É d i t o r i a l Dysfonction

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Éditorial
Dysfonction
érectile : du
symptôme au
mécanisme
J.M. Kuhn*
* Service d’endocrinologie et maladies
métaboliques, hôpital Le Bois-Guillaume,
CHU de Rouen.
M
anifestation de l’instinct primaire de reproduction, source de volupté et de
communication tels sont certains des principaux moteurs de la relation sexuelle.
Ils ne sont, bien sûr, pas exclusifs les uns des autres et, à l’évidence, non exhaustifs
des caractéristiques d’une fonction à laquelle bien d’autres qualificatifs peuvent être
attachés.
Contexte psycho-affectif adéquat, harmonie dans l’intégration centrale des informations
sensorielles reçues et des ordres émis, intégrité des relais neuro-biologiques de
transmission et des effecteurs font partie des conditions nécessaires, mais non
obligatoirement suffisantes, à son accomplissement optimal. Le nombre et la
complexité des mécanismes mis en jeu a pour corollaire l’exposition au risque d’altération
de l’un ou de plusieurs points de la chaîne unissant les différentes étapes du processus
d’accomplissement de la relation sexuelle. Quoique demeurant un aspect des plus
intimes de leur vécu personnel, le thème de la sexualité et de ses troubles est
beaucoup plus aisément abordé qu’auparavant par les patients, en réponse aux
interrogations de leur médecin lorsque le contexte médical le nécessite et, a fortiori,
lorsque le motif de la consultation est justement un trouble de la fonction sexuelle ou
plus précisément chez l’homme, une dysfonction érectile. Les portes d’entrée de la
prise en charge médicale d’une dysfonction érectile sont aussi multiples que variées.
Médecin généraliste, psychiatre, neurologue, endocrinologue, angéiologue, urologue
représentent autant d’interlocuteurs potentiels du patient se plaignant de ce symptôme.
Toutes ces portes d’entrée sont pertinentes à la condition qu’elles amènent à une prise
en charge polydisciplinaire d’évaluation étiologique du trouble. Dans son article
traitant de la prise en charge clinique des patients consultant pour dysfonction érectile,
J. Weber, faisant état de son expérience, illustre bien ce point. La première consultation
destinée à établir une relation de confiance sereine avec le patient doit être suivie
d’un “état des lieux” polydisciplinaire. Les éventuelles étapes ultérieures d’exploration
ou d’orientation plus spécifique vers une prise en charge spécialisée dépendent bien
sûr des résultats explicités lors d’une deuxième entrevue avec le consultant initial.
Une telle démarche simplifie le parcours du patient, optimise le bilan nécessaire et
permet, dans la majorité des cas, de lui proposer une thérapeutique adaptée.
L’hypogonadisme masculin tient une place à part au sein des étiologies des dysfonctions
érectiles. C’est en effet une cause rare, mais facile à démontrer et surtout aisément
curable. Sa recherche doit d’autant plus faire partie de la démarche étiologique d’une
dysfonction érectile qu’un hypogonadisme masculin peut n’être qu’une des
composantes d’un mécanisme physiopathologique multifactoriel. En outre, la
dysfonction érectile peut représenter un effet secondaire d’une thérapeutique responsable
d’hypogonadisme. Il faudra donc en informer le patient et, si possible, lui proposer un
traitement correctif. Enfin dans certaines situations particulières, l’obtention d’une
dysfonction érectile par hypogonadisme peut représenter un objectif thérapeutique.
Ces différents aspects liant hypogonadisme et dysfonction érectile sont détaillés dans
le deuxième volet de ce dossier.
Le désintérêt pour l’activité sexuelle est une caractéristique essentielle de la dysfonction
érectile par hypogonadisme. Elle reflète le rôle activateur des stéroides sexuels sur les
structures cérébrales impliquées dans la psychophysiologie de l’excitation sexuelle. Si
la localisation anatomique des centres cérébraux impliqués est relativement bien
établie sur des modèles animaux, elle n’est pas aussi aisée chez l'homme. Les progrès
de l’imagerie fonctionnelle permettent de pallier cette difficulté. Dans le troisième
volet du dossier consacré aux dysfonctions érectiles, S. Stoleru rapporte des résultats
obtenus par application des techniques d’imagerie fonctionnelle cérébrale à l’étude du
désir sexuel masculin chez des hommes hypogonadiques avant puis après substitution
par testostérone. Cette approche psychophysiologique novatrice et prometteuse a
déjà permis de localiser plusieurs cibles anatomiques de la testostérone dans le cortex
cérébral impliqué dans l'excitation sexuelle masculine. Nul doute que nous ne
sommes qu’au début des enseignements et des retombées que pourront nous
apporter ces élégantes et nouvelles méthodologies.
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Act. Méd. Int. - Métabolismes - Hormones - Nutrition, Volume V, n°6, novembre-décembre 2001
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