progrès en Progrès en thérapeutique À l’heure des essais de morbi-mortalité, quelle place reste-t-il pour les antihypertenseurs centraux ? Michel Salvador* se situait juste après le diltiazem pour le taux de n 1995 (1), on pouvait s’interroger sur l’éventuel répondeurs (55 %) sous 90 Une seconde génération retour en grâce des antihypertenseurs centraux (AH- mmHg, et au premier d’AH-C a succédé à la C), influencé par l’étude des Veterans (2), une capacité rang pour le taux d’effets méthyldopa et à la clonidiindésirables (14 %). Par la ne, celle des agonistes reconnue de l’OMS dans la prévention des événements suite, l’AH-C a été écarté sélectifs des récepteurs des essais de supériorité, cardiovasculaires (3), et au vu d’effets associés favobulbaires aux imidazolines TOMHS dans l’HTA – rilménidine et moxoni- rables, établis ou pressentis. La commercialisation de la légère, ALLHAT chez dine, analogues structu- moxonidine par un grand groupe, le dossier construit l’hypertendu à risque, raux de la clonidine – CAPPP, UKPDS, HOT... réducteurs du tonus vaso- autour de la rilménidine confortaient encore une hypo- Les AH-C ne figurent pas moteur et de très faible thèse, à ce jour non validée. parmi les six classes prinaffinité pour les récepteurs cipales indiquées en 1999 alpha-2 adrénergiques téines plasmatiques (6), le métabolisme glupar l’OMS pour débuter et poursuivre le centraux, dont la stimulation générait les cidique et, en particulier, l’insulino-résistantraitement : “Plusieurs drogues d’action effets indésirables (4). ce (7). On estime que la baisse de PA explicentrale sont disponibles dont les agoSon effet antihypertenseur paraît compétinistes des récepteurs à l’imidazoline, rilquerait 50 % de la réduction du risque tif (5, 6, 7), sans contre-régulation antiménidine et moxonidine ; toutefois le proattribuable à un antihypertenseur (8), et l’étunatriurétique et sans échappement, synerfil des effets latéraux est généralement de HOPE a situé l’ampleur du bénéfice gique au diurétique (4), avec un bon moins favorable que celui des classes éventuel, indépendant de la réduction de la positionnement en bithérapie. Autres éléprincipales” (9). Le choix initial de PA, spécifique d’un médicament ou d’une ments du drug design favorable, la simplil’ANAES (10) se porte sur une classe classe sur la seule base d’un risque cardiocité du protocole, l’absence avec recul de ayant fait l’objet d’essais probants, et la vasculaire élevé. toxicité et d’hypothèque en cas de seule allusion concédée aux AH-C défaillance cardiorénale, de surveillance concerne la contre-indication de réserpine biologique spécifique... Les progrès dans et de méthyldopa en cas de dépression le contrôle de l’HTA – bien au-delà de la sévère ! La RMO de 1998 stipule de Réserpine et méthyldopa, le plus souvent découverte de nouvelles classes – passent débuter par un seul principe actif dont le associées au diurétique en deuxième ou par la prescription optimisée des antihychoix demeure ouvert. En situation d’urtroisième intention, figuraient dans les pertenseurs disponibles et la promotion de gence, l’AFFSSaPs (11) cite la clonidine grands essais contrôlés – EWPHE (1985), molécules mieux adaptées. parmi les drogues injectables, sans indicaMRFIT (1989), SHEP (1991) – qui ont Alors que le danger principal de l’HTA protion préférentielle – en particulier l’urgence établi la capacité du traitement à réduire vient des dysfonctions qui, très habituellegravidique – et en retrait vis-à-vis de les événements (3). Les AH-C ne furent ment, l’accompagnent et élèvent le risque nicardipine, labétalol et urapidil. pas retenus dans les essais d’intervention absolu, on porte au crédit des nouveaux AHultérieurs. C un effet bénéfique sur l’HVG (5) et l’éléL’étude de Materson (1993) fut un essai vation de la fréquence cardiaque, un effet comparatif de faible puissance dans une neutre ou plutôt favorable sur les lipopropopulation non représentative, des effets de six monothérapies et du placebo sur le Dans l’enquête nationale 2000 de la devenir de la PA diastolique, et non de la * Faculté de médecine, 37, allée Jules-Guesde, CNAM sur l’HTA sévère exonérée en morbi-mortalité (2). À un an, la clonidine 31400 Toulouse. Dans un sens... E Dans un sens opposé... Remarques et questions posées Act. Méd. Int. - Hypertension (13), n° 8/9, octobre/novembre 2001 192 progrès en Progrès en thérapeutique exercice libéral (12), la rilménidine occupe la deuxième position parmi les dix spécialités les plus prescrites, loin devant un diurétique, très loin devant un IEC. Il existe un décalage évident de la pratique quotidienne envers des recommandations mal ou peu appliquées, mal adaptées et peu réalistes au vu des objectifs fixés par l’OMS. C’est grâce à la méthodologie rigoureuse des essais que des résultats fiables ont été obtenus, mais “dans la pratique clinique, les problèmes individuels de chaque patient sont beaucoup plus difficiles à résoudre que ne le suggère le résultat des essais contrôlés” (13). Bien des vérités échappent encore aux exigences de la médecine fondée sur les preuves, et ce mode de raisonnement ne doit pas s’établir réducteur. La rédaction des recommandations suppose l’exhaustivité dans les sources, la prise en compte de toutes les données en conservant les faits établis. La mise à l’écart des AH-C de seconde génération à partir de la tolérance médiocre reconnue de la première, est-elle établie avec le niveau de preuve requis ? Aucune référence précise ne l’accrédite dans les rapports (9, 10). Même observation à propos de leur exclusion des essais comparatifs sur la morbi-mortalité. Le paradoxe est à retenir entre le retrait général des recommandations et l’actualité scientifique où se succèdent à propos de rilménidine et de moxonidine, les travaux favorables d’équipes référentes et les symposia de congrès internationaux : Sociétés européennes d’hypertension (1993), de cardiologie (1996 et 1999), dernièrement de l’Union internationale des pharmacologues... Peut-être plus paradoxal, le mutisme de l’ANAES, où siègent des généralistes et spécialistes libéraux dans les groupes de travail et de lecture, alors que la rilménidine caracole en seconde position sur le terrain... La stratégie des promoteurs se fonde sur la physiologie pour bien démarquer les récepteurs aux imidazolines des effets sur les alpha-2 centraux, et veille à structurer un dossier clinique international. Attentif à l’actualité, on insiste sur le bénéfice à espérer, en regard de l’élévation de la fréquence cardiaque, de l’insulinorésistance, de l’hyperactivité sympathique spontanée ou induite... Cette politique d’occupation du terrain donne ses résultats en particulier à l’Est du pays, en dépit du silence des instances... Mais le nécessaire est-il fait par les deux grands groupes pharmaceutiques pour rechercher l’accès (très onéreux) à la programmation des grands essais, dont dépendent désormais les recommandations ? Rilménidine et moxonidine y seraient-elles jugées perdantes en l’état de leur analyse ? In fine... – Ou un mauvais ratio efficacité/tolérance des AH-C de seconde génération a déjà été établi à dose requise, avec le niveau de preuve exigible, et on restera un temps à la situation équivoque actuelle ; – ou ce ratio n’est pas établi avec la puissance suffisante, le nécessaire reste à faire, et il serait injuste de nier à ces médicaments tout avenir sur la base d’un amalgame réducteur. Références bibliographiques 1. Salvador M. Peut-on espérer encore des antihypertenseurs centraux ? Act Méd Int – Hypertension 1996 ; 8 : 11-3. 2. Materson BJ, Reda DJ, Cushman WC. Department of Veterans affairs single-drug therapy of hypertension study. Revised figures and new data. Am J Hypertens 1995 ; 8 : 189-92. 3. Memorandum from a world health organization/ international society of hypertension meeting. Guidelines for the management of mild hypertension. Hypertension 1993 ; 22 : 392-403. 4. Bousquet P, Feldman J. 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