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La Lettre d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - n° 233 - mai 1998
Le lifting (R. Niforaos, Lyon) peut se faire dans un contexte
environnemental plus confortable pour le patient s’il est réalisé
sous anesthésie locale que s’il est effectué sous anesthésie
générale. L’anesthésie locale a aussi l’avantage de permettre
un contrôle peropératoire de l’étendue du geste. Elle n’est
envisageable que si la durée prévisible de l’intervention est
inférieure à une heure. La présence d’un anesthésiste est exi-
gée, même pour une anesthésie locale pure, pour des raisons
médico-légales. Le patient est prémédiqué avec 5 à 10 mg de
midazolam (Hypnovel®) en sublingual, 1 mg d’alprazolam
(Xanax®) ou 100 mg d’hydroxyzine (Atarax®). La moitié supé-
rieure de la face se prête bien à une anesthésie par bloc troncu-
laire ; pour la partie inférieure du visage, il est préférable
d’infiltrer. Il est possible de compléter l’anesthésie locale par
une neuroleptanalgésie ; dans ce dernier cas, il faut surveiller
très attentivement la respiration.
La chirurgie du regard (F. Disant, Lyon) ne peut se faire sous
anesthésie locale que chez un patient coopérant, lorsque le
geste ne doit pas durer plus d’une heure ni comporter de fraisage
du rebord orbitaire. Dans les autres cas, on optera pour une
anesthésie générale. Il est important de ne pas faire d’infiltra-
tion dans la graisse orbitaire car il y a alors un risque d’amau-
rose.
L’innervation de l’oreille est très complexe. La sensibilité du
pavillon dépend du plexus cervical superficiel, du nerf auricu-
lotemporal et du VII bis, la caisse est innervée par le nerf de
Jacobson. Une anesthésie de contact du tympan peut être envi-
sagée pour une paracentèse ou une pose d’aérateur
transtympanique. Diverses méthodes peuvent être employées :
l’iontophorèse, la réfrigération, le Bonain (C. Martin n’a
jamais observé de nécrose avec le Bonain), la crème Emla®ou
la Xylocaïne 5 %®sur un morceau de coton. Le secret est
d’attendre suffisamment longtemps, au moins 20-25 minutes
pour la Xylocaïne®et le Bonain, davantage pour la crème
Emla®. L’infiltration du conduit auditif externe est complétée
en cas de voie postérieure par 4 points d’injection postérieurs.
L’infiltration de la paroi antérieure du conduit ne doit pas être
trop superficielle et le point d’infiltration postéro-inférieur ne
doit pas être trop bas pour ne pas risquer une paralysie tempo-
raire du nerf facial, gênante en peropératoire et toujours désa-
gréable au réveil du patient. Diverses interventions otologiques
ne comportant pas de fraisage osseux, en particulier les myrin-
goplasties, sont tout à fait réalisables sous anesthésie locale
associée à une diazanalgésie.
J.M. Klossek (Poitiers) et R. Jankovski (Nancy) ont détaillé
leur protocole d’anesthésie locale en chirurgie endonasale et
rhinosinusienne. Une mèche imbibée de Xylocaïne 5 % à la
naphazoline®est appliquée dans chaque fosse nasale pendant
15 minutes. Ensuite, J.M. Klossek place une cotonnette avec
2 à 4 gouttes d’une solution de cocaïne au tiers sous le cornet
moyen. Pour la chirurgie endonasale, l’anesthésie est complétée
par une infiltration de 3 ml maximum de Xylocaïne
adrénaline®. Pour la chirurgie rhinosinusienne, R. Jankovski
préconise une infiltration transcutanée des pédicules sus- et
sous-orbitaires, autour de l’artère faciale dans le sillon nasogénien,
à l’angle interne de l’œil et autour de la frontale ascendante au
niveau de la tête du sourcil. Il pratique cette infiltration avec
un mélange, fait extemporanément, de 20 cc de Xylocaïne®à
1 % et 1/4 mg (= 1 ml) d’adrénaline, car les patients opérés
pour polypose nasosinusienne peuvent avoir un syndrome de
Fernand-Widal et être allergiques aux excipients de la Xylo-
caïne adrénaline®.
L’anesthésie de contact de l’oropharynx (F. Chabolle,
Suresnes) peut être obtenue avec de la Xylocaïne visqueuse®
ou des nébulisations de Xylocaïne 5 %®. L’anesthésie locale
par infiltration de divers points de l’ogive amygdalienne ou du
voile permet de faire certains gestes : amygdalectomie, uvulo-
palatopharyngoplastie simple, sous réserve que le patient soit
coopérant, qu’il ait une morphologie qui s’y prête et qu’il n’ait
pas trop de réflexes nauséeux.
En ce qui concerne l’endoscopie ORL (J.M. Thomassin, Mar-
seille), il faut distinguer la nasofibroscopie de pratique très
courante en consultation et les endoscopies qui se font au bloc
opératoire comme les laryngoscopies en suspension et les
panendoscopies pour bilan d’extension des épithéliomas. La
nasofibroscopie est facilitée par la pulvérisation, endonasale et
sur la paroi pharyngée postérieure, de Xylocaïne®. Les autres
endoscopies nécessitent, si l’on ne veut pas faire d’anesthésie
générale, un bloc laryngé et une sédation ou une neuroleptanal-
gésie.
Une technique originale d’analgésie cervicale a été exposée
par J.M. Prades (Saint-Étienne) : la péridurale cervicale. Elle
s’effectue dans l’espace C6-C7 ou C7-TH1. Elle est intéressante
comme analgésique postopératoire dans la chirurgie pharyn-
golaryngée, dans les douleurs chroniques cancéreuses ou les
radiculopathies cervicales ; elle est aussi employée dans la chi-
rurgie des carotides et la chirurgie carcinologique pharyngola-
ryngée avec ou sans lambeaux.
La deuxième partie de cette séance d’enseignement post-uni-
versitaire, organisée par G. Renou (Poissy), avait pour thème
la chirurgie ambulatoire en ORL. Les agences régionales
d’hospitalisation (ARH) ont trois priorités 1998 : les urgences,
la chirurgie ambulatoire et les réseaux de cancérologie. Il y a
une volonté politique de développer la chirurgie ambulatoire,
plus particulièrement dans le secteur hospitalier public, qui est
en retard sur ce plan-là par rapport au secteur privé. En effet,
actuellement, 70 % des places ambulatoires (on ne parle plus
de lits) appartiennent au privé. Dès à présent, une fraction non
négligeable des actes pratiqués en ambulatoire sont des actes
ORL. L’adénoïdectomie, la pose d’aérateurs transtympaniques
et les amygdalectomies représentent respectivement 9, 6 et 3 %
de la totalité des actes chirurgicaux effectués en ambulatoire
dans le secteur libéral. Tous les actes ne se prêtent pas à la
chirurgie ambulatoire et ce type de soins n’est pas applicable à
tous les patients. En ce qui concerne les actes, il y a un consensus,
tant du côté des praticiens que des experts ORL auprès des
tribunaux, permettant de considérer que les paracentèses et les
poses d’aérateurs transtympaniques peuvent être réalisées en
ambulatoire. De même, il y a un consensus pour ne pas réaliser
en ambulatoire les tympanoplasties avec fraisage osseux et les