!
Deux comédiens face au miroir
Marc Citti signe une comédie douce-amère sur l’envers du décor.
Tandis que sur scène, Hamlet joue son destin, dans leur loge, derrière le rideau,
deux rôles secondaires attendent de faire leur entrée : Edouard, qui joue Horatio,
et Mathieu, cantonné aux "utilités". Un haut-parleur renvoie les échos vibrants
de l’interprète principal, avivant les doutes de l’un, les frustrations de l’autre. Ce
n’est pas le premier texte qui s’intéresse aux coulisses et dévoile les rivalités
entre partenaires, la vie de tournée, les affres du comédien.
Celui-ci, fort bien écrit par Marc Citti, vise particulièrement juste, notamment
lorsqu’il égratigne l’ego démesuré inhérent à la profession, les sensibilités
exacerbées, les petits aménagements pas toujours glorieux avec le métier, et le
malaise, la douleur de l’attente d’un rôle. Les comédiens s’apparentent alors à
des suricates, ces sentinelles du désert "à l’affût alors qu’il n’y a jamais rien qui
arrive". Sans en connaître l’exacte proportion, on devine chez Marc Citti la part
d’autobiographie. N’était-il pas de la distribution du Hamlet mis en scène par
Patrice Chéreau, joué par un acteur prénommé Gérard, comme dans sa pièce? Il
interprète ici un comédien amer et blasé, un peu mythomane, dépité et mal dans
sa vie. Son jeu est vif, souple et acéré. Son partenaire Vincent Deniard lui
oppose la vitalité, l’enthousiasme et l’énergie des débuts. Ils sont comme un
miroir à double face.
Annie Chénieux - leJDD.fr
vendredi 31 octobre 2014
Marc Citti et Vincent Deniard. (Lisa Lesourd)
!