
listes (UEMS) a discuté récemment
de la question des examens euro-
péens et, sur proposition des délégués des
différentes sections, il a été convenu de
tenir une session de travail en mai 2006 sur
ce point. Cette session se penchera sur
divers enjeux d’intérêts pour les médecins
spécialistes européens, comme notamment
l’harmonisation de la qualité dans la forma-
tion médicale. Cette réunion visera à clari-
fier la situation des examens conduits au
niveau européen, notamment vis-à-vis des
standards nationaux, tout en reconnaissant
que ces examens ne doivent pas avoir de
valeur au plan juridique, ni supplanter les
certifications nationales.
La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 1 - mars 2006
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Tchéquie :
études médicales
L
a Tchéquie, après avoir
réformé son système d’ensei-
gnement supérieur, attire de
plus en plus d’étudiants étran-
gers. Certaines disciplines comme la
médecine ou la musique sont particu-
lièrement prisées, et, associé à un bon
niveau d’études universitaires, le faible
coût de la vie en Tchéquie favorise l’af-
flux d’étudiants étrangers (de 9 300 à
la rentrée 2001 à plus de 18 000 l’an
dernier). Le problème de la langue n’en
est plus un, comme le souligne le
Centre français de recherche en
sciences sociales de Prague, car, pour
ceux qui sont incapables de com-
prendre la langue tchèque, de nom-
breuses universités ont créé des
filières en anglais. Pour la médecine,
l’université Charles, qui est l’une des
plus anciennes d’Europe, et dont le
cycle de médecine en anglais connaît
un énorme succès : depuis sa création
en 1993, il est passé de 17 inscrits à
quelque 120 aujourd’hui. Du fait du
développement d’Internet, les infor-
mations sont faciles à trouver, et le
charme de Prague et sa réputation fes-
tive contribuent beaucoup à ce succès.
Même les Britanniques viennent en
grand nombre puisque Londres reconnaît
le diplôme tchèque sans examen ni vali-
dation supplémentaire. Les Allemands
sont également très présents, un accord
leur permettant maintenant de com-
mencer leur cursus en République
tchèque pour le terminer dans leur pays.
Les inscriptions du cycle anglais sont
devenues le principal revenu de la
première faculté de médecine de
Tchéquie et représentent 15 à 20 %
de son budget. Ces filières anglaises
sont payantes, mais leur suivi ne
coûte que 8 000 à 8 500 euros par an,
ce qui est relativement peu par rap-
port aux universités payantes d’Eu-
rope, et il y a toujours la possibilité
d’apprendre le tchèque, auquel cas la
formation universitaire est gratuite.
Union européenne :
définition de l’acte médical
L
ors de sa dernière réunion à Munich, les 21 et 22 octobre 2005, le
Conseil de direction de l’Union européenne des médecins spécia-
listes a adopté une définition européenne de l’acte médical. Cette
définition, qui recouvre un large éventail d’actions réalisées par les
médecins spécialistes, constituant la spécificité des activités professionnelles
des spécialistes, se base sur une définition précédente adoptée en 1996.
Cette mise à jour avait été sollicitée par un certain nombre de sections de
l’UEMS, afin d’établir clairement la description des tâches des spécialistes.
Cet acte médical a été défini par le Conseil de l’UEMS comme suit :
“L’acte médical comprend toutes les actions professionnelles, les
démarches scientifiques d’enseignement, de formation et de pédagogie,
cliniques et médico-techniques, accomplies afin de promouvoir la santé,
prévenir les maladies, fournir un diagnostic ou un soin thérapeutique aux
patients, individus, groupes ou communautés et ressort de la responsabi-
lité d’un docteur en médecine reconnu et peut toujours être accompli par
celui-ci ou sous sa supervision directe et/ou prescription.”
Ce texte a été transmis aux autres organisations médicales européennes
pour information.
À
l’occasion d’une réunion à
Bruxelles du 21 au 23 no-
vembre 2005, la Commis-
sion marché intérieur et
protection du consommateur a
examiné le projet de rapport d’Eve-
lyne Gebhardt concernant les ser-
vices dans le marché intérieur. Ce
projet de directive avait fait couler
beaucoup d’encre, puisque, bien
qu’il ait déjà été annoncé depuis
2002, il avait été présenté, par les
adversaires de l’idée d’une consti-
tution européenne lors du référen-
dum en France, comme “liberti-
cide”. Il avait été agité comme une
mainmise de Bruxelles sur les ser-
vices, et il concernait aussi la
santé.
Après de nombreux reports, le
texte a finalement été voté par le
Parlement européen et, alors que
Parlement européen :
directive sur les services
les services d’intérêt économique
général ont été inclus dans le
champ d’application de la direc-
tive, les eurodéputés ont convenu
d’en exclure les services de santé
et les services publics.
Le texte du rapport final doit
maintenant être approuvé en
séance plénière. Il sera revu par la
Commission et le Conseil euro-
péens puis repassera en deuxième
lecture au Parlement avant adop-
tion.
Ce vote met actuellement entre
parenthèses le risque que la santé,
et particulièrement la santé men-
tale, soit tenue pour un service
comme les autres, sans considéra-
tion d’aucune spécificité, faisant
des malades des consommateurs,
avec toutes les conséquences néga-
tives que cela pourrait entraîner.
16 La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 1 - mars 2006
> Vie
professionnelle
Harmonisation européenne :
conséquences du décret du 19 avril 2005
L
es conséquences du rembour-
sement des frais médicaux
avancés par les patients au
sein de l’Union européenne
ont donné lieu à un décret en France
le 19 avril 2005 dans le but d’harmo-
niser ces remboursements. Jusqu’à
présent, si un assuré français choisis-
sait de consulter un médecin de
l’Union européenne, la Sécurité sociale
se devait de le rembourser. Or, le rem-
boursement reposait sur le tarif dit
“d’autorité” – car, par la force des
choses, le médecin européen n’était
pas conventionné –, et ce tarif d’au-
torité était de 50 cents à un euro pour
une consultation. Ce remboursement
discriminatoire constituait à l’évidence
une distorsion de concurrence propre
à interdire aux médecins européens
l’accès de la clientèle française.
Ce décret règle donc actuellement ce
problème. Il dit en substance que
“les caisses d’assurance maladie pro-
cèdent au remboursement des frais de
soins dispensés aux assurés sociaux et
à leurs ayants droit dans un État
membre de l’Union européenne ou lié
à l’accord sur l’Espace économique
européen, dans les mêmes conditions
que si les soins avaient été reçus en
France”, et la circulaire d’application
confirme que “le principe général de
la prise en charge des soins reçus
dans l’Union européenne, notamment
pour les consultations des profession-
nels de santé, est qu’elle s’effectue
sur la base des tarifs conventionnels
et non plus des tarifs d’autorité”. Si
l’on s’en tient au droit, les patients
français qui consultent à l’étranger
seraient remboursés sur le tarif habi-
tuel des caisses de maladie françaises
mais, par extension, ceux qui consul-
tent des médecins français non
conventionnés aussi.
En effet, ce règlement communautaire
s’applique, bien sûr, en Europe mais
aussi en France, et les patients béné-
ficient également d’une prise en
charge sur la base des tarifs conven-
tionnels et non plus des tarifs d’auto-
rité. Dans le cas contraire, il s’agirait
d’une discrimination fondée sur la
nationalité, spécifiquement interdite
dans l’Union européenne, et l’on peut
penser qu’il se trouvera probablement
(comme pour la mise en concurrence
de la Sécurité sociale) des institutions
pour nous expliquer que ces textes ne
concernent que les cas marginaux, les
frontaliers ou les touristes. On trou-
vera aussi probablement des juges ou
des fonctionnaires de l’ordre judiciaire
qui feindront d’ignorer le plus long-
temps possible que le droit européen
est un droit interne qui a pour seule
particularité d’être commun à plu-
sieurs pays alors qu’il s’impose aux
États.
Enfin, la liberté de choix du patient
sera enfin respectée et un médecin
lassé de la convention pourrait la
dénoncer sans crainte de perdre une
partie de sa clientèle. Un début d’ap-
plication vient d’être confirmé par la
Caisse régionale de l’assurance maladie
d’Alsace-Moselle. Elle offre en effet la
possibilité de recourir à des soins dans
l’Union européenne dans les mêmes
conditions qu’en France. Cette posi-
tion est renforcée par l’accord cadre
franco-allemand du 22 juillet 2005.
Pays-Bas : influence de l’organisation des soins
sur la prescription médicamenteuse
U
ne étude pilotée par l’IN-
SERM, réalisée à partir d’en-
tretiens semi-directifs et
d’observations de généra-
listes néerlandais en comparaison
avec des praticiens français, s’est
révélée être très instructive. En effet,
la modification du système de san
avec la réforme de la Sécurité sociale
va accentuer l’importance du médecin
généraliste pour l’accès aux soins
mentaux, même si celle-ci, pour le
moment, n’est pas encore codifiée. Or,
le système néerlandais privilégie le
passage par le médecin généraliste
pour l’accès, par exemple, au psy-
chiatre. La sociologue Sophia Rosman,
d’origine néerlandaise, tire les ensei-
gnements de cette étude : “En France,
la facilité d’accès aux généralistes
favorise chez les patients une
demande de réparation immédiate
sous forme de médicaments et la pres-
sion porte le plus souvent sur les
médicaments dits de confort mais
rarement, voire jamais, sur le traite-
ment de longue durée.”
Aux Pays-Bas, les choses se déroulent
autrement, puisque le contact avec le
médecin généraliste passe par l’intermé-
diaire d’une assistante médicale qui filtre
les demandes, évalue la gravité des
symptômes, établit et donne des conseils
téléphoniques si ceux-ci lui semblent
mineurs. L’accès au psychiatre se fait par
le passage obligé chez le généraliste.
La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. II - n° 1 - mars 2006
17
Ce système est caractérisé par le phé-
nomène de la gradation des responsa-
bilités relevant apparemment du
médecin généraliste, voire du spécia-
liste, et celles-ci sont aujourd’hui de
plus en plus déléguées aux profes-
sionnels paramédicaux qui exercent
dans les cabinets de médecine géné-
rale. Ils prennent en charge le suivi
des maladies chroniques ou des patho-
logies courantes, ce qui contribue à
limiter les prescriptions.
Les patients sont inscrits sur une liste
auprès des généralistes et le praticien
ne risque pas de perdre un patient s’il
ne prescrit pas à la fin de la consulta-
tion, celle-ci ne donnant pas lieu à une
rémunération de la part du patient.
En France, le système est tout à fait
différent. La rémunération à l’acte et
la transaction financière directe entre
médecin et patient favorisent un
échange reposant sur le don et le
contre-don”, comme si cet échange
devait obligatoirement passer par la
remise d’une ordonnance matérialisant
la compassion du médecin pour son
patient.
Il existe non seulement une différence
dans l’organisation des soins, mais
aussi des différences culturelles. Si le
patient français comprend souvent que,
chez le psychiatre, il n’est pas obligé
d’avoir une prescription, il le comprend
encore plus facilement aux Pays-Bas,
où la consultation, plus courte qu’en
France, repose davantage sur la parole
que sur l’écrit : expliquer, rassurer,
informer, éduquer sont les termes qui
caractérisent les rencontres méde-
cin/patient, alors qu’en France la trace
laissée par le médecin est l’ordonnance,
celle-ci devenant par là même autant
un acte social qu’un acte médical.
Les médecins néerlandais sont habi-
tués depuis longtemps à la constitu-
tion de groupes de pairs dans lesquels
ils réfléchissent à leur pratique de
prescription et, de ce fait, exercent un
certain contrôle social sur la prescrip-
tion de leurs confrères.
La prudence des médecins, quand elle
ne consiste pas en une réserve vis-à-
vis du médicament, semble être à
mettre au compte de la formation ini-
tiale, car en France les étudiants des
facultés de médecine ne sont pas for-
més aux alternatives aux médica-
ments, la non-prescription n’y étant
pas enseignée.
Aux Pays-Bas, les médecins exercent
dans une logique de restriction où il
ne convient pas de prescrire un médi-
cament, sauf si, avec évidence, la
pathologie ne peut pas évoluer favo-
rablement sans traitement médica-
menteux. Cette logique, fondée sur la
perception de la capacité d’autoguéri-
son du corps, est confortée par une
recommandation de bonnes pratiques
qui est très suivie aux Pays-Bas.
Par ailleurs, le médicament peut même
être perçu comme un produit potentiel-
lement nocif, en cas de mésusage. Il
garde son pouvoir, précisément parce
qu’on y a peu recours, ce qui va totale-
ment à l’encontre des habitudes fran-
çaises et expliquerait la consommation
tout à fait exponentielle et exagérée de
médicaments par les Français.
Le problème se pose d’autant plus qu’en
psychiatrie la France a une consomma-
tion de psychotropes parmi les plus
fortes de l’Union européenne, généra-
listes et psychiatres confondus.
Commission européenne :
livre vert de l’Union européenne sur la santé mentale
L
a Commission européenne
entend améliorer la prise en
charge des malades mentaux,
après consultation publique
des populations des 25 pays de
l’Union européenne. Elle a récemment
adopté un “Livre Vert” ou “Green
Book” à la suite de la communication
de M. Kyprianou, commissaire euro-
péen en chage de la santé et de la
protection du consommateur.
Pour prendre quelques exemples de sa
communication : les placements d’office
sont 40 fois moins nombreux au Portu-
gal qu’en Finlande (à population
égale) ; en Slovaquie la part du budget
réservé à la santé mentale est de 20 %
du budget de la santé et au Luxembourg
de 13 % (mais avec une population
15 fois moindre). Les troubles psy-
chiques touchent plus d’un européen
adulte sur 4 (27 % d’après une étude
récente) et représentent 52 000 suicides
sur 58 000 suicides recensés. Toujours
d’après ce rapport, les conséquences
économiques de ces pertes humaines
peuvent représenter jusqu’à 4 % du pro-
duit national brut selon les états.
Le niveau de santé mentale est égale-
ment supposé avoir une influence
importante sur le bien-être écono-
mique et social de la société. Pour-
tant, jusqu’à récemment, d’autres
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