RETOUR A DOMICILE APRES...
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Correspondances en médecine - n° 3-4, vol. IV - juillet-décembre 2003
sur les traces de drains ; le pli inguinal, lieu d’une
coronarographie et de certaines CEC, mais aussi les
bras, le cou où des cathéters furent posés. Ensuite, la
palpation s’assure par la pression douce d’un hémi-
thorax de la solidarité de l’autre hémithorax. Ainsi, en
jouant d’une main posée à plat, puis de l’autre, la soli-
dité de la paroi est testée. Un craquement, une mobi-
lité réduite évoquent un retard de consolidation qui
peut aboutir à une pseudarthrose voire à une désu-
nion sternale. La hantise est l’infection sous-jacente,
un train fébrile, un fil qui lâche, une peau rebelle et le
réflexe du médecin conduit le malade au chirurgien.
Lorsque ces défauts persistent à moyen terme, la procé-
dure s’effectue plus calmement. Un fil d’acier peut être
glissé sous le sternum, quelques points peuvent accélérer
la fermeture. Il y a habituellement une réticence à renforcer
le sternum vers la troisième semaine, période à plus forte
activité inflammatoire de ce qui fut le champ opératoire.
Le plus souvent, la peau fermée, aucun geste de ren-
forcement n’est effectué. La pseudarthrose demeure,
avec pour inconvénient des douleurs à la toux, finale-
ment acceptées par le patient.
L’évolution des douleurs thoraciques en fonction du
temps mérite d’être connue. L’angor, toujours craint, est
finalement rare en cas de montage correct et de revas-
cularisation complète. Les premiers jours, les douleurs
sont antérieures, dues à l’abord trans-sternal. Progressi-
vement, ces douleurs se déplacent vers le dos et finissent
par prédominer sur le rachis. Le mécanisme retenu est
celui d’une subluxation des articulations costales posté-
rieures provoquées par l’écartement de la cage. Des dou-
leurs localisées se surajoutent, il est tentant d’y voir de
petits névromes sur les sites de dissection mammaire.
Enfin, la cicatrice cutanée peut devenir chéloïde sur la
totalité ou une partie de sa longueur. L’aspect définitif
n’est fixé que tardivement, après au moins deux ans. Des
pansements sous forme de résine à mémoire de forme
(Cica-Care®) peuvent être appliqués pour réduire les
risques de chéloïde. La chéloïde constituée est d’abord
traitée par corticoïdes locaux (Dermoval®, Betneval®)
avant d’être confiée au dermatologue, voire au chirurgien
esthétique.
L
E PÉRICARDE
Nous n’évoquons pas l’hémopéricarde précoce lié à
un défaut d’hémostase ni la péricardite liquidienne
précoce qui est dépistée par l’échocardiographie sys-
tématique de sortie dans le service de chirurgie.
L’épanchement péricardique est une complication fré-
quente dans les suites opératoires, avec un pic de sur-
venue entre la deuxième et la troisième semaine. Le
mécanisme est inflammatoire.
Sa recherche doit être systématique par échocardio-
graphie, rendant la complicité d’un cardiologue indis-
pensable. La symptomatologie est diverse. Parfois, la
douleur est typique, inspiratoire, mais chez un patient
dont le thorax vient d’être maltraité, la sémiologie est
souvent atypique : douleurs localisées, pseudo-angi-
neuses, points de côté… Le malade est légitimement
angoissé, à l’écoute de ses symptômes thoraciques,
ce qui rend l’interrogatoire difficile. La douleur peut
être absente et la péricardite apparaître sous la forme
d’un malaise vagal, voire d’une tamponnade avec flé-
chissement de la diurèse, tachycardie et instabilité
hémodynamique.
Des outils biologiques sont utiles pour suivre le tableau
inflammatoire. La CRP, très sensible, est de maniement
aisé. Le traitement repose sur les anti-inflammatoires. Le
spectre est large, allant de l’aspirine à des doses de 2 à
3 g/jour, à la colchicine (dépourvue d’action anti-agré-
gante), aux AINS voire, dans les formes chronicisées, aux
corticoïdes. Le drainage chirurgical est exceptionnel, il
permet une histologie et ne nécessite pas le recours à une
CEC.
L
E MUSCLE MYOCARDIQUE ET L
’
HÉMODYNAMIQUE
Le statut musculaire est un problème croissant. Les indi-
cations actuelles se portent sur les insuffisances coro-
naires à mauvaises fonctions VG. La chirurgie à cœur bat-
tant permet d’opérer des patients encore plus sévères.
L’oxygénation peut, certes, améliorer des territoires
ischémiques mais ne rend pas une contractibilité à des
territoires infarcis. Une iatrogénie est également à
craindre, liée à une mauvaise protection VG lors de la CEC.
Une insuffisance aortique associée à une hypertrophie
myocardique favorise ces incidents.
Le dépistage de cette dysfonction myocardique est en
règle générale offert par le contexte : fraction d’éjection
préopératoire et postopératoire, lourdeur des prescrip-
tions, en particulier IEC, diurétiques, nitrés, bêtablo-
quants. Ces patients bénéficient le plus souvent des
séjours en service de rééducation spécialisée qui permet-
tent un ajustement thérapeutique évolutif, un condition-
nement physique et une éducation.
Lors du retour à domicile, le praticien doit d’emblée
recueillir des critères de surveillance. Le premier est le
poids. La prise rapide de quelques kilogrammes signe
l’insuffisance cardiaque. La diurèse des 24 heures est
alors un outil des plus utiles bien que de réalisation non
toujours aisée en ville (et hélas parfois à l’hôpital !). Les
autres paramètres, bien qu’utiles, sont au second plan :
fréquence cardiaque, pression artérielle.
Ces patients sont les plus menacés de complications,
non seulement hémodynamiques mais également